Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.23/2012
Zurück zum Index Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 2012
Retour à l'indice Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 2012



Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
6B_23/2012, 6B_46/2012

Arrêt du 1er novembre 2012
Cour de droit pénal

Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Mathys, Président,
Schneider et Jacquemoud-Rossari.
Greffier: M. Vallat.

Participants à la procédure
6B_23/2012
X.________, représenté par Me Freddy Rumo, avocat, recourant,

contre

Ministère public du canton de Neuchâtel,
intimé,

et

6B_46/2012
Ministère public du canton de Neuchâtel,
recourant,

contre

X.________, représenté par Me Freddy Rumo, avocat,
intimé.

Objet
6B_23/2012
Meurtre; meurtre passionnel; arbitraire, garantie d'un procès équitable, etc.,

6B_46/2012
Assassinat; fixation de la peine,

recours contre le jugement de la Cour pénale du Tribunal cantonal du canton de
Neuchâtel du 7 décembre 2011.

Faits:

A.
Ensuite de son divorce d'avec A.________, au mois d'août 2007, X.________,
médecin à B.________, a ouvert, au mois de novembre 2007, une procédure tendant
principalement à obtenir une garde alternée sur leurs enfants C.________ (9
ans) et D.________ (7 ans). A.________ s'y est opposée. Dans ce contexte, et
dans l'exercice de son droit de visite, à partir du 2 janvier 2008, les enfants
sont restées avec leur père, qui avait convenu avec leur mère qu'il les
ramènerait le dimanche 6 janvier en fin de journée. Le samedi 5 dans la
matinée, X.________ est passé à son cabinet médical. Il y a pris son pistolet
d'ordonnance, qu'il a chargé et emporté, ainsi que trois seringues de 60 ml de
chlorure de potassium, 18 comprimés de Dormicum et trois seringues de 5 ml du
même somnifère sous forme liquide, le tout placé dans un sac à dos. Le
lendemain, il a assisté à un spectacle de danse avec ses filles durant
l'après-midi, puis il est repassé à son domicile pour y prendre le sac à dos et
son contenu et il s'est rendu avec les enfants chez leur mère. La famille a
soupé, les enfants sont allées dans leur chambre pour se coucher et une
discussion s'est engagée entre leurs parents au sujet de leur garde. A un
moment donné, X.________ a pris le pistolet qui était dans son sac, a tenté de
tirer une première fois, a alors dû désassurer l'arme, a tiré une deuxième fois
en direction de A.________ qui se trouvait à faible distance et qui a été
atteinte d'un coup mortel. Il a ensuite appelé le 144 et indiqué qu'il avait
tué son ex-femme.

Par jugement du 19 mai 2011, le Tribunal criminel des Montagnes et du
Val-de-Ruz a condamné X.________, pour assassinat, à 16 ans de privation de
liberté dont à déduire 1230 jours de détention avant jugement. En bref, les
premiers juges ont retenu qu'il avait tiré à bout touchant une balle dans la
tête de la victime qui, voyant l'arme, s'était mise à genoux ou accroupie et
avait esquissé un geste de défense avec un bras. Ils ont relevé la
préméditation, le fait que l'auteur avait agi de sang froid non sans une
certaine perfidie et que la façon de tuer s'apparentait à une exécution. Ils
ont aussi souligné les préoccupations purement égocentriques de l'auteur,
poussé par l'égoïsme et la jalousie, et l'absence particulière de scrupules
dénotée par le fait qu'il avait agi alors que les enfants étaient dans
l'appartement. Ce jugement statue en outre sur les prétentions des parties
civiles.

B.
Saisie d'un appel du condamné ainsi que d'un appel joint du Ministère public,
la Cour pénale du Tribunal cantonal neuchâtelois a, par jugement sur appel du 7
décembre 2011, déclaré l'appel joint sans objet pour autant qu'il fût
recevable. Elle a admis l'appel de X.________ et l'a condamné à 14 ans de
privation de liberté pour meurtre.

En résumé, en mettant en relief les faiblesses de l'instruction, des expertises
techniques en particulier, la cour cantonale a écarté au bénéfice du doute le
scénario de « l'exécution » par une balle tirée de haut en bas au profit du
déroulement des faits tel que décrit par X.________ (voyant l'arme, A.________
s'était levée de sa chaise; elle avait fait un geste d'éloignement, avait
trébuché et était tombée en arrière faisant face à X.________, lequel avait
fait un mouvement de charge, avait essayé de tirer une première fois, avait dû
abaisser le levier de sécurité et avait tiré à nouveau en direction du corps de
la victime qui se trouvait peut-être à un ou deux mètres, sans viser un endroit
précis). En relevant les circonstances émotionnelles entourant l'acte et en se
référant à l'expertise psychiatrique, la cour cantonale a estimé que l'on
s'éloignait de plus en plus de l'homme totalement dépourvu de scrupules et
agissant de manière particulièrement odieuse. Elle a jugé que la présence des
enfants dans l'appartement ne dénotait pas, en l'espèce, une absence
particulière de scrupules. Le geste de l'auteur, qui avait manifesté des
scrupules en décidant de consulter un psychiatre dans la période précédant
l'acte, traduisait plus son désespoir qu'une cruauté particulière. La cour
cantonale a aussi écarté la qualification du meurtre passionnel, jugeant que si
X.________ était aux prises avec un certain désarroi, ce dernier n'était ni
profond ni excusable. Examinant la question de la responsabilité pénale, la
cour cantonale, après avoir discuté les avis scientifiques dont elle disposait,
a conclu que le médicament antidépresseur que X.________ prenait depuis
quelques jours en automédication (Floxyfral [fluvoxamine]) avait pu jouer un
rôle facilitateur d'un passage à l'acte, mais ne l'avait fait que dans une
mesure marginale qui était restée sans influence sur la responsabilité pénale
de l'auteur, laquelle était entière.

C.
X.________ et le Ministère public du canton de Neuchâtel recourent en matière
pénale. Ils concluent, tous deux, avec suite de frais et dépens, à l'annulation
de la décision entreprise et au renvoi de la cause à l'autorité inférieure pour
nouveau jugement au sens des considérants. X.________ requiert, par ailleurs,
le bénéfice de l'assistance judiciaire.
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.

