Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 1B.104/2013
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
1B_104/2013

Arrêt du 13 mai 2013
Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président,
Aemisegger et Merkli.
Greffier: M. Kurz.

Participants à la procédure
L.________ et consort,
représentés par Me Shahram Dini, avocat,
recourants,

contre

Ministère public de la République
et canton de Genève,
intimé.

Objet
procédure pénale; qualité de partie plaignante,

recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de
Genève, Chambre pénale
de recours, du 18 décembre 2012.

Faits:

A.
Le 24 avril 2009, le Juge d'instruction du canton de Genève a inculpé
B.________, C.________, D.________, A.________ et E.________, administrateurs
et actionnaires de la société de gestion de fortune X.________ SA (ci-après:
X.________), de gestion déloyale. Il leur est reproché d'avoir porté atteinte à
leurs clients en plaçant l'essentiel de leurs avoirs dans des "fonds Madoff",
tout en percevant des rémunérations excessives. Des inculpations
complémentaires ont été prononcées les 8 juillet et 10 décembre 2009. Plus de
75 plaintes ont été recueillies dans le cadre de cette procédure. En
particulier, le 23 mai 2009, L.________ et consort ont déposé plainte pour
gestion déloyale et escroquerie. Ils expliquaient avoir confié, en novembre
2000, la gestion du compte de leur société au chef du personnel de X.________.
Plus des deux tiers de leurs avoirs auraient été investis en février 2001 dans
"Hermes World Fund", investissement qui avait perdu toute valeur après
l'arrestation de Bernard Madoff en décembre 2008, causant une perte de 720'594
fr.

B.
Par décision du 1er novembre 2012, le Ministère public a refusé de reconnaître
la qualité de parties plaignantes à L.________ et consort. Le mandat de gestion
avec X.________ avait été résilié en juin 2008, et les fonds avaient été
transférés le mois suivant à une autre banque avec un mandat de gestion
discrétionnaire, assorti d'une instruction de conserver les placements
litigieux. En décembre 2008, il n'existait plus de mandat de gestion avec
X.________.
Par arrêt du 18 décembre 2012, la Chambre pénale de recours de la Cour de
justice du canton de Genève a confirmé cette décision. A l'exception d'un
fonds, l'ensemble des titres avait, après la résiliation du mandat de
X.________, été transféré à la nouvelle banque, laquelle aurait pu réaliser les
fonds "HWF" entre juillet et décembre 2008. Auparavant, les placements opérés
par X.________ étaient rémunérateurs de sorte qu'il n'y avait pas de dommage.

C.
Par acte du 1er février 2013, L.________ et consort forment un recours en
matière pénale. Ils concluent à l'annulation de l'arrêt cantonal et à la
reconnaissance de leur qualité de parties plaignantes.
La Chambre pénale de recours a produit le dossier, sans déterminations. Le
Ministère public conclut au rejet du recours en se référant à l'arrêt attaqué.
Attribuée dans un premier temps à la Cour de droit pénal, la cause a ensuite
été transmise à la Ire Cour de droit public.

Considérant en droit:

1.
La décision attaquée a été rendue dans le cadre d'une procédure pénale. Elle
peut donc faire l'objet d'un recours en matière pénale au sens de l'art. 78 al.
1 LTF. Elle a été rendue en dernière instance cantonale (art. 80 LTF). Les
recourants, qui se voient dénier la qualité de parties plaignantes, ont pris
part à la procédure devant l'autorité précédente et ont un intérêt juridique à
l'annulation ou à la réforme de la décision attaquée (art. 81 LTF).
Selon la jurisprudence, une décision qui rejette une demande de constitution de
partie plaignante dans le procès pénal présente pour la partie concernée, qui
se trouve définitivement écartée de la procédure, les traits d'une décision
finale au sens de l'art. 90 LTF (cf. ATF 128 I 215). Le recours est dès lors
recevable.

2.
Les recourants considèrent que la résiliation du mandat avec X.________ et le
transfert des fonds auprès d'une autre banque n'empêchaient pas la réalisation
de l'infraction de gestion déloyale. Les recourants se réfèrent à deux arrêts
du Tribunal fédéral (1B_311/2010 du 19 novembre 2010 et 1B_678/2011 du 30
janvier 2012) déniant la qualité de partie plaignante à des clients d'une
gérante indépendante des prévenus, respectivement à des investisseurs ayant
donné eux-mêmes les instructions quant à la gestion des fonds. Ils relèvent que
dans leur cas, il existait une relation de mandat et un devoir de gestion des
prévenus de 2001 à juin 2008. La cour cantonale aurait ainsi méconnu qu'il
existait un lien de causalité entre les investissements opérés et le dommage
subi par les recourants. Aucun événement ne serait intervenu entre les mois de
juillet et décembre 2008 qui aurait pu inciter les recourants à se défaire des
parts litigieuses, investies dès le début du mandat, conservées depuis lors et
dont le rendement était correct.

