Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.196/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
6B_196/2012

Arrêt du 24 janvier 2013
Cour de droit pénal

Composition
MM. et Mme les Juges Mathys, Président,
Schneider, Jacquemoud-Rossari, Denys et Schöbi.
Greffière: Mme Livet.

Participants à la procédure
X.________, représenté par Me Charlotte Iselin, avocate,
recourant,

contre

Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens
VD,
intimé.

Objet
Infraction à la LSEE, infraction à la LEtr, lex mitior,

recours contre le jugement de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du
canton de Vaud du 28 janvier 2012.

Faits:

A.
Par jugement du 21 septembre 2011, le Tribunal de police de l'arrondissement de
la Côte a condamné X.________ pour infraction à la loi fédérale sur le séjour
et l'établissement des étrangers (LSEE) et infraction à la loi fédérale sur les
étrangers (LEtr) à une peine de 90 jours-amende à 10 fr. le jour.

B.
Le 28 janvier 2012, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a admis
l'appel formé par le Ministère public et a condamné X.________ pour infraction
à la LSEE et infraction à la LEtr à une peine privative de liberté de 3 mois.
En substance, il a été reproché à X.________, ressortissant kosovar, d'avoir
séjourné en Suisse sans autorisation entre le 1er novembre 2006 et le 25 mai
2011. Durant la même période, il a exercé, par intermittence, une activité
lucrative sans autorisation auprès de vignerons et maraîchers. En 2007, il a
fait venir son épouse du Kosovo alors qu'elle ne disposait d'aucune
autorisation de séjour. Le casier judiciaire du recourant fait état de deux
condamnations pour infraction à la réglementation sur le séjour des étrangers,
l'une, en 2005, à 10 jours d'emprisonnement avec sursis (révoqué en 2006) et
500 fr. d'amende, l'autre, en 2006, à 15 jours d'emprisonnement et 500 fr.
d'amende.

C.
X.________ forme un recours en matière pénale contre ce jugement. Il conclut,
sous suite de frais et dépens, principalement, à la réforme de la décision
entreprise en ce sens qu'il est condamné à une peine de 90 jours-amende à 10
fr. et, subsidiairement, à l'annulation du jugement et au renvoi de la cause à
l'autorité précédente pour nouvelle instruction et nouveau jugement. Il
sollicite par ailleurs l'assistance judiciaire.

Invités à déposer des observations sur le recours, la cour cantonale y a
renoncé en se référant aux considérants de son jugement, cependant que le
Ministère public a conclu à son rejet. X.________ s'est déterminé sur ces
écritures par courrier du 6 septembre 2012, lequel a été communiqué à titre de
renseignement au Ministère public le 7 septembre 2012.

Considérant en droit:

1.
Invoquant le principe de la lex mitior, le recourant prétend que l'autorité
précédente ne pouvait pas le condamner à une courte peine privative de liberté.
Son comportement ayant duré de novembre 2006 à mai 2011, les dispositions
régissant pénalement le séjour illégal avaient successivement réglé le genre et
la quotité de la peine de trois manières différentes. L'art. 23 al. 1 LSEE dans
sa teneur jusqu'au 31 décembre 2006 punissait le séjour illégal de six mois
d'emprisonnement, l'art. 23 al. 1 LSEE dans sa teneur du 1er janvier au 31
décembre 2007 de 180 jours-amende et l'art. 115 al. 1 LEtr, entré en vigueur le
1er janvier 2008, d'une peine privative de liberté d'un an au plus ou d'une
peine pécuniaire. Selon le recourant, la cour cantonale aurait dû, en vertu du
principe de la lex mitior, appliquer l'art. 23 al. 1 LSEE dans sa version du
1er janvier 2007 à l'ensemble des faits, le recourant ne pouvant ainsi être
condamné qu'à des jours-amende.