Considérant en droit:

1.
Les deux recours ont pour objet la même décision. Ils visent, tous les deux à
obtenir, après renvoi, une qualification différente des faits, pour l'un dans
le sens d'une aggravation (assassinat), pour l'autre d'une atténuation (meurtre
passionnel) en vue d'alourdir ou d'alléger la peine. Il se justifie de joindre
les causes et de les traiter dans un seul arrêt (art. 24 al. 2 PCF et 71 LTF).

2.
Dans le recours en matière pénale, les constatations de fait de la décision
entreprise lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), sous les réserves
découlant des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de
l'arbitraire (v. sur cette notion: ATF 137 I 1 consid. 2.4 p. 5) dans la
constatation des faits. La recevabilité de tels griefs suppose l'articulation
de critiques circonstanciées (ATF 136 II 101 consid. 3, p. 105), claires et
précises, répondant aux exigences de motivation accrues déduites de l'art. 106
al. 2 LTF (ATF 133 IV 286 consid. 1.4 p. 287). Les critiques appellatoires sont
irrecevables (cf. ATF 137 II 353 consid. 5.1 p. 356).

3.
X.________ a été condamné pour meurtre (art. 111 CP). Il est constant que les
conditions objectives et subjectives de l'homicide intentionnel sont réalisées.
Seules prêtent à discussion les qualifications aggravée (art. 112 CP;
assassinat; recours du Ministère public) et atténuée (art. 113 CP; meurtre
passionnel; recours du condamné) quant à l'acte ainsi que la question de la
responsabilité pénale.
Recours du Ministère public

4.
L'assassinat (art. 112 CP) se distingue du meurtre ordinaire (art. 111 CP) par
le fait que l'auteur a tué avec une absence particulière de scrupules. Cela
suppose une faute spécialement lourde et déduite exclusivement de la commission
de l'acte. Pour la caractériser, l'art. 112 CP évoque le cas où les mobiles, le
but ou la façon d'agir de l'auteur sont particulièrement odieux, mais cet
énoncé n'est pas exhaustif. Pour déterminer si l'on se trouve en présence d'un
assassinat, il faut procéder à une appréciation d'ensemble des circonstances
externes (comportement, manière d'agir de l'auteur) et internes de l'acte
(mobile, but, etc.). Les antécédents et le comportement de l'auteur après
l'acte sont également à prendre en considération, s'ils ont une relation
directe avec ce dernier et sont révélateurs de la personnalité de l'auteur. Il
y a assassinat lorsqu'il résulte de l'ensemble de ces circonstances qu'il a
fait preuve du mépris le plus complet pour la vie d'autrui. Alors que le
meurtrier agit pour des motifs plus ou moins compréhensibles, généralement dans
une grave situation conflictuelle, l'assassin est une personne qui agit de
sang-froid, sans scrupules, qui démontre un égoïsme primaire et odieux et qui,
dans le but de poursuivre ses propres intérêts, ne tient aucun compte de la vie
d'autrui. Chez l'assassin, l'égoïsme l'emporte en général sur toute autre
considération. Il est souvent prêt, pour satisfaire des besoins égoïstes, à
sacrifier un être humain dont il n'a pas eu à souffrir. La destruction de la
vie d'autrui est toujours d'une gravité extrême. Pour retenir la qualification
d'assassinat, il faut cependant que la faute de l'auteur, son caractère odieux,
se distingue nettement de celle d'un meurtrier au sens de l'art. 111 CP (ATF
127 IV 10 consid. 1a p. 13 s.).

4.1 Dans son jugement sur appel, la cour cantonale, après avoir écarté le
scenario d'une froide exécution de la victime agenouillée dans une attitude
suppliante par un tir d'une balle dans la tête, a retenu que l'acte avait été
prémédité et qu'il était le fait d'un homme jaloux qui voyait son ex-épouse se
remettre, en apparence en tout cas, facilement de la séparation d'avec le père
de ses enfants, en nouant une nouvelle relation et en faisant des projets avec
son nouveau compagnon. X.________ se trouvait ainsi exclu de cette famille qui
se reconstituait, d'où l'importance exacerbée que paraissait avoir prise sa
demande de garde partagée des enfants et le caractère inacceptable pour lui du
refus de leur mère alors que sa démarche visait à lui restituer le rôle de père
qui semblait lui échapper. La cour cantonale a relevé que selon l'expert
psychiatre, « sous l'aspect froid et calculateur qu'on peut à première vue
discerner dans les actions de Monsieur X.________ se cache la détresse d'un
homme ballotté par des émotions qu'il a de la peine à lire et à intégrer,
toujours en retard d'un épisode dans une histoire où il a laissé, faute de
savoir écouter son coeur, les constructions rationnelles de son intelligence
prendre le contrôle de ses actions ». Elle en a déduit que l'on s'éloignait
ainsi de plus en plus de l'homme totalement dépourvu de scrupules et agissant
de manière particulièrement odieuse qu'exige la définition de l'assassin. La
cour cantonale a, ensuite, exposé qu'au moment d'agir X.________ n'avait pas
réfléchi à la question de son avenir et de celui de ses enfants une fois l'acte
commis, qu'il n'avait pris aucune précaution ni aucune mesure pour tenter
d'échapper aux conséquences de son acte et qu'il était ainsi aussi possible
d'admettre qu'au moment où il avait tiré, il n'avait plus pensé non plus à la
présence des enfants dans la chambre voisine, que le bruit du coup allait très
sûrement attirer dans la pièce. Son geste traduisait davantage du désespoir
qu'une cruauté particulière à l'égard d'enfants auxquelles il n'aurait pas
hésité à infliger la vue de leur mère morte. Il avait, enfin, manifesté des
scrupules dans la période précédant l'acte, en décidant de consulter un
psychiatre, même si l'on peinait à comprendre pourquoi il ne s'était pas ouvert
auprès de lui des fantasmes de mort qui l'avaient précisément amené à le
consulter. Le contexte dans lequel l'auteur avait agi et l'ensemble de ces
considérations conduisaient à abandonner la prévention d'assassinat.

