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Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.639/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
6B_639/2012

Arrêt du 19 mars 2013
Cour de droit pénal

Composition
MM. les Juges fédéraux Mathys, Président,
Denys et Oberholzer.
Greffière: Mme Cherpillod.

Participants à la procédure
X.________, représenté par Me Pierre-Alain Killias, avocat,
recourant,

contre

Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens
VD,
intimé.

Objet
Récusation, escroquerie,

recours contre les jugements de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du
canton de Vaud des 20 juin 2012 et 24 juillet 2012.

Faits:

A.
Par jugement du 11 novembre 2011, le Tribunal de police de l'arrondissement de
la Côte a condamné X.________ pour escroquerie à une peine de 270 jours-amende,
à 20 fr. le jour avec sursis et délai d'épreuve de 3 ans. Il a également donné
acte de ses réserves civiles à A.________ SA et condamné le recourant à verser
à cette société une indemnité pour ses dépens.

B.
Par jugement du 20 juin 2012, dont les considérants complets ont été notifiés
le 25 septembre suivant, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois,
notamment composée du juge B.________, a admis l'appel de X.________, réformé
le jugement du 11 novembre 2011 en ce sens que X.________ est condamné pour
escroquerie à une peine de 150 jours-amende, à 20 fr. le jour avec sursis et
délai d'épreuve de 2 ans, et qu'il est pris acte de la transaction intervenue
entre X.________ et A.________ SA prévoyant une reconnaissance de dette de
celui-là en faveur de celle-là et un retrait par A.________ SA de sa plainte et
de son appel contre le jugement du 11 novembre 2011.

C.
Par jugement du 24 juillet 2012, notifié le 16 août suivant, la Cour d'appel
pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté la requête de récusation de
X.________ à l'encontre du juge B.________.

D.
Le 26 octobre 2012, X.________ a déposé un recours en matière pénale auprès du
Tribunal fédéral. Il conclut à l'annulation du jugement du 24 juillet 2012 et
au renvoi de la cause à l'autorité précédente. Subsidiairement, il requiert la
réforme du jugement du 20 juin 2012 en ce sens qu'il est acquitté, qu'il lui
est donné acte de ses prétentions civiles contre A.________ SA et qu'il reçoit
une indemnité fondée sur l'art. 429 al. 1 let. a CPP. Plus subsidiairement
encore, il conclut à l'annulation du jugement rendu le 20 juin 2012 et au
renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. Il sollicite
le bénéfice de l'assistance judiciaire.
Aucun échange d'écriture n'a été ordonné.

Considérant en droit:

1.
Le recourant invoque que les art. 30 Cst., 56 et 57 CPP imposaient la
récusation du juge d'appel B.________.

1.1 Conformément aux art. 78 et 92 al. 1 LTF, une décision relative à la
récusation dans une cause pénale peut faire immédiatement l'objet d'un recours
en matière pénale. Elle ne peut plus être attaquée ultérieurement (art. 92 al.
2 LTF).
Le jugement de la Cour d'appel pénale du 24 juillet 2012, rejetant la demande
de récusation formée par le recourant, lui a été notifié le 16 août 2012. Ce
dernier n'a pas recouru contre cette décision dans le délai imparti par l'art.
100 LTF. Les moyens interjetés contre celle-ci sont par conséquent
irrecevables.

1.2 Au demeurant, c'est en vain que le recourant laisse entendre en se référant
à l'arrêt 1P.353/2006 du 8 août 2006, que le motif de récusation, prétendument
découvert après le prononcé du jugement au fond, peut être soulevé dans le
cadre du recours au Tribunal fédéral. Il perd en effet de vue l'art. 60 al. 3
CPP, qui prévoit que lorsqu'un motif de récusation n'est découvert qu'après la
clôture de la procédure, les dispositions sur la révision sont applicables. On
peut considérer que le jugement du 24 juillet 2012 s'inscrit dans le cadre de
cette disposition.

1.3 Quoiqu'il en soit, la récusation invoquée est infondée pour les motifs
suivants. En vertu du principe de la bonne foi et de l'interdiction de l'abus
de droit, en relation avec le droit à un juge indépendant et impartial, la
partie qui a connaissance d'un motif de récusation doit l'invoquer aussitôt,
sous peine d'être déchue du droit de s'en prévaloir ultérieurement (cf. ATF 138
I 1 consid. 2.2 p. 4 et arrêts cités). En l'occurrence, le recourant avait
connaissance de l'existence, au sein de la partie plaignante, de C.________,
cousin au 4ème degré du magistrat dont la récusation était demandée, depuis
novembre 2007. C.________ était ainsi notamment indiqué dans un courrier
adressé au recourant comme son supérieur hiérarchique dès le 13 novembre 2007
(cf. pièce 4/2; jugement du 24 juillet 2012, p. 5; recours, p. 5). Le recourant
a été informé de la composition de la cour le 23 avril 2012. Le principe de la
bonne foi imposait qu'il demande sans retard, sous peine d'irrecevabilité, des
éclaircissements, respectivement la récusation du magistrat visé. Il ne pouvait
en revanche attendre, comme il l'a fait, juillet 2012, soit après la
communication du dispositif du jugement d'appel, en arguant n'avoir découvert
l'existence de C.________ comme fondé de procuration au sein de la société
plaignante que le 5 juillet 2012. Il était par conséquent déchu du droit de se
prévaloir du motif de récusation qu'il invoque aujourd'hui encore.
Par surabondance, son grief de violation des art. 56 et 57 CPP était vain:
qu'un magistrat et l'un des employés de la partie plaignante, inscrit au
registre du commerce comme titulaire d'une procuration collective à deux,
soient cousins au quatrième degré, alors qu'ils n'entretiennent aucune relation
depuis des années, ne constitue pas un motif de récusation au sens de l'art. 56
let. d ou f CPP ni n'impose une obligation d'annonce au sens de l'art. 57 CPP.

