Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 425/2012
Zurück zum Index II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2012
Retour à l'indice II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2012



Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
9C_425/2012

Arrêt du 20 décembre 2012
IIe Cour de droit social

Composition
MM. les Juges fédéraux U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffier: M. Bouverat.

Participants à la procédure
B.________,
représenté par Me Jean-Louis Duc, avocat,
recourant,

contre

1. Santésuisse, Römerstrasse 20, 4502 Soleure,
2. Pharmasuisse, Stationsstrasse 12, 3097 Liebefeld,
toutes les deux représentées par Me Jean-Pierre Gross, avocat,
intimées.

Objet
Assurance-maladie,

recours contre le jugement du Tribunal arbitral des assurances du canton de
Vaud du 18 avril 2012.

Faits:

A.
A.a En mars 2009, Pharmasuisse, Société Suisse des Pharmaciens, et Santésuisse,
Les assureurs-maladie suisses, ont conclu la Convention tarifaire RPB IV,
laquelle porte sur la rémunération des prestations des pharmaciens par les
assureurs dans le domaine de la LAMal; aux termes de celle-ci les parties
entendent poursuivre le développement du système de rémunération basée sur les
prestations (ci-après: la Convention; art. 1 al 1, art. 2 ch. 1). Tout
pharmacien au sens de la LAMal peut bénéficier du système prévu par cet accord
à condition d'adhérer à ce dernier; à cet effet, il s'acquitte d'une taxe
d'adhésion et d'une contribution annuelle dont les montants varient selon qu'il
est ou non membre de Pharmasuisse (art. 1 s. de l'annexe 6 à la Convention).
A.b B.________, pharmacien non-membre de Pharmasuisse, exploite une pharmacie à
Y.________ (Pharmacie X.________). Le 11 octobre 2010, il a fait savoir à
Santésuisse qu'il adhérait à la Convention mais réservait ses droits s'agissant
de la taxe d'adhésion et de la contribution annuelle aux frais prévues par
celle-ci, qu'il considérait comme trop élevées. Par ordonnance du 4 janvier
2011, le Juge de paix du district de Z.________ l'a autorisé à consigner à
titre d'exécution les montants en question.

B.
Le 22 septembre 2011, B.________ a ouvert action contre Pharmasuisse et
Santésuisse devant le Tribunal arbitral des assurances du canton de Vaud. Il
concluait à ce que cette autorité fixe la taxe d'adhésion et la contribution
annuelle prévues par la Convention, pour les non-membres de Pharmasuisse, à un
montant suffisant pour couvrir les frais de conclusion et de fonctionnement de
celle-ci tout en garantissant l'égalité de traitement entre les membres de
Pharmasuisse et les autres pharmaciens. Par jugement du 18 avril 2012, le
président du tribunal arbitral a déclaré l'action irrecevable.

C.
B.________ interjette un recours en matière de droit public et un recours
constitutionnel subsidiaire contre ce jugement dont il demande l'annulation. Il
conclut au renvoi de la cause au Tribunal arbitral des assurances du canton de
Vaud pour que celui-ci entre en matière sur sa demande et, après avoir constaté
que les taxes d'adhésion, de conclusion et de fonctionnement prévues par la
Convention sont abusives, les fixe à nouveau.
Pharmasuisse et Santésuisse concluent au rejet du recours tandis que l'Office
fédéral de la santé publique a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
La décision attaquée ayant été rendue dans une cause de droit public (art. 82
let. a LTF) et dans une matière - le droit fédéral des assurances sociales - où
aucune des clauses d'exception de l'art. 83 LTF ne s'applique, la voie du
recours en matière de droit public est ouverte. Partant, il n'y a pas lieu
d'entrer en matière sur le recours constitutionnel subsidiaire interjeté par le
recourant.

2.
Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit,
tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique
le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être limité par les arguments de
la partie recourante ou par la motivation de l'autorité précédente.

3.
Est litigieuse la compétence matérielle du Tribunal arbitral des assurances du
canton de Vaud pour examiner les prétentions élevées devant lui par le
recourant à l'encontre des intimées.