4.2 Le Ministère public ne remet pas en cause l'abandon du scénario de
l'exécution de la victime agenouillée. En substance, relevant que X.________ a
agi avec préméditation, il objecte qu'il aurait fait preuve de traîtrise et de
perfidie en exploitant l'ouverture d'esprit de la victime qui l'avait invité à
souper pour discuter de la garde partagée et en prétextant d'aller aux
toilettes pour prendre l'arme avec laquelle il l'avait tuée. Il aurait fait
preuve de lâcheté en tuant sa victime alors que celle-ci n'avait aucune
possibilité d'échapper à sa volonté et qu'elle était tombée en tentant de fuir.
Le fait qu'il avait tiré en étant pleinement conscient qu'elle avait peur de
mourir et qu'elle l'implorait de ne pas mettre son dessein à exécution ainsi
que la circonstance qu'il avait pris le risque, réalisé en l'espèce, que ses
enfants découvrent le corps de leur mère, révéleraient également le caractère
particulièrement odieux de son acte, qui devrait, compte tenu de tous ces
éléments, être qualifié d'assassinat.

4.3 Etayée par de très nombreuses références aux pièces du dossier,
l'argumentation du Ministère public s'écarte, sur nombre de points, de l'état
de fait ressortant de la décision entreprise, qui ne fournit, en particulier,
guère de précisions quant à l'état d'esprit de la victime le soir du drame et
ne constate pas non plus qu'elle aurait imploré X.________. En ce qui concerne
la présence des enfants, la cour cantonale a retenu que X.________ n'avait pas
voulu cette circonstance, soit qu'il n'y avait pas pensé au moment d'agir. En
soutenant que l'auteur aurait, au contraire, délibérément choisi de tuer la
mère de ses enfants en présence de celles-ci, le recourant s'écarte également
de manière inadmissible des constatations de fait de la décision entreprise. Le
recours est irrecevable dans cette mesure.

4.4 La préméditation, au sens d'une planification froide de l'acte peut certes
constituer un indice de l'absence particulière de scrupules de l'auteur. En
tant que cette notion vise aussi le travail qui se fait dans l'esprit de
celui-ci avant qu'il commette son acte et qui le conduit à l'exécuter
(Überlegung, entendue au sens de Vorbedacht; v. déjà en relation avec l'ancien
art. 112 CP dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 1989: ATF 70 IV 5
consid. 2 p. 7; CHRISTIAN SCHWARZENEGGER, BSK Strafrecht II, 2e éd. 2007, art.
112 CP n. 4; STEFAN DISCH, L'homicide intentionnel, 1999, p. 292 s.), on doit
cependant se demander si ce débat intérieur ne traduit pas par lui-même
l'existence de scrupules (DISCH, op. cit., p. 320; SCHWARZENEGGER, op. cit.,
art. 112 CP, n. 22; STRATENWERTH, JENNY, BOMMER, Schweizerisches Strafrecht, BT
I, 7e éd. 2010, § 1 n. 25; TRECHSEL ET AL., Schweizerisches Strafgesetzbuch,
Praxis Kommentar, 2008, art. 112 CP n. 16) et s'interroger, cas échéant, sur la
manière dont l'auteur a évacué ses scrupules initiaux (SCHWARZENEGGER, op.
cit., art. 112 CP, n. 4). C'est, en l'espèce, précisément ce qu'a fait la cour
cantonale en retenant notamment, à la suite de l'expert psychiatre, que
X.________ avait été ballotté par des émotions qu'il ne pouvait ni lire ni
intégrer et qu'il avait eu des scrupules dans la période précédant l'acte, en
décidant de consulter un psychiatre. Etant précisé que ces éléments
psychologiques (accentuation de traits de personnalité alexithymiques) n'ont,
selon ce spécialiste, pas valeur d'un trouble mental (expertise E.________ p.
19), la cour cantonale pouvait les prendre en considération sous l'angle moral
objectif, dans la qualification de l'acte (cf. arrêts 6B_719/2009 du 3 décembre
2009 consid. 2.3; 6S.780/1997 du 22 décembre 1997 consid. 1a; 6S.357/2004 du 20
octobre 2004 consid. 2.2; BERNARD CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol.
I, art. 112 CP, n. 4; sur les limites de la distinction, v. : SCHWARZENEGGER,
op. cit., art. 112 CP n. 4). Il résulte de ce qui précède que le recourant ne
démontre pas en quoi l'appréciation de l'autorité cantonale serait critiquable
et qu'il ne peut, en particulier, rien déduire en sa faveur du caractère
prémédité de l'acte.

4.5 En ce qui concerne la perfidie, il est vrai que l'exploitation de la
confiance de la victime est susceptible de dénoter l'absence de scrupules. La
jurisprudence l'a retenu, par exemple, s'agissant d'un auteur qui avait donné
rendez-vous à la victime, qu'il avait mise enceinte, en lui faisant croire
qu'il avait organisé un avortement, alors qu'il s'agissait de la tuer (ATF 101
IV 279 consid. 2 p. 282 s.) ou de celui qui avait prétexté une discussion sur
la répartition des meubles pour convaincre son épouse dont il était séparé, de
venir chez lui avec l'intention de la tuer ou tout au moins qui avait organisé
un guet-apens (ATF 106 IV 342 consid. 3 p. 345). De telles circonstances ne
sont cependant pas réalisées en l'espèce. L'arrêt entrepris ne constate pas, en
effet, que X.________ aurait fallacieusement organisé la rencontre du 6 janvier
2008 dans le but de tuer son épouse. Par ailleurs, si l'intéressé s'était muni,
pour ce rendez-vous, du matériel qu'il avait préparé, comprenant une arme,
l'arrêt entrepris ne constate pas non plus qu'il avait la ferme intention de
tuer son épouse, en tout hypothèse, en se rendant à ce rendez-vous. Il ressort,
du reste, de l'expertise psychiatrique, que X.________ cherchait apparemment à
se convaincre que la réussite de la discussion qu'il prévoyait à propos de
l'extension du droit de garde le dispenserait de mettre à exécution un plan qui
devenait ainsi plus facile à organiser et qu'un certain nombre d'événements
survenus au cours de la soirée (vision de photographies de son ex-épouse
embrassant un ami et perspectives de voyage des deux intéressés) ont pu
fonctionner comme une sorte de condensé venant confirmer l'histoire d'une
trahison délibérée que X.________ s'était construite depuis fin août (expertise
E.________, p. 23). Ces éléments, qui confirment la dimension émotionnelle des
faits, ne plaident pas en faveur de la thèse d'une exploitation délibérée et
perfide de la confiance de la victime.