2.
Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits retenus par l'arrêt attaqué
(art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. La
partie recourante ne peut ainsi les critiquer que s'ils ont été établis en
violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement
inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (sur la notion
d'arbitraire, cf. ATF 138 III 378 consid. 6.1 p. 379 s.), et si la correction
du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).
Le grief d'arbitraire doit être invoqué et motivé de manière précise (art. 106
al. 2 LTF; ATF 138 V 67 consid. 2.2 p. 69).
Au vu de ce qui précède, il ne saurait être tenu compte des faits allégués par
le recourant, notamment en page 8 de son recours, qui ne ressortent pas du
jugement du 20 juin 2012 et pour lesquels aucun grief d'arbitraire n'est
soulevé.

3.
Le recourant estime qu'aucune des conditions cumulatives posées par l'art. 146
CP pour retenir une escroquerie n'est remplie.

3.1 En vertu de cette disposition, se rend coupable d'escroquerie celui qui,
dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement
illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne par des
affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais ou l'aura
astucieusement confortée dans son erreur et aura de la sorte déterminé la
victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un
tiers.

3.2 L'escroquerie suppose une tromperie, qui peut se présenter sous la forme
d'affirmations fallacieuses, de dissimulation de faits vrais ou encore
consister à conforter la dupe dans l'erreur. Pour qu'il y ait tromperie par
affirmations fallacieuses, il faut que l'auteur ait affirmé un fait dont il
connaissait la fausseté. L'affirmation peut résulter de n'importe quel acte
concluant. Il n'est donc pas nécessaire que l'auteur ait fait une déclaration.
Il suffit qu'il ait adopté un comportement dont on déduit qu'il affirme un fait
(arrêt 6B_243/2009 du 26 mai 2009 consid. 2.2.1).
L'astuce est réalisée lorsque l'auteur recourt à un édifice de mensonges, à des
manoeuvres frauduleuses ou à une mise en scène, mais aussi lorsqu'il donne
simplement de fausses informations, si leur vérification n'est pas possible, ne
l'est que difficilement ou ne peut raisonnablement être exigée, de même que si
l'auteur prévoit, en fonction des circonstances, que la dupe renoncera à le
faire en raison d'un rapport de confiance particulier. Il y a notamment
manoeuvre frauduleuse lorsque l'auteur fait usage de titres falsifiés ou
obtenus sans droit ou de documents mensongers. L'astuce ne saurait toutefois
être admise si la dupe pouvait se protéger avec le minimum de prudence que l'on
pouvait attendre d'elle. Il n'est cependant pas nécessaire qu'elle ait fait
preuve de la plus grande diligence et qu'elle ait recouru à toutes les mesures
de prudence possibles ou, autrement dit, qu'elle ait fait tout ce qu'elle
pouvait pour éviter d'être trompée. Pour apprécier si l'auteur a usé d'astuce
et si la dupe a omis de prendre des mesures de prudence élémentaires, il faut
prendre en considération la situation particulière de la dupe, telle que
l'auteur la connaît et l'exploite (ATF 128 IV 18 consid. 3 p. 20 s. et
références citées).
La conséquence de la tromperie astucieuse doit être que la dupe, dans l'erreur,
accomplit un acte préjudiciable à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un
tiers.
Sur le plan subjectif, l'auteur doit agir intentionnellement et dans le dessein
de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, un
résultat correspondant n'étant cependant pas une condition de l'infraction (ATF
119 IV 210 consid. 4b p. 214).

3.3 Le recourant a été engagé à 100 %, le 1er septembre 2002, par A.________
SA, partie plaignante. Le 12 novembre 2007, celle-ci a résilié le contrat de
travail du recourant pour le 29 février 2008. Dès mi-janvier 2008, le recourant
a fourni à la partie plaignante des certificats médicaux successifs attestant
d'une incapacité de travail totale du 14 janvier 2008 au 29 février 2009. Sans
en informer la partie plaignante ni son assurance perte de gain, le recourant a
toutefois pris un emploi auprès d'une autre société et travaillé effectivement
pour celle-ci dès le 24 mai 2008 à raison de 3 jours en mai puis de 12 jours
par mois en moyenne jusqu'à fin novembre 2008. Durant cette période, il a
touché un revenu total de 15'947 fr. 05 de cette société. Il a également reçu
de l'assurance perte de gain de la partie plaignante 24'235 fr. 20 entre le 22
avril 2008 et le 30 septembre 2008. Après cette date, cette assurance a décidé,
sur la base d'une expertise du recourant ne mettant pas en évidence de
pathologie médicale, de ne plus verser de prestations. La partie plaignante a
alors informé le recourant que le délai de congé avait recommencé à courir et a
repris le versement du salaire complet du recourant, jusqu'à fin novembre 2008.
Entre le 1er mars 2008 et le 30 novembre 2008, elle lui a versé 42'344 fr. 35.