1.1 Selon l'art. 2 al. 1 CP, la loi pénale ne s'applique qu'aux faits commis
après son entrée en vigueur (principe de la non-rétroactivité de la loi
pénale). Cependant, en vertu de l'art. 2 al. 2 CP, une loi nouvelle s'applique
aux faits qui lui sont antérieurs si, d'une part, l'auteur est mis en jugement
après son entrée en vigueur et si, d'autre part, elle est plus favorable à
l'auteur que l'ancienne (exception de la lex mitior). Il en découle que l'on
applique en principe la loi en vigueur au moment où l'acte a été commis, à
moins que la nouvelle loi ne soit plus favorable à l'auteur. La règle de la lex
mitior constitue une exception au principe de non-rétroactivité. Elle se
justifie par le fait qu'en raison d'une conception juridique modifiée le
comportement considéré n'apparaît plus ou apparaît moins punissable pénalement
(ATF 134 IV 82 consid. 6.1 p. 86 s.).

L'art. 2 CP s'applique également au droit pénal accessoire, en vertu de l'art.
333 al. 1 CP, lorsqu'il ne dispose pas le contraire.

1.2 Une infraction est dite continue lorsque les actes créant la situation
illégale forment une unité avec ceux qui la perpétuent, ou avec l'omission de
la faire cesser, pour autant que le comportement visant au maintien de l'état
de fait délictueux soit expressément ou implicitement contenu dans les éléments
constitutifs du délit. Le délit continu se caractérise par le fait que la
situation illicite créée par un état de fait ou un comportement contraire au
droit se poursuit. Il est réalisé sitôt accompli le premier acte délictueux,
mais n'est achevé qu'avec la fin ou la suppression de l'état contraire au droit
(ATF 135 IV 6 consid. 3.2 p. 9; ATF 132 IV 49 consid. 3.1.2.2 p. 55).

Le séjour illégal est un délit continu (ATF 135 IV 6 consid. 3.2 p. 9).
L'infraction est achevée au moment où le séjour prend fin.

1.3 En matière de délit continu, la question du droit applicable se pose
lorsque la loi change pendant l'exécution d'un tel délit. Un comportement qui
n'était pas punissable sous l'ancien droit et qui le devient sous le nouveau
sera jugé selon le nouveau droit, mais seule la partie du comportement
postérieure à l'entrée en vigueur du nouveau droit sera punissable,
conformément au principe de la non-rétroactivité. Si la nouvelle loi comporte
uniquement une modification des sanctions, il n'est pas envisageable
d'appliquer deux régimes de peine à un seul et même acte. Le délit continu
constituant une unité, il n'est pas possible d'appliquer pour partie l'ancien
et pour partie le nouveau droit. Le principe de la lex mitior ne permet en
effet pas de combiner ancien et nouveau droit (ATF 134 IV 82 consid. 6.2.3 p.
88 s.; 114 IV 81 consid. 3c p. 82). Pour régler cette question, la doctrine
largement majoritaire propose l'application du nouveau droit à l'ensemble du
délit continu, soit également à la partie antérieure à l'entrée en vigueur de
la nouvelle norme (HURTADO POZO, Droit pénal, partie générale, 2009, p. 109 s.;
repris par POPP/LEVANTE, in Basler Kommentar, Strafgesetzbuch I, 2e éd. 2007,
no 6 ad art. 2 CP; JEAN GAUTHIER, in Commentaire romand, Code pénal I, 2009, no
17 ad art. 2 CP; STEPHAN TRECHSEL ET AL., Schweizerisches Strafgesetzbuch :
Praxiskommentar, 2008, no 5 ad art. 2 CP; DUPUIS ET AL., Code pénal, Petit
commentaire, 2012, no 19 ad. art. 2 CP). Dès lors qu'une norme abrogée ne peut
être appliquée à un comportement postérieur à son abrogation et qu'il n'est pas
possible d'appliquer pour partie l'ancien et pour partie le nouveau droit, la
solution doctrinale se justifie. En cas d'aggravation de la sanction prévue par
la loi, il convient toutefois, lors de la fixation de la peine, de tenir
compte, dans un sens atténuant, du fait qu'une partie de l'infraction s'est
déroulée pendant une période où la sanction était moins grave.

1.4 L'art. 115 al. 1 let. b LEtr punit celui qui séjourne illégalement en
Suisse. Avant le 1er janvier 2008, date d'entrée en vigueur de la LEtr, ce
comportement était réprimé par l'article 23 al. 1 LSEE. Les conditions de
punissabilité n'ont pas changé, seul le type de peine et sa quotité maximale
ont été modifiés. Ainsi, le nouveau droit est applicable à l'ensemble du
comportement du recourant pour son séjour illicite de 2006 à 2011. C'est en
vain que le recourant invoque la lex mitior à l'égard de sa condamnation en
vertu de l'art. 115 al. 1 let. b LEtr.