2.1 Selon l'art. 118 al. 1 CPP, on entend par partie plaignante le lésé qui
déclare expressément vouloir participer à la procédure pénale comme demandeur
au pénal ou au civil. La notion de lésé est définie à l'art. 115 CPP; il s'agit
de toute personne dont les droits ont été touchés directement par une
infraction. L'art. 115 al. 2 CPP prévoit aussi que sont considérées comme des
lésés les personnes qui ont qualité pour déposer plainte pénale. Cette
disposition vise les représentants et les héritiers du lésé, ainsi que les
autorités et organisations habilitées à porter plainte (PERRIER, in Commentaire
romand CPP, n° 15 ad art. 115).

2.2 Pour être personnellement lésé au sens de l'art. 115 CPP, l'intéressé doit
être titulaire du bien juridiquement protégé touché par l'infraction, ce qui
est le cas du propriétaire ou de l'ayant droit dans le cas d'une infraction
contre le patrimoine (MAZZUCCHELLI/POSTIZZI, in BSK/ StPO, n° 22 ss ad art.
115; PERRIER, Commentaire romand CPP, n° 8 ad art. 115). Pour être directement
touché, il doit en outre subir une atteinte en rapport de causalité directe
avec l'infraction poursuivie, ce qui exclut les dommages par ricochet
(MAZZUCCHELLI/POSTIZZI, op. cit., n° 28 ad art. 115; PERRIER, op. cit., n° 13
ad art. 115).
La déclaration de partie plaignante doit avoir lieu avant la clôture de la
procédure préliminaire (art. 118 al. 3 CPP), soit à un moment où l'instruction
n'est pas encore achevée. Dès lors, tant que les faits déterminants ne sont pas
définitivement arrêtés sur ce point, il y a lieu de se fonder sur les allégués
de celui qui se prétend lésé ainsi que sur les éléments de preuve déjà
disponibles pour déterminer si tel est effectivement le cas (PERRIER, op. cit.,
n° 8 ad art. 115). Celui qui entend se constituer partie plaignante doit
toutefois rendre vraisemblable le préjudice et le lien de causalité entre
celui-ci et l'infraction dénoncée (arrêt 1B_311/2010 du 19 novembre 2010
consid. 3.2).

2.3 En l'occurrence, le dommage subi par les recourants ne s'est réalisé qu'au
mois de décembre 2008, lorsque les cours des "fonds Madoff" se sont
définitivement effondrés. Dès le mois de juillet 2008, les recourants
(respectivement leur gestionnaire) avaient la disposition des avoirs et
pouvaient les réaliser librement. On peut toutefois se demander si la mauvaise
gestion (supposée) durant huit ans ne conserve pas encore un lien de causalité
suffisant, du moins au stade actuel de l'instruction. On ignore en effet si les
recourants pouvaient réellement, dans les mois qui ont suivi la fin du mandat,
se rendre compte du caractère aléatoire des fonds, et prendre une décision en
toute connaissance de cause compte tenu des renseignements dont ils
disposaient.
Au stade actuel de la procédure, le doute doit en l'occurrence profiter aux
plaignants, afin de leur permettre de défendre leur position et de participer à
la suite de l'instruction.

3.
Le recours doit par conséquent être admis. L'arrêt attaqué est annulé, de même
que l'ordonnance de refus de la qualité de partie plaignante du 1er novembre
2012. Compte tenu de cette issue, les recourants ont droit à une indemnité de
dépens, à la charge du canton de Genève. Les dépens comprennent également
l'indemnité pour la procédure de recours cantonal (art. 68 al. 5 LTF).
Conformément à l'art. 66 al. 4 LTF, il n'est pas perçu de frais judiciaires.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis. L'arrêt attaqué est annulé, de même que l'ordonnance de
refus de la qualité de partie plaignante du 1er novembre 2012.

2.
Une indemnité de dépens de 3000 fr. est allouée aux recourants, pour les
procédures cantonale et fédérale, à la charge du canton de Genève.

3.
II n´est pas perçu de frais judiciaires.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la
République et canton de Genève, Chambre pénale de recours.

Lausanne, le 13 mai 2013

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Fonjallaz

Le Greffier: Kurz

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