Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.77/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
6B_77/2012

Arrêt du 18 juin 2012
Cour de droit pénal

Composition
MM. et Mme les Juges Mathys, Président,
Jacquemoud-Rossari et Denys.
Greffière: Mme Kistler Vianin.

Participants à la procédure
X.________,
représenté par Me Vincent Kleiner, avocat,
recourant,

contre

Parquet général du canton de Berne, Maulbeerstrasse 10, 3011 Berne,
intimé.

Objet
Fixation de la peine (acte d'ordre sexuel avec un enfant), mesure thérapeutique
institutionnelle dans un établissement fermé,

recours contre le jugement de la Cour suprême du canton de Berne, Section
pénale, 2ème Chambre pénale, du 12 octobre 2011.

Faits:

A.
Par jugement du 9 décembre 2010, l'ancien Tribunal d'Arrondissement I du canton
de Berne a condamné X.________, pour actes d'ordre sexuel avec un enfant (art.
187 CP), à une peine privative de liberté de douze mois, sous déduction de la
détention préventive. Il a ordonné la suspension de cette peine au profit d'une
mesure thérapeutique institutionnelle dans un établissement fermé (art. 59 al.
3 CP).

B.
Statuant le 12 octobre 2011, la 2e Chambre pénale de la Cour suprême du canton
de Berne a rejeté les appels formés par X.________ et le Ministère public
bernois.

Pour l'essentiel, elle a retenu les faits suivants :
X.________ se trouvait en exécution de peine dans les établissements de St-Jean
en raison de la commission d'infractions semblables à celles qui font l'objet
de la présente procédure.

Le 22 août 2009, dans le courant de l'après-midi, vêtu uniquement de son short
de bain, il s'est rendu dans la zone de pêche se trouvant au bord du canal de
la Thielle, zone dans laquelle il était autorisé à se rendre, car il s'adonnait
à la pêche à la ligne. Après avoir traversé à la nage le canal de la Thielle et
longé à pied la rive, il a rejoint la plage de Saint-Joux à La Neuveville.

Il s'est approché d'un groupe de quatre fillettes et leur a proposé de jouer
avec elles. Profitant des absences momentanées des autres fillettes,
X.________, qui avait réussi à acquérir la confiance d'A.________, l'a touchée
au sexe, près de la fente et à même la peau. En outre, il a sorti son sexe de
son short de bain à deux reprises pour se gratter, en présence d'A.________. A
une reprise, il a pris la main de la victime et lui a demandé de toucher son
sexe, ce qu'A.________ a refusé de faire, tout en s'excusant et en précisant
qu'elle n'en avait pas le droit; X.________ n'a pas insisté. Il a en outre
exercé des mouvements de va-et-vient sur son sexe sorti du short de bain,
devant la victime. Enfin, il lui a demandé de lui montrer ce qu'elle avait sous
sa robe, ce qu'elle a refusé.

C.
Contre ce dernier jugement, X.________ dépose un recours en matière pénale
devant le Tribunal fédéral. Il conclut, principalement, à la réforme du
jugement attaqué en ce sens qu'il est condamné à une peine privative de liberté
de six mois et, subsidiairement, à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi
de la cause à l'autorité précédente. En outre, il sollicite l'assistance
judiciaire.

Invités à se déterminer sur le recours, le Ministère public et la Cour suprême
du canton de Berne concluent à son rejet.

A la suite de la communication des prises de positions susmentionnées, le
recourant dépose des observations.

Considérant en droit:

1.
Le recourant s'en prend à la mesure de la peine (art. 47 CP). Il conteste que
les antécédents, qui sont les seuls éléments aggravants, permettent d'aggraver
de moitié la peine hypothétique, faisant passer celle-ci de six à douze mois.

1.1 L'art. 47 CP prévoit que le juge fixe la peine d'après la culpabilité de
l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle
de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La
culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger
du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les
motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci
aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation
personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