4.
4.1 Considérant que le litige ne concernait pas directement la fourniture de
prestations médicales par le recourant et n'avait dès lors pas pour objet les
positions respectives du pharmacien et de l'assureur-maladie, le président du
Tribunal arbitral des assurances a dénié la compétence matérielle de la
juridiction arbitrale cantonale au motif que les conditions d'application de
l'art. 89 LAMal fixées par la jurisprudence n'étaient pas remplies.

4.2 Le recourant conteste ce point de vue, faisant valoir en substance que si
la procédure arbitrale prévue par l'art. 89 LAMal porte le plus souvent sur des
litiges relatifs à l'application de tarifs médicaux, elle s'applique de manière
générale à tous ceux, fondés sur la LAMal, qui opposent - comme en l'espèce -
un assureur ou une fédération d'assureurs à des fournisseurs de prestations.

5.
Selon l'art. 89 al. 1 LAMal, les litiges entre assureurs et fournisseurs de
prestations sont jugés par un tribunal arbitral. La notion de litige
susceptible d'être soumis au tribunal arbitral doit être entendue au sens
large. Il est nécessaire, cependant, que soient en cause des rapports
juridiques qui résultent de la LAMal ou qui ont été établis en vertu de cette
loi. Il doit par ailleurs s'agir d'un litige entre un assureur-maladie et la
personne appelée à fournir des prestations, ce qui se détermine en fonction des
parties qui s'opposent en réalité. En d'autres termes, le litige doit concerner
la position particulière de l'assureur ou du fournisseur de prestations dans le
cadre de la LAMal (ATF 132 V 303 consid. 4.1 et les arrêts cités; 131 V 191
consid. 2 p. 192). La compétence du tribunal arbitral doit être déterminée au
regard des prétentions que fait valoir la partie demanderesse et de leur
fondement (arrêt K 5/03 du 15 avril 2004 consid. 2.2, in RAMA 2004 n° KV 285 p.
238). Une fédération d'assureurs peut être partie à une procédure devant le
tribunal arbitral prévu à l'art. 89 LAMal (cf. ATF 125 V 297).

6.
6.1 Le litige porté par le recourant devant le Tribunal arbitral du canton de
Vaud concerne l'application de certaines dispositions de l'accord passé en mars
2009 entre Santésuisse et Pharmasuisse, lequel constitue une convention
tarifaire au sens de l'art. 46 LAMal (art. 2 ch. 1 de la Convention).
Le litige touche plus précisément aux montants de la taxe d'adhésion et de la
contribution aux frais (art. 2 al. 1 let. a et b de l'annexe 6 à la
Convention), dont le recourant en tant que pharmacien non-membre de
Pharmasuisse doit s'acquitter (art. 5 al. 1 let. b de la Convention) auprès de
Santésuisse (art. 3 de l'annexe 6 à la Convention), selon la procédure
d'adhésion prévue par les parties, pour pouvoir entrer dans le champ
d'application de la Convention (art. 4 let. c de la Convention) et, partant,
bénéficier du système tarifaire établi par celle-ci.

6.2 Aux termes de l'art. 43 al. 1 et 2 LAmal, les fournisseurs de prestations
établissent leurs factures sur la base de tarifs ou de prix. Le tarif est une
base de calcul de la rémunération qui peut se fonder sur différents éléments
(let. a à d). Les tarifs et les prix sont fixés par convention entre les
assureurs et les fournisseurs de prestations (convention tarifaire) ou, dans
les cas prévus par la loi, par l'autorité compétente (art. 46 al. 2 in initio
LAMal). Les parties à une convention tarifaire sont un ou plusieurs
fournisseurs de prestations, ou fédérations de fournisseurs de prestations,
d'une part, et un ou plusieurs assureurs ou fédérations d'assureurs, d'autre
part (art 24 al. 1 LAMal). Si la partie à une convention est une fédération, la
convention ne lie les membres de ladite fédération que s'ils ont adhéré à la
convention. Les non-membres qui exercent leur activité dans le rayon
conventionnel peuvent également adhérer à la convention. Celle-ci peut prévoir
qu'ils doivent verser une contribution équitable aux frais causés par sa
conclusion et son exécution. Elle règle les modalités des déclarations
d'adhésion ou de retrait, et leur publication (art. 46 al. 2 LAMal).