1.5 Le recourant a non seulement été condamné en vertu de l'art. 115 al. 1 let.
b LEtr, mais aussi de l'art. 115 al. 1 let. c, soit deux infractions
distinctes. En application de l'art. 115 al. 1 let. c LEtr, celui qui déploie
une activité lucrative illicite est punissable d'une peine privative de liberté
d'un an au plus ou d'une peine pécuniaire. Avant l'entrée en vigueur de la
LEtr, une telle activité était punie d'une amende jusqu'à 2000 fr. en vertu de
l'art. 23 al. 6 LSEE.

Bien que la cour cantonale ne le dise pas expressément, on comprend de sa
motivation qu'elle a considéré l'activité lucrative illicite du recourant comme
un délit continu, à l'instar de l'infraction pour le séjour illégal réprimée
par l'art. 115 al. 1 let. b LEtr. Ce point de vue ne peut être suivi. En effet,
il ressort du jugement attaqué et du dossier que le recourant a travaillé, par
intermittence, auprès de différents vignerons et maraîchers. Les interruptions
de travail et la pluralité d'employeurs empêchent la qualification de délit
continu. Le comportement du recourant constitue une succession de différents
actes délictueux. Il incombera ainsi à la cour cantonale de déterminer quels
actes délictueux ont été commis avant le 1er janvier 2008 et quels actes ont
été commis après. En application de l'art. 2 al. 1 CP, les actes commis sous
l'ancien droit devront être jugés selon ce droit (art. 23 al. 6 LSEE), qui est
plus favorable que le nouveau puisque le comportement visé n'était punissable
que d'une amende. En revanche, les actes commis sous l'empire du nouveau droit
seront jugés en application de celui-ci. En fixant la peine, le juge aura égard
à la question de la prescription s'agissant des contraventions à l'art. 23 al.
6 LSEE et, le cas échéant, à l'art. 49 al. 1 CP en application duquel des
peines de genre différent doivent être prononcées cumulativement (ATF 137 IV 57
consid. 4.3.1 p. 58).

2.
Le recourant invoque une violation de la Directive du Parlement européen et du
Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes
applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers
en séjour irrégulier (Directive sur le retour 2008/115/CE), intégrée au droit
suisse par l'arrêté fédéral du 18 juin 2010 (RO 2010 5925). Se référant à la
jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (arrêt du 28 avril
2011 C-61/11 PPU El Dridi), il fait valoir que la cour cantonale ne pouvait pas
le condamner dès lors que les dispositions pénales en cas de séjour illégal ne
peuvent intervenir qu'en cas d'échec de la procédure administrative de renvoi.
2.1
2.1.1 Par accord du 26 octobre 2004, entré en vigueur le 1er mars 2008 (Accord
entre la Confédération suisse, l'Union européenne et la Communauté européenne
sur l'association de la Confédération suisse à la mise en ?uvre, à
l'application et au développement de l'acquis de Schengen; RS 0.362.31,
ci-après : AAS), la Suisse s'est engagée à mettre en ?uvre et appliquer
l'acquis de Schengen. C'est ainsi que par arrêté fédéral du 18 juin 2010
(Arrêté fédéral portant approbation et mise en ?uvre de l'échange de notes
entre la Suisse et la CE concernant la reprise de la Directive CE sur le retour
[Directive 2008/115/CE]; RO 2010 5925), elle a repris la Directive sur le
retour faisant partie de l'acquis de Schengen et modifié la LEtr (RS 142.20) et
la loi fédérale sur l'asile (LAsi; RS 142.31) en conséquence.
2.1.2 La Directive sur le retour poursuit la mise en place d'une politique
efficace d'éloignement et de rapatriement fondée sur des normes communes, afin
que les personnes concernées soient rapatriées de façon humaine et dans le
respect intégral de leurs droits fondamentaux ainsi que leur dignité (cf.
Directive 2008/115/CE considérant 2).

