Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 633/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
9C_633/2012

Arrêt du 8 janvier 2013
IIe Cour de droit social

Composition
MM. et Mmes les Juges fédéraux Kernen, Président,
Meyer, Borella, Pfiffner Rauber et Glanzmann.
Greffier: M. Piguet.

Participants à la procédure
Office cantonal genevois de l'assurance-invalidité, Rue des Gares 12, 1201
Genève,
recourant,

contre

S.________, représentée par Me Gilbert Bratschi, avocat,
intimée.

Objet
Assurance-invalidité,

recours contre le jugement de la Cour de justice de la République et canton de
Genève, Chambre des assurances sociales, du 20 juin 2012.

Faits:

A.
S.________ souffre de séquelles d'une poliomyélite survenue au cours de son
enfance qui touchent principalement ses membres inférieurs. Considérablement
limitée dans les activités de la vie quotidienne, elle ne peut se déplacer à
l'extérieur qu'au moyen d'un fauteuil roulant électrique. Elle bénéficie depuis
le 1er décembre 2009 d'un quart de rente et depuis le 1er mars 2010 d'une rente
entière de l'assurance-invalidité.
Le 12 octobre 2010, l'assurée a déposé une demande d'allocation pour impotent.
Dans le cadre de l'instruction de cette demande, l'Office de
l'assurance-invalidité du canton de Genève a interpellé le docteur C.________,
médecin traitant de l'assurée (rapport du 20 décembre 2010), et fait procéder à
une enquête à domicile. Selon l'enquêtrice, les conditions mises à l'octroi
d'une allocation pour impotent de degré faible à compter du mois de septembre
2008 étaient réunies (rapport du 25 janvier 2011).
Malgré les conclusions de cette enquête, l'office AI a, par décision du 28 mars
2011, refusé d'allouer une allocation pour impotent à l'assurée.

B.
Par jugement du 20 juin 2012, la Cour de justice de la République et canton de
Genève, Chambre des assurances sociales, a admis le recours formé par
l'assurée, annulé la décision du 28 mars 2011 et dit que l'assurée avait droit
à une allocation pour impotent de degré moyen dès le 1er septembre 2008.

C.
L'office AI interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement
dont il demande l'annulation. Il conclut à l'octroi d'une allocation pour
impotent de degré faible et au renvoi de la cause à la juridiction cantonale
pour instruction complémentaire et nouvelle décision sur le début du droit à
l'allocation.
S.________ conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des
assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit,
tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique
le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être limité par les arguments de
la partie recourante ou par la motivation de l'autorité précédente. Le Tribunal
fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués, compte tenu de
l'exigence de motivation prévue à l'art. 42 al. 2 LTF, et ne peut aller au-delà
des conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). Il fonde son raisonnement sur
les faits retenus par la juridiction de première instance (art. 105 al. 1 LTF)
sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du
droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). La partie recourante qui
entend s'écarter des faits constatés doit expliquer de manière circonstanciée
en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées sinon un état de
fait divergent ne peut être pris en considération. Aucun fait nouveau ni preuve
nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité
précédente (art. 99 al. 1 LTF).

2.
Le litige porte sur le point de savoir si l'intimée peut prétendre à une
allocation pour impotent de degré moyen plutôt que de degré léger.

2.1 La juridiction cantonale a constaté que l'intimée avait besoin, d'une part,
d'un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie et,
d'autre part, d'une aide régulière et importante pour accomplir au moins deux
actes ordinaires de la vie, soit pour se lever, s'asseoir et se coucher et pour
se déplacer à l'intérieur ou à l'extérieur. Conformément à l'art. 37 al. 2 let.
c RAI, elle pouvait par conséquent prétendre à une allocation pour impotent de
degré moyen, allocation due dès le mois de septembre 2008, soit à l'issue du
délai de carence d'une année prévu à l'art. 28 al. 1 let. b LAI.

