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II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 133/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
9C_133/2012

Arrêt du 29 août 2012
IIe Cour de droit social

Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux U. Meyer, Président, Borella et Pfiffner Rauber.
Greffière: Mme Moser-Szeless.

Participants à la procédure
R.________,
représenté par Me David Ecoffey, avocat,
recourant,

contre

Office AI du canton de Fribourg,
Route du Mont-Carmel 5, 1762 Givisiez,
intimé.

Objet
Assurance-invalidité (rente d'invalidité),

recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton de Fribourg, Cour des
assurances sociales, du 22 décembre 2011.

Faits:

A.
R.________ a travaillé dès 1988 dans le domaine de la restauration, puis comme
employé dans une boucherie et une laiterie. A partir de septembre 2002, il a
exploité à titre d'indépendant un commerce alimentaire à l'enseigne
"X.________" à Y.________.
A la suite d'un accident de la circulation (survenu le 11 décembre 2003),
R.________ a souffert de maux de tête et de cervicalgies. Incapable de
travailler jusqu'au 24 mars 2004, il a repris son activité à mi-temps à partir
de cette date. Le 15 juin 2005, il a présenté une demande de prestations de
l'assurance-invalidité. L'Office de l'assurance-invalidité du canton de
Fribourg (ci-après: l'office AI) a pris des renseignements économiques et
médicaux, notamment auprès du docteur U.________, spécialiste FMH en médecine
interne. Il a également soumis l'assuré à un examen interdisciplinaire au
Centre d'observation médicale de l'assurance-invalidité (COMAI). Dans leur
rapport du 16 novembre 2007, les docteurs G.________, spécialiste FMH en
rhumatologie, médecine interne et médecine du sport, et B.________, spécialiste
FMH en psychiatrie et psychothérapie, ont diagnostiqué, avec répercussion sur
la capacité de travail, des troubles statiques et dégénératifs modérés du
rachis cervical, ainsi que, sans répercussion sur la capacité de travail, des
cervico-brachialgies et douleurs ubiquitaires de la musculature et du squelette
dans un contexte de syndrome douloureux, des séquelles de maladie de
Scheuermann, un trouble somatoforme indifférencié et une majoration de
symptômes physiques pour des raisons psychologiques. Ils ont conclu que
l'assuré avait conservé une capacité de travail et un rendement à 100 % dans
son activité professionnelle. Après avoir requis l'avis de son Service médical
régional et du docteur K.________, spécialiste FMH en psychiatrie et
psychothérapie, consulté par l'assuré en février 2008, l'office AI a rejeté la
demande de prestations, par décision du 15 avril 2009.

B.
R.________ a déféré cette décision au Tribunal cantonal du canton de Fribourg,
Cour des assurances sociales, en produisant des nouveaux rapports et
certificats médicaux des docteurs U.________ et K.________. Par jugement du 22
décembre 2011, le Tribunal cantonal a rejeté son recours.

C.
R.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement,
dont il demande l'annulation. Sous suite de frais et dépens, il conclut
principalement à l'octroi d'une rente entière d'invalidité "mais au minimum une
demi-rente" et, subsidiairement, au renvoi de la cause à l'office AI pour qu'il
"réactualise le dossier médical" et mette en oeuvre une nouvelle expertise
psychiatrique, voire un stage d'évaluation professionnelle. A titre plus
subsidiaire encore, il conclut au renvoi de la cause à la Cour des assurances
sociales du Tribunal cantonal fribourgeois pour qu'elle statue au sens des
considérants et des conclusions énoncées ci-avant.
Le Tribunal fédéral a renoncé à procéder à un échange d'écritures.

Considérant en droit:

1.
Le recours en matière de droit public (art. 82 ss LTF) peut être formé pour
violation du droit selon l'art. 95 sv. LTF. Le Tribunal fédéral statue en
principe sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al.
1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Cette disposition
lui donne la faculté de rectifier ou compléter d'office l'état de fait de
l'arrêt attaqué dans la mesure où des lacunes ou erreurs dans celui-ci lui
apparaîtraient d'emblée comme manifestes. Quant au recourant, il ne peut
critiquer la constatation de faits importants pour le jugement de la cause que
si ceux-ci ont été constatés en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou
de manière manifestement inexacte (art. 97 al. 1 LTF).

