Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 473/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
9C_473/2012

Arrêt du 9 novembre 2012
IIe Cour de droit social

Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux U. Meyer, Président, Kernen et Pfiffner Rauber.
Greffier: M. Berthoud.

Participants à la procédure
Office AI du canton de Neuchâtel, Espacité 4-5, 2300 La Chaux-de-Fonds,
recourant,

contre

M.________, représenté par Me Claire-Lise Oswald, avocate,
intimé.

Objet
Assurance-invalidité,

recours contre le jugement du Tribunal cantonal de la République et canton de
Neuchâtel, Cour de droit public, du 3 mai 2012.

Faits:

A.
M.________ est au bénéfice d'une rente entière de l'assurance-invalidité depuis
le 1er décembre 1993. Des rentes pour ses six enfants lui ont également été
versées.
Par décision du 30 septembre 2010, l'Office de l'assurance-invalidité du canton
de Neuchâtel (l'office AI) a réclamé à l'assuré la restitution de la somme de
53'268 fr., correspondant aux rentes perçues indûment du 1er octobre 2005 au 30
septembre 2010 pour l'enfant E.________, née en 1997 et décédée en 1999.

B.
M.________ a déféré cette décision au Tribunal administratif de la République
et canton de Neuchâtel (aujourd'hui: Tribunal cantonal, Cour de droit public)
en concluant à son annulation.
Par jugement du 3 mai 2012, la juridiction cantonale a admis le recours et
annulé la décision du 30 septembre 2010, au motif que la créance en
remboursement des rentes versées à tort du 1er octobre 2005 au 30 septembre
2010 pour l'enfant E.________ était périmée.

C.
L'office AI interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement
dont il demande l'annulation, avec suite de frais.
L'intimé conclut à l'irrecevabilité du recours ou à son rejet pour le cas où le
Tribunal fédéral entrerait en matière, avec suite de frais et dépens. L'Office
fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
L'office recourant ne remet pas en question le bien-fondé du jugement attaqué,
dans la mesure où il est constaté que feue E.________ ne figurait plus au
nombre des enfants à charge de l'intimé sur les questionnaires remplis en 2002
et 2007. En outre, le recourant ne conteste pas non plus que son droit de
demander la restitution des rentes versées à tort jusqu'en septembre 2009 pour
E.________ était ainsi périmé. En revanche, devant le Tribunal fédéral, le
recourant expose les motifs pour lesquels il s'estimait fondé à demander pour
le moins que l'intimé soit condamné à lui restituer les prestations indûment
versées durant les douze mois qui ont précédé la décision du 30 septembre 2010,
soit une somme de 10'944 fr. (12 x 912 fr.). Dès lors que l'argumentation
juridique développée dans le mémoire de recours ne s'étend pas à la question de
la péremption du droit de l'administration de réclamer le remboursement de
rentes versées antérieurement à cette période de douze mois, on doit
interpréter les conclusions du recourant en ce sens qu'il conclut uniquement au
paiement de la somme de 10'944 fr., ce qui constitue ainsi l'objet du litige.
Dans sa réponse, l'intimé précise que le recourant a recommencé à lui verser à
tort une rente pour E.________, par décision du 5 juillet 2011, ce qui l'a
conduit à rendre une nouvelle décision de restitution le 11 juin 2012. Ces deux
décisions ne constituent toutefois pas l'objet de la contestation, si bien
qu'il n'y a pas lieu d'en examiner le mérite ni d'en tenir compte pour trancher
le présent litige issu de la décision de restitution du 30 septembre 2010.

2.
Les premiers juges ont constaté que l'intimé n'avait pas expressément fait état
du décès de sa fille, en particulier à réception d'une décision de l'office
recourant du 9 février 2000 qui détaillait le montant de la rente principale et
des rentes pour enfants, au nombre desquelles figurait la rente pour l'enfant
E.________ décédée en 1999. Par ailleurs, les juges cantonaux ont constaté que
dans les questionnaires qu'il avait remplis dans le cadre des révisions des 24
septembre 2002 et 5 février 2007 (qui étaient non seulement destinés à obtenir
des renseignements récents quant à l'état de santé et aux éventuels revenus,
mais à également à mettre les données personnelles à jour), l'intimé n'avait
plus fait mention de sa fille E.________ comme enfant à charge.
Dans ces conditions, la juridiction cantonale a admis que l'office AI aurait
pu, s'il avait fait preuve de l'attention qui pouvait raisonnablement être
exigée de lui, être complètement et précisément informé du décès de l'enfant
E.________ lors de la révision d'office du 24 septembre 2002, voire au plus
tard lors de celle du 5 février 2007. Le tribunal en a déduit que le délai de
péremption d'un an pour exiger la restitution des prestations était venu à
échéance en novembre 2003, voire au plus tard en février 2008. Lorsque la
décision de restitution du 30 septembre 2010 a été rendue, la créance en
remboursement des rentes versées à tort du 1er octobre 2005 au 30 septembre
2010 pour l'enfant E.________ était ainsi périmée.

