Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 709/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
9C_709/2012

Arrêt du 27 novembre 2012
IIe Cour de droit social

Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux U. Meyer, Président, Borella et Glanzmann.
Greffier: M. Piguet.

Participants à la procédure
Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève, rue des Gares 12, 1201
Genève,
recourant,

contre

D.________,
représentée par Me Thierry Sticher, avocat,
intimée.

Objet
Assurance-invalidité,

recours contre le jugement de la Cour de justice de
la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, du 10
juillet 2012.

Faits:

A.
A.a D.________, née en 1952, travaillait à mi-temps en qualité de nettoyeuse
pour le compte de X.________ et à mi-temps en qualité de concierge. Souffrant
de lombalgies qui ont nécessité une intervention chirurgicale (spondylodèse
L4-L5) au mois de février 1996, elle s'est vu allouer à compter du 1er janvier
1997 une rente entière de l'assurance-invalidité (décision du 1er octobre 1997,
confirmée après révision les 21 novembre 2002, 17 juin 2004 et 18 septembre
2009).
A.b Dans le cadre d'une nouvelle procédure de révision initiée au mois d'avril
2010, l'Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après:
l'office AI) a confié la réalisation d'une expertise rhumatologique à la
doctoresse R.________. Dans son rapport du 7 octobre 2010, ce médecin a retenu
les diagnostics - avec répercussion sur la capacité de travail - de
déconditionnement musculaire global, de discopathie protrusive, paramédiane et
foraminale droite L3-L4 avec ostéophytose marginale en couronne et
antélisthésis L3-L4, de status après opération de spondylodèse par PLIF pour
antélisthésis L4-L5 et discopathie protrusive, et de douleurs du pied droit
probablement neurogènes d'origine indéterminée. La capacité de travail était
nulle dans la profession de nettoyeuse, de 30 % dans la profession de
concierge; elle pouvait en revanche travailler à raison de six heures par jour
dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles. Se fondant sur les
conclusions de cette expertise, le Service médical régional de l'AI (SMR) a
estimé que l'assurée avait, en réalité, présenté une pleine capacité de travail
dans une activité adaptée jusqu'au mois de septembre 2007, période où son état
de santé s'était aggravé pour restreindre son degré d'activité à six heures par
jour (environ 75 % de capacité de travail). Se fondant sur les considérations
du SMR, l'office AI a, par décision du 23 février 2012, reconsidéré sa décision
du 1er octobre 1997 et remplacé la rente entière d'invalidité allouée à
l'assurée par une demi-rente avec effet au premier jour du deuxième mois
suivant la notification de la décision.

B.
Par jugement du 10 juillet 2012, la Cour de justice de la République et canton
de Genève, Chambre des assurances sociales, a admis le recours formé par
l'assurée et annulé la décision du 23 février 2012.

C.
L'office AI interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement
en concluant à son annulation et à la confirmation de sa décision du 23 février
2012.
D.________ conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des
assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
Le recours en matière de droit public peut être formé notamment pour violation
du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), que le Tribunal fédéral applique
d'office (art. 106 al. 1 LTF), n'étant limité ni par les arguments de la partie
recourante, ni par la motivation de l'autorité précédente. Le Tribunal fédéral
n'examine en principe que les griefs invoqués, compte tenu de l'exigence de
motivation prévue à l'art. 42 al. 2 LTF, et ne peut aller au-delà des
conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). Il fonde son raisonnement sur les
faits retenus par la juridiction de première instance (art. 105 al. 1 LTF) sauf
s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit
au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant qui entend
s'écarter des faits constatés doit expliquer de manière circonstanciée en quoi
les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées, sinon un état de fait
divergent ne peut être pris en considération. Aucun fait nouveau ni preuve
nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité
précédente (art. 99 al. 1 LTF).

2.
Au regard des griefs invoqués, le litige porte principalement sur la question
de la modification, par la voie de la reconsidération, de la rente d'invalidité
octroyée à l'intimée par décision du 1er octobre 1997.

2.1 Selon l'art. 53 al. 2 LPGA, l'assureur peut revenir sur les décisions
formellement passées en force lorsqu'elles sont manifestement erronées et que
leur rectification revêt une importance notable. Pour juger s'il est admissible
de reconsidérer une décision pour le motif qu'elle est sans nul doute erronée,
il faut se fonder sur les faits et la situation juridique existant au moment où
cette décision a été rendue, compte tenu de la pratique en vigueur à l'époque (
ATF 125 V 383 consid. 3 p. 389 et les références). Par le biais de la
reconsidération, on corrigera une application initiale erronée du droit, de
même qu'une constatation erronée résultant de l'appréciation des faits. Un
changement de pratique ou de jurisprudence ne saurait en principe justifier une
reconsidération (ATF 117 V 8 consid. 2c p. 17, 115 V 308 consid. 4a/cc p. 314).
Pour des motifs de sécurité juridique, l'irrégularité doit être manifeste, de
manière à éviter que la reconsidération devienne un instrument autorisant sans
autre limitation un nouvel examen des conditions à la base des prestations de
longue durée. En particulier, les organes d'application ne sauraient procéder
en tout temps à une nouvelle appréciation de la situation après un examen plus
approfondi des faits. Ainsi, une inexactitude manifeste ne saurait être admise
lorsque l'octroi de la prestation dépend de conditions matérielles dont
l'examen suppose un pouvoir d'appréciation, quant à certains de leurs aspects
ou de leurs éléments, et que la décision initiale paraît admissible compte tenu
de la situation antérieure de fait et de droit. S'il subsiste des doutes
raisonnables sur le caractère erroné de la décision initiale, les conditions de
la reconsidération ne sont pas remplies (arrêts 9C_575/2007 du 18 octobre 2007
consid. 2.2; I 907/06 du 7 mai 2007 consid. 3.2.1).