Dans deux arrêts récents (arrêts du 28 avril 2011 C-61/11 PPU El Dridi et du 6
décembre 2011 C-329/11 Achughbabian), la Cour de justice de l'Union européenne
(ci-après CJUE) a eu l'occasion d'examiner la compatibilité de législations
prévoyant des peines privatives de liberté au seul motif de l'irrégularité de
l'entrée ou du séjour d'un ressortissant d'un pays tiers. Dans les deux
affaires, il s'agissait de personnes qui se trouvaient en séjour illégal dans
le pays, Italie, respectivement France, et à l'encontre desquelles une
procédure de refoulement avait été engagée. M. El Dridi ne s'était pas conformé
à un ordre d'éloignement du 21 mai 2010. Il avait été condamné par le Tribunal
di Trento à une peine d'un an d'emprisonnement pour ce motif en application du
droit national. Se posait dès lors la question de la compatibilité de cette
sanction qui visait le non-respect d'une des étapes de la procédure
administrative de retour au regard des principes découlant de l'application de
la Directive 2008/115/CE. M. Achughbabian, lui, ne s'était pas conformé à un
arrêté lui faisant obligation de quitter le pays dans un délai d'un mois. Un
arrêté de reconduite à la frontière et un arrêté de placement en rétention
administrative avaient été prononcés contre lui. Le simple arrêté de reconduite
à la frontière, fondé sur la constatation du délit de séjour irrégulier tel
qu'il était défini par le droit national, était susceptible de conduire à une
condamnation à une peine d'emprisonnement.

Dans les deux arrêts, la CJUE a relevé que la Directive sur le retour posait
comme condition à l'adoption de mesures coercitives le respect des principes de
proportionnalité et d'efficacité en ce qui concerne les moyens utilisés et les
objectifs poursuivis. La CJUE en a déduit que les Etats membres ne pouvaient
pas procéder à l'emprisonnement d'un ressortissant étranger en séjour
irrégulier pour la seule raison qu'il continuait de se trouver de manière
irrégulière sur le territoire de l'Etat après qu'un ordre de quitter le
territoire national lui avait été notifié et que le délai imparti dans cet
ordre avait expiré. En effet, selon la CJUE, une telle peine risquait de
compromettre la réalisation de l'objectif poursuivi par ladite directive, à
savoir l'instauration d'une politique efficace d'éloignement et de rapatriement
des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, notamment parce que le
fait de condamner quelqu'un à une peine d'emprisonnement relativement longue
avait nécessairement pour conséquence de retarder l'exécution de la décision de
retour prise à son encontre. La CJUE a donc considéré que la Directive sur le
retour, notamment ses articles 15 et 16, devait être interprétée en ce sens
qu'elle s'opposait à une réglementation d'un Etat membre qui prévoyait le
prononcé d'une peine d'emprisonnement à un ressortissant d'un pays tiers en
séjour irrégulier pour le seul motif que celui-ci demeurait, en violation d'un
ordre de quitter le territoire de cet Etat dans un délai déterminé, sur ledit
territoire sans motif justifié. Autrement dit, selon la jurisprudence
européenne, une peine d'emprisonnement pour séjour illégal ne peut être
infligée à un ressortissant étranger que si la procédure administrative de
renvoi a été menée à son terme sans succès et que le ressortissant étranger
demeure sur le territoire sans motif justifié de non-retour. La CJUE a
toutefois souligné que les ressortissants étrangers ayant, outre le séjour
irrégulier, commis un ou plusieurs autres délits pouvaient, dans les hypothèses
visées par l'art. 2 par. 2 let. b de la Directive sur le retour, c'est-à-dire
en cas d'expulsion judiciaire prononcée comme sanction pénale ou de procédure
d'extradition, être soustraits au champ d'application de ladite directive. A
noter que cette dernière ne s'applique pas non plus aux personnes qui se sont
vu refuser l'entrée dès la frontière extérieure Schengen et qui sont ensuite
appréhendées sur le territoire d'un Etat Schengen, pas plus qu'en cas
d'interdiction d'entrée à la frontière extérieure Schengen (art. 2 par. 2 let.
a Directive sur le retour).
Les principes développés dans ces deux décisions ont été très récemment
confirmés par la CJUE dans un arrêt du 6 décembre 2012 (C-430/11 Sagor). Dans
cette affaire, M. Sagor séjournait en Italie sans avoir jamais eu de titre de
séjour valable. Pour cette raison, il s'exposait à une condamnation pénale sous
forme d'amende. La CJUE a précisé que la Directive sur le retour ne s'opposait
pas à une poursuite pénale et à une condamnation à une peine pécuniaire
réprimant le séjour irrégulier d'un ressortissant d'un Etat tiers, dès lors
qu'une telle peine n'était pas de nature à retarder ou entraver la procédure de
retour.
2.1.3 Contrairement à l'Accord du 21 juin 1999 sur la libre circulation des
personnes (ALCP; RS 0.142.112.681), en particulier son art. 16 al. 2, l'AAS ne
prévoit pas de reprise directe de la jurisprudence européenne. La Suisse, comme
les autres parties, jouit de l'autonomie dans l'interprétation et l'application
de l'acquis de Schengen. Toutefois, comme le rappelle le Conseil fédéral dans
son message, il est dans l'intérêt de toutes les parties que les règles
instaurées par Schengen soient interprétées et appliquées de manière identique
de part et d'autre (Message du 1er octobre 2004 relatif à l'approbation des
accords bilatéraux entre la Suisse et l'Union européenne, y compris les actes
législatifs à la transposition des accords [« accords bilatéraux II »], FF 2004
5593 ss ch. 2.6.7.6). L'AAS a ainsi instauré un comité mixte qui a notamment
pour mission d'observer l'application de cet accord par les différentes
parties. S'il constate une différence substantielle dans l'interprétation et
l'application de l'acquis de Schengen entre les autorités et juridictions
suisses et la CJUE, il peut engager la procédure de règlement des différends
prévue aux art. 9 al. 2 et 10 AAS qui peut aboutir, en cas d'échec, à la
cessation de l'application de l'AAS.

