Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 554/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

9C_554/2012 {T 0/2}

Arrêt du 30 janvier 2013
IIe Cour de droit social

Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Kernen, Président, Borella et Glanzmann.
Greffière: Mme Moser-Szeless.

Participants à la procédure
S._________, représentée par Me Christian Fischele, avocat,
recourante,

contre

Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève, Rue des Gares 12, 1201
Genève,
intimé.

Objet
Assurance-invalidité (rente d'invalidité),

recours contre le jugement de la Cour de justice
de la République et canton de Genève,
Chambre des assurances sociales, du 29 mai 2012.

Faits:

A.
Originaire de Serbie et Monténégro, S._________ n'a bénéficié d'aucune
formation professionnelle. Elle a travaillé à temps partiel au service des
sociétés D.________ AG pour lesquelles elle effectuait des travaux de
nettoyage. Après avoir subi plusieurs périodes d'incapacité de travail (totale
et partielle) en raison de douleurs dorsales, S._________ a été mise en arrêt
complet de travail à partir du 1er mai 2008. Ses employeurs ont mis fin aux
rapports de travail au 31 août 2008, respectivement au 20 septembre suivant.

S._________ a présenté une demande de prestations de l'assurance-invalidité le
12 juin 2008. L'Office cantonal genevois de l'assurance-invalidité (ci-après:
l'office AI) a recueilli les renseignements usuels et effectué une enquête
économique sur le ménage (rapport du 27 avril 2009). Après avoir requis l'avis
du médecin traitant de l'assurée, le docteur T._________, spécialiste FMH en
médecine interne, l'office AI a également soumis S._________ à un examen auprès
du docteur P.________, spécialiste FMH en médecine interne et rhumatologie et
médecin auprès de son Service médical régional (SMR). Diagnostiquant notamment
des lombalgies chroniques persistantes dans le cadre de troubles dégénératifs
étagés, ce médecin a conclu que l'assurée n'était plus capable de travailler
dans son activité habituelle, mais qu'elle disposait en revanche d'une capacité
de travail de 100 % dans une activité adaptée aux limitations décrites (rapport
du 17 février 2009).

Le 21 septembre 2009, l'office AI a rendu une décision par laquelle il a refusé
toute mesure de reclassement professionnel; il était en revanche prêt à
examiner le droit à une aide au placement, à la requête de l'intéressée. Par la
suite, le 28 octobre 2010, l'administration a également nié le droit de
l'assurée à une rente d'invalidité. En application de la méthode mixte
d'évaluation de l'invalidité, elle a fixé à 12 % le degré d'invalidité, compte
tenu d'une absence de perte de gain en lien avec l'activité lucrative (prise en
compte pour 50 %) et d'une invalidité de 11,5 % dans les travaux habituels
(empêchement de 23 % pris en compte pour 50 %).

B.
En temps voulu, S._________ a déféré ces deux décisions à la Cour de justice de
la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, en
produisant de nouveaux avis de son médecin traitant. La juridiction cantonale a
joint les causes, et entendu en qualité de témoins les docteurs T._________ et
C._________, spécialiste FMH en médecine interne et rhumatologie, qui avait
suivi l'assurée en février et mars 2008 (cf. procès-verbaux des 26 mai 2011 et
7 juillet 2011). Statuant le 29 mai 2012, elle a débouté l'assurée.

C.
S._________ interjette un recours en matière de droit public contre le jugement
cantonal, dont elle demande l'annulation. Sous suite de dépens, elle conclut
principalement à ce qu'il soit dit qu'elle est incapable de travailler et
qu'elle a droit à un quart de rente d'invalidité dès le 15 janvier 2008. A
titre subsidiaire, puis plus subsidiaire encore, elle requiert en substance le
renvoi de la cause à la juridiction cantonale, respectivement à l'office AI,
pour la mise en oeuvre d'une expertise pluridisciplinaire et une nouvelle
décision au sens des considérants. Elle sollicite par ailleurs le bénéfice de
l'assistance judiciaire.

Le Tribunal fédéral n'a pas procédé à un échange d'écritures.