1.2 La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les
éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir
notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son
mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de
la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces
composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur
lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la
réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations
familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la
vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au
cours de la procédure pénale (ATF 134 IV 17 consid. 2.1 p. 19 s.; 129 IV 6
consid. 6.1).
1.2.1 En cas de diminution de la responsabilité pénale, le juge doit, d'abord,
décider sur la base des constatations de fait de l'expertise dans quelle mesure
la responsabilité pénale de l'auteur doit être restreinte sur le plan juridique
et comment cette diminution de la responsabilité se répercute sur
l'appréciation de la faute. La faute globale doit être qualifiée et désignée
expressément dans le jugement (art. 50 CP). Ensuite, le juge doit déterminer la
peine (hypothétique), qui correspond à cette faute. La peine ainsi fixée peut
enfin être modifiée en raison de facteurs liés à l'auteur (Täterkomponente) (
ATF 136 IV 55 consid. 5.7).
1.2.2 Bien que la récidive ne constitue plus un motif d'aggravation obligatoire
de la peine (art. 67 aCP), les antécédents continuent de jouer un rôle très
important dans la fixation de celle-ci (WIPRÄCHTIGER, Strafrecht I, Basler
Kommentar, 2007, n. 100 ad art. 47). En général, la culpabilité de l'auteur est
amplifiée du fait qu'il n'a pas tenu compte de l'avertissement constitué par la
précédente condamnation, et sa rechute témoigne d'une énergie criminelle accrue
(cf. QUELOZ/HUMBERT, Code pénal I, Commentaire romand, n. 55 ad art. 47; contra
: STRATENWERTH, Schweizerisches Strafrecht, Allgemeiner Teil II : Strafen und
Massnahmen, 2e éd., 2006, § 6 n. 44 ; TRECHSEL ET AL., Schweizerisches
Strafgesetzbuch, Praxiskommentar, n. 31 ad art. 47). Une série d'infractions
semblables pèse plus lourd que des actes de nature différente. En outre, les
condamnations passées perdent de leur importance avec l'écoulement du temps.
Les condamnations qui ont été éliminées du casier judiciaire ne peuvent plus
être utilisées pour l'appréciation de la peine ou l'octroi du sursis dans le
cadre d'une nouvelle procédure pénale (ATF 135 IV 87 consid. 2). Les
antécédents judiciaires ne sauraient toutefois conduire à une augmentation
massive de la peine, parce que cela reviendrait à condamner une deuxième fois
pour des actes déjà jugés (ATF 120 IV 136 consid. 3b p. 145).
1.2.3 Pour fixer la peine, le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation.
Il y a toutefois violation du droit fédéral lorsque le juge sort du cadre
légal, se fonde sur des critères étrangers à l'art. 47 CP, omet de prendre en
considération des éléments d'appréciation prévus par cette disposition ou,
enfin, si la peine qu'il prononce est exagérément sévère ou clémente au point
de constituer un abus du pouvoir d'appréciation (ATF 134 IV 17 consid. 2.1; 129
IV 6 consid. 6.1 et les références citées).
1.3
1.3.1 Dans une première étape, la cour cantonale a constaté que les actes
commis n'étaient en soi pas particulièrement graves. Elle a qualifié le mode
d'exécution de subtil et elle n'a pas exclu que la victime puisse souffrir de
séquelles se manifestant sur le long terme, d'autant plus que la fillette avait
immédiatement culpabilisé, se reprochant sa passivité face aux actes du
recourant. Sur le plan subjectif, les juges cantonaux ont relevé que le
recourant avait fait preuve d'une grande énergie criminelle et que l'intensité
de sa volonté délictueuse devait être qualifiée de forte, dans la mesure où il
devait se douter que les fillettes étaient accompagnées par des adultes qui se
trouvaient à proximité et que cela ne l'avait pas empêché de commettre les
actes litigieux, démontrant un sang froid redoutable. Il avait fait preuve
d'égoïsme, donnant la priorité à ses besoins sexuels et n'hésitant pas à le
faire au préjudice de l'équilibre psychique d'une enfant. A ce stade du
raisonnement, la cour cantonale a qualifié la culpabilité du recourant de
moyenne (jugement attaqué p. 32).

Dans une deuxième phase, elle a qualifié de moyenne la diminution de la
responsabilité du recourant sur le plan juridique. Elle a donc retenu une
culpabilité de légère à moyenne, ce qui entraînait une peine privative de
liberté hypothétique de six mois (jugement attaqué p. 33).

