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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.386/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
6B_386/2012

Arrêt du 15 novembre 2012
Cour de droit pénal

Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Mathys, Président,
Jacquemoud-Rossari et Schöbi.
Greffière: Mme Kistler Vianin.

Participants à la procédure
X.________, représenté par Me Benoît Morzier, avocat,
recourant,

contre

Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens
VD,
intimé.

Objet
Exécution de la peine, semi-détention (art. 77b CP), arrêts domiciliaires,

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des
recours pénale, du 23 mai 2012.

Faits:

A.
Par décision du 19 décembre 2011, l'Office d'exécution des peines du canton de
Vaud a refusé de donner suite à la demande de X.________ de réexaminer les
décisions des 4 novembre et 6 décembre 2011 ordonnant l'exécution de sa peine
privative de liberté sous la forme du régime ordinaire.

B.
Par arrêt du 23 avril 2012, le Juge d'application des peines vaudois a rejeté
le recours interjeté par X.________ et confirmé les décisions de première
instance.

C.
Statuant le 23 mai 2012 sur le recours formé par X.________, la Chambre des
recours pénale du Tribunal cantonal vaudois a refusé de donner suite aux
réquisitions tendant au complément de l'instruction et rejeté ledit recours.

D.
Contre ce dernier arrêt, X.________ dépose un recours en matière pénale devant
le Tribunal fédéral. Il conclut à la réforme de l'arrêt attaqué en ce sens
qu'il est autorisé à exécuter sa peine sous le régime des arrêts domiciliaires,
subsidiairement de la semi-détention.

Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.

Considérant en droit:

1.
Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir insuffisamment motivé le
rejet de sa requête tendant à ordonner la production du dossier du Service
d'application des peines et mesures du canton de Genève.

1.1 Le droit d'être entendu consacré à l'art. 29 al. 2 Cst. implique
l'obligation pour le juge de motiver sa décision, afin que le justiciable
puisse la comprendre, la contester utilement s'il y a lieu et que l'autorité de
recours puisse exercer son contrôle. Il suffit que le juge mentionne, au moins
brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision (
ATF 134 I 83 consid. 4.1 p. 88; 133 III 439 consid. 3.3 p. 445; 130 II 530
consid. 4.3 p. 540).

1.2 La cour cantonale a rejeté la requête du recourant, au motif que le dossier
était complet. De la sorte, elle a motivé son refus. Cette motivation est
certes brève, mais suffisante. Il n'appartenait pas à la cour cantonale de
requérir la production du dossier d'une autorité d'un autre canton, dans la
mesure où elle n'était pas liée par la décision de celle-ci (cf. consid. 7).

2.
Le recourant se plaint du refus de la cour cantonale de lui accorder un délai
supplémentaire pour la production ultérieure de la promesse d'engagement.

2.1 Tel qu'il est garanti à l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu
comprend celui de produire ou de faire administrer des preuves, mais à
condition qu'elles soient pertinentes (ATF 135 I 187 consid. 2.2 p. 190; 135 II
286 consid. 5.1 p. 293). Le droit d'être entendu n'empêche pas le juge de
mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis
de se forger une conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à
une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, il a la
certitude qu'elles ne pourraient pas l'amener à modifier son opinion (ATF 136 I
229 consid. 5.3 p. 236). L'appréciation (anticipée) des preuves ne peut être
revue par le Tribunal fédéral que sous l'angle restreint de l'arbitraire (cf.
ATF 131 I 153 consid. 3 p. 157; 124 I 208 consid. 4a). Une décision est
arbitraire lorsqu'elle se trouve en contradiction claire avec la situation de
fait, viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou heurte de
manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité (ATF 137 I 1
consid. 2.4 p. 5). La prohibition de l'arbitraire étant de rang constitutionnel
(art. 9 Cst.), le recourant doit expressément soulever le grief et exposer de
manière claire et circonstanciée, si possible documentée, en quoi ce droit
fondamental a été violé (art. 106 al. 2 LTF; ATF 134 II 244 consid. 2.2).