2.
Le présent litige porte sur le droit du recourant à une rente d'invalidité. Le
jugement entrepris expose correctement les règles légales et jurisprudentielles
applicables à la solution du litige, en particulier la jurisprudence sur les
troubles somatoformes douloureux et le principe de la libre appréciation des
preuves. Il suffit donc d'y renvoyer.

3.
Se plaignant d'arbitraire dans l'appréciation des preuves, le recourant
reproche à la juridiction cantonale de s'être fondée exclusivement sur le
rapport du COMAI du 16 novembre 2007 pour nier son droit à une rente
d'invalidité et la nécessité de mesures d'instruction complémentaires
(expertise psychiatrique et stage d'évaluation professionnelle). Il soutient
que l'autorité cantonale de recours n'était pas en droit de suivre l'expertise
du COMAI, parce qu'elle comprenait une analyse des critères jurisprudentiels
relatifs au caractère invalidant du trouble somatoforme douloureux effectuée
sur la base d'éléments erronés ou qui avaient évolué depuis. La juridiction
cantonale aurait par ailleurs ignoré les diagnostics mis en évidence par les
docteurs K.________ et U.________ et écarté arbitrairement leurs avis en
invoquant leur position de médecins traitants.

3.1 Le Tribunal fédéral n'examine le résultat de l'appréciation des preuves à
laquelle a procédé l'autorité cantonale de recours que sous l'angle restreint
de l'arbitraire. L'appréciation des preuves est arbitraire lorsque l'autorité
ne prend pas en compte, sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à
modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa
portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en
tire des constatations insoutenables (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9).

3.2 Avec son argumentation, le recourant ne parvient pas à établir le caractère
arbitraire de l'appréciation des preuves à laquelle a procédé la juridiction
cantonale, qui, à l'issue d'un examen des pièces médicales du dossier et en se
fondant sur les conclusions de l'expertise du COMAI a constaté que l'assuré
souffrait essentiellement d'un trouble somatoforme douloureux sans incidence
sur sa capacité de travail et de cervicalgies chroniques qui induisaient
quelques limitations fonctionnelles, mais ne l'empêchaient pas d'exercer son
ancienne activité (qui respectait ces limitations).
3.2.1 Les critiques émises par le recourant à l'encontre de l'appréciation
psychiatrique de la doctoresse B.________ sont tout d'abord mal fondées. Le
reproche relatif à la durée trop brève de l'examen psychiatrique (une heure)
n'est pas pertinent. La durée de l'examen - qui n'est pas en soi un critère de
la valeur probante d'un rapport médical -, ne saurait en effet remettre en
question la valeur du travail de l'experte, dont le rôle consistait notamment à
se prononcer sur l'état de santé psychique de l'assuré dans un délai
relativement bref (cf. arrêt 9C_443/2008 du 28 avril 2009 consid. 4.4.2). Elle
ne peut donc être comparée à la durée des consultations (mentionnées par le
recourant) chez les docteurs L.________ et M.________ du Service psycho-social
Z.________, auprès duquel l'assuré bénéficiait d'un suivi psychiatrique
régulier.