Dans un troisième temps, elle a modifié la peine en fonction des facteurs liés
à l'auteur lui-même. Elle a noté que le recourant avait été condamné en appel
le 19 février 2001 par la Chambre pénale de la Cour suprême à une peine de cinq
ans et demi de réclusion, peine partiellement complémentaire à celle infligée
par le Tribunal du district de Nyon, pour actes d'ordre sexuel avec des enfants
et contraintes sexuelles. Le 14 mai 2009, il avait été condamné par l'ancien
Tribunal d'Arrondissement II à une peine privative de liberté d'ensemble de
trois ans et demi - le solde de la peine de un an, dix mois et dix jours de la
peine privative de liberté découlant de la révocation de la libération
conditionnelle étant compris dans cette peine - pour actes d'ordre sexuel avec
des enfants, contrainte sexuelle, actes d'ordre sexuel commis sur une personne
incapable de discernement ou de résistance et pornographie. Au vu de ces lourds
antécédents, la cour cantonale a augmenté la peine hypothétique de six mois et
infligé au recourant une peine de douze mois (jugement attaqué p. 34 s.).
1.3.2 Les antécédents, surtout lorsqu'il s'agit d'actes délictueux semblables,
restent un élément pertinent, justifiant une aggravation de la peine. En
l'espèce, le recourant a un passé très chargé. A ce jour, il a commis une
trentaine d'actes d'ordre sexuel et fait 19 victimes. En outre, les
condamnations passées sont récentes, le dernier jugement remontant à quelques
mois seulement avant la commission des nouveaux actes. Le recourant était même
en exécution de peine lorsqu'il a commis les infractions qui font l'objet de la
présente procédure. Vu le nombre des actes d'ordre sexuel précédemment commis
et leur caractère récent, une augmentation de la peine hypothétique de six mois
n'est pas sévère au point qu'il faille conclure à un abus du large pouvoir
d'appréciation laissé à la cour cantonale. Le grief tiré de la violation de
l'art. 47 CP doit donc être rejeté.

2.
Le recourant conteste que les conditions d'une mesure thérapeutique
institutionnelle selon l'art. 59 CP soient réalisées.
2.1
2.1.1 Une mesure doit être ordonnée si une peine seule ne peut pas écarter le
danger que l'auteur commette d'autres infractions, si l'auteur a besoin d'un
traitement ou que la sécurité publique l'exige et si les conditions prévues aux
art. 59 à 61, 63 ou 64 sont remplies (art. 56 al. 1 CP). Le prononcé d'une
mesure suppose que l'atteinte aux droits de la personnalité qui en résulte pour
l'auteur ne soit pas disproportionnée au regard de la vraisemblance qu'il
commette de nouvelles infractions et de leur gravité (al. 2).
2.1.2 Le prononcé d'une mesure thérapeutique institutionnelle selon l'art. 59
CP suppose un grave trouble mental au moment de l'infraction, lequel doit
encore exister lors du jugement. Selon la jurisprudence, toute anomalie mentale
du point de vue médical ne suffit pas. Seuls certains états psychopathologiques
d'une certaine importance et seules certaines formes relativement lourdes de
maladies mentales au sens médical peuvent être qualifiés d'anomalies mentales
au sens juridique (arrêt 6B_784/2010 du 2 décembre 2010, consid. 2.1). En
d'autres termes, il faut que la structure mentale de l'intéressé s'écarte
manifestement de la moyenne par rapport aux autres sujets de droit, mais plus
encore par rapport aux autres criminels (message du 21 septembre 1998
concernant la modification du code pénal suisse (dispositions générales, entrée
en vigueur et application du code pénal), FF 1999 p. 1812). La référence à la
gravité du trouble mental ne correspond pas à une description quantitative du
dérangement psychique, mais signifie uniquement que le trouble mental doit être
significatif sur le plan psychiatrique comme sur le plan juridique (MARIANNE
HEER, Einige Schwerpunkte des neuen Massnahmenrechts, in RPS 212 (2003), p. 376
ss, spéc. 391; HANS WIPRÄCHTIGER, Grundzüge des neuen Massnahmenrechts 2002, in
La revisione della parte generale del codice penale, 2005, p. 43 ss, spéc. 56).

Outre l'exigence d'un grave trouble mental, le prononcé d'un traitement
institutionnel selon l'art. 59 al. 1 CP suppose que l'auteur ait commis un
crime ou un délit en relation avec ce trouble (let. a) et qu'il soit à prévoir
que cette mesure le détournera de nouvelles infractions en relation avec ce
dernier (let. b). Il doit être suffisamment vraisemblable que le traitement
entraînera, dans les cinq ans de sa durée normale, une réduction nette du
risque que l'intéressé commette de nouvelles infractions. La seule possibilité
vague d'une diminution du danger ne suffit pas (ATF 134 IV 315 consid. 3.4.1 p.
321 ; arrêt 6B_784/2010 du 2 décembre 2010, consid. 2.1).
2.1.3 Pour ordonner une des mesures prévues aux art. 59 à 61, 63 et 64 CP, le
juge doit se fonder sur une expertise. Celle-ci doit se déterminer sur la
nécessité et les chances de succès d'un traitement, la vraisemblance que
l'auteur commette d'autres infractions et la nature de celles-ci, et sur les
possibilités de faire exécuter la mesure (art. 56 al. 3 CP). Selon la
jurisprudence, le juge apprécie en principe librement une expertise et n'est
pas lié par les conclusions de l'expert. Toutefois, il ne peut s'en écarter que
lorsque des circonstances ou des indices importants et bien établis en
ébranlent sérieusement la crédibilité; il est alors tenu de motiver sa décision
de ne pas suivre le rapport d'expertise (ATF 133 II 384 consid. 4.2.3 p. 391;
129 I 49 consid. 4 p. 57; 128 I 81 consid. 2 p. 86).