4.6 En définitive, même si l'acte n'apparaît dénué ni de lâcheté - dans la
mesure où X.________ a abattu son ex-épouse dans des circonstances qui ne lui
laissaient aucune chance - ni d'égoïsme en tant qu'il est le fait d'un homme
jaloux, les circonstances relevées par la cour cantonale mettent,
parallèlement, en évidence une certaine dimension émotionnelle dans les faits
qui ont conduit à l'acte, l'existence d'un débat intérieur dénotant certains
scrupules dans la phase précédant l'homicide ainsi que la dimension du
désespoir de l'auteur, soit d'un certain désarroi de ce dernier (v. infra
consid. 6). Si ces éléments ne peuvent rendre entièrement compréhensible, à
l'aune de critères moraux objectifs, le fait que X.________ a supprimé son
ex-épouse, ils ne dénotent pas non plus, compte tenu de l'implication
émotionnelle des circonstances, le mépris le plus complet pour la vie d'autrui,
respectivement un égoïsme primaire et odieux, mais plutôt le désespoir et le
désarroi. En définitive, aucun des éléments discutés par le recourant,
appréhendé seul ou globalement, ne dénote suffisamment une absence de scrupules
telle quelle démarquerait nettement, en l'espèce, l'assassinat du meurtre. La
cour cantonale pouvait ainsi, sans violer le droit fédéral, retenir cette
dernière qualification en l'espèce.
Recours de X.________

5.
X.________ soutient, de son côté, que l'acte devrait être qualifié de meurtre
passionnel (art. 113 CP) et qu'une responsabilité diminuée devrait lui être
reconnue (art. 19 CP). Il reproche aussi, dans ce contexte, à la cour cantonale
de lui avoir refusé le droit d'administrer certaines preuves.

5.1 Le recours de X.________ s'ouvre sur une vingtaine de pages intitulées «
Les faits », dans lesquelles le recourant présente sa propre vision des
événements. Il n'y a pas lieu de s'arrêter sur ces développements, qui ne
répondent pas aux exigences de recevabilité de critiques relatives aux faits
(v. supra consid. 2). Ses griefs déduits de l'application des art. 19 et 113 CP
consistent, par ailleurs, en de longs développements. Ceux-ci comportent
indistinctement et sans structure claire des critiques au sujet de l'expertise
psychiatrique sur laquelle s'est fondée la cour cantonale. Le recourant y
oppose l'expertise pharmacologique privée qu'il a produite. Il rediscute ainsi
les faits constatés par la cour cantonale et son appréciation au regard des
éléments sur lesquels se sont fondés les deux experts précités en formulant des
critiques sur le refus de la cour cantonale d'ordonner une contre-expertise ou
un complément d'expertise pharmaco-psychologique. Ces développements, largement
appellatoires, sont eux aussi irrecevables dans cette mesure. Ainsi, en
particulier, de l'affirmation, non étayée, que le dossier comporterait de
nombreux éléments qui démontreraient que la victime aurait, au cours de la
soirée du 6 janvier 2008, tenu des propos particulièrement blessants qui
auraient déclenché une pulsion longtemps retenue. Les critiques du recourant
sont, de surcroît, irrecevables en tant qu'il discute, sur plusieurs points, le
jugement de première instance, qui n'est pas l'objet du présent recours (art.
80 al. 1 LTF).

5.2 Le recourant reproche à la cour cantonale, au titre de la violation de son
droit à un procès équitable et de son droit d'être entendu, d'avoir refusé
d'entendre le témoin F.________.

Par décision de procédure du 3 octobre 2011, la cour cantonale a indiqué qu'il
convenait d'écarter l'audition de cette personne, curatrice des enfants, qui
aurait été censée relater les faits que ces dernières lui auraient confiés à la
veille de l'audience de jugement. La cour a considéré que, compte tenu de la
nature de l'affaire, de l'âge des enfants au moment des faits, du temps écoulé
depuis lors et des répercussions extraordinairement difficiles à saisir et
mesurer que l'homicide de leur mère par leur père a immanquablement entraînées,
il serait hasardeux d'établir le déroulement des faits à partir d'un récit des
enfants, de surcroît rapporté par un tiers.

Le recourant, qui n'expose pas précisément le contenu des droits fondamentaux
qu'il invoque (art. 106 al. 2 LTF), se borne à opposer qu'il s'agissait
d'entendre ce témoin « sur des éléments de nature à mieux apprécier le
caractère passionnel de l'acte » (Mémoire p. 22), à mentionner que l'audition
de la tutrice aurait été utile pour apprécier de façon plus précise l'élément
déclencheur de l'acte et à indiquer que « l'existence de l'altercation qui
aurait été le fait déclencheur n'a pas pu être élucidée, la preuve requise par
la défense ayant été rejetée » (Mémoire, p. 40). Il ne discute d'aucune manière
les motifs de la cour cantonale, de sorte que ce moyen, faute de toute
argumentation topique, est irrecevable.