2.2 En l'espèce, le recourant ne démontre pas que la pièce litigieuse est
propre à influer l'issue du litige. Il aurait notamment pu produire celle-ci ou
tout autre document établissant qu'il avait un emploi, conformément à l'art. 99
al. 1 LTF, qui autorise la production de moyen de preuve nouveau pour démontrer
des irrégularités de la procédure devant l'autorité précédente. Or, plus d'un
mois après avoir consulté son conseil, il se borne à mentionner sur son
bordereau de pièces " promesse d'engagement (à produire) ". Insuffisamment
motivé, le grief soulevé est irrecevable.

3.
Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir versé dans l'arbitraire en
retenant qu'il n'était pas digne de confiance.

3.1 Le Tribunal fédéral est un juge du droit. Il ne peut revoir les faits
établis par l'autorité précédente que si ceux-ci l'ont été de manière
manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire (ATF 137 II 353 consid. 5.1 p.
356). On peut renvoyer, sur la notion d'arbitraire, aux principes maintes fois
exposés par le Tribunal fédéral (voir par ex: ATF 137 I 1 consid. 2.4 p. 5; 136
III 552 consid. 4.2 p. 560 ; 135 V 2 consid. 1.3 p. 4/5; 134 I 140 consid. 5.4
p. 148; 133 I 149 consid. 3.1 p. 153 et les arrêts cités). Le grief
d'arbitraire doit être invoqué et motivé de manière précise (art. 106 al. 2
LTF). Le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur les critiques de nature
appellatoire (ATF 137 II 353 consid. 5.1 p. 356 ; 133 III 393 consid. 6 p.
397).

3.2 La cour cantonale a relevé que, dans son recours contre la décision de
l'OEP, le recourant avait invoqué travailler à plein temps et pour une durée
indéterminée, alors que, dans son recours contre la décision du Juge
d'application des peines, il avait déclaré ne pas travailler mais disposer
d'une promesse d'engagement auprès d'une entreprise à Genève. Elle a déduit de
ce changement de version une propension au mensonge de la part du recourant. Le
recourant ne démontre pas que les faits sur lesquels se fonde l'interprétation
de la cour cantonale seraient faux, mais se borne à affirmer, sans l'établir,
que sa situation professionnelle s'est réellement modifiée et que les
conclusions de la cour cantonale quant à son caractère sont arbitraires.
Purement appellatoire, son argumentation est irrecevable (art. 106 al. 2 LTF).

4.
Dénonçant la violation des art. 77b CP, 178 RSC et 2 Rad 1, le recourant
conteste que les conditions de la semi-détention et des arrêts domiciliaires ne
sont pas réalisées.
Il convient d'examiner d'abord les conditions des arrêts domiciliaires, dont la
réglementation relève de la compétence cantonale, puis, celles de la
semi-détention, qui sont posées à l'art. 77b CP.

5.
5.1 Edictées sur la base d'autorisations délivrées par le Conseil fédéral
conformément à l'ancien art. 397bis al. 4 CP et prolongées en application de
l'art. 387 al. 4 let. a CP (voir la décision du Conseil fédéral du 14 décembre
2007 et l'arrêté du 4 décembre 2009 concernant la prolongation de
l'autorisation accordée aux cantons de Berne, de Soleure, de Bâle-Ville, de
Bâle-Campagne, du Tessin, de Vaud et de Genève, de faire exécuter des peines
privatives de liberté sous surveillance électronique à l'extérieur d'un
établissement; FF 2008 147, 2009 7999), les réglementations cantonales
relatives à l'exécution des peines privatives de liberté sous forme d'arrêts
domiciliaires constituent du droit cantonal autonome. Les cantons en question,
dont celui de Vaud, demeurent, dans le cadre des autorisations accordées,
libres de délimiter le champ d'application des arrêts domiciliaires en les
soumettant à des conditions restrictives, sous la seule réserve de l'arbitraire
dans le choix des critères (ATF 115 IV 131 consid. 2 p. 134 relatif à la
semi-détention sous l'ancien droit; v. aussi arrêts non publiés 6B_583/2010 du
11 janvier 2011 consid. 2; 6B_240 et 241/2009 du 8 mai 2009 consid. 2 ainsi que
6B_582/2008 du 5 novembre 2008 consid. 2.2).
Le règlement vaudois sur l'exécution des courtes peines privatives de liberté
sous forme d'arrêts domiciliaires (Rad1; RSV 340.01.6) règle les arrêts
domiciliaires. L'art. 2 al. 1 Rad1 dispose que le condamné peut être autorisé à
exécuter sa peine sous forme d'arrêts domiciliaires si, en raison de son
caractère, de ses antécédents et de sa coopération à la mise en ?uvre de ce
mode d'exécution, le condamné paraît capable d'en respecter les conditions.
Selon le deuxième alinéa de cet article, l'autorisation est accordée à
condition que le condamné et des personnes adultes faisant ménage commun
donnent leur accord (let. a), que le domicile du condamné soit équipé des
raccordements électrique et téléphonique (let. b), que le condamné exerce une
activité professionnelle ou une occupation ménagère, à mi-temps au minimum,
agréée par la Fondation vaudoise de probation (let. c), que le condamné accepte
les modalités d'exécution de la peine (notamment le port du bracelet, programme
horaire, règles de conduite) (let. d) et que le condamné accepte de se
soumettre au programme d'évaluation scientifique de cette modalité d'exécution
de peine (let. e).