En matière d'ALCP, l'art. 16 al. 2 de cet accord impose aux autorités suisses
de tenir compte des arrêts de la CJUE antérieurs à sa signature. Toutefois, le
Tribunal fédéral a précisé qu'afin de privilégier le parallélisme du système
voulu par les Etats parties à l'ALCP, il n'y avait pas lieu de s'écarter de la
jurisprudence de la CJUE, même postérieure à la signature de l'accord, sans
raison valable (ATF 136 II 5 consid. 3.6.2 p. 15 s; 136 II 65 consid. 3.1 p. 70
s.). En matière de droit privé, le Tribunal fédéral a également rappelé que
lorsque l'ordre juridique suisse avait été adapté au droit européen, on ne
devait pas uniquement viser une harmonisation dans l'adoption des règles, mais
également dans leur interprétation et leur application (ATF 137 II 199 consid.
4.3.1 in fine p. 209 et les références citées).

Au vu de ce qui précède, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les arrêts El
Dridi, Achughbabian ou Sagor, même si une interprétation conforme du droit
suisse doit être privilégiée (cf. ANDREAS ZÜND, in Migrationsrecht, 3e éd.
2012, no 12 ad. art. 115 LEtr). Toutefois, la question de l'éventuelle
interprétation de l'art. 115 LEtr au regard de ces jurisprudences n'a pas à
être examinée dans le présent contexte, dès lors que, pour les motifs qui vont
suivre, le recourant ne se trouve pas dans les hypothèses visées par les arrêts
européens.

2.2 Le recourant a été condamné à une peine privative de liberté de 3 mois pour
avoir séjourné et travaillé illégalement en Suisse.
2.2.1 Sur le principe, la condamnation du recourant pour son activité lucrative
illicite n'est pas critiquable. En effet, la Directive sur le retour ne
concerne pas un tel comportement. Elle n'est ainsi pas applicable à cet aspect,
pas plus que la jurisprudence précitée de la CJUE qui concerne uniquement la
question du séjour illégal (cf. THOMAS HUGI YAR, Das Urteil El Dridi, die
EU-Rückführungsrichtlinie und der Schengen-Besitzstand, Jusletter du 11 juillet
2011, no 11). La cour cantonale était donc fondée à condamner le recourant pour
infraction à la réglementation sur les étrangers s'agissant de son activité
lucrative sans autorisation. Il conviendra toutefois de tenir compte des
éléments développés au considérant 1.5 supra s'agissant du droit applicable et
de la fixation de la peine.
2.2.2 Pour ce qui est de son séjour illicite, le recourant ne se trouve pas
dans la situation de l'étranger pour lequel aucune procédure de renvoi
administratif n'a été menée à son terme sans succès. Il ressort des faits
établis qu'il a déposé une demande d'asile qui a été rejetée en 2000. Invité à
quitter le territoire suisse, il s'est caché. Il a été refoulé au Kosovo en
2001. Il a donc déjà fait l'objet des mesures coercitives visées par
l'éloignement de l'art. 8 de la Directive 2008/115/CE concrétisée à l'art. 64
LEtr. Il est ensuite revenu en Suisse en 2003.

