Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 501/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

9C_501/2012 {T 0/2}

Arrêt du 31 décembre 2012
IIe Cour de droit social

Composition
MM. les Juges fédéraux U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffier: M. Wagner.

Participants à la procédure
Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève, Rue des Gares 12, 1201
Genève,
recourant,

contre

F._________, représentée par Me Gustavo da Silva, avocat,
intimée.

Objet
Assurance-invalidité,

recours contre le jugement de la Cour de justice de la République et canton de
Genève, Chambre des assurances sociales, du 14 mai 2012.

Faits:

A.
F._________ de nationalité portugaise, est entrée en Suisse en 1987. Dès le 1er
juillet 2000, elle a travaillé en qualité d'aide à domicile. Elle a oeuvré
également à partir du 1er avril 2007 en qualité d'employée à l'entretien des
locaux et au service de restauration, avant d'être en arrêt de travail dès le
21 octobre 2009. Du 27 janvier au 16 février 2010, elle a séjourné à la
Clinique X.________, dont les médecins ont posé le diagnostic principal de
trouble dépressif récurrent, épisode actuel modéré avec somatisations ([CIM-10]
F33.11), et retenu un trouble somatoforme douloureux (F45.4) comme comorbidité
(rapport du 2 mars 2010). Le 26 mai 2010, le docteur W.________, spécialiste en
psychiatrie au sein de la Clinique C.________, a examiné F.________ et consigné
ses conclusions dans un rapport daté du même jour.
L'institution de prévoyance professionnelle de F._________ a annoncé à l'Office
de l'assurance-invalidité du canton de Genève une incapacité de travail de 100
% depuis le 12 novembre 2009, pour une détection précoce. Un entretien s'est
tenu le 16 juin 2010, à la suite duquel F._________ a présenté le 24 juin 2010
une demande de prestations de l'assurance-invalidité. Dans un rapport produit
le 22 juillet 2010, le docteur L.________, spécialiste en médecine générale, a
posé les diagnostics avec effet sur la capacité de travail de trouble dépressif
récurrent et de trouble somatoforme douloureux, en indiquant que l'incapacité
de travail était de 100 % depuis octobre 2009, d'une durée indéterminée, et que
l'activité exercée jusque-là n'était plus exigible. Dans un rapport du 28
juillet 2010, le docteur D.________, spécialiste FMH en
psychiatrie-psychothérapie, a retenu les diagnostics avec effet sur la capacité
de travail de trouble dépressif récurrent épisode actuel modéré (F33.1) et de
troubles somatoformes douloureux (F45.4), ainsi que d'obésité stade 1 (E66.9)
et d'asthme sans signe d'activité (J45.9), et conclu à une incapacité de
travail de 100 % en ce qui concerne l'état de santé "actuel" de la patiente,
dont les troubles de l'humeur ne permettaient pas d'exercer une activité
professionnelle (questionnaire du 28 juillet 2010; rapport du 18 août 2010).
Le 15 novembre 2010, les docteurs G.________ (spécialiste FMH en médecine
interne et rhumatologie) et E._________ (spécialiste FMH en
psychiatrie-psychothérapie), médecins SMR, ont procédé à un examen clinique
rhumatologique et psychiatrique. Dans un rapport du 20 décembre 2010, ils ont
noté de discrets troubles statiques du rachis, lesquels étaient trop discrets
pour définir des limitations fonctionnelles ainsi qu'une incapacité de travail,
et conclu à une capacité de travail complète d'un point de vue rhumatologique
dans toute activité professionnelle. Relevant que l'examen ne permettait pas de
mettre en évidence les signes cliniques d'un trouble dépressif selon la CIM-10,
ils ont considéré que les troubles de l'humeur de l'assurée étaient
caractéristiques de la dysthymie ([CIM-10] F34.1), alors que ses plaintes
douloureuses correspondaient aux critères diagnostiques du syndrome somatoforme
douloureux persistant (F45.4), lequel était sans répercussion sur la capacité
de travail vu qu'il n'était pas accompagné d'une comorbidité psychiatrique
manifeste, la dysthymie n'étant pas considérée comme invalidante. Dans un
rapport du 6 janvier 2011, le docteur A.________, médecin SMR, a conclu à une
capacité de travail exigible de 100 % dans l'activité habituelle (théoriquement
depuis toujours) et dans une activité adaptée (théoriquement depuis toujours; à
traduire en termes de métier par un spécialiste de la réadaptation
professionnelle). L'office AI, dans un préavis du 14 janvier 2011, a informé
F.________ des conclusions des médecins du SMR niant toute incapacité de
travail durable et du rejet de sa demande. Par décision du 23 février 2011,
l'office AI a nié tout droit de F.________ à des prestations de
l'assurance-invalidité.