6.3 Le recourant est un fournisseur de prestations admis à pratiquer à la
charge de l'assurance obligatoire des soins (art. 35 al. 2 let. b et 37 LAMal);
il n'est pas membre de la fédération suisse des fournisseurs de prestations au
nombre desquels il appartient (art. 46 al. 2 LAMal). En tant qu'il juge
excessif le montant de la taxe d'adhésion et de la contribution aux frais dont
il doit s'acquitter auprès de Santésuisse en tant que non-membre de
Pharmasuisse, il conteste les modalités concrètes de la procédure d'adhésion
mise en place par les parties à la Convention pour assurer, selon la volonté du
législateur fédéral, aux fournisseurs de prestations qui ne sont pas membres de
la fédération partie à la convention de pouvoir bénéficier du système
conventionnel. Sa prétention à ne s'acquitter auprès de Santésuisse que d'une
taxe d'adhésion et d'une contribution aux frais d'un moindre montant est fondée
sur la notion de contribution équitable aux frais causés par la conclusion et
l'exécution de la convention prévue par l'art. 46 al. 2 LAMal et donc
directement sur la loi. En outre, l'adhésion à la Convention permet au
fournisseur de prestations de bénéficier du système conventionnel de
rémunération et particulièrement d'être rémunéré directement par les
assureurs-maladies pour les prestations qu'il fournit dans le cadre de la LAMal
(système du tiers payant prévu par l'art. 42 al. 2 LAMal; cf. art. 2 ch. 1
Convention). Le paiement des contributions que doit verser un pharmacien pour
adhérer à la Convention n'est ainsi rien d'autre qu'une condition préalable à
la mise en oeuvre d'un tarif conventionnel par un fournisseur de prestations
donné. Compte tenu de l'importance que revêtent les conventions tarifaires dans
le système de la LAMal - les prix et tarifs sur la base desquels les
fournisseurs de prestations établissent leurs factures sont, sauf dans certains
cas prévus par la loi, fixés dans ce type d'accord (art. 43 al. 4 LAMal) -, le
litige opposant le recourant aux intimées touche bien aux positions
particulières de l'assureur ou du fournisseur de prestations dans le cadre de
la LAMal et ressortit dès lors à la compétence matérielle du tribunal arbitral
institué par l'art. 89 LAMal.

6.4 Il suit de ce qui précède que le recours est bien fondé. La cause doit être
renvoyée au tribunal arbitral afin qu'il détermine si, dans le cas d'espèce,
les contributions prévues à l'art. 2 ch. 1 de l'annexe 6 à la Convention
revêtent un caractère équitable au sens de l'art. 46 al. 2 LAMal. On précisera
que, dans la mesure où il en va de l'application d'une notion juridique
indéterminée, cette autorité dispose d'une grande latitude de jugement. Etant
donné que le Tribunal arbitral devra trancher le litige sur le fond, la
compétence de son président pour se prononcer seul sur la recevabilité de la
demande déposée par le recourant (cf. supra let. B) - qui paraît douteuse au vu
de la jurisprudence (ATF 135 V 124 consid. 3.2 p. 128 ss) - peut rester
indécise.

7.
Compte tenu de l'issue du litige, les intimées, qui succombent, supporteront
les frais de justice (art. 66 al. 1 LTF) et verseront au recourant une
indemnité de dépens (art. 68 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable.

2.
Le recours en matière de droit public est admis. Le jugement du Tribunal
arbitral des assurances du canton de Vaud, du 18 avril 2012, est annulé. La
cause lui est renvoyée pour nouveau jugement au sens des considérants.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge des intimées à
raison de 250 fr. chacune.

4.
Les intimées verseront au recourant une indemnité de 2'800 fr. à titre de
dépens à raison de 1'400 fr. chacune.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal arbitral des
assurances et à l'Office fédéral de la santé publique.

Lucerne, le 20 décembre 2012
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Meyer

Le Greffier: Bouverat