Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 1B.202/2013
Zurück zum Index I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 2013
Retour à l'indice I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 2013


Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente
dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet.
Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem
Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
                                                               Grössere Schrift

Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
1B_202/2013

Arrêt du 23 juillet 2013

Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président,
Karlen et Chaix.
Greffière: Mme Arn.

Participants à la procédure
A.________, représenté par Me Jean-Daniel Kramer, avocat,
recourant,

contre

B.________,
intimé,
Ministère public de la République et canton de Neuchâtel, rue du Pommier 3,
2000 Neuchâtel.

Objet
Procédure pénale; récusation,

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de la République et canton de
Neuchâtel, Autorité de recours en matière pénale, du 2 mai 2013.

Faits:

A.
Une procédure pénale pour escroquerie est en cours à Neuchâtel, depuis le mois
d'octobre 2003, notamment contre A.________. Celui-ci a été placé en détention
préventive à plusieurs reprises. L'instruction a été successivement menée par
différents magistrats et a été confiée, au mois de mars 2006, au Juge
d'instruction suppléant B.________, parallèlement à la magistrate C.________
que celui-ci devait initialement remplacer durant sa grossesse. Durant
l'enquête, la détention de A.________ a été ordonnée à trois reprises, à savoir
du 10 au 13 novembre 2003 par le Juge D.________, du 21 février au 15 mars 2006
par la Juge C.________ et du 8 janvier au 5 mars 2007 par cette même juge. Le
25 novembre 2011, B.________, devenu Procureur suppléant dès le 1 ^er janvier
2011, a dressé l'acte d'accusation renvoyant A.________ devant le Tribunal
criminel du Littoral et du Val de Travers (ci-après: le tribunal).
Lors de l'audience préliminaire du 13 décembre 2012 devant le tribunal,
A.________ a requis la récusation du Procureur B.________ en raison de son
intervention antérieure en tant que juge d'instruction. Cette demande a été
transmise le 17 décembre 2012 à l'autorité de recours en matière pénale du
Tribunal cantonal neuchâtelois (ci-après: l'autorité de recours), avec les
déterminations du Procureur datées du même jour; celui-ci concluait à la
tardiveté de la demande de récusation, laquelle aurait pu être présentée dès
notification de l'acte d'accusation; il relevait également qu'il n'avait pas
ordonné la mise en détention du prévenu. Le 17 décembre 2012 également, la
Présidente de l'autorité de recours a interpellé le Ministère public au sujet
d'une pratique évoquée par le requérant relativement à la poursuite de
l'instruction par les magistrats ayant précédemment ordonné la mise en
détention du prévenu. Le Procureur a répondu, également le même jour, en
précisant que les juges d'instruction ayant ordonné une mise en détention ne
poursuivaient l'instruction que jusqu'à l'avis de clôture, puis transmettaient
la cause à un autre procureur. Ces pièces - y compris une note interne sur le
même sujet - ont été adressées pour information au mandataire du requérant et
lui sont parvenues le 21 décembre 2012.

B.
Par arrêt du 21 décembre 2012, l'autorité de recours a rejeté, pour autant que
recevable, la demande de récusation. Sur recours de A.________, le Tribunal
fédéral a, le 5 mars 2013, annulé l'arrêt précité et renvoyé la cause à
l'instance précédente pour nouvelle décision; le Tribunal fédéral a constaté
une violation du droit de réplique de A.________, celui-ci n'ayant pu se
déterminer ni sur les objections du Procureur, ni sur les pièces produites
(1B_16/2013 du 5 mars 2013).

C.
Après que le recourant a pu exercer son droit de réplique, l'autorité de
recours a, par arrêt du 2 mai 2013, rejeté, pour autant que recevable, la
demande de récusation. Le Procureur n'avait ordonné aucune des trois mises en
détention. Il n'était pas récusable à ce titre, ni au motif plus général qu'il
était intervenu comme juge d'instruction selon l'ancien droit. La demande de
récusation était d'ailleurs tardive, car elle aurait dû être présentée au plus
tard lors de la mise en accusation.

D.
Par acte du 4 juin 2013, A.________ forme un recours en matière pénale par
lequel il demande l'annulation de l'arrêt cantonal et la récusation du
Procureur. Il requiert l'assistance judiciaire.
L'autorité de recours se réfère aux considérants de son arrêt. Le Ministère
public conclut au rejet du recours.

Considérant en droit:

1.
Conformément aux art. 78 et 92 al. 1 LTF, une décision incidente relative à la
récusation d'un magistrat dans la procédure pénale peut faire immédiatement
l'objet d'un recours en matière pénale. L'auteur de la demande de récusation a
qualité pour agir (art. 81 al. 1 LTF). La décision attaquée est rendue en
dernière instance cantonale, au sens de l'art. 80 LTF. Le recours a été déposé
dans le délai de trente jours prescrit à l'art. 100 al. 1 LTF et les
conclusions présentées (y compris l'admission de la demande de récusation) sont
recevables au regard de l'art. 107 LTF.