3.
Selon l'art. 25 LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées
(al. 1 première phrase). Le droit de demander la restitution s'éteint un an
après le moment où l'institution d'assurance a eu connaissance du fait, mais au
plus tard cinq ans après le versement de la prestation (al. 2 première phrase).
Si, au moment où l'institution d'assurance a eu connaissance du fait, la
prestation n'a pas encore été versée, le délai d'une année de péremption selon
l'art. 25 al. 2 première phrase LPGA ne peut commencer à courir qu'avec le
versement effectif de la prestation, la créance en restitution de rentes
mensuelles versées à tort n'étant pas sujette à péremption aussi longtemps que
la prestation périodique n'a pas encore été versée (arrêt 9C_363/2010 du 8
novembre 2011 consid. 2.1, in SVR 2012 IV n° 33 p. 132 et les références
citées).

4.
L'office recourant se plaint d'une violation du droit fédéral, singulièrement
d'une application de l'art. 25 al. 2, première phrase, LPGA, contraire à la
jurisprudence (cf. arrêt 9C_363/2010 précité). A son avis, le droit de demander
la restitution des rentes ne saurait être prescrit (recte: périmé) au moment
même où il les a payées indûment. A défaut, en suivant la juridiction
cantonale, la péremption surviendrait immédiatement pour le cas où
l'administration verserait ses prestations par erreur, alors qu'elle en
connaissait le caractère indu.
De son côté, l'intimé estime que l'arrêt 9C_363/2010 ne peut être appliqué dans
le cas d'espèce, car la demande de restitution (du 30 septembre 2010) constitue
un abus de droit manifeste (art. 2 al. 2 CC). En effet, le versement des rentes
pour enfant résulte d'une négligence grave de l'office recourant, lequel a même
repris le paiement de ces prestations postérieurement à la décision du 30
septembre 2010.

5.
On ne saurait partager le raisonnement du Tribunal cantonal, car on se trouve
dans l'éventualité expressément envisagée par l'arrêt 9C_363/2010. En effet, le
délai de péremption d'une année selon l'art. 25 al. 2 première phrase LPGA n'a
pu commencer à courir qu'avec le versement effectif de chacune des rentes pour
enfant servies du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2010, si bien que le droit
du recourant de demander la restitution de ces rentes n'était pas encore périmé
au jour où il l'a exercé par voie de décision (le 30 septembre 2010). Quant à
l'existence d'un abus de droit de la part de l'autorité, elle ne saurait être
admise pour le simple fait que cette dernière a tenté d'obtenir la restitution
de prestations qu'elle a versées par erreur, à moins de vider l'art. 25 LPGA de
son sens.
Dès lors que les critiques du recourant relatives à la restitution des rentes
pour E.________ versées du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2010 sont bien
fondées, le jugement attaqué doit être réformé dans la mesure où il admet à
tort que le droit du recourant de réclamer la restitution de ces rentes (10'944
fr.) était également périmé.

6.
L'intimé, qui succombe entièrement, supportera les frais de la procédure
fédérale (art. 66 al. 1 LTF) et ne saurait, pour le même motif, prétendre des
dépens (art. 68 al. 1 LTF).
Vu l'issue du litige, il sied d'annuler les ch. 2, 3 et 4 du dispositif du
jugement attaqué relatifs aux frais et dépens, puis d'inviter les premiers
juges à statuer à nouveau sur ceux-ci.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis. Le jugement du Tribunal cantonal de la République et
canton de Neuchâtel, Cour de droit public, du 3 mai 2012, est réformé en ce
sens que l'intimé est condamné à restituer au recourant la somme de 10'944 fr.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de l'intimé.

3.
La cause est renvoyée au Tribunal cantonal de la République et canton de
Neuchâtel, Cour de droit public, afin qu'il statue à nouveau sur les frais et
dépens de l'instance cantonale, compte tenu de l'issue du litige.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal de la
République et canton de Neuchâtel, Cour de droit public, et à l'Office fédéral
des assurances sociales.

Lucerne, le 9 novembre 2012
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Meyer

Le Greffier: Berthoud