Le recourant ne saurait ainsi tirer argument de la jurisprudence de la CJUE
concernant la Directive sur le retour, car sa situation n'est pas comparable à
celles visées dans ces affaires. Il ne saurait en particulier être suivi
lorsqu'il soutient que l'Etat doit à nouveau, à la suite de son retour,
procéder à son renvoi forcé en utilisant la palette des mesures prévues par la
Directive. En effet, la jurisprudence de la CJUE doit être interprétée dans ce
sens qu'elle couvre tant l'hypothèse de la personne qui n'a en définitive pas
pu être refoulée que celle qui l'a été et qui revient. Ce qui est déterminant,
comme le retient l'arrêt Achughbabian, c'est que la personne à qui la procédure
de retour a été appliquée, séjourne irrégulièrement sur le territoire sans
motif justifié de non-retour. Aucun motif ne justifie de traiter moins bien le
ressortissant qui est resté, parce qu'il s'est soustrait avec succès à une
procédure de refoulement menée jusqu'à son terme, de celui qui a pu être
refoulé, mais qui est revenu sur le territoire de l'Etat concerné. Dans les
deux hypothèses, il faut retenir l'échec de la procédure de refoulement,
quoique menée à son terme dans le respect des règles de fond et de forme. Le
recourant n'invoque, par ailleurs, aucun motif justifié de non-retour. L'art.
115 LEtr peut donc lui être appliqué, car la peine n'est pas prononcée en cours
ou avant une procédure de retour, mais après l'échec de celle-ci. La cour
cantonale pouvait, par conséquent, condamner le recourant à une peine privative
de liberté. Mal fondé, le grief doit être rejeté.

3.
Le recourant invoque une violation de l'art. 41 CP. Bien que le dossier soit
renvoyé à l'autorité cantonale pour nouvelle fixation de la peine (cf. supra
consid. 1.5), il convient, par économie de procédure, de relever les éléments
suivants.

3.1 Aux termes de l'art. 41 al. 1 CP, le juge peut prononcer une peine
privative de liberté ferme de moins de six mois uniquement si les conditions du
sursis à l'exécution de la peine (art. 42 CP) ne sont pas réunies et s'il y a
lieu d'admettre que ni une peine pécuniaire, ni un travail d'intérêt général ne
peuvent être exécutés.

A titre de sanctions, le Code pénal fait de la peine pécuniaire (art. 34 CP) et
du travail d'intérêt général (art. 37 CP) la règle dans le domaine de la petite
criminalité, respectivement de la peine pécuniaire et de la peine privative de
liberté la règle pour la criminalité moyenne. Dans la conception de la partie
générale du Code pénal, la peine pécuniaire constitue la sanction principale.
Les peines privatives de liberté ne doivent être prononcées que lorsque l'Etat
ne peut garantir d'une autre manière la sécurité publique. Quant au travail
d'intérêt général, il suppose l'accord de l'auteur. En vertu du principe de la
proportionnalité, il y a en règle générale lieu, lorsque plusieurs peines
entrent en considération et apparaissent sanctionner de manière équivalente la
faute, de choisir celle qui restreint le moins sévèrement la liberté
personnelle de l'intéressé, respectivement qui le touche le moins durement. La
peine pécuniaire et le travail d'intérêt général représentent des atteintes
moins importantes et constituent ainsi des peines plus clémentes. Cela résulte
également de l'intention essentielle, qui était au coeur de la révision de la
partie générale du Code pénal en matière de sanction, d'éviter les courtes
peines de prison ou d'arrêt, qui font obstacle à la socialisation de l'auteur,
et de leur substituer d'autres sanctions. Pour choisir la nature de la peine,
le juge doit prendre en considération l'opportunité de la sanction déterminée,
ses effets sur l'auteur et son milieu social, ainsi que son efficacité
préventive (ATF 134 IV 97 consid. 4 p. 100 ss).

