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II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 94/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
9C_94/2012

Arrêt du 4 juillet 2012
IIe Cour de droit social

Composition
MM. et Mme les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Glanzmann.
Greffier: M. Bouverat.

Participants à la procédure
J.________, représentée par Me Jean-Michel Duc, avocat,
recourante,

contre

Caisse de pensions de l'Etat de Vaud, rue Caroline 9, 1003 Lausanne,
intimée.

Objet
Prévoyance professionnelle,

recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des
assurances sociales, du 20 septembre 2011.

Faits:

A.
J.________ a travaillé depuis le 1er mars 1982 en qualité d'employée
d'exploitation auprès du Centre hospitalier X.________; à ce titre, elle a été
affiliée pour la prévoyance professionnelle auprès de la Caisse de pensions de
l'Etat de Vaud (ci-après: la caisse). Le 27 juillet 1992, elle a présenté sa
démission pour le 31 octobre suivant.
Par courrier du 17 septembre 1992, la caisse a informé l'assurée qu'elle
pouvait prétendre une prestation de départ de 58'769 fr. 20 et l'a priée de lui
indiquer, au moyen d'un formulaire annexé, si cette somme devait être
transférée au fonds de prévoyance de son nouvel employeur ou si elle souhaitait
en obtenir le remboursement en espèces. Le 23 septembre suivant, l'intéressée a
opté pour la seconde solution, précisant qu'elle était mariée et cessait
d'exercer toute activité lucrative.
Le 20 avril 1993, J.________ a déposé auprès de l'Office de
l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après: l'office AI) une
demande tendant à l'octroi d'une rente.
Du 1er septembre 1993 au 30 septembre 1995, la prénommée a été engagée comme
employée de maison à l'institution Y.________; pendant cette période, elle a
été affiliée au titre de la prévoyance professionnelle auprès du Fonds de
prévoyance de l'association vaudoise des organismes privés pour enfants,
adolescents et adultes en difficulté et de l'association vaudoise des
travailleurs de l'éducation spécialisée (ci-après: l'AVOP-AVTES).
Par communication du 18 avril 1996, l'office AI a annoncé à la caisse l'octroi
à l'assurée d'une rente entière avec effet rétroactif au 1er octobre 1993. Il a
rendu une décision en ce sens le 26 août 1996.
Le 23 juin 1997, J.________ a saisi le Tribunal cantonal vaudois des assurances
d'une demande tendant au paiement par l'AVOP-AVTES de prestations d'invalidité.
Elle a été déboutée par jugement du 19 février 2001.
L'assurée a sollicité le 21 avril 2008 l'examen par la caisse de son droit à
une rente d'invalidité de la prévoyance professionnelle. Par courrier du 23
juillet suivant, celle-ci a indiqué qu'elle était en principe tenue de lui
servir une telle prestation, mais que le droit en question était frappé de
prescription.

B.
Le 23 octobre 2009, J.________ a déposé devant le Tribunal cantonal du canton
de Vaud, Cour des assurances sociales, une demande visant l'octroi par la
caisse d'une rente d'invalidité. Le Tribunal cantonal l'a rejetée par jugement
du 20 septembre 2011.

C.
J.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement
dont elle demande l'annulation. Elle conclut à l'octroi par la caisse d'une
rente d'invalidité à compter du 1er novembre 1992 avec intérêt et sollicite
l'octroi de l'assistance judiciaire pour la procédure fédérale.
La caisse conclut au rejet du recours tandis que l'Office fédéral des
assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit,
tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique
le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être limité par les arguments du
recourant ou par la motivation de l'autorité précédente. Toutefois, compte tenu
de l'exigence de motivation prévue à l'art. 42 al. 2 LTF, il n'examine en
principe que les griefs invoqués et ne peut aller au-delà des conclusions des
parties (art. 107 al. 1 LTF). Il fonde son raisonnement sur les faits retenus
par la juridiction de première instance (art. 105 al. 1 LTF) sauf s'ils ont été
établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de
l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant qui entend s'écarter des faits
constatés doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de
l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées sinon un état de fait divergent ne peut
être pris en considération.

2.
Le litige porte sur le droit de la recourante à une rente d'invalidité de la
prévoyance professionnelle, à charge de l'institution de prévoyance intimée, à
compter du 1er novembre 1992.

3.
3.1 La juridiction cantonale a considéré que la recourante aurait pu prétendre
à l'octroi d'une rente d'invalidité de la prévoyance professionnelle depuis le
mois de novembre 1992. L'intimée était cependant fondée à refuser de lui servir
cette prestation dont la prescription était acquise en octobre 2003 au plus
tard. La recourante n'avait pas rendu vraisemblables ses allégations selon
lesquelles un collaborateur de l'intimée lui aurait affirmé à la fin de l'année
1992 qu'elle n'avait pas droit à une rente; il n'y avait dès lors pas lieu de
considérer que cette institution avait commis un abus de droit en invoquant la
prescription. En outre, la recourante ne pouvait pas valablement tirer argument
du fait que l'intimée ne l'avait pas informée de son droit à des prestations.
Le Tribunal cantonal, dans son jugement du 19 février 2001, avait en effet
considéré que si une institution était tenue de lui fournir une rente
d'invalidité de la prévoyance professionnelle, il s'agissait de l'intimée;
ainsi, la recourante avait disposé du renseignement omis par l'intimée avant
que ses prétentions à l'encontre de cette dernière ne fussent prescrites.