Considérant en droit:

1.
Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit,
tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique
le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être limité par les arguments du
recourant ou par la motivation de l'autorité précédente. Le Tribunal fédéral
n'examine en principe que les griefs invoqués, compte tenu de l'exigence de
motivation prévue à l'art. 42 al. 2 LTF, et ne peut aller au-delà des
conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). Il fonde son raisonnement sur les
faits retenus par la juridiction de première instance (art. 105 al. 1 LTF) sauf
s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit
au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant qui entend
s'écarter des faits constatés doit expliquer de manière circonstanciée en quoi
les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées sinon un état de fait
divergent ne peut être pris en considération.

2.
2.1 Au regard des motifs et conclusions du recours (au-delà desquelles le
Tribunal fédéral ne peut aller, supra consid. 1), le litige porte uniquement
sur le droit de la recourante à un quart de rente de l'assurance-invalidité à
partir du 15 janvier 2008, le refus de la mesure de reclassement n'étant pas
contesté en instance fédérale.

2.2 Le jugement entrepris expose correctement les dispositions légales et les
principes jurisprudentiels relatifs à la notion d'invalidité et son évaluation
chez les assurés qui n'exercent que partiellement une activité lucrative et se
consacrent en outre à leurs travaux habituels (méthode mixte de l'évaluation de
l'invalidité), à la libre appréciation des preuves, ainsi qu'à la valeur
probante d'un rapport médical. Il suffit d'y renvoyer.

3.
La recourante soulève tout d'abord le grief de violation du droit d'être
entendue, en reprochant aux premiers juges d'avoir écarté sa requête visant à
la mise en oeuvre d'une nouvelle expertise médicale.

Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. comprend celui pour
les parties de produire des preuves quant aux faits de nature à influer la
décision et d'obtenir qu'il soit donné suite aux offres de preuves pertinentes
(ATF 132 V 368 consid. 3.1 p. 370; 127 III 576 consid. 2c p. 578; 127 V 431
consid. 3a p. 436). En revanche, une partie n'a pas droit à l'administration
d'une preuve dépourvue de pertinence parce qu'elle porte sur une circonstance
sans rapport avec le litige, ou qu'une appréciation anticipée des preuves déjà
recueillies démontre qu'elle ne serait pas de nature à emporter la conviction
de la juridiction saisie (cf. ATF 130 II 425 consid. 2.1 p. 429; 125 I 127
consid. 6c/cc in fine p. 135). Dans la mesure où il porte sur le résultat de
cette appréciation anticipée des preuves, le grief de violation du droit d'être
entendu se confond avec celui de constatation manifestement inexacte (y compris
arbitraire) ou incomplète des faits pertinents, que la recourante soulève
également en soutenant qu'elle n'est pas capable de travailler dans la mesure
reconnue par les premiers juges. Il sera examiné avec le fond du litige.

4.
4.1 Sur le fond, la recourante ne conteste pas que sans atteinte à la santé
elle aurait exercé une activité lucrative à mi-temps et se serait occupée de
son ménage le reste du temps. Elle ne critique pas non plus l'application de la
méthode mixte d'évaluation de l'invalidité. Elle reproche en revanche aux
premiers juges d'avoir constaté les faits de manière à la fois manifestement
inexacte, incomplète et arbitraire, en retenant qu'elle était capable d'exercer
une activité adaptée à 100 %, alors que les docteurs T._________ et C._________
avaient attesté d'une capacité de travail de 50 %. Elle présenterait ainsi une
invalidité de 25 % s'agissant de la part consacrée à l'activité lucrative.

La recourante s'en prend également à l'évaluation de l'empêchement pour la part
de son activité consacrée aux travaux habituels, en remettant en cause le taux
d'empêchement déterminé par la collaboratrice de l'intimée chargée de l'enquête
ménagère pour les postes "alimentation", "emplettes et courses diverses" et
"lessive et entretien des vêtements". Selon elle, c'est un taux d'invalidité de
33,7 % qui aurait dû être retenu pour la part relative aux travaux habituels.
Il en résulterait donc un taux d'invalidité global de 42 % ([0,5 x 50 %] + [0,5
x 33,7 %]).