5.2 Le Tribunal fédéral est habilité à examiner la bonne application du droit
concordataire (intercantonal; art. 95 let. e LTF), mais non celle du droit
cantonal. Il est toutefois toujours possible de faire valoir que la mauvaise
application du droit cantonal constitue une violation du droit fédéral, en
particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à
d'autres droits constitutionnels (ATF 133 III 462 consid. 2.3 p. 466). A cet
égard, le Tribunal fédéral n'examinera le moyen fondé sur la violation d'un
droit constitutionnel que si le grief a été invoqué et motivé de manière
précise (art. 106 al. 2 LTF). En l'occurrence, le recourant ne soulève aucun
grief d'arbitraire en relation avec le droit cantonal pertinent, qu'il se borne
à citer, mais qu'il ne commente ni dans son principe ni dans son application.
Le grief est donc irrecevable faute d'une motivation suffisante (art. 106 al. 2
LTF).

6.
6.1 La semi-détention doit permettre au condamné de conserver son travail ou sa
place de formation, et prévenir ainsi le danger de coupure avec le monde
professionnel (BAECHTOLD, Strafrecht I, Basler Kommentar, 2e éd., 2007, n. 2 ad
art. 77b CP; VIREDAZ/VALLOTTON, Code pénal I, Commentaire romand, 2009, n. 1 ad
art. 77b CP). Depuis la révision de la partie générale entrée en vigueur le 1er
janvier 2007, le droit fédéral impose aux cantons de prévoir ce mode
d'exécution et en pose les conditions. Ainsi, l'art. 77b CP subordonne la
semi-détention à deux conditions cumulatives: il doit s'agir d'une peine
privative de liberté de six mois à un an (cf. aussi art. 79 al. 1 et 3 CP); en
outre, il ne doit pas exister de danger de fuite ou de récidive. Une troisième
condition découle directement du but de la semi-détention: le condamné doit
disposer d'une activité professionnelle ou suivre une formation (BAECHTOLD, op.
cit., n. 8 ad art. 77b CP).

Le risque de fuite ou de récidive doit être d'une certaine importance et les
nouvelles infractions doivent être d'une certaine gravité (BAECHTOLD, op. cit.,
n. 7 ad art. 77b; VIREDAZ/VALLOTTON, op. cit., n. 3 ad art. 77a CP). Pour poser
un pronostic quant au comportement futur du condamné, l'autorité d'exécution
des peines doit tenir compte, notamment, de ses antécédents judiciaires, de sa
personnalité, de son comportement en général et au travail, et des conditions
dans lesquelles il vivra (à propos de la libération conditionnelle, cf. ATF 133
IV 201 consid. 2.3; en matière de sursis, cf. ATF 135 IV 180 consid. 2.1 p. 185
s.).