2.
Le recourant se plaint de violation des art. 30 al. 1 Cst. et 5 par. 3CEDH et
56 let. b et f CPP. Le recourant invoque, comme motif de récusation, le fait
que l'intimé, qui l'a renvoyé en jugement devant le tribunal, a occupé
précédemment la fonction de juge de la détention dans la présente cause pénale.
Il conteste en outre le caractère tardif de sa demande de récusation fondée sur
ce motif. Par ailleurs, il voit une apparence de prévention à son égard dans la
manière dont le Procureur s'est déterminé dans le cadre de la présente
procédure de récusation.

2.1. La garantie d'un tribunal indépendant et impartial instituée par les art.
30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH permet d'exiger la récusation d'un juge dont la
situation ou le comportement est de nature à faire naître un doute sur son
impartialité (ATF 126 I 68 consid. 3a p. 73). Elle n'impose pas la récusation
seulement lorsqu'une prévention effective du juge est établie, car une
disposition interne de sa part ne peut guère être prouvée; il suffit que les
circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une
activité partiale du magistrat. Seules les circonstances constatées
objectivement doivent être prises en considération; les impressions purement
individuelles d'une des parties au procès ne sont pas décisives (ATF 138 IV 142
consid. 2.1 p. 144 et les arrêts cités). Les motifs de récusation mentionnés à
l'art. 56 CPP concrétisent ces garanties. Ils imposent notamment la récusation
d'un magistrat lorsqu'il a agi à un autre titre dans la même cause, en
particulier comme membre d'une autorité, conseil juridique d'une partie, expert
ou témoin (let. b) ou lorsque d'autres motifs, notamment un rapport d'amitié
étroit ou d'inimitié avec une partie ou son conseil, sont de nature à le rendre
suspect de prévention (let. f).

2.1.1. Le fait que le magistrat a déjà participé à l'affaire, à un autre titre
et à un stade antérieur de la procédure, peut éveiller le soupçon de
partialité. La jurisprudence a renoncé à résoudre une fois pour toutes et de
manière générale la question de savoir si, et quelles interventions successives
peuvent contrevenir aux art. 30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH (cf. ATF 114 Ia 50
consid. 3d p. 57 ss et les arrêts cités). Elle exige cependant que l'issue de
la cause demeure indécise quant à la constatation des faits et à la résolution
des questions juridiques. Il faut en particulier examiner les fonctions
procédurales que le magistrat a été appelé à exercer lors de son intervention
précédente, prendre en compte les questions successives à trancher à chaque
stade de la procédure, et mettre en évidence leur éventuelle analogie ou leur
interdépendance (ATF 116 Ia 135 consid. 3b p. 139 et les arrêts cités; cf.
aussi: ATF 126 I 168 consid. 2a p. 169). L'art. 56 let. b CPP, invoqué par le
recourant, doit être interprété dans le même sens.

2.1.2. Quant à l'art. 56 let. f CPP, il a la portée d'une clause générale
recouvrant tous les motifs de récusation non expressément prévus aux lettres
précédentes. Elle correspond à la garantie d'un tribunal indépendant et
impartial instituée par les art. 30 Cst. et 6 CEDH (cf. supra consid. 2.1).

2.2. Le recourant fait valoir que c'est à tort et de façon arbitraire que
l'instance précédente a considéré que sa demande de récusation était
manifestement tardive en tant qu'elle concerne le fait que le Procureur intimé
serait intervenu comme juge de la détention dans la présente procédure pénale.
Selon l'instance précédente, ce moyen fondé sur l'art. 56 let. b CPP était en
outre mal fondé.

2.2.1. Conformément à l'art. 58 al. 1 CPP, la récusation doit être demandée
sans délai, dès que la partie a connaissance du motif de récusation. Celui qui
omet de se plaindre immédiatement de la prévention d'un magistrat et laisse la
procédure se dérouler sans intervenir agit contrairement à la bonne foi et voit
son droit se périmer (ATF 138 I 1 consid. 2.2 p. 4; 134 I 20 consid. 4.3.1 p.
21 et les références). Dès lors, même si la loi ne prévoit aucun délai
particulier, il y a lieu d'admettre que la récusation doit être demandée
aussitôt, c'est-à-dire dans les jours qui suivent la connaissance de la cause
de récusation (arrêt 1B_203/2011 du 18 mai 2011 consid. 2.1).