5.
5.1 En ce qui concerne tout d'abord l'incapacité d'accomplir les travaux
habituels en raison d'une atteinte à la santé, comme l'ont rappelé les premiers
juges, l'enquête économique sur le ménage effectuée au domicile de l'assuré
(cf. art. 69 al. 2 RAI) constitue en règle générale une base appropriée et
suffisante pour évaluer les empêchements dans ce domaine (sur les exigences
relatives à la valeur probante d'un tel rapport d'enquête, voir consid. 2.3.2
non publié au Recueil officiel mais dans VSI 2003 p. 218 de l'ATF 129 V 67
[arrêt I 90/02 du 30 décembre 2002]; ATF 128 V 93).

On précisera que la constatation d'un empêchement pour les différents postes
constituant l'activité ménagère est une question de fait qui ne peut être
examinée par le Tribunal fédéral que sous un angle restreint, tel que rappelé
ci-avant (supra consid. 1; arrêt I 693/06 du 20 décembre 2006 consid. 6.3).

5.2 L'argumentation soulevée par la recourante ne suffit pas à remettre en
cause les constatations des premiers juges sur les empêchements à prendre en
considération, qui se sont entièrement ralliés aux conclusions de l'enquête
économique sur le ménage (du 27 avril 2009) selon lesquelles ces empêchements
s'élevaient à 23 %. La recourante se limite en effet à donner sa propre
appréciation des restrictions qu'elle subirait sans démontrer que le contenu du
rapport d'enquête ne serait pas plausible, ni motivé ou ne correspondrait pas
aux indications relevées sur place (cf. consid. 2.3.2 non publié au Recueil
officiel mais dans VSI 2003 p. 218 de l'ATF 129 V 67 [arrêt I 90/02 du 30
décembre 2002]).

En particulier, c'est en vain que la recourante soutient qu'un empêchement de
30 % pour le poste "alimentation" devrait être reconnu, dès lors que
l'estimation de l'enquêtrice (de 10 %), selon laquelle l'assurée devait pouvoir
participer à la confection des repas, a été corroborée tant par le docteur
T._________ que sa consoeur C._________ lors de leur audition en instance
cantonale (cf. procès-verbaux d'enquêtes des 26 mai et 7 juillet 2011). Le
médecin traitant, qui a expliqué avoir insisté "sur le fait que Mme S._________
effectue les activités au niveau du ménage", a indiqué qu'une participation aux
activités ménagères devait être possible - même - dans des moments de
diminution liée aux douleurs chroniques fluctuantes. De son côté, le docteur
C._________ a mentionné que les diagnostics constatés n'empêchaient pas les
activités ménagères, dans la mesure où il n'y avait pas d'exigences de
rendement, même si certains travaux pouvaient être difficiles. Au regard de ces
constatations médicales, l'évaluation du poste "lessive et entretien des
vêtements" (empêchement de 10 %) n'est par ailleurs pas critiquable. Il paraît
exigible de la recourante qu'elle participe dans une moindre mesure aux tâches
en cause, comme l'a retenu l'enquêtrice. Concernant enfin le poste "emplettes
et courses diverses", l'estimation de l'enquêtrice (pas d'empêchement) ne peut
pas être qualifiée d'insoutenable, quoi qu'en dise la recourante, dès lors
qu'elle prend dûment en considération l'aide que l'intéressée peut requérir de
son époux et du fait que c'est toujours celui-ci qui gérait les tâches
administratives (poste/assurances/services officiels).

5.3 En conclusion de ce qui précède, il n'y a pas lieu de s'écarter du taux
d'invalidité de 11,5 % retenu par les premiers juges pour les travaux habituels
(23 % x 0,5).

6.
6.1 En ce qui concerne ensuite le taux d'invalidité relatif à la part consacrée
à l'exercice d'une activité lucrative, singulièrement l'étendue de la capacité
de travail de la recourante dans une activité professionnelle adaptée, il
apparaît que les faits pertinents ont été établis de façon pour le moins
elliptique par la juridiction cantonale. On ignore par exemple quelle(s)
atteinte(s) à la santé entraîne(nt), à son avis, les limitations fonctionnelles
qu'elle retient apparemment en se ralliant aux conclusions du rapport du SMR du
16 février 2009. Si elle expose le contenu des différents rapports médicaux
déterminants, l'autorité cantonale de recours n'indique cependant pas - ou
indique alors de façon pour le moins implicite - quelles constatations de fait
elle en tire.

