Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 498/2012
Zurück zum Index II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2012
Retour à l'indice II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2012



Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
9C_498/2012

Arrêt du 7 mars 2013
IIe Cour de droit social

Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Kernen, Président, Borella et Glanzmann.
Greffier: M. Berthoud.

Participants à la procédure
R.________,
représenté par Me Douglas Hornung, avocat,
recourant,

contre

Service des prestations complémentaires, route de Chêne 54, 1208 Genève,
intimé.

Objet
Prestation complémentaire à l'AVS/AI (remise, bonne foi),

recours contre le jugement de la Cour de justice de
la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, du 8 mai
2012.

Faits:

A.
A.a R.________, né en 1951, est rentier de l'assurance-invalidité. Il a
bénéficié de prestations complémentaires fédérales et cantonales à partir du
1er juin 2000 (décisions du 27 novembre 2000). Dans le cadre d'une révision de
son dossier, intervenue en mai 2010, le Service des prestations complémentaires
du canton de Genève (SPC) a constaté que l'assuré percevait également une rente
d'invalidité de la CNA depuis le 1er décembre 2000, ce qui l'a conduit à
reprendre le calcul des prestations complémentaires depuis cette date en tenant
compte de ce revenu. Par décision du 27 mai 2010, le SPC a supprimé le droit
aux prestations complémentaires.
Par décision du 27 octobre 2010, confirmée sur opposition le 14 décembre 2010,
le SPC a réclamé à l'assuré la restitution de la somme de 170'841 fr. 75,
représentant les prestations complémentaires fédérales (13'617 fr.), les
prestations complémentaires cantonales (99'960 fr.), les subsides à
l'assurance-maladie obligatoire (50'337 fr. 40) et le remboursement de frais
médicaux (6'927 fr. 35) versés à tort du 1er décembre 2000 au 31 octobre 2010.
Par jugement du 22 mars 2011, qui n'a pas été attaqué, la Cour de justice de la
République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, a rejeté le
recours que l'assuré avait formé contre la décision du 14 décembre 2010.
A.b Le 23 novembre 2010, l'assuré a demandé au SPC de remettre son obligation
de restituer le montant de 170'841 fr. 75, en tout ou partie. Par décision du
1er juin 2011, confirmée sur opposition le 30 septembre 2011, le SPC a refusé
d'accorder la remise.

B.
R.________ a déféré la décision du 30 septembre 2011 à la Cour de justice, qui
l'a débouté par jugement du 8 mai 2012.

C.
R.________ interjette un recours en matière de droit public ainsi qu'un recours
constitutionnel subsidiaire contre ce jugement en concluant notamment à son
annulation, avec suite de frais et dépens.

Considérant en droit:

1.
Le recours en matière de droit public réalise les conditions de recevabilité
posées par les art. 82 à 85 LTF. Partant, en raison de son caractère
subsidiaire, le recours constitutionnel n'est pas recevable (art. 113 LTF).

2.
Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit,
tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique
le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être limité par les arguments de
la partie recourante ou par la motivation de l'autorité précédente. Le Tribunal
fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués, compte tenu de
l'exigence de motivation prévue à l'art. 42 al. 2 LTF, et ne peut aller au-delà
des conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). Il fonde son raisonnement sur
les faits retenus par la juridiction de première instance (art. 105 al. 1 LTF)
sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du
droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). La partie recourante qui
entend s'écarter des faits constatés doit expliquer de manière circonstanciée
en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées sinon un état de
fait divergent ne peut être pris en considération.

3.
La question de l'obligation du recourant de restituer la somme de 170'841 fr.
75 a fait l'objet du jugement du 22 mars 2011 qui est passé en force. Il
s'ensuit que toute l'argumentation que le recourant développe à propos du
bien-fondé de son obligation de restituer, singulièrement sur la question de la
péremption au sens de l'art. 25 al. 2 LGPA et de l'art. 28 de loi genevoise sur
les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC-GE; RSG J 4
25), est dépourvue de pertinence.