2.2 L'office recourant considère que les conditions de l'art. 37 al. 2 let. c
RAI ne sont pas remplies. S'il ne conteste pas que l'assurée nécessite un
accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie, il estime en
revanche que le besoin d'aide régulière et importante ne doit être admis que
pour un seul acte ordinaire de la vie, soit celui de se déplacer. Il ressortait
clairement du dossier que l'intimée pouvait accomplir seule l'acte de se lever,
s'asseoir et se coucher, sans que la manière d'y procéder n'apparaisse
contraire aux moeurs. Qui plus est, comme l'aide d'autrui avait déjà été
reconnue et prise en compte pour l'acte de se déplacer à l'intérieur, le fait
que l'intimée ait besoin de son mari pour changer de siège afin de se déplacer
plus facilement à l'intérieur de son logement ne pouvait être pris en
considération une deuxième fois au travers de l'acte de se lever, s'asseoir et
se coucher.

3.
3.1 En vertu de l'art. 42 al. 1 LAI, les assurés impotents qui ont leur
domicile et leur résidence habituelle en Suisse ont droit à une allocation pour
impotent.

3.2 Aux termes de l'art. 9 LPGA, est réputée impotente toute personne qui, en
raison d'une atteinte à sa santé, a besoin de façon permanente de l'aide
d'autrui ou d'une surveillance personnelle pour accomplir des actes
élémentaires de la vie quotidienne. Est aussi considérée comme impotente la
personne vivant chez elle qui, en raison d'une atteinte à sa santé, a
durablement besoin d'un accompagnement lui permettant de faire face aux
nécessités de la vie (art. 42 al. 3 LAI et 38 RAI).

3.3 La loi distingue trois degrés d'impotence: grave, moyen ou faible (art. 42
al. 2 LAI). L'impotence est grave lorsque l'assuré est entièrement impotent.
Tel est le cas s'il a besoin d'une aide régulière et importante d'autrui pour
tous les actes ordinaires de la vie et que son état nécessite, en outre, des
soins permanents ou une surveillance personnelle (art. 37 al. 1 RAI).
L'impotence est moyenne si l'assuré, même avec des moyens auxiliaires, a
besoin: (a) d'une aide régulière et importante d'autrui pour accomplir la
plupart des actes ordinaires de la vie; (b) d'une aide régulière et importante
d'autrui pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie et nécessite,
en outre, une surveillance personnelle permanente; ou (c) d'une aide régulière
et importante d'autrui pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie
et nécessite, en outre, un accompagnement durable pour faire face aux
nécessités de la vie au sens de l'art. 38 RAI (art. 37 al. 2 RAI). L'impotence
est faible si l'assuré, même avec des moyens auxiliaires, a besoin, notamment:
(a) de façon régulière et importante, de l'aide d'autrui pour accomplir au
moins deux actes ordinaires de la vie; (b) d'une surveillance personnelle
permanente; ou (e) d'un accompagnement durable pour faire face aux nécessités
de la vie au sens de l'art. 38 RAI (art. 37 al. 3 RAI).

3.4 Selon le ch. 8010 de la circulaire sur l'invalidité et l'impotence dans
l'assurance-invalidité (CIIAI), les actes ordinaires de la vie les plus
importants se répartissent en six domaines:
- se vêtir, se dévêtir (éventuellement adapter la prothèse ou l'enlever);
- se lever, s'asseoir, se coucher (y compris se mettre au lit ou le quitter);
- manger (apporter le repas au lit, couper des morceaux, amener la nourriture à
la bouche, réduire la nourriture en purée et prise de nourriture par sonde);
- faire sa toilette (se laver, se coiffer, se raser, prendre un bain/se
doucher);
- aller aux toilettes (se rhabiller, hygiène corporelle/vérification de la
propreté, façon inhabituelle d'aller aux toilettes);
- se déplacer (dans l'appartement, à l'extérieur, entretien des contacts
sociaux).
Pour qu'il y ait nécessité d'assistance dans l'accomplissement d'un acte
ordinaire de la vie comportant plusieurs fonctions partielles, il n'est pas
obligatoire que la personne assurée requière l'aide d'autrui pour toutes ou la
plupart des fonctions partielles; il suffit bien au contraire qu'elle ne
requière l'aide régulière et importante d'autrui que pour une seule de ces
fonctions partielles (ATF 117 V 146 consid. 2 p. 148). Les fonctions partielles
d'un acte ordinaire de la vie ne peuvent toutefois être prises en considération
qu'une fois en tout lorsque l'assuré a besoin de l'aide d'autrui pour accomplir
ces fonctions dans plusieurs actes ordinaires (arrêt du Tribunal fédéral des
assurances H 270/80 du 3 novembre 1981 consid. 2b, in RCC 1983 p. 71). En
revanche, si l'accomplissement d'un acte ordinaire de la vie est seulement
rendu plus difficile ou ralenti par l'atteinte à la santé, cela ne signifie pas
qu'il y ait impotence (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 25/85 du 11
juin 1985 consid. 2b, in RCC 1986 p. 509).