6.
Le meurtre passionnel (art. 113 CP) constitue une forme privilégiée d'homicide
intentionnel, qui se distingue par l'état particulier dans lequel se trouvait
l'auteur au moment d'agir. Celui-ci doit avoir tué alors qu'il était en proie à
une émotion violente ou se trouvait dans un profond désarroi, état devant avoir
été rendu excusable par les circonstances (ATF 119 IV 202 consid. 2a p. 204).
Ce n'est pas l'acte commis qui doit être excusable, mais l'état dans lequel se
trouvait l'auteur. Le plus souvent, cet état est rendu excusable par le
comportement blâmable de la victime à son égard. Il peut cependant aussi l'être
par le comportement d'un tiers ou par des circonstances objectives (ATF 119 IV
202 consid. 2a p. 204 s.). L'application de l'art. 113 CP est réservée à des
circonstances dramatiques dues principalement à des causes échappant à la
volonté de l'auteur et qui s'imposent à lui (ATF 119 IV 202 consid. 2a p. 205).
Pour que son état soit excusable, l'auteur ne doit pas être responsable ou
principalement responsable de la situation conflictuelle qui le provoque (ATF
118 IV 233 consid. 2b p. 238; 107 IV 103 consid. 2b/bb p. 106). Il faut
procéder à une appréciation objective des causes et déterminer si un homme
raisonnable, de la même condition que l'auteur et placé dans une situation
identique, se trouverait facilement dans un tel état (ATF 107 IV 103 consid. 2b
/bb p. 106). Il convient à cet égard de tenir compte de la condition
personnelle de l'auteur, notamment de son éducation et de son mode de vie, en
écartant les traits de caractère anormaux ou particuliers, tels qu'une
irritabilité marquée ou une jalousie maladive, qui ne peuvent être pris en
considération que dans l'appréciation de la culpabilité (ATF 108 IV 99 consid.
3b p. 102; 107 IV 103 consid. 2b/bb p. 106).

6.1 Le recourant discute, dans ce contexte, l'influence sur son état d'esprit
des anti-dépresseurs de la classe des inhibiteurs sélectifs de la recapture de
la sérotonine (ISRS), qui auraient, selon lui, en causant de graves troubles
comportementaux, respectivement un dysfonctionnement psychique, favorisé un
passage à l'acte hétéro-agressif. Cette argumentation, fondée sur l'allégation
d'un état psychique perturbé par les médicaments est sans pertinence pour
l'application de l'art. 113 CP. On l'examinera ci-dessous, en relation avec les
griefs relatifs à l'art. 19 CP.

6.2 Selon la cour cantonale, les événements tels qu'ils ont été décrits par le
recourant permettaient d'exclure une émotion violente qui se serait produite
brusquement, le submergeant et le poussant à un acte irréfléchi en relation à
ce qui n'aurait pu être qu'une provocation particulièrement injuste de la part
de la victime, qui aurait poussé tout homme raisonnable placé dans la même
situation à agir de la même manière. On pouvait, en revanche, admettre qu'il
était aux prises avec un certain désarroi. La rapide procédure de divorce à
laquelle il avait été mêlé (et qu'il avait lui-même provoquée en réponse à la
demande de séparation de son ex-épouse) n'avait rien présenté de bien
particulier. Toutefois, on comprenait que pour lui un divorce ne revêtait pas
un caractère définitif et qu'il n'avait pas renoncé à tout espoir de renouer
avec son ex-épouse. Cette attente avait été déçue lorsqu'il avait appris
l'existence d'un nouveau compagnon dans la vie de A.________. En plus de rendre
vains ses espoirs de réconciliation, ce nouveau compagnon pouvait lui donner
l'impression d'être remplacé au quotidien comme père de ses enfants et exclu de
cette famille (au sens large) qui se reconstituait. Dans ce contexte, on
pouvait comprendre sa demande de modification du jugement de divorce comme une
tentative - peu adroite et qui avait eu pour effet de heurter son ex-épouse -
de regagner un statut de père de ses enfants qu'il sentait, à tort ou à raison,
lui échapper. Cette situation n'était cependant pas sans issue et X.________
disposait au contraire des ressources nécessaires notamment sur le plan
intellectuel et moral, pour résoudre autrement que par un homicide la
problématique qui se présentait à lui. Il avait d'ailleurs su mobiliser, dans
un premier temps, ces ressources puisqu'il avait consulté un psychiatre. On ne
pouvait dire que son désarroi aurait été profond et surtout excusable, en ce
sens que toute personne placée dans la même situation que lui, possédant
l'éducation et les ressources morales et éthiques qui étaient les siennes en
tant que médecin socialement intégré, exerçant son art en indépendant, n'aurait
vu et n'aurait eu comme seule solution que la mort de son ex-épouse, mère de
deux jeunes enfants.

6.3 En résumé, le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir insuffisamment
instruit la question de l'émotion violente en ignorant que la victime avait
tenu des propos blessants, qui auraient constitué une ultime offense,
respectivement en refusant d'ordonner, sur ce point l'audition du témoin
F.________. Ainsi articulé, le grief déduit de la violation de l'art. 113 CP se
confond avec ceux, examinés ci-dessus, relatifs à l'établissement des faits. On
peut se limiter à renvoyer à ce qui a été exposé au sujet de la recevabilité de
ces critiques (v. supra consid. 5.1 et 5.2).

6.4 En ce qui concerne le désarroi, le recourant soutient, en substance,
abstraction faite de ses vains développements relatifs à son état psychique et
à l'effet des médicaments anti-dépresseurs (v. supra consid. 6.1), que le
désespoir traduit par son geste, les frustrations quotidiennes qu'il a
endurées, les pulsions contre lesquelles il a lutté, en relation avec son
sentiment d'avoir été trahi et d'avoir perdu son statut de père,
constitueraient un profond désarroi au sens de l'art. 113 CP.

La cour cantonale n'a cependant pas ignoré ces éléments en considérant
l'existence d'un certain désarroi en relation avec la situation du recourant
ensuite de son divorce. Mais elle a jugé que cette situation n'était pas sans
issue compte tenu des ressources intellectuelles et morales du recourant. Cette
appréciation n'est pas critiquable et le recourant n'explique pas non plus ce
qui, hormis les éléments d'ordre psycho-pathologique qu'il invoque inutilement
dans ce contexte, conduirait à conclure que tout homme raisonnable, de la même
condition que lui et placé dans une situation identique, se trouverait dans un
désarroi tel qu'il ne pourrait envisager d'autre solution que l'homicide. Le
grief est infondé dans la mesure où il est recevable.