4.
4.1 Le litige porte uniquement sur la remise de l'obligation de restituer le
montant de 170'841 fr. 75. La solution du litige ressortit à l'art. 25 al. 1,
2e phrase LPGA ainsi qu'aux art. 4 et 5 OPGA pour les prestations
complémentaires fédérales, de même qu'à l'art. 24 al. 1, 2e phrase LPCC-GE pour
les prestations cantonales. Aussi bien pour les premières que les secondes, la
restitution ne peut être exigée lorsque l'intéressé était de bonne foi et
qu'elle le mettrait dans une situation difficile.

4.2 La bonne foi, en tant que condition de la remise, est exclue d'emblée
lorsque les faits qui conduisent à l'obligation de restituer (violation du
devoir d'annoncer ou de renseigner) sont imputables à un comportement dolosif
ou à une négligence grave. Selon la jurisprudence (arrêt P 42/92 consid. 5b,
cité par ULRICH MEYER, Die Rückerstattung von Sozialversicherungsleistungen,
RSJB 131/1995 p. 483), on peut attendre d'un assuré qu'il décèle des erreurs
manifestes et qu'il en fasse l'annonce à la caisse (arrêt 9C_189/2012 du 21
août 2012 consid. 4). En revanche, l'assuré peut invoquer sa bonne foi lorsque
l'acte ou l'omission fautifs ne constituent qu'une violation légère de
l'obligation d'annoncer ou de renseigner (ATF 112 V 97 consid. 2c p. 103 et les
références; arrêt 9C_474/2009 du 21 août 2009 consid. 2).
La jurisprudence distingue entre la bonne foi en tant que manque de conscience,
de la part de l'intéressé, d'agir contrairement au droit et la question de
savoir s'il peut invoquer la bonne foi dans les circonstances données ou s'il
aurait dû, en faisant preuve de l'attention que l'on pouvait exiger de lui,
reconnaître l'irrégularité juridique qui s'est produite. Alors que la présence
ou le défaut de conscience d'agir contrairement au droit relève d'une question
de fait, qui ne peut être examinée par le Tribunal fédéral que sous l'angle de
l'art. 105 al. 2 LTF (consid. 2 supra), l'examen de l'attention exigible
constitue une question de droit qui peut être revue librement, dans la mesure
où il s'agit d'examiner si l'intéressé peut invoquer sa bonne foi au vu des
circonstances de fait données (arrêt 9C_674/2012 du 15 janvier 2013 consid.
3.3, citant l'arrêt 8C_1/2007 du 11 mai 2007, in SVR 2007 EL n° 8 p. 19; ATF
122 V 221 consid. 3 p. 223).

4.3 Même si la qualification pénale joue un rôle important lorsque le
comportement à l'origine de l'éventualité assurée est une infraction réprimée
par le droit pénal (cf. par ex. en ce qui concerne les infractions au droit de
la circulation routière ATF 120 V 227 consid. 2d, 119 V 245 consid. 3a), le
juge des assurances sociales n'est lié par les constatations et l'appréciation
du juge pénal ni en ce qui concerne la désignation des prescriptions
enfreintes, ni quant à l'évaluation de la faute commise. Mais il ne s'écarte
des constatations de fait du juge pénal que si les faits établis au cours de
l'instruction pénale et leur qualification juridique ne sont pas convaincants,
ou s'ils se fondent sur des considérations spécifiques du droit pénal, qui ne
sont pas déterminantes en droit des assurances sociales (ATF 125 V 237 consid.
6a p. 242 et les références).