Les conditions restrictives prévues par le droit cantonal qui étaient
applicables avant la révision du Code pénal ne sont plus déterminantes pour
l'octroi de la semi-détention (BAECHTOLD, op. cit., n. 7 ad art. 77b CP; le
même, Exécution des peines, L'exécution des peines et mesures concernant les
adultes en Suisse, 2008, p. 149, n. 52). Pour TRECHSEL, une certaine
flexibilité doit toutefois être laissée aux cantons (TRECHSEL ET AL.,
Schweizerisches Strafgesetzbuch, Praxiskommentar, n. 4 ad art. 77b).
Les concordats intercantonaux règlent plus précisément l'institution de la
semi-détention. Pour ce qui est des cantons latins, la Conférence latine des
autorités cantonales compétentes en matière d'exécution des peines et des
mesures a adopté, le 25 septembre 2008, une décision relative à l'exécution des
peines sous la forme de la semi-détention. En outre, les cantons, à l'exception
de Bâle-Ville et de Genève, ont réglé la semi-détention au niveau d'une loi ou
d'une ordonnance. Dans le canton du Vaud, les art. 178 ss du règlement sur le
statut des condamnés exécutant une peine privative de liberté et les régimes de
détention applicables (RSC; RSV 340.01.1) règlent l'exécution des peines sous
le régime de la semi-détention.

6.2 Il ressort de l'arrêt cantonal - qui lie la cour de céans, dans la mesure
où le recourant n'en a pas démontré l'arbitraire (art. 97 al. 1 et 105 al. 1
LTF; art. 106 al. 2 LTF) - que le recourant a de lourds antécédents (dix
condamnations depuis 1994), qu'il n'est pas digne de confiance (notamment qu'il
a montré une tendance à mentir; cf. consid. 3) et qu'il n'existe pas moins de
dix-huit procédures pénales ouvertes contre lui. Même si le principe de la
présomption d'innocence s'applique, il ne peut être fait abstraction de ces
nombreuses enquêtes. L'ensemble de ces éléments permettent de conclure qu'il
existe un risque de récidive et que, partant, les conditions posées pour la
semi-détention ne sont pas réalisées. En conséquence, le refus de la
semi-détention est justifié, et le grief tiré de la violation de l'art. 77b CP
doit être rejeté.

Dans la mesure où le recourant dénonce également la violation de l'art. 180
RSC, qui énumère les conditions cumulatives que doit remplir le condamné pour
être mis au bénéfice de la semi-détention (parmi lesquelles l'absence de risque
de récidive), son grief est irrecevable, puisqu'il n'explique pas en quoi la
cour cantonale aurait appliqué le droit cantonal de manière arbitraire (cf.
consid. 5.2 ci-dessus).

7.
Le recourant invoque encore le principe d'égalité (art. 8 al. 1 Cst.). Il fait
valoir que le Service d'application des peines et mesures du canton de Genève a
admis qu'il puisse exécuter sa peine de quatre mois d'emprisonnement sous la
forme des arrêts domiciliaires.

Le principe d'égalité devant la loi signifie que la loi doit être appliquée de
façon égale, dans des situations d'espèce, par l'autorité qui est chargée de
cette application. Il n'y a pas d'inégalité de traitement lorsque les mêmes
dispositions légales sont interprétées différemment par des autorités de
cantons différents (ATF 124 IV 44 consid. 2c p. 47).

En l'occurrence, il s'agit d'autorités différentes et de lois cantonales
différentes. Le grief tiré de l'égalité de traitement est infondé.

8.
Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.
Le recourant, qui succombe, doit supporter les frais (art. 66 al. 1 LTF).

Vu l'issue du recours, la requête d'effet suspensif est sans objet.

Dans la mesure où le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par
l'autorité précédente (cf. consid. 3.1), il ne lui appartient pas d'ordonner
des mesures d'instruction. Partant, la réquisition tendant à la production du
dossier du Service d'application des peines et mesures du canton de Genève doit
être rejetée; en tout état de cause, le dossier en cause n'est pas pertinent
pour l'issue du litige (consid. 1 et 7).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton
de Vaud, Chambre des recours pénale.

Lausanne, le 15 novembre 2012

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Mathys

La Greffière: Kistler Vianin