3.2 La recourante affirme que l'intimée, la sachant au bénéfice d'une rente de
l'assurance-invalidité, ne pouvait pas ignorer qu'elle avait droit à des
prestations d'invalidité de la prévoyance professionnelle; dans ces conditions,
l'intéressée aurait dû instruire sa cause d'office. L'intimée aurait commis un
abus de droit en soulevant l'exception de la prescription car le laps de temps
qui s'était écoulé avant qu'elle n'élève des prétentions à l'égard de cette
institution s'expliquerait par le comportement adopté par celle-ci en 1992. Un
collaborateur de l'intéressée, avec lequel elle aurait eu un entretien à la fin
de cette année, lui aurait en effet affirmé qu'elle n'avait pas droit à une
rente et le formulaire au moyen duquel elle avait demandé le remboursement de
sa prestation de départ aurait précisé que le versement de la somme en question
mettait fin à tous ses droits envers l'intimée. Enfin, étant donné qu'elle ne
disposerait d'aucune connaissance juridique, la lecture du jugement du 19
février 2001 ne lui aurait pas permis de comprendre que l'intimée pouvait être
tenue de lui fournir une rente.

4.
4.1 Lorsque la recourante a introduit la demande du 23 octobre 2009, son droit
de percevoir une rente de la part de l'intimée était, ainsi que l'ont relevé
les premiers juges, prescrit depuis longtemps compte tenu du délai absolu de
dix ans applicable (cf. ATF 132 V 159 consid. 3 p. 162, cité dans le jugement
entrepris [consid. 2b p. 8]); il l'était déjà le 1er janvier 2005 - date de
l'entrée en vigueur de la modification de l'art. 96 de la loi cantonale du 18
juin 1984 sur la Caisse de pensions de l'Etat de Vaud (RSV 172.43) instituant
l'imprescriptibilité du droit aux prestations pour les assurés affiliés à la
caisse au moment de la survenance du cas d'assurance -, si bien qu'au vu des
principes jurisprudentiels topiques en matière de droit transitoire (ATF 132 V
159 consid. 2 p. 161 cité dans le jugement entrepris [consid. 2b p. 8]; cf.
également arrêt 9C_321/2007 du 28 septembre 2007 consid. 2.1), la recourante ne
saurait se prévaloir de cette disposition.
L'invocation de la prescription par l'intimée n'est pas constitutive d'un abus
de droit. Les premiers juges ont en effet retenu que celle-ci n'avait pas
fourni, par le biais d'un de ses employés, un renseignement erroné à la
recourante et cette dernière ne cherche pas à démontrer en quoi cette
constatation serait manifestement inexacte. En outre, l'intimée a expressément
indiqué à la recourante, dans son courrier du 17 septembre 1992, que la
couverture du risque d'invalidité subsistait pendant trente jours après la fin
de l'affiliation. Dès lors, elle ne l'a nullement incitée à n'entreprendre
aucune démarche juridique tendant à l'obtention d'une rente.

4.2 L'intimée n'a pas violé le principe inquisitoire. S'il est vrai que
celui-ci régit le domaine des assurances sociales, il ne trouve application
qu'à partir du moment où une demande a été déposée. Or lorsque la recourante a
agi en ce sens, ses prétentions à l'égard de l'intimée étaient déjà prescrites
(cf. supra consid. 4.1) alors même que de longue date elle se savait invalide
et avait, plusieurs années auparavant, été représentée par un avocat - ainsi
que le démontre la procédure qu'elle a engagée (sans succès) à l'encontre de
l'institution de prévoyance de son nouvel employeur. A suivre la recourante,
les rentes de la prévoyance professionnelle devraient être allouées d'office.
Une telle conception ne repose sur aucune base légale. Dans cette branche des
assurances sociales comme dans toutes les autres (cf. art. 29 LPGA), l'octroi
de prestations est au contraire subordonné au dépôt d'une demande de
prestations.

5.
Il s'ensuit que le recours est mal fondé. Dès lors que la recourante est dans
le besoin et que ses conclusions n'étaient pas d'emblée vouées à l'échec,
l'assistance judiciaire doit lui être accordée (art. 64 al. 1 LTF). Il y a lieu
de désigner Me Jean-Michel Duc en qualité d'avocat d'office et de fixer ses
honoraires, qui seront supportés provisoirement par la caisse du Tribunal
fédéral (art. 64 al. 2 LTF). L'attention de la recourante est attirée sur le
fait qu'elle devra rembourser la caisse du Tribunal fédéral si elle devient en
mesure de le faire ultérieurement (art. 64 al. 4 LTF). La recourante est en
outre dispensée des frais judiciaires (art. 64 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.

3.
L'assistance judiciaire est accordée à la recourante. Me Jean-Michel Duc est
désigné en tant qu'avocat d'office de la recourante et une indemnité de 2'800
fr. lui est allouée à titre d'honoraires, supportée par la caisse du Tribunal.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de
Vaud, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances
sociales.

Lucerne, le 4 juillet 2012
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Meyer

Le Greffier: Bouverat