Par ailleurs, l'appréciation des preuves à laquelle a procédé la juridiction
cantonale ne satisfait pas aux exigences des règles sur la libre appréciation
des preuves pourtant rappelées dans le jugement entrepris. Elle s'est en effet
limitée à exposer que "partageant l'avis de l'OAI au sujet du fait que
notamment les éléments médicaux produits par la recourante ne permettent pas de
remettre en cause les conclusions du rapport du SMR du 16 février 2009, [elle]
retiendra la valeur probante des rapports d'examen du SMR et se ralliera aux
conclusions de l'OAI" (consid. 32 du jugement entrepris). En se ralliant
simplement à l'avis de l'intimé - ce qui implique implicitement la constatation
que l'assurée dispose d'une capacité de travail entière dans une activité
adaptée -, les premiers juges n'exposent pas les raisons pour lesquelles les
pièces médicales produites par la recourante ne suffisent pas à faire douter de
l'appréciation du SMR. S'ils citent effectivement l'ensemble des documents
médicaux pertinents, ils n'en font cependant pas une véritable analyse critique
conforme à leur obligation de procéder à une appréciation libre mais complète,
consciencieuse et objective des preuves.

6.2 Cela étant, même si l'autorité cantonale de recours n'a pas effectué une
appréciation des preuves de manière suffisamment rigoureuse, le résultat n'en
est cependant pas arbitraire, de sorte qu'il n'y a pas lieu de s'en écarter. A
cet égard, on précisera que pour que l'appréciation des preuves opérée par la
juridiction de première instance soit qualifiée d'arbitraire, il faut qu'elle
le soit non seulement en ce qui concerne les motifs évoqués par l'autorité
cantonale de recours pour écarter un moyen de preuve, mais également dans son
résultat (ATF 137 I 1 consid. 2.4 p. 5; 136 I 316 consid. 2.2.2 p. 318).

Quand bien même il conviendrait de suivre l'argumentation de la recourante et
d'admettre, en se fondant sur les déclarations des doctoresses T._________ et
C._________ (respectivement des 26 mai et 7 juillet 2011) auxquelles elle se
réfère, qu'elle ne disposerait que d'une capacité de travail de 50 % dans une
activité adaptée aux limitations médicalement constatées, la perte de gain qui
en résulte reste insuffisante pour lui ouvrir le droit à un quart de rente
d'invalidité. Le taux d'invalidité pour la part consacrée à l'activité
lucrative s'élèverait au maximum à 25 % (0,5 x 50 %) - ce chiffre mentionné par
la recourante relève d'une évaluation médico-théorique s'écartant en sa faveur
de la comparaison des revenus qui s'imposerait conformément aux art. 28a al. 3
LAI et 16 LPGA -, celui pour la part réservée aux travaux ménagers à 11,5 %
(supra consid. 5.3). Le taux d'invalidité global correspondrait dès lors à 37 %
(36,5 %), ce qui ne permet pas de reconnaître à la recourante le droit à la
prestation requise.

Compte tenu de ce résultat, la mise en oeuvre d'une expertise médicale telle
que sollicitée par la recourante n'apparaît pas nécessaire.

7.
Il résulte de ce qui précède que le recours est mal fondé.

8.
Vu l'issue de la procédure, la recourante doit en principe supporter les frais
judiciaires y afférents (art. 66 al. 1 LTF), alors qu'elle n'a pas droit à des
dépens (art. 68 al. 1 LTF). Il convient toutefois d'accepter sa demande
d'assistance judiciaire, dès lors qu'elle en réalise les conditions (cf. art.
64 al. 1 et 2 LTF). La recourante est rendue attentive au fait qu'elle devra
rembourser la caisse du tribunal si elle se trouve ultérieurement en mesure de
le faire (art. 64 al. 4 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
L'assistance judiciaire est accordée et Maître Christian Fischele est désigné
comme avocat d'office de la recourante.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de la
recourante. Ils sont toutefois supportés provisoirement par la caisse du
Tribunal.

4.
Une indemnité de 2800.- fr. est allouée à l'avocat de la recourante à titre
d'honoraires à payer par la caisse du Tribunal.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la
République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 30 janvier 2013

Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Kernen

La Greffière: Moser-Szeless