B.
Le 30 mars 2011, F._________ a formé recours contre cette décision devant la
Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances
sociales, en concluant à son annulation, la juridiction cantonale étant invitée
à dire et prononcer qu'elle avait droit à une rente entière pour une invalidité
de 100 % à compter du 1er juin 2010, à titre subsidiaire à une demi-rente pour
une invalidité de 50 % au moins à compter du 1er juin 2010, et à titre plus
subsidiaire à des mesures d'observation professionnelle. A titre préalable,
elle demandait que soit ordonnée une nouvelle expertise bidisciplinaire
(rhumatologique et psychiatrique) et requérait l'audition des docteurs
D.________ et L.________.
Dans sa réponse du 18 avril 2011, l'Office de l'assurance-invalidité du canton
de Genève a conclu au rejet du recours.
Interpellé par la juridiction cantonale, le docteur D.________ a déposé ses
conclusions dans un rapport du 23 mai 2011 et un rapport complémentaire du 6
juin 2011. Le docteur B.________, médecin-chef de la Clinique X.________, en a
fait de même dans un rapport du 23 août 2011. La juridiction cantonale a confié
une expertise médicale au docteur N.________, spécialiste FMH en
psychiatrie-psychothérapie. Dans un rapport du 11 janvier 2012, ce médecin a
posé le diagnostic de trouble dépressif récurrent, épisode actuel atypique
([CIM-10] F33.8). Répondant aux questions posées par le tribunal, l'expert a
considéré qu'un emploi représentant une capacité de travail globale de 50 %,
dans une profession équivalente à la dernière profession exercée, représentait
un effort exigible de la part de F._________, qui du point de vue
médico-théorique pourrait exercer une activité lucrative correspondant à une
capacité de travail de 50 %, soit à un taux de 100 % avec un rendement de 50 %,
ou à un taux plus faible avec un rendement meilleur, activité qui pourrait être
exigible dès "à présent". Dans un rapport complémentaire du 8 mars 2012, le
docteur N.________ a déclaré qu'il n'était pas possible de son point de vue
"actuel" de préciser les fluctuations de la capacité de travail entre 2009 et
2012; il se prononçait donc pour une capacité de travail de 50 % à la date de
son expertise du 11 janvier 2012.
Par arrêt du 14 mai 2012, la juridiction cantonale, admettant partiellement le
recours, a annulé la décision de l'Office de l'assurance-invalidité du canton
de Genève du 23 février 2011 et dit que F._________ avait droit à un quart de
rente d'invalidité depuis le 1er novembre 2010.

C.
L'Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève interjette un recours en
matière de droit public contre ce jugement, dont il conclut à l'annulation. Il
demande que la décision de refus de prestations du 23 février 2011 soit
confirmée. Il sollicite l'octroi de l'effet suspensif au recours, ce qui lui a
été accordé par ordonnance du 30 août 2012.
F._________ conclut, sous suite de frais et dépens, au rejet du recours.
L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
Le Tribunal fédéral statue en principe sur la base des faits établis par
l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à
l'art. 105 al. 2 LTF. Le recourant ne peut critiquer la constatation de faits
importants pour le jugement en cause que si ceux-ci ont été établis en
violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement
inexacte (art. 97 al. 1 LTF), c'est-à-dire insoutenable, voire arbitraire, et
si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause.
L'appréciation des preuves est arbitraire lorsqu'elle est manifestement
insoutenable, en contradiction avec le dossier, ou contraire au sens de la
justice et de l'équité ou lorsque l'autorité ne tient pas compte, sans raison
sérieuse, d'un élément propre à modifier la décision, se trompe sur le sens et
la portée de celui-ci ou, se fondant sur les éléments recueillis, en tire des
constatations insoutenables (ATF 134 V 53 consid. 4.3 p. 62 et les références).