7.
X.________ soutient, enfin, que sa responsabilité devrait être tenue pour
restreinte (art. 19 CP) en raison de l'effet des anti-dépresseurs qu'il
consommait. Il reproche à la cour cantonale d'avoir retenu une responsabilité
entière en se fondant sur les conclusions de l'expert psychiatre et en rejetant
celles, opposées, du rapport pharmacologique qu'il a produit en procédure.

7.1 Lorsque l'autorité cantonale se rallie au résultat d'une expertise, le
Tribunal fédéral n'admet le grief d'appréciation arbitraire des preuves que si
l'expert n'a pas répondu aux questions, si ses conclusions sont contradictoires
ou si, de quelque autre manière, l'expertise est entachée de défauts à ce point
évidents et reconnaissables, même en l'absence de connaissances ad hoc, qu'il
n'était tout simplement pas possible de les ignorer. Il ne lui appartient pas
de vérifier que toutes les affirmations de l'expert sont exemptes d'arbitraire.
Sa tâche se limite à examiner si l'autorité cantonale pouvait, sans arbitraire,
faire siennes les conclusions de l'expertise (ATF 128 I 81 consid. 2 in fine p.
86). Dans ce contexte, si une expertise privée n'a pas la même valeur probante
qu'une expertise judiciaire (ATF 137 II 266 consid. 3.2 p. 270 s.), le juge
n'en est pas moins tenu d'examiner, dans les limites précitées, si elle est
propre à mettre en doute, sur les points litigieux importants, l'opinion et les
conclusions de l'expert mandaté par l'autorité (ATF 125 V 351 consid. 3c p.
354).

7.2 En l'espèce, les autorités cantonales ont confié au Dr E.________,
psychiatre et psychothérapeute FMH, le mandat de procéder à une expertise
psychiatrique. Dans un rapport du 10 juin 2008, ce spécialiste a conclu que
X.________ présentait au moment des faits un trouble de l'adaptation. On
discernait également chez lui une accentuation de traits de personnalité
alexithymique et anankastique. Dans l'ensemble, le trouble pouvait être
considéré comme léger. Les facultés d'apprécier le caractère illicite de l'acte
et de se déterminer en conséquence n'étaient pas altérées. Invité à se
déterminer sur des questions complémentaires, notamment sur l'éventuel effet
d'anti-dépresseurs de la classe des ISRS sur le comportement de X.________,
l'expert a complété son rapport, le 2 octobre 2008. Selon lui, « si le
recourant était sous l'influence d'une telle médication, il n'y a aucun élément
suggérant qu'elle aurait pu conduire à une des complications susceptibles selon
J.________ de favoriser un passage à l'acte: il n'y a pas eu de symptômes
psychotiques ni d'état d'agitation et Monsieur X.________ n'a pas présenté
d'acathisie [réd.: impossibilité de rester immobile et de conserver d'une
manière prolongée une position, même confortable, des membres inférieurs]. La
notion d' « émoussement émotionnel » a un caractère relativement «
impressionniste » et ne peut guère être invoquée dans un tel débat. L'expertisé
affirme avoir ressenti « un peu plus de pep » sous l'effet du médicament qu'il
dit avoir pris. Cela ne va pas dans le sens d'un émoussement émotionnel »
(rapport E.________, p. 10).

De son côté, le recourant a fait appel au Dr G.________, médecin adjoint, chef
de service a.i. auprès de la Division de pharmacologie et toxicologie clinique
de H.________, à titre de « témoin-expert ». Dans un rapport du 9 août 2010, ce
praticien, après avoir résumé les faits décrivant le comportement du recourant
dans les mois précédant le drame, expose que « la prise de fluoxétine ou de
médicaments similaires peut déclencher des modifications neuropsychiques
associant à divers degrés une activation mentale, une impatience sans objet, un
« bouillonnement intérieur » accompagné d'anxiété, d'euphorie ou d'indifférence
émotionnelle, des préoccupations obsédantes, une irritabilité, une impulsivité,
une désinhibition, une sueur et des troubles digestifs [...] regroupés sous
différentes appellations telles que syndrome d'activation, acathisie ou
syndrome sérotoninergique. La présentation de ce trouble peut mêler en
proportions très variables les symptômes somatiques et les manifestations
psychiques » (Rapport G.________, p. 190). Il conclut que « les éléments
d'observation disponibles concordent avec l'hypothèse d'un syndrome
sérotoninergique d'activation mentale induit par la fluoxétine (Fluctine), et
encore déséquilibré suite au passage à la fluvoxamine (Floxyfral) » (Rapport
G.________, p. 195).

7.3 Face à ces conclusions divergentes, la cour cantonale a considéré, en
résumé, que l'avis des deux experts n'était pas sensiblement différent au plan
théorique. Elle a suivi le rapport, jugé fouillé et nuancé, du psychiatre en
relevant que ce dernier avait pu observer de visu l'expertisé peu après les
faits et que ses constatations étaient corroborées par celles d'autres
personnes qui avaient côtoyé X.________ à ce moment-là. A l'inverse, le
pharmacologue s'était basé sur les dires que l'expertisé lui avait livrés après
plus de deux ans d'instruction et sur ce qu'avait pu lui en dire également le
Dr I.________, thérapeute du recourant, dont on savait que son patient ne
l'avait pas entièrement renseigné. La cour a également exposé, en se référant à
l'expérience générale, que les déceptions amoureuses et les ruptures
sentimentales mal vécues constituaient la claire majorité des cas d'homicide,
de sorte que, contrairement à l'avis du pharmacologue, la médication en cause
n'était pas la seule explication plausible au geste du recourant. X.________,
qui avait vécu une telle situation, ne présentait pas les facteurs de risques
particuliers liés à la prise de tels médicaments (jeune âge, dépression
majeure). Il avait agi de manière réfléchie avant, pendant et après les faits
et n'avait pas donné l'impression de se réveiller d'un mauvais rêve après les
faits. Les conditions pour envisager une nouvelle expertise n'était pas réunies
et une telle démarche n'aurait eu un sens que s'il avait été possible de
procéder à une nouvelle appréciation clinique de l'état de santé mentale du
recourant en janvier 2008, ce qui, quatre ans après les faits, était clairement
impossible. L'autorité cantonale en a conclu que le médicament antidépresseur
que X.________ prenait depuis quelques jours en auto-médication, s'il avait
éventuellement joué un rôle facilitateur d'un passage à l'acte, ne l'avait fait
que dans une mesure marginale qui était restée sans influence sur la
responsabilité pénale du recourant, qui devait être tenue pour entière.