4.
4.1 En l'occurrence, la juridiction cantonale a constaté que la personne
chargée de l'enquête à domicile n'avait pas tenu compte du besoin d'aide pour
les transferts (se lever, s'asseoir, se coucher), mais pris en considération ce
besoin sous l'angle ordinaire consistant à aller aux toilettes. Or, si
l'assurée était généralement capable de se lever et de s'asseoir, elle avait
besoin de l'aide de son mari pour passer de son fauteuil roulant à la chaise à
roulette, moyen indispensable pour accéder à certaines parties du logement,
notamment la chambre à coucher. De plus, elle ne pouvait s'allonger de manière
normale puisqu'elle n'avait pas d'autres choix que de se laisser choir si
lourdement qu'elle avait endommagé son lit. Il n'y avait donc pas lieu de
considérer qu'elle procédait à cet acte de manière conforme aux moeurs, si bien
qu'il fallait reconnaître, contrairement à ce qu'avait retenu l'enquêtrice, un
besoin d'aide pour cet acte ordinaire. Dans ces conditions, la question de
savoir si l'assurée avait besoin d'aide pour se rendre aux toilettes pouvait
être laissée ouverte.
4.2
4.2.1 S'agissant de l'acte "se lever, s'asseoir ou se coucher" (y compris se
mettre au lit ou se lever de son lit), il y a impotence lorsqu'il est
impossible à la personne assurée de se lever, de s'asseoir ou de se coucher
sans aide d'un tiers (ch. 8015 CIIAI). En l'occurrence, les problèmes
rencontrés par l'intimée pour passer de sa chaise à roulettes à son lit
relèvent de difficultés d'ordre pratique plutôt que d'une impossibilité
objective à accomplir l'acte en question. Le fait que l'intimée doive d'une
certaine manière se laisser tomber pour pouvoir atteindre son lit ne saurait
dans ces conditions être considéré comme un acte non conforme aux moeurs et
irrespectueux des droits de la personnalité, ce d'autant que cette difficulté
pourrait être surmontée par le simple rehaussement du lit (au moyen d'un
matelas supplémentaire ou d'un matelas plus épais), voire par l'utilisation
d'un moyen auxiliaire adapté tel qu'un lit électrique. Quant aux problèmes
rencontrés par l'intimée pour passer de son fauteuil roulant électrique à sa
chaise à roulettes, ils sont déjà compris dans la fonction "se déplacer (dans
l'appartement)" et ne sauraient être pris en considération une seconde fois
dans le cadre de la fonction "se lever, s'asseoir ou se coucher".
4.2.2 Cela étant constaté, il convient d'examiner la question - laissée ouverte
par la juridiction cantonale - de savoir si l'assurée a besoin d'une aide
régulière pour se rendre aux toilettes. L'enquêtrice avait admis ce besoin au
motif que l'assurée, qui ne pouvait accéder à l'intérieur des toilettes avec
son fauteuil roulant, devait se placer devant l'entrée, s'accrocher à la
poignée et pivoter pour s'asseoir sur le siège, son mari étant obligé de
retirer le fauteuil et de fermer la porte pour préserver son intimité. Selon la
jurisprudence (ATF 121 V 88 consid. 6 p. 93), il y a impotence s'agissant de
l'acte "aller aux toilettes" lorsque l'assuré a besoin de l'aide d'un tiers
pour vérifier son hygiène, se rhabiller ou l'aider pour s'asseoir ou se
relever, ou encore lorsqu'il faut procéder à une manière inhabituelle d'aller
aux toilettes (p. ex. apporter le vase de nuit et le vider, apporter un urinal,
l'ajuster pour l'assuré, apporter une aide régulière pour uriner). Or, il
ressort clairement de la description opérée par l'enquêtrice que l'intimée
n'est, en soi, pas empêchée de se rendre aux toilettes, puisqu'elle est
fonctionnellement en mesure de se transférer de son fauteuil sur le siège des
toilettes et d'éliminer son urine et ses selles. Tel que décrit par
l'enquêtrice, le problème réside dans l'impossibilité de pouvoir fermer sans
l'aide d'autrui la porte des toilettes et dans l'atteinte à l'intimité que
cette situation engendre. Cela étant, dans l'intimité du couple et du domicile,
il convient d'apprécier la notion de sphère intime de manière plus large que
celle qui a court dans la sphère sociale et publique. Le fait de ne pas pouvoir
fermer la porte des toilettes pendant leur utilisation ne dépasse pas, malgré
les désagréments passagers que cela peut causer, le seuil du tolérable dans un
couple présentant de nombreuses années de vie commune. On ne saurait par
conséquent considérer que le fait de pouvoir fermer la porte des toilettes
constitue une des fonctions partielles de l'acte "aller aux toilettes".
4.2.3 Sur le vu de ce qui précède, il y a lieu de constater que l'intimée ne
subit des limitations objectives que dans un seul acte ordinaire de la vie, si
bien qu'elle ne peut pas prétendre à une allocation pour impotent de degré
moyen, les conditions de l'art. 37 al. 2 let. c RAI n'étant pas remplies. Eu
égard aux conclusions prises par le recourant en procédure fédérale (art. 107
al. 1 LTF), elle ne peut par conséquent prétendre qu'à une allocation pour
impotent de degré léger.