3.4 Le recourant a trompé son employeur, respectivement l'assurance perte de
gain de celui-ci, en leur faisant croire, par le biais de la remise régulière
de certificats médicaux, qu'il était en incapacité de travail totale, ce qui
dès le 24 mai 2008 ne correspondait pas à la réalité, dès lors que le recourant
travaillait pour une société tierce. Le grief du recourant, tiré d'une absence
de tromperie, est infondé.

3.5 Pour recevoir des prestations de la part de la partie plaignante et de son
assurance perte de gain, le recourant a dissimulé à son psychiatre non
seulement qu'il pouvait travailler, mais surtout qu'il travaillait, ce afin
d'obtenir des certificats médicaux à intervalles réguliers attestant d'une
incapacité totale de travailler. Il a ensuite remis à son employeur ces
certificats médicaux, tout en lui cachant avoir repris une activité salariée
auprès d'un tiers. La partie plaignante comme son assurance perte de gain
n'avaient aucun moyen de vérifier que le recourant ne travaillait pas ailleurs.
On ne peut non plus leur reprocher de n'avoir pas vérifié immédiatement la
véracité des certificats médicaux remis par le recourant en le soumettant à une
expertise, finalement effectuée le 17 septembre 2008: d'une part, la partie
plaignante et le recourant étaient liés par des rapports de travail depuis plus
de cinq ans, qui justifiaient, même s'ils avaient été résiliés, que la partie
plaignante fasse confiance au recourant. D'autre part, les certificats
émanaient d'un médecin-psychiatre et revêtaient par conséquent une valeur
probante certaine. Enfin, le problème constaté était d'ordre psychologique et
partant plus difficilement vérifiable. La tromperie était ainsi bel et bien
astucieuse.

3.6 Du fait de celle-ci, la partie plaignante et son assurance ont cru à tort
que le recourant était en incapacité totale de travail du 24 mai 2008 à fin
novembre 2008. Il n'est pas déterminant de savoir si durant cette période la
capacité de travail du recourant était totale ou partielle. Il importe
uniquement que l'erreur de l'assurance perte de gain a conduit celle-ci à
verser au recourant des indemnités journalières entières, qui n'étaient pas, en
partie ou totalement, dues. La partie plaignante a quant à elle complété ces
indemnités afin que le recourant reçoive l'équivalent de son salaire, ce sans
fournir aucune contre-prestation, alors qu'il en était au moins en partie
capable. Ainsi la partie plaignante et son assurance étaient dans l'erreur, ce
qui les a conduit à verser au recourant des prestations indues jusqu'à fin
novembre 2008, soit à accomplir un acte préjudiciable à leurs intérêts
pécuniaires.

3.7 La cour cantonale a discuté de l'élément subjectif sous l'angle du dessein
d'enrichissement, qu'elle a admis. Savoir ce que l'auteur a su, voulu, envisagé
ou accepté relève de l'établissement des faits (ATF 135 IV 152 consid. 2.3.2 p.
156). En l'occurrence, il se déduit sans conteste du comportement du recourant
qu'il a agi pour tromper la partie plaignante, respectivement son assurance
perte de gain en occultant sa situation réelle. Le recourant ne formule aucun
grief recevable sous l'angle de l'art. 106 la. 2 LTF pour établir qu'il était
arbitraire de retenir une volonté délictuelle. L'intention est réalisée.
S'agissant du dessein d'enrichissement, celui-ci vise non pas le salaire perçu
par le recourant pour l'activité qu'il a exercée en faveur d'un tiers, mais la
dissimulation par le recourant à la partie plaignante et à son assurance de cet
emploi - qui allait bien au-delà d'une activité accessoire - afin de leur faire
croire qu'il était en complète incapacité de travail et d'obtenir ainsi des
indemnités pour perte de gain entière et/ou des prestations de salaire, sans
avoir notamment à travailler pour la partie plaignante. Il a donc bien agi avec
un dessein d'enrichissement illégitime, soit celui de recevoir des prestations
indues.

3.8 Il résulte de ce qui précède que la condamnation du recourant pour
escroquerie ne viole pas le droit fédéral.

4.
Le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité. Les conclusions
étaient vouées à l'échec de sorte que l'assistance judiciaire est refusée pour
ce motif déjà (art. 64 al. 1 et 2 LTF). Le recourant supportera les frais de
justice, ses revenus, gains intermédiaires compris, ainsi que ceux de son
épouse le lui permettant (art. 66 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du
Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 19 mars 2013

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Mathys

La Greffière: Cherpillod