7.4 Le recourant soutient que cette appréciation des preuves serait arbitraire.
Selon lui, la cour cantonale aurait méconnu ou sous-estimé les effets des
anti-dépresseurs de la classe des ISRS sur les personnes âgées ou d'âge moyen
en privilégiant une statistique qui concernait essentiellement des jeunes de
moins de 25 ans présentant un état dépressif majeur. Le recourant oppose un
certain nombre de cas, sous forme de tableau, dans lesquels des décisions
judiciaires auraient retenu l'influence de tels médicaments en relation avec
des actes de violence commis par des personnes de plus de 30 ans. Il se réfère
également à quelques faits divers dans lesquels l'influence des ISRS a été
suspectée et en conclut que la cour cantonale aurait sombré dans l'arbitraire
en substituant son raisonnement à celui du témoin-expert. Elle aurait
arbitrairement retenu qu'il n'était pas dans un état de dépression majeure et
même dans l'hypothèse d'une telle dépression il ne serait pas soutenable de
nier l'existence de symptômes purement psychiques au motif de l'absence de
symptômes de dépression majeure ou d'acathisie. Le recourant relève, dans ce
contexte, que l'expert psychiatre prescrivait lui-même des ISRS à ses patients
et reproche aussi à la cour cantonale de n'avoir pas permis au Dr G.________ de
prendre position sur les déclarations du Dr E.________ à l'audience du 6
décembre 2011. La cour cantonale aurait également fondé de manière arbitraire
ses conclusions sur la constatation qu'il n'avait, à aucun moment, donné
l'impression de se réveiller d'un mauvais rêve. Il relève, à ce propos qu'il
était sous ISRS depuis l'automne 2007 et l'était toujours lors des premiers
mois de son incarcération ainsi qu'au moment où il avait été vu pour la
première fois par le Dr E.________. Selon lui, ses aveux spontanés et l'étalage
de ses fantasmes, y compris devant le psychiatre, dénoteraient l'effet de ces
médicaments, sous la forme d'une « agitation psychique », que traduirait
également un passage à l'acte brouillon et incohérent. Une nouvelle expertise
ou une contre-expertise se serait imposée en raison de la non-reconnaissance
par l'expert E.________ de l'existence de symptômes psychiques isolés (sans
acathisie) ainsi que du fait que le recourant était toujours sous
anti-dépresseurs lorsque cet expert l'avait examiné. Il serait, de même,
inadmissible de refuser une contre-expertise en raison de l'écoulement du temps
alors que le recourant n'avait cessé de la demander tout au long de
l'instruction et alors que divers précédents judiciaires, ainsi que des études
scientifiques, établiraient que de tels effets psychiques peuvent exister sans
manifestations physiques, ce qui démontrerait l'arbitraire de l'appréciation de
la cour cantonale.

7.5 A la lecture des deux expertises, il apparaît que les avis des deux
spécialistes divergent sur la question de la démonstration scientifique de
l'influence des anti-dépresseurs de la classe des ISRS dans des comportements
auto ou hétéro-agressifs de patients auxquels ils ont été dispensés (toxicité
comportementale). Cependant que pour le Dr E.________ il n'y a pas de preuves
convaincantes étayant un lien entre l'usage de la fluoxétine ou d'autres ISRS
et des comportements violents ou suicidaires (rapport complémentaire
E.________, p. 10), cette conclusion n'est pas tenable, d'un point de vue
pharmacologique, pour le Dr G.________ (expertise G.________, p. 13).
Contrairement à ce que soutient le recourant, cette divergence ne conduit
cependant pas nécessairement à nier toute valeur probante à l'expertise
psychiatrique. Amplement documentées, les deux analyses font état d'une large
palette d'études aboutissant à des résultats différents en tout ou partie.
L'expert G.________ se réfère, en particulier, à de nombreuses reprises, à
l'opinion du psychiatre américain J.________, connu pour être intervenu en
qualité d'expert dans divers procès aux Etat-unis ayant abouti à la
reconnaissance judiciaire de tels effets. L'expert E.________ cite, de son
côté, divers travaux critiquant la méthodologie de cet auteur, les études sur
lesquelles il se fonde, ainsi que ses conclusions. En donnant chacun la
préférence à une lecture de cet état de la recherche scientifique, les avis des
deux experts paraissent principalement refléter l'absence d'unanimité ou, tout
au moins, d'un consensus large au sein de la communauté scientifique.
L'argumentation déduite par le recourant de cas dans lesquels la justice aurait
reconnu l'influence de tels médicaments sur des auteurs de plus de 25 ans n'y
change rien. Quant au fait que l'expert E.________ prescrive de tels
médicaments à ses patients, il reflète non seulement les convictions
scientifiques de cet expert mais aussi une pratique très répandue en
psychiatrie voire en médecine générale. Selon le Dr G.________, ces
médicaments, dont l'action bénéfique est bien établie dans la dépression
majeure, ont en effet progressivement supplanté les autres anti-dépresseurs au
cours des années 90 et ont été de plus en plus largement prescrits dans toutes
sortes d'indications telles que dépressions légères, les troubles anxieux, les
phobies sociales, les troubles obsessionnels compulsifs et les crises de
boulimie (Rapport G.________, p. 8). La circonstance invoquée par le recourant
ne suffit donc pas à nier d'emblée toute crédibilité à l'expert psychiatre.
Quoi qu'il en soit, il n'incombe pas à la cour de céans de trancher
définitivement ce débat scientifique. Il s'agit uniquement d'examiner, sous
l'angle de l'arbitraire, s'il était insoutenable, en se référant aux
conclusions de l'expert psychiatre, de retenir qu'en l'espèce il n'était pas
démontré que les anti-dépresseurs en question avaient joué un rôle. Or, si
l'expert E.________ nie la démonstration scientifique d'un tel effet en général
et exprime des doutes sur la prise d'ISRS par le recourant avant les faits, il
n'en a pas moins examiné cette hypothèse (expertise E.________ p. 10; v. supra
consid. 7.2).

