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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.224/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
6B_224/2012

Arrêt du 31 août 2012
Cour de droit pénal

Composition
MM. les Juges fédéraux Mathys, Président,
Schneider et Denys.
Greffière: Mme Gehring.

Participants à la procédure
X.________,
recourant,

contre

Ministère public du canton de Neuchâtel, rue du Pommier 3, 2000 Neuchâtel,
intimé.

Objet
Conduite d'un véhicule automobile au mépris d'un retrait du permis de conduire,

recours contre le jugement de la Cour pénale du Tribunal cantonal du canton de
Neuchâtel du 5 mars 2012.

Faits:

A.
Par jugement du 7 octobre 2011, le Tribunal de police des Montagnes et du
Val-de-Ruz a condamné X.________ à 20 jours-amende à 30 fr. le jour avec sursis
pendant deux ans et à une amende additionnelle de 120 francs - la peine
privative de liberté de substitution s'élevant à 2 jours - pour avoir conduit
le 9 février 2011 au mépris d'une mesure administrative de retrait de son
permis de conduire. Ce jugement est fondé sur les principaux éléments de faits
suivants.
Le 28 septembre 2005, le Service cantonal des automobiles et de la navigation
(SCAN) a constaté l'inaptitude médicale à la conduite de X.________ - qui
souffrait alors d'épilepsie - et prononcé à ce motif le retrait d'une durée
indéterminée de son permis de conduire.
A la faveur d'une intervention chirurgicale pratiquée en avril 2010, la santé
de X.________ s'est stabilisée et les épisodes épileptiques ont cessé. Le
prénommé a alors requis la restitution de son permis de conduire, produisant à
l'appui de sa requête un préavis favorable établi le 30 août 2010 par son
médecin-traitant, le docteur Y.________ (spécialiste FMH en neurologie). Par
lettre du 4 octobre 2010, le SCAN a refusé de lui restituer son permis de
conduire. Il a exposé qu'un délai de carence d'une année devait être observé
entre la restitution du permis de conduire et la dernière crise épileptique,
suivant en cela le préavis négatif de son médecin-conseil ainsi que les
recommandations de la Ligue suisse contre l'épilepsie. Par lettre du 11 octobre
2010, le docteur Y.________ a signalé au SCAN que les recommandations précitées
permettaient d'écourter le délai de carence selon les conclusions du neurologue
et réclamé la restitution immédiate du permis de conduire à X.________, compte
tenu des résultats cliniques présentés par celui-ci. A la suite d'un nouvel
avis de son médecin-conseil préconisant cette fois-ci un délai de carence
limité à 6 mois, le SCAN a requis l'Office fédéral des routes (OFROU) de lui
spécifier si le délai de carence présidant à l'autorisation de conduire des
conducteurs souffrant d'épilepsie active s'évaluait à la lumière des
recommandations publiées sur son site internet ou des directives de la Ligue
suisse contre l'épilepsie. A réception de la détermination de l'OFROU établie
le 24 novembre 2010, le SCAN a confirmé, par lettre du 2 décembre 2010, sa
décision de ne pas rétrocéder son permis de conduire à X.________ avant
l'échéance d'un délai de carence d'une année.
Alors même que son permis de conduire ne lui avait toujours pas été rendu,
X.________ a pris le volant, le 9 février 2011, afin d'effectuer une course
dont ses collègues de travail ne pouvaient pas se charger à sa place.

B.
Statuant par jugement du 5 mars 2012, la Cour pénale du Tribunal cantonal
neuchâtelois a rejeté l'appel formé par X.________.

C.
Ce dernier interjette un recours en matière pénale à l'encontre du jugement
cantonal dont il requiert l'annulation en concluant à son acquittement.
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.

Considérant en droit:

1.
Dans un grief d'ordre formel qu'il convient d'examiner en premier lieu, le
recourant invoque une violation de son droit d'être entendu (art. 29 al. 2
Cst.). Il se plaint de n'avoir pas eu accès à la détermination de l'OFROU sur
la base de laquelle le SCAN s'est fondé pour justifier son refus de lui
restituer son permis de conduire. Le grief est irrecevable, dès lors qu'il a
trait à la procédure administrative de restitution du permis de conduire et non
à la présente procédure pénale dont l'objet est strictement circonscrit à la
condamnation du recourant pour avoir conduit alors qu'il se trouvait sous le
coup d'une mesure administrative de retrait de son permis de conduire depuis le
28 septembre 2005.