En ce qui concerne ensuite le prétendu caractère erroné de l'analyse de la
psychiatre du COMAI, il ne peut être déduit du fait invoqué par le recourant à
cet égard que l'experte a mentionné, en relation avec le critère
jurisprudentiel de "la perte d'intégration sociale secondaire aux douleurs dans
tous les domaines de la vie", qu'il continuait son activité professionnelle
alors qu'il ne travaillait plus en novembre 2007 et ce depuis le mois d'avril
précédent. On remarquera que la doctoresse B.________ a interrogé le recourant
sur sa situation professionnelle lors de leur entretien (le 15 mai 2007), mais
n'a apparemment reçu que des réponses évasives ("De plus, il est très difficile
de lui faire préciser sa situation professionnelle et ses horaires de travail",
expertise de psychiatrie, p. 12), alors qu'il aurait été tenu de lui indiquer,
le cas échéant, la cessation de son activité lucrative. Quoi qu'il en soit, le
critère de la perte d'intégration sociale dans toutes les manifestations de la
vie ne correspond pas à l'absence de l'exercice d'une activité lucrative ou à
un échec dans la tentative d'une réinsertion professionnelle, comme semble
l'avoir compris le recourant. Le fait qu'il aurait cessé son activité
professionnelle depuis avril 2007 et bénéficié depuis lors de l'assistance
sociale ne conduit pas à admettre la réalisation du critère en cause. Il ne
ressort en effet aucunement de l'anamnèse ou des données subjectives de
l'assuré (expertise de psychiatrie, p. 2 à 5) que le recourant aurait subi un
retrait social marqué; il indique, par exemple, aimer sortir de chez lui pour
rencontrer des gens et discuter. Ce critère n'est pas non plus établi, quoi
qu'en dise le recourant, par l'appréciation du docteur K.________ qui a fait
état de difficultés relationnelles avec repli social persistant (rapport du 27
octobre 2009). Le médecin n'a pas motivé ces constatations plus avant, ni
retenu (voire discuté) le diagnostic de syndrome douloureux somatoforme au
regard duquel la présence du critère en cause doit être examinée (la
"symptomatologie douloureuse et anxieuse consécutive à un accident de
circulation et apparue avec un temps de latence" [rapport du 24 mars 2009] ne
correspondant pas à ce diagnostic). En tout état de cause, ce critère ne
suffirait pas à lui seul à admettre le caractère invalidant du trouble
somatoforme douloureux diagnostiqué par les médecins du COMAI.
3.2.2 C'est en vain, ensuite, que le recourant se réfère aux avis de son
psychiatre traitant pour invoquer l'évolution de sa maladie entre la date de
l'expertise du COMAI et le prononcé de la décision administrative.
Contrairement à ce qu'il affirme, la juridiction cantonale n'a pas ignoré les
diagnostics posés par le docteur K.________ (et repris par le docteur
U.________), mais exposé de manière convaincante pour quels motifs elle a
considéré ne pas pouvoir suivre les conclusions du psychiatre qui ne s'était
pas prononcé sur le diagnostic de trouble somatoforme douloureux, ni n'avait
motivé de façon suffisante l'incapacité de travail retenue. Elle ne s'est pas
non plus limitée à invoquer la position de médecin traitant du docteur
K.________, mais a apprécié de manière globale le contenu et la valeur probante
de ses rapports.
En ce qui concerne, en particulier, les diagnostics posés par le psychiatre
traitant, on constate que celui de trouble de la personnalité décompensé avait
été évoqué par la doctoresse B.________, mais pas retenu puisque les critères
en faisaient défaut. Postérieurement à l'expertise du COMAI, le docteur
K.________ a certes diagnostiqué une modification acquise de la personnalité,
d'allure post-traumatique, mais il n'a cependant pas motivé en quoi les
critères en étaient réunis et l'évaluation de sa consoeur dépassée. Par
ailleurs, faute de précision et motivation suffisantes, les avis du psychiatre
traitant ne permettent pas de retenir, comme le voudrait le recourant, que les
diagnostics posés ne seraient pas une manifestation du trouble somatoforme
douloureux, qui s'accompagne souvent d'une altération du comportement
interpersonnel (Classification internationale des maladies et des problèmes de
santé connexes, 10e édition, OMS, [CIM-10] ad F45.0 et F45.1) ou revêtent, en
tant que comorbidités psychiatriques, une sévérité et une gravité suffisantes
au sens de la jurisprudence sur les troubles somatoformes douloureux (cf. ATF
130 V 354).

3.3 Il résulte de ce qui précède que la juridiction cantonale pouvait, sans
tomber dans l'arbitraire, renoncer à ordonner une expertise médicale ou
d'autres mesures d'instructions, qui ne se révélaient pas nécessaires au regard
des pièces au dossier, et choisir de s'en tenir à l'évaluation du COMAI plutôt
qu'à celle du psychiatre traitant.
Le recours est, en conséquence, mal fondé.

4.
Vu l'issue de la procédure, le recourant supportera les frais judiciaires (art.
66 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de
Fribourg, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances
sociales.

Lucerne, le 29 août 2012
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Meyer

La Greffière: Moser-Szeless