7.6 En tant qu'il discute la qualification diagnostique de son état dépressif
comme majeur ou non, qu'il tente de démontrer que son passage à l'acte «
brouillon et incohérent », ses aveux en cours d'instruction, ses déclarations
au psychiatre et, plus généralement, son comportement après les faits
signeraient une « agitation psychique » résultant de l'effet des
anti-dépresseurs au moment des faits puis de la poursuite de la médication en
cause en détention, le recourant se borne à exposer sa propre lecture des faits
au plan médical, qui ne trouve pas appui dans le rapport du Dr G.________.
Cette argumentation n'est, dès lors, pas de nature à démontrer en quoi la cour
cantonale serait tombée dans l'arbitraire en suivant les conclusions de
l'expert judiciaire. On peut également relever, dans ce contexte, que les
fantasmes que le recourant a conçus de la disparition, d'abord accidentelle, de
son ex-épouse sont apparus dès août 2007 et que, selon le Dr G.________, c'est
par une immersion dans le travail qu'il s'est efforcé, dans un premier temps,
de lutter contre ces ruminations de plus en plus pervasives, entreprenant,
parallèlement, des démarches juridiques afin de renégocier les clauses de son
divorce (Rapport G.________, p. 4). Cette période apparaît également marquée
par une tension croissante, des troubles du sommeil, un certain laisser-aller
physique et une augmentation du stress au travail pour faire face à ses
obligations financières (Rapport E.________, p. 11). C'est dans ce contexte que
X.________ a consulté le Dr I.________, sans toutefois lui faire part de ses
idées morbides. Ces éléments démontrent ainsi déjà que les fantasmes morbides
du recourant, sa fuite dans le travail et les insomnies sont apparus durant une
période largement antérieure à la prescription de fluctine (début novembre
2007; Rapport G.________, p. 185) et plus encore à la prise de fluvoxamine
(mi-décembre 2007; Rapport G.________, p. 186). Sur ce point, l'analyse du Dr
E.________, qui impute ces comportements du recourant à sa personnalité
alexithymique avec des traits anankastiques, apparaît ainsi convaincante. Dans
son rapport, le Dr G.________ n'expose, ensuite, pas précisément les éléments
d'observation disponibles qui, selon lui, concorderaient avec l'hypothèse d'un
syndrome sérotoninergique d'activation mentale. Son analyse ne permet, dès
lors, pas de comprendre précisément ce qui, dans le comportement du recourant,
dénoterait incontestablement, à un moment donné après la prise des
anti-dépresseurs, l'influence de ces substances et pourquoi l'approche
psychiatrique du Dr E.________ ne pourrait pas, à elle seule, expliquer les
mécanismes psychiques qui ont conduit le recourant à agir.

Pour le surplus, il ne ressort ni de l'arrêt entrepris ni du dossier de la
cause que la cour cantonale aurait, principalement, fondé son opinion sur les
explications fournies par les deux spécialistes en audience. Le rapport du
pharmacologue a été établi postérieurement aux deux rapports du psychiatre, et
le premier praticien a, ainsi, pu discuter les conclusions du second. Le
recourant ne peut, en conséquence, rien déduire en sa faveur de son
argumentation relative à l'ordre dans lequel ces deux médecins ont été entendus
et à ce qu'il affirme avoir été dit par ces praticiens en audience. On ne
saurait, dans ces conditions, reprocher à la cour cantonale d'être tombée dans
l'arbitraire en préférant les conclusions de l'expert judiciaire à celles du
spécialiste mandaté par le recourant et, s'estimant suffisamment renseignée,
d'avoir refusé d'ordonner une contre-expertise ou une nouvelle expertise.

8.
Les deux recourants ne discutent la quotité de la peine qu'en relation avec les
griefs examinés ci-dessus. On peut se limiter à relever que la privation de
liberté infligée, par 14 ans, demeure dans le cadre légal et à renvoyer aux
considérants de la cour cantonale (art. 109 al. 3 LTF) qui n'apparaissent pas
procéder d'un abus du large pouvoir d'appréciation dont elle disposait en la
matière (v.: ATF 134 IV 17 consid. 2.1 et les références citées).

9.
Les conclusions de X.________ étaient d'emblée vouées à l'échec. L'assistance
judiciaire doit être refusée (art. 64 al. 1 LTF). Il supporte les frais
afférents à son recours, qui seront fixés en tenant compte de sa situation
financière qui n'apparaît pas favorable, en raison de sa détention (art. 65 al.
2 et 66 al. 1 LTF). Bien qu'il succombe dans les conclusions de son propre
recours, il n'y a pas lieu de mettre des frais à la charge du Ministère public
(art. 66 al. 4 LTF). Il n'y a pas lieu non plus d'allouer des dépens à
X.________, qui n'a pas été invité à se déterminer sur ce recours (art. 68 al.
1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Les causes 6B_23/2012 et 6B_46/2012 sont jointes.

2.
Le recours du Ministère public du canton de Neuchâtel est rejeté dans la mesure
où il est recevable.

3.
Le recours de X.________ est rejeté dans la mesure où il est recevable.

4.
L'assistance judiciaire est refusée.

5.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1600 fr., sont mis à la charge de X.________.

6.
Il n'est pas alloué de dépens.

7.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour pénale du Tribunal
cantonal du canton de Neuchâtel.
Lausanne, le 1er novembre 2012
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Mathys

Le Greffier: Vallat