5.
L'office recourant conteste également le moment où la juridiction cantonale a
fixé la naissance du droit à l'allocation pour impotent. Il estime qu'elle a
violé le droit fédéral, car elle "aurait dû, conformément à la jurisprudence
[...], instruire en procédant au calcul du degré d'impotence moyenne,
relativement à une impotence de degré faible". Ce faisant, l'office AI
n'explique pas en quoi les premiers juges ont procédé à une constatation
manifestement inexacte des faits et violé les principes juridiques qu'il
invoque en fixant le début du droit à l'allocation pour impotent au 1er
septembre 2008, soit un an après la remise à l'intimée d'un système de
propulsion électrique pour fauteuil roulant. Il n'y a pas lieu d'entrer en
matière sur le grief, faute d'une motivation suffisante.

6.
Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être partiellement admis. Les
frais judiciaires doivent être mis proportionnellement à la charge de l'office
recourant et de l'intimée (art. 66 al. 1 LTF). L'intimée a également droit à
une indemnité de dépens réduite pour l'instance fédérale à la charge de
l'office recourant (art. 68 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est partiellement admis. La décision de la Cour de justice de la
République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, du 20 juin
2012 est réformée en ce sens que l'intimée a droit à une allocation pour
impotent de degré faible dès le 1er septembre 2008. Le recours est rejeté pour
le surplus.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis pour 250 fr. à la charge du
recourant et pour 250 fr. à la charge de l'intimée.

3.
Le recourant versera à l'intimée la somme de 1'000 fr. à titre de dépens pour
la dernière instance.

4.
La cause est renvoyée à la Cour de justice de la République et canton de
Genève, Chambre des assurances sociales pour nouvelle décision sur les frais de
la procédure antérieure.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la
République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 8 janvier 2013
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Kernen

Le Greffier: Piguet