2.
Selon une jurisprudence constante, le juge des assurances sociales apprécie la
légalité des décisions attaquées, en règle générale, d'après l'état de fait
existant au moment de la clôture de la procédure administrative. Les faits
survenus postérieurement et ayant modifié cette situation doivent faire l'objet
d'une nouvelle décision administrative (ATF 131 V 242 consid. 2.1 p. 243; 121 V
362 consid. 1b p. 366).

3.
Les premiers juges, se ralliant au résultat de l'expertise judiciaire du
docteur N.________, ont retenu que l'intimée présentait une capacité de travail
sur le plan psychique de 50 % dans son ancienne activité d'employée de maison
et de 60 % dans une activité adaptée nécessitant peu de qualifications, avec
peu d'exigences de rendement et peu de stress, peu d'initiatives et sans
efforts physiques importants. Bien que l'expert ait fixé cette capacité de
travail depuis janvier 2012 vu qu'il estimait ne pas pouvoir se prononcer sur
la période antérieure de novembre 2009 à décembre 2011, ils ont retenu que
l'intimée était en incapacité de travail de 40 % depuis le 11 novembre 2009 et
que le 11 novembre 2010, elle avait présenté une incapacité de travail d'au
moins 40 % en moyenne depuis une année, de sorte que la survenance de son
invalidité remontait à ce moment-là.

4.
La juridiction cantonale, relevant que le docteur N.________, comme cela
résultait de son rapport du 11 janvier 2012 (page 12), avait indiqué que l'état
"actuel" de l'intimée correspondait globalement à celui qu'elle présentait,
avec quelques fluctuations, depuis août 2009, a considéré qu'en réalité son
appréciation médicale avait porté sur la période dès août 2009 qu'il avait
qualifiée de similaire à la situation clinique de 2012, de sorte que les
conclusions relatives à la capacité de travail de l'intimée depuis janvier 2012
étaient applicables à la période antérieure, soit depuis août 2009 en
particulier depuis novembre 2009, date à laquelle avait débuté son incapacité
de travail. Aucun élément médical au dossier ne permettait d'exclure une
capacité de travail de 60 % seulement dans une activité adaptée, telle que
retenue par l'expert en 2012, antérieurement à cette date.

4.1 Le recourant fait valoir que le docteur N.________, dans son rapport
complémentaire du 8 mars 2012, a déclaré qu'il n'était pas possible de son
point de vue "actuel" de préciser les fluctuations de la capacité de travail
entre 2009 et 2012 et que la juridiction cantonale, en retenant que l'intimée
présentait une incapacité de travail de 40 % depuis le 11 novembre 2009, a
substitué son évaluation à celle de l'expert. Invoquant les conclusions du
docteur W.________ dans son rapport du 26 mai 2010 et des docteurs G.________
et E._________ dans leur rapport du 20 décembre 2010, il reproche aux premiers
juges d'avoir procédé à une appréciation arbitraire des preuves en considérant
qu'aucun élément médical au dossier ne permettait d'exclure une capacité de
travail de 60 % seulement dans une activité adaptée antérieurement au 11
janvier 2012.