5.
5.1 En l'espèce, l'intimé a refusé d'accorder au recourant la remise de
l'obligation de restituer le montant de 170'841 fr. 75 au motif que la
condition de la bonne foi n'était pas remplie. Les premiers juges ont confirmé
le point de vue de l'intimé. Ils ont considéré que même si le recourant
s'estimait convaincu que les différentes assurances et services de
l'administration communiquaient entre eux, il ne pouvait cependant pas manquer
de constater que la rente qu'il percevait de la CNA n'apparaissait dans aucun
des plans de calculs du SPC. En cas de doute, le recourant aurait dû interroger
le SPC à ce sujet; son silence constituait une négligence grave.

5.2 Le recourant se prévaut d'une application arbitraire, au sens de l'art. 9
Cst., des art. 25 al. 2 LPGA, 30 OPC-AVS/AI, 24 et 28 LPCC-GE. Il soutient
qu'il n'avait pas déclaré sa rente de l'assurance-accidents au SPC, car il
pensait que la CNA avait intégré dans son calcul le montant des prestations
complémentaires qui lui étaient versées par le SPC. C'est d'ailleurs en raison
de sa bonne foi que le Ministère public de la République et canton de Genève
n'est pas entré en matière sur une plainte du Département de la solidarité et
de l'emploi de ce canton, par ordonnance du 21 mars 2011, de sorte que la
sécurité du droit commanderait au juge administratif de ne pas s'écarter du
jugement pénal (cf. ATF 123 II 97 consid. 3c/aa p. 104, 109 Ib 209 consid. 1 p.
204, 96 I 766 consid. 4 p. 774).
A cet égard, le recourant allègue qu'il avait en toute bonne foi, chaque année,
rempli ses déclarations fiscales en inscrivant les montants reçus par l'AI, le
SPC et la CNA. A son avis, il aurait suffi au SPC de demander une copie de ses
déclarations fiscales pour constater que la rente de la CNA n'était pas prise
en compte. Il estime qu'il ne doit pas supporter les conséquences des
dysfonctionnements internes du SPC, notamment quant à l'obligation de
réexaminer périodiquement les prestations, tous les quatre ans au moins,
laquelle n'a pas été respectée.

5.3 Dans sa demande de prestations complémentaires du 21 juillet 2000, le
recourant avait annoncé qu'il percevait une rente AI mensuelle de 2'300 fr. A
cette occasion, il s'était engagé à informer l'Office cantonal des personnes
âgées (OCPA, auquel le SPC a succédé) sans retard de tout changement de sa
situation personnelle, de ses revenus, de son patrimoine et de ses dépenses;
l'OCPA lui avait rappelé cette obligation lors de la notification des décisions
de prestations complémentaires du 27 novembre 2000 (lettre du 5 décembre 2000).
Dès lors, avec les premiers juges, on doit admettre que le manque de vigilance
du recourant, qui a omis d'annoncer à l'administration qu'une rente
d'invalidité de 45 % de la CNA lui avait été allouée subséquemment par décision
du 10 octobre 2001 (mensuellement 1'872 fr. en 2000), relève assurément de la
négligence grave, d'autant que ses revenus avaient à l'évidence augmenté depuis
l'octroi de cette prestation.
La négligence grave dont le recourant a fait preuve exclut sa bonne foi au sens
des art. 25 al. 1, 2e phrase LPGA et 24 al. 1, 2e phrase LPCC-GE,
indépendamment des considérations spécifiques de l'autorité pénale (cf.
ordonnance du Ministère public du 21 mars 2011) qui ne sont pas déterminantes
en droit des assurances sociales. Quant aux réexamens périodiques, leur
omission dans les délais prescrits (art. 30 OPC-AVS/AI) ne libérait pas pour
autant le recourant de son obligation d'annoncer tout changement dans sa
situation patrimoniale, ce qu'il n'a pas fait.

6.
Le recourant, qui succombe, supportera les frais de la procédure (art. 66 al. 1
LTF). Vu les circonstances du cas d'espèce, ceux-ci sont arrêtés à 3'000 fr.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable.

2.
Le recours en matière de droit public est rejeté.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la
République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 7 mars 2013
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Kernen

Le Greffier: Berthoud