2.
2.1 Le recourant conteste s'être rendu coupable de conduite au mépris d'une
mesure administrative de retrait de son permis de conduire. Il explique s'être
cru légitimé à conduire dès lors qu'un neurologue l'avait déclaré apte à
reprendre le volant dès le 30 août 2010. A l'appui de son point de vue, il
invoque la décision du 28 septembre 2005 qui indiquait que son permis de
conduire lui serait restitué sur présentation d'un certificat médical du
neurologue, ainsi que l'art. 11a al. 3 OAC aux termes duquel les épileptiques
sont autorisés à conduire un véhicule automobile dans la mesure où un
neurologue ou un médecin spécialisé dans le traitement de l'épilepsie délivre
un certificat d'aptitude.

2.2 Ce faisant, le recourant n'invoque pas une erreur sur les faits, mais une
erreur sur l'illicéité. L'art. 21 CP dispose à cet égard que quiconque ne sait
ni ne peut savoir au moment d'agir que son comportement est illicite n'agit pas
de manière coupable. Le juge atténue la peine si l'erreur était évitable.

2.3 Le recourant n'allègue pas avoir faussement cru qu'il pouvait conduire sur
la base du seul avis d'un spécialiste en épilepsie, ni qu'un tel avis était
susceptible de se substituer à une décision formelle du SCAN. Quand bien même,
il ne saurait être mis au bénéfice d'une erreur sur l'illicéité dès lors que
son attention avait été expressément attirée sur le fait que le SCAN était seul
compétent pour lui restituer son permis de conduire et que, malgré un avis
médical favorable, celui-ci n'entendait pas le lui rétrocéder avant l'échéance
d'un délai de carence d'une année, de sorte qu'il n'était pas autorisé à
conduire (cf. jugement attaqué p. 6 § 1).
En outre, la décision administrative du 28 septembre 2005 indiquait simplement
que le permis de conduire pourrait être restitué à son titulaire sur production
d'un avis médical favorable, pas que celui-là serait pour autant légitimé à
conduire avant la restitution matérielle de son permis de conduire. L'art. 11a
al. 3 OAC constitue une disposition spéciale qui définit les conditions
préalables auxquelles sont assujettis les sujets souffrant d'épilepsie avant
qu'un permis de conduire puisse leur être délivré. Cette disposition n'institue
aucunement une dérogation qui permettrait à ces personnes de conduire un
véhicule automobile aussitôt qu'un neurologue ou un médecin spécialisé dans le
traitement de leur pathologie leur délivrerait un certificat d'aptitude et
d'anticiper la délivrance ou la restitution formelle de leur permis de conduire
par l'autorité administrative compétente.
De surcroît, le recourant est d'autant moins légitimé à se prévaloir d'une
erreur sur l'illicéité qu'il a déjà été sanctionné administrativement et
pénalement pour une infraction similaire (cf. jugement attaqué p. 6 consid. 4c
et mémoire de recours p. 12).
Sur le vu de ce qui précède, c'est à juste titre que la cour cantonale n'a pas
accordé au recourant le bénéfice d'une erreur sur l'illicéité.

3.
3.1 Le recourant discute la quotité de la peine infligée qu'il considère comme
excessive. Pour l'essentiel, il fait valoir qu'il n'a pas commis de mise en
danger d'autrui comme retenu par les instances cantonales, dès lors que les
médecins l'ont reconnu apte à conduire. Il conteste en outre avoir commis une
infraction grave au sens de l'art. 90 LCR.

3.2 Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de
l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle
de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La
culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger
du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les
motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci
aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation
personnelle et des circonstances extérieures (al. 2). L'art. 47 CP confère un
large pouvoir d'appréciation au juge. Par conséquent, celui-ci ne viole le
droit fédéral en fixant la peine que s'il sort du cadre légal, s'il se fonde
sur des critères étrangers à l'art. 47 CP, s'il omet de prendre en
considération des éléments d'appréciation prévus par cette disposition ou,
enfin, si la peine qu'il prononce est exagérément sévère ou clémente au point
de constituer un abus du pouvoir d'appréciation (ATF 136 IV 55 consid. 5.6 p.
61; 134 IV 17 consid. 2.1).

3.3 La cour cantonale a retenu que l'infraction à la règle selon laquelle nul
ne peut conduire un véhicule automobile sans être titulaire d'un permis de
conduire (art. 10 al. 2 LCR) ne saurait être considérée comme étant de minime
importance attendu qu'elle est sanctionnée d'une peine privative de liberté de
trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire (ancien art. 95 ch. 2 LCR), tout
comme l'art. 90 ch. 2 LCR punit les violations graves de la LCR. Elle ajoute
que le recourant a déjà été condamné pénalement et administrativement pour le
même délit et que son comportement l'a de surcroît exposé à des risques, lui et
les autres usagers de la route. Les agissements qui lui sont reprochés ne
sauraient par conséquent être considérés comme négligeables par rapport à
d'autres cas de conduite sans permis.