2.2 Le recourant fait grief à la cour cantonale d'avoir retenu un «grave»
trouble mental, alors que l'expert aurait qualifié le trouble de «sévérité
moyenne».
2.2.1 La cour cantonale s'est fondée sur les expertises du Dr B.________ des 21
octobre 1999, 27 janvier 2009 et 24 novembre 2009. L'expert a posé un
diagnostic de trouble schizotypique (F21 selon CIM-10), qui implique une forme
d'infantilisme caractérisée par la conviction profonde d'être un enfant dans un
corps d'adulte (expertise novembre 2009, D 131). Dans l'expertise de 1999, il a
précisé que le trouble psychique avait certainement le caractère de gravité
nécessaire pour qu'on puisse l'assimiler à un trouble de la santé mentale au
sens de l'art. 11 aCP (expertise 1999, D 608). Selon l'expert, le trouble
relativement sérieux dont le recourant est atteint fait de lui un pédophile
s'écartant de manière caractérisée de la normalité non seulement par rapport au
citoyen ordinaire mais également en comparaison d'autres personnes comme lui
attirées sexuellement par les enfants (expertise janvier 2009, D 618; déjà
expertise 1999, D 608). L'expert a conclu que, par rapport au large spectre des
troubles psychiques connus, le trouble mental dont souffrait le recourant était
à considérer comme de sévérité moyenne (expertise janvier 2009, D 619;
expertise novembre 2009, D 131).
2.2.2 Il ressort de ces trois expertises que le trouble mental dont souffre le
recourant est significatif sur le plan psychiatrique. La cour cantonale n'a
donc pas violé le droit fédéral en le qualifiant de grave au sens juridique. Il
n'est à cet égard pas déterminant que l'expert n'ait pas utilisé le terme
«grave», mais celui de «sévérité moyenne».

2.3 En outre, le recourant reproche à la cour cantonale de s'être écartée de
l'expertise, en ordonnant une mesure thérapeutique institutionnelle.
2.3.1 Au chiffre 4.4 des conclusions de son expertise du 24 novembre 2009,
l'expert a déclaré qu'aucune mesure thérapeutique ne pouvait être proposée à
l'heure actuelle (expertise novembre 2009, réponse à la question 4.3, D 133).

A la page 10 de son expertise, il a expliqué la raison pour laquelle il
arrivait à cette conclusion: «Il convient de rester prudent dans la
prescription de thérapies et on aurait tort d'y voir une panacée universelle.
Mon opinion est toujours, comme je l'écrivais en janvier dernier, qu'il n'est
pas impossible que Monsieur X.________ puisse à terme utiliser le cadre d'une
psychothérapie de soutien pour développer des façons moins destructrices pour
ses victimes et pour lui-même de vivre avec les aspects particuliers de son
vécu intime et il demeure donc important qu'il ait des possibilités d'accès à
un ou une psychothérapeute s'il le souhaite mais il ne paraît pas à l'heure
actuelle indiqué de lui imposer une thérapie. On le sent tellement «braqué»,
révolté contre toute manoeuvre visant à des changements chez lui, vivant ce
type de démarche comme une intrusion insupportable, qu'on irait à fins
contraires en le contraignant à entreprendre une démarche thérapeutique»
(expertise novembre 2009, D 130).
2.3.2 A l'encontre des conclusions de l'expertise, la cour cantonale a
cependant ordonné une mesure thérapeutique institutionnelle. Elle a fondé son
prononcé, principalement, sur deux motifs.