2.2.2. En l'occurrence, l'acte d'accusation dressé par le Procureur intimé a
été communiqué au recourant le 25 novembre 2011. L'intéressé n'a cependant
formulé la demande de récusation à l'encontre de l'intimé que lors de
l'audience préliminaire du 13 décembre 2012 devant le tribunal, soit plus d'une
année plus tard. Il connaissait pourtant déjà dès novembre 2011 le motif de
prévention dont il se prévaut dans sa demande de récusation. Il savait en effet
que l'intimé avait été nommé, en mars 2006, juge d'instruction suppléant dans
la procédure pénale dirigée à son encontre et, en particulier, qu'au moment de
la mise en détention en 2007, l'instruction était menée par plusieurs
magistrats. Quoi qu'en pense le recourant, le fait que l'acte d'accusation
n'est pas susceptible de recours ne l'empêchait pas de déposer, dès la
notification de ce document, une demande de récusation contre le magistrat
auprès de l'autorité compétente. Le principe de la bonne foi imposait qu'il
demande sans retard, sous peine d'irrecevabilité, la récusation du Procureur.
Le recourant soutient ainsi à tort que son mandataire a réagi à temps, à savoir
lorsque celui-ci a examiné le dossier en vue de l'audience de jugement dans la
perspective de l'audience préliminaire. L'intéressé était par conséquent déchu
du droit de se prévaloir du motif de récusation qu'il invoque aujourd'hui
encore. L'autorité de recours pouvait ainsi, sans violer le droit fédéral,
déclarer la requête tardive et donc irrecevable ("pour autant que recevable")
au motif qu'elle n'avait pas été présentée "sans délai" au sens de l'art. 58
al. 1 CPP.
A supposer recevable, ce moyen aurait de toute manière dû être rejeté. En
effet, à teneur des faits constatés par l'autorité de recours, le Procureur
intimé n'a jamais participé aux décisions de mise en détention du recourant.
L'instance précédente a en particulier relevé qu'au moment de la troisième
décision de mise en détention, l'instruction était menée par C.________ seule
et aucun élément ne permettait de douter que cette décision, signée par elle,
émanait d'elle seule. En affirmant que les décisions prises en janvier et mars
2007 portant respectivement sur sa mise en détention puis sa libération ont été
prises conjointement par les deux magistrats, le recourant s'écarte des faits
retenus par l'autorité de recours sans parvenir à en démontrer le caractère
arbitraire, comme il lui appartenait de faire (cf. ATF 137 I 58 consid. 4.1.2
p. 62). Les déductions faites par l'intéressé sur ce point sont en l'occurrence
de simples hypothèses.
La question de savoir si l'union personnelle du juge de la détention et de
l'autorité d'accusation est contraire au droit ne se posait dès lors pas en
l'espèce, l'intimé ne s'étant jamais prononcé sur la détention du recourant.
C'est donc en vain que le recourant invoque l'art. 5 par. 3 CEDH concernant
l'impartialité du juge de la détention, de même que l'art. 57 CPP concernant la
récusation d'office.

2.3. Enfin, le recourant voit également un motif de prévention au sens de
l'art. 56 let. f CPP dans les prises de position du Procureur dans le cadre de
la présente procédure de récusation, en particulier dans sa phase devant le
Tribunal fédéral ayant conduit au prononcé de l'arrêt 1B_16/2013. Il déduit de
la conclusion du Procureur tendant au refus du bénéfice de l'assistance
judiciaire, que celui-ci ne présenterait plus les gages d'une indépendance
absolue; en se prononçant sur l'assistance judiciaire, il aurait outrepassé ses
attributions, démontrant ainsi sa partialité. En outre, le recourant affirme
que le libellé des prises de position du Procureur laisse penser que celui-ci
"risque de requérir d'une manière plus sévère que de coutume" et que son
intervention "pourrait éventuellement avoir pour conséquence un réquisitoire
lourd de conséquence".
Les éléments invoqués par le recourant ne permettent pas de conclure à une
apparence de prévention de l'intimé envers lui, qui justifierait sa récusation.
Les craintes du recourant ne reposent pas sur des circonstances objectives,
mais sur des impressions purement individuelles. Comme le relève à bon droit
l'autorité de recours, retenir comme motif de récusation le fait que le
Procureur se soit prononcé sur la demande de récusation reviendrait à priver ce
magistrat des interventions que la loi lui permet, voire l'enjoint de faire, au
cours de la procédure. On ne discerne en particulier aucune inimitié
caractérisée du Procureur dans le fait de se déterminer, à la demande de
l'autorité, sur le recours déposé par l'intéressé, et donc implicitement
également sur la demande d'assistance judiciaire formulée à cette occasion;
cela vaut d'autant moins que sa détermination se résume sur ce point à la
simple conclusion tendant au rejet de l'assistance judiciaire, sans autre
commentaire. Par ailleurs, quoi qu'en dise le recourant, le contenu des
observations du Procureur ne permet pas de conclure que celui-ci est partial.
Le recourant n'indique d'ailleurs nullement quel propos exactement fonderait
une apparence de prévention. Enfin, l'allégation selon laquelle le Procureur
risque de prononcer un réquisitoire d'une sévérité accrue relève de la pure
conjecture. Le grief du recourant doit dès lors être rejeté.

3.
Le recours doit par conséquent être rejeté dans la mesure où il est recevable.
Comme il était voué à l'échec, l'assistance judiciaire ne peut être accordée
(art. 64 al. 1 LTF). Les frais du présent arrêt seront mis à la charge du
recourant (art. 65 et 66 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Ministère public et à
l'Autorité de recours en matière pénale du Tribunal cantonal de la République
et canton de Neuchâtel.

Lausanne, le 23 juillet 2013
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Fonjallaz

La Greffière: Arn

Navigation

Neue Suche

ähnliche Leitentscheide suchen
ähnliche Urteile ab 2000 suchen

Drucken nach oben