2.2 Les premiers juges ont considéré que c'était à tort que l'office recourant
avait retenu que la rente d'invalidité avait été octroyée sans examen de la
capacité de travail dans une activité adaptée ni examen du droit à des mesures
de réadaptation. Ils ont constaté que la décision du 1er octobre 1997 reposait
sur les rapports de divers médecins - généralistes et spécialistes - qui
avaient traité l'intimée depuis 1991. Il ressortait plus particulièrement du
rapport du docteur A.________ du 15 novembre 1996 que l'intimée était
totalement incapable de travailler depuis le mois de janvier 1996 et que des
mesures de réadaptation n'étaient pas indiquées; ce médecin avait notamment
indiqué - brièvement mais clairement - qu'il n'existait aucune activité adaptée
à son état de santé. C'est donc sur la base de l'avis médical du médecin
traitant - aux termes duquel la persistance des douleurs empêchait toute
reprise d'activité - que l'office recourant avait alloué une rente entière
d'invalidité. Ce faisant, l'office recourant avait accordé une pleine valeur
probante aux rapports médicaux recueillis par ses soins, sans estimer
nécessaire de procéder à des examens complémentaires ou de mettre en oeuvre une
expertise; de même, il avait renoncé à toute mesure de réadaptation, puisque la
mise sur pied d'une mesure d'orientation, voire de reclassement, n'avait de
sens qu'en présence d'une capacité résiduelle de travail dans une activité
adaptée.

2.3 Pour pouvoir qualifier une décision de manifestement erronée, il ne suffit
pas que l'assureur social ou le juge, en réexaminant l'un ou l'autre aspect du
droit à la prestation d'assurance, procède simplement à une appréciation
différente de celle qui avait été effectuée à l'époque et qui était, en soi,
soutenable. Le caractère inexact de l'appréciation doit bien plutôt résulter de
l'ignorance ou de l'absence - à l'époque - de preuves de faits essentiels. Or,
comme l'a constaté à juste titre la juridiction cantonale, tel n'est pas le cas
en l'espèce. Si le rapport du docteur A.________ recueilli dans le cadre de
l'examen de la demande de prestations peut paraître a posteriori relativement
succinct, il n'en demeure pas moins qu'il contenait les éléments nécessaires à
l'examen des questions relatives au droit à une rente de
l'assurance-invalidité, notamment de celle relative au caractère exigible de
l'exercice d'une activité lucrative adaptée. S'il est vrai que l'office
recourant avait requis à l'époque - de manière fort peu précise d'ailleurs -
des renseignements supplémentaires auprès du docteur A.________, il s'avère
également qu'il a transmis le dossier à la caisse de compensation compétente
pour fixation du montant de la rente sans attendre les compléments
d'information qu'il avait requis. Dans ces conditions, rien ne permet de
retenir que l'office recourant avait statué sur la base d'un dossier
manifestement insuffisant ou lacunaire ou fait un usage manifestement erroné de
son pouvoir d'appréciation au regard des renseignements récoltés auprès du
médecin traitant de l'intimée.

2.4 Plutôt que de procéder à une appréciation à la lumière des seules
circonstances de fait et de droit existant à l'époque de la décision initiale
de rente, l'office recourant a, en réalité, effectué une nouvelle appréciation
des faits après un examen plus complet et plus approfondi de la situation
médicale, à la lumière des conclusions de l'expertise qu'il avait requise dans
le cadre de la procédure de révision qu'il avait initiée. En agissant de la
sorte, l'office recourant n'a pas établi que les conditions d'une
reconsidération étaient réunies. S'il apparaît ultérieurement, à la suite d'un
examen plus minutieux de la situation, que l'instruction ou l'appréciation
médicale du cas avait été faite d'une manière qui peut aujourd'hui sembler
critiquable, cela ne rend pas pour autant la décision prise sur cette base
comme étant manifestement erronée au regard de la situation de fait et de droit
de l'époque.

3.
Pour le reste, il n'y a pas lieu de se demander si les premiers juges ont violé
le droit fédéral en omettant d'examiner la question de l'existence ou non d'un
motif de révision. Dans la mesure où l'intimée est au bénéfice d'une rente
entière d'invalidité depuis le 1er janvier 1997, la question d'une révision du
droit à la rente d'invalidité au sens de l'art. 17 LPGA ne peut se poser que
dans l'hypothèse où l'état de santé se serait entre-temps amélioré. A l'appui
de son grief, l'office recourant se limite à énumérer les diagnostics
mentionnés dans les différents rapports médicaux versés au dossier et à
expliquer que "ces rapports médicaux suffisent en eux-mêmes à démontrer que
depuis 1997, l'état de santé de l'assurée n'est pas resté inchangé". On ne
saurait toutefois tirer de cette argumentation des indices sérieux permettant
d'établir l'existence d'un motif de révision. Il importe de rappeler que
l'intimée avait fait l'objet, jusqu'à la présente procédure, de trois
procédures de révision qui n'avaient pas donné lieu à des mesures d'instruction
particulières de la part de l'office recourant.

4.
Mal fondé, le recours doit être rejeté. Vu l'issue du litige, les frais et les
dépens de la procédure sont mis à la charge de l'office recourant (art. 66 al.
1 et 68 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Le recourant versera à l'intimée la somme de 2'500 fr. à titre de dépens pour
la dernière instance.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la
République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 27 novembre 2012
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Meyer

Le Greffier: Piguet