3.4 Contrairement à ce que le recourant semble déduire de l'arrêt cantonal, il
n'a pas été condamné pour violation grave d'une règle de la circulation
routière au sens de l'art. 90 ch. 2 LCR. Il a été reconnu coupable d'avoir
enfreint l'art. 10 al. 2 LCR en conduisant un véhicule automobile au mépris
d'une mesure administrative de retrait de son permis et, à ce motif, condamné à
une sanction pénale fondée sur l'ancien art. 95 ch. 2 LCR (selon sa teneur en
vigueur depuis le 1er janvier 2005 jusqu'au 31 décembre 2011 [RO 2002 2767], le
nouvel article 95 LCR n'étant pas plus favorable [art. 2 al. 2 CP]). En se
référant à l'art. 90 ch. 2 LCR qui prévoit une peine identique à celle de
l'art. 95 ch. 2 aLCR (cf. consid. 3.2 supra), la cour cantonale n'a pas
qualifié la culpabilité du recourant de grave, mais s'est bornée à tirer un
parallèle afin de démontrer que l'infraction querellée ne pouvait pas être
considérée comme étant de minime importance.
Cette dernière appréciation n'est pas critiquable. La conduite sous retrait de
permis constitue une forme qualifiée de l'infraction consistant à conduire sans
être au bénéfice d'un permis de conduire, l'élément aggravant découlant du fait
que le conducteur ne se soumet pas à une décision lui retirant son permis de
conduire (cf. YVAN JEANNERET, Les dispositions pénales de la loi sur la
circulation routière, Berne 2007, ch. 68 ad art. 95 LCR). L'auteur doit être
condamné pour le seul fait de n'avoir pas observé une décision lui interdisant
de conduire. La question de savoir si le recourant était apte à conduire ou non
au moment de l'infraction, respectivement les préavis médicaux favorables dont
il entend se prévaloir, ont trait à la procédure de restitution de son permis.
Ils n'ont aucune incidence juridique sur la réalisation de l'infraction prévue
à l'art. 95 ch. 2 aLCR qui est consommée du seul fait que l'auteur conduit
alors qu'il se trouve sous le coup d'une mesure administrative de retrait de
permis. Les motifs du retrait du permis n'interfèrent pas dans l'application de
l'art. 95 ch. 2 aLCR, de sorte qu'il est indifférent de savoir s'il s'agit d'un
retrait d'admonestation ou de sécurité (cf. YVAN JEANNERET, op. cit., ch. 72 ad
art. 95 aLCR). En décider autrement équivaudrait à légitimer la conduite sans
permis et vider les décisions administratives de leur autorité.
S'il est vrai que les rapports médicaux attestent de l'aptitude à conduire du
recourant au moment des faits, son comportement n'en reste pas moins blâmable.
Il savait que le retrait de sécurité prononcé à son encontre n'était pas levé.
Par ailleurs, les autorités cantonales n'ont pas perdu de vue les préavis
favorables à son aptitude à conduire, dans la mesure où il n'a pas fait l'objet
de poursuites pénales pour mise en danger d'autrui. Enfin, le recourant
présentait des antécédents puisqu'il avait déjà été condamné pénalement et
administrativement pour la commission de faits identiques (cf. jugement attaqué
p. 8 lettre b).
Partant, la quotité de la peine retenue à son encontre n'apparaît pas
critiquable au regard de l'infraction commise, de la culpabilité de l'auteur et
de sa situation personnelle. Elle ne relève ni d'un abus, ni d'un excès du
pouvoir d'appréciation dont jouit l'autorité cantonale, laquelle n'a ignoré
aucun des critères déterminants consacrés à l'art. 47 CP. Il s'ensuit qu'il n'y
a pas eu violation du droit fédéral.

4.
Le recourant demande à être exempté de toute peine en application de l'art. 52
CP. Sur le vu du considérant 3.4 qui précède, la culpabilité du recourant n'est
pas de peu d'importance, de sorte que la cour cantonale n'a pas violé le droit
fédéral en ne procédant pas à son exemption pure et simple.

5.
Le recourant, qui succombe, supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour pénale du Tribunal
cantonal du canton de Neuchâtel.

Lausanne, le 31 août 2012

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Mathys

La Greffière: Gehring