4.2 L'appréciation des preuves à laquelle a procédé la juridiction cantonale
est manifestement insoutenable (ATF 134 V 53 consid. 4.3 p. 62 et les
références). A partir du moment où le docteur N.________ a déclaré dans son
rapport complémentaire du 8 mars 2012 qu'il n'était pas possible de son point
de vue "actuel" de préciser les fluctuations de la capacité de travail de
l'intimée entre 2009 et 2012, il n'y avait plus de place pour interpréter ses
conclusions relatives à la capacité de travail de l'intimée depuis janvier 2012
à la lumière de ses affirmations dans son rapport du 11 janvier 2012. Le
recours est bien fondé de ce chef.

4.3 Les conclusions du docteur N.________ dans son expertise judiciaire
n'entrent pas en considération dans le cadre de la présente procédure. Ce
médecin s'est fondé sur l'évolution depuis août 2009 de l'état de santé de
l'intimée, en indiquant que l'état correspondait à un diagnostic de trouble
dépressif récurrent, épisode "actuel" atypique. Pour autant, il n'a pas
considéré que ce trouble était incapacitant à partir de 2009. Dans son rapport
complémentaire du 8 mars 2012, il s'est prononcé pour une capacité de travail
de 50 % à la date de son expertise du 11 janvier 2012, soit postérieurement à
la décision de refus de prestations du 23 février 2011, dont la légalité
s'apprécie d'après l'état de fait existant au moment de la clôture de la
procédure administrative (supra, consid. 2).
Il apparaît que les premiers juges, en retenant que l'intimée était en
incapacité de travail de 40 % depuis le 11 novembre 2009, ont établi les faits
de façon manifestement insoutenable, voire arbitraire (ATF 134 II 124 consid.
4.1 p. 133). L'hypothèse d'un syndrome somatoforme douloureux persistant peut
demeurer indécise. Même si, par hypothèse, l'intimée a présenté un syndrome
somatoforme douloureux persistant, il n'y a aucune raison de s'écarter des
conclusions des docteurs G.________ et E._________ dans leur rapport du 20
décembre 2010, selon lesquelles ce syndrome était sans répercussion sur la
capacité de travail de l'intimée vu qu'il n'était pas accompagné d'une
comorbidité psychiatrique manifeste. A cet égard, les médecins traitants de
l'intimée n'ont fait état d'aucun élément objectivement vérifiable qui aurait
été ignoré par les médecins du SMR dans le cadre de l'examen clinique
rhumatologique et psychiatrique du 15 novembre 2010 et du rapport du 20
décembre 2010 et qui soit suffisamment pertinent pour remettre en cause leurs
conclusions. Sur le vu des conclusions des docteurs G.________ et E._________
dans leur rapport du 20 décembre 2010 et du docteur A.________ dans son rapport
du 6 janvier 2011, il convient de retenir que l'intimée présentait au moment
déterminant, soit lors de la décision administrative litigieuse du 23 février
2011, une capacité de travail exigible de 100 % dans une activité adaptée. Il
s'ensuit que les conditions du droit à un quart de rente d'invalidité n'étaient
pas réunies à ce moment-là, ce qui conduit à l'annulation du jugement
entrepris. Le recours est bien fondé.

5.
Il se justifie de transmettre le dossier à l'Office de l'assurance-invalidité
du canton de Genève pour qu'il examine le droit de l'intimée à des prestations
de l'assurance-invalidité en ce qui concerne la période postérieure au 23
février 2011.

6.
Vu l'issue du litige, les frais judiciaires doivent être mis à la charge de
l'intimée, qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Elle ne saurait prétendre une
indemnité de dépens pour l'instance fédérale (art. 68 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis et le jugement de la Cour de justice de la République et
canton de Genève, Chambre des assurances sociales, du 14 mai 2012, est annulé.

2.
Le dossier est transmis à l'Office de l'assurance-invalidité du canton de
Genève pour qu'il procède conformément aux considérants.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de l'intimée.

4.
La cause est renvoyée à la Cour de justice de la République et canton de
Genève, Chambre des assurances sociales, pour nouvelle décision sur les frais
et les dépens de la procédure antérieure.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la
République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 31 décembre 2012

Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Meyer

Le Greffier: Wagner