Premièrement, elle a constaté que l'expert n'avait pas exclu qu'à terme une
psychothérapie pouvait avoir des effets positifs (jugement attaqué p. 45). En
réalité, l'expert a déclaré qu'il était difficile de modifier fondamentalement
le type de trouble dont souffrait l'expertisé, mais qu'il n'était pas
impossible qu'à terme un traitement puisse avoir des effets modestes. Il a
ainsi envisagé une thérapie à terme et n'a parlé que d'effets modestes. Il a en
outre ajouté que les expériences effectuées montraient que des mesures
thérapeutiques imposées pouvaient s'avérer contre-productives (expertise
novembre 2009, réponse à la question 4.2 D 132)

En second lieu, la cour cantonale a considéré que, dans la mesure où le
traitement institutionnel avait lieu dans une unité spécifique de la prison, il
était permis d'espérer que la motivation à suivre une thérapie puisse être
créée (jugement attaqué p. 45). Toutefois, l'expert a exclu, à l'heure
actuelle, que le recourant puisse être motivé. Il a exposé qu'il n'avait pas
discerné de motivation au changement chez l'intéressé, qui lui paraissait
actuellement hostile à toute intervention thérapeutique, et il a conclu qu'un
traitement ordonné contre sa volonté risquait d'aller à fins contraires
(expertise novembre 2009, réponse à la question 4.3, D 133). Dans ses
observations, le Ministère public s'est référé à un arrêt du 6 janvier 2011
(6B_798/2010), dans lequel le Tribunal fédéral a considéré que l'opposition à
la mesure ne pouvait empêcher le prononcé d'une mesure, car le but de celle-ci
était aussi de faire naître chez l'auteur une disposition à coopérer au
traitement. Dans cet arrêt toutefois, le placement de l'auteur dans un milieu
hospitalier avait montré des premiers effets positifs, de sorte que l'on
pouvait admettre que l'auteur pouvait être motivé (cf. aussi arrêt 6B_784/2010
du 2 décembre 2010, consid. 2.2.3).
2.3.3 En procédant de la sorte, la cour cantonale s'est écartée de la
jurisprudence relative au pouvoir d'examen du juge par rapport à une expertise
(cf. consid. 2.1.3 ci-dessus). En effet, par son argumentation, elle a
substitué son avis à celui de l'expert, en interprétant ses constatations de
manière à aboutir à la conclusion qu'une mesure thérapeutique institutionnelle
serait souhaitable. Elle n'a pas expliqué en quoi l'appréciation de l'expert
reposerait sur des fausses considérations et en quoi ses conclusions seraient
douteuses. En outre, elle a opté pour un traitement institutionnel en milieu
fermé, qui s'exécute, en règle générale, dans un établissement pénitentiaire,
vu le manque d'établissements fermés selon l'art. 59 al. 3 CP, et qui porte dès
lors une grave atteinte à la liberté personnelle. En conclusion, en ordonnant
un traitement thérapeutique institutionnel en milieu fermé, alors que l'expert
proposait de renoncer à toute mesure thérapeutique, la cour cantonale est
tombée dans l'arbitraire. Il convient d'admettre le recours sur la question de
la mesure, d'annuler l'arrêt attaqué et de renvoyer la cause à la cour
cantonale pour nouveau jugement.

3.
Le recourant a requis l'assistance judiciaire. Cette requête est sans objet
dans la mesure où il obtient gain de cause sur la question du prononcé de la
mesure et peut, à ce titre, prétendre à des dépens réduits (art. 64 al. 2 et 68
al. 1 LTF). Le recours est, pour le surplus, dénué de chances de succès, si
bien que l'assistance judiciaire doit être refusée dans cette mesure (art. 64
al. 1 LTF). Vu l'issue du litige, le recourant supporte une part des frais de
la cause qui seront, en outre, fixés en tenant compte de sa situation
économique (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF), qui n'apparaît pas favorable en
raison de sa détention notamment. Le Ministère public ne supporte pas de frais
(art. 66 al. 4 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est partiellement admis et l'arrêt attaqué est annulé dans la mesure
où il ordonne la suspension de la peine au profit d'un traitement thérapeutique
institutionnel dans un établissement fermé. Le recours est rejeté pour le
surplus.

2.
La requête d'assistance judiciaire du recourant est rejetée, dans la mesure où
elle n'est pas devenue sans objet.

3.
Des frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant.

4.
Le canton de Berne versera au mandataire du recourant la somme de 1500 fr. à
titre de dépens.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour suprême du canton de
Berne, Section pénale, 2ème Chambre pénale.

Lausanne, le 18 juin 2012

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Mathys

La Greffière: Kistler Vianin