3.2 Il convient tout d'abord de déterminer si les conditions du sursis sont
réalisées, première condition posée par l'art. 41 al. 1 CP. Cette question
s'examine selon les critères de l'art. 42 CP qui ont été rappelés dans l'arrêt
publié aux ATF 135 IV 180 consid. 2.1 p. 185 s., auquel il est renvoyé.

Le recourant a fait l'objet de deux condamnations pour infraction à la
réglementation sur le séjour des étrangers, l'une, en 2005, à une peine de 10
jours d'emprisonnement avec sursis (révoqué en 2006) et 500 fr. d'amende,
l'autre, en 2006, à 15 jours d'emprisonnement et 500 fr. d'amende. Il apparaît
ainsi qu'une première condamnation avec sursis n'a pas dissuadé le recourant de
maintenir son comportement contraire au droit. L'exécution d'une peine ferme
n'a pas non plus dissuadé le recourant qui a persisté à rester et à travailler
en Suisse, comportement qui fait l'objet de la présente procédure. Cela ne peut
conduire qu'à un pronostic défavorable. Un sursis est exclu.

3.3 En second lieu, il convient de déterminer si une peine pécuniaire ou un
travail d'intérêt général peuvent être exécuté, seconde condition posée par
l'art. 41 al. 1 CP.

Selon les constations de la cour cantonale, le recourant ne dispose d'aucune
autorisation de séjour ou de travail et son renvoi a été prononcé. Il peut
ainsi à tout moment être expulsé de Suisse. Il s'ensuit que le prononcé d'un
travail d'intérêt général n'entre pas en considération, cette sanction
apparaissant d'emblée inadaptée (ATF 134 IV 60 consid. 3.3 p. 63 s.).

Quant à l'exécution d'une peine pécuniaire, l'autorité précédente a constaté
que le recourant refusait absolument d'admettre l'illicéité de son
comportement, qu'il se cachait pour tenter d'échapper à ses conséquences, qu'il
continuait à affirmer qu'il ne partirait jamais et qu'au regard de ses
antécédents, aucune menace de sanction, ni même l'exécution d'une peine
d'emprisonnement n'avaient pu le détourner de son comportement délictueux. Se
référant à la jurisprudence du Tribunal fédéral (arrêt 6B_128/2011 du 14 juin
2011), elle a retenu que des motifs de prévention spéciale permettaient de
considérer qu'une peine pécuniaire était inexécutable, en particulier lorsque
l'intéressé avait démontré l'inutilité de telle peine et/ou une volonté de ne
pas tenir compte des sanctions prononcées contre lui, et que tel était le cas
en l'espèce. Ce raisonnement ne prête pas le flanc à la critique et la cour
cantonale pouvait exclure le prononcé d'une peine pécuniaire, en se fondant sur
des motifs de prévention spéciale.

3.4 Au vu de ce qui précède, la cour cantonale peut, sans violation du droit
fédéral et à condition que les circonstances personnelles du recourant n'aient
pas subi de changement majeur dans l'intervalle, prononcer une courte peine
privative de liberté ferme à l'encontre du recourant. Le grief est infondé.

4.
Le recourant obtient partiellement gain de cause. Il peut prétendre à une
indemnité de dépens réduite (art. 68 al. 1 LTF). La demande d'assistance
judiciaire est sans objet dans cette mesure. Pour le surplus, bien que rejeté,
le recours n'était pas dénué de chances de succès et la situation économique du
recourant justifie l'octroi de l'assistance judiciaire (art. 64 al. 1 LTF). La
complexité de la cause et les intérêts en jeu permettent qu'un avocat d'office
lui soit désigné et indemnisé par la caisse du tribunal (art. 64 al. 2 LTF). Il
n'y a pas lieu de prélever des frais (art. 66 al. 1 et 4 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est partiellement admis, le jugement attaqué est annulé et la cause
renvoyée à la cour cantonale afin qu'elle rende une nouvelle décision. Pour le
surplus, le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.

3.
L'Etat de Vaud versera au conseil du recourant la somme de 1000 fr. à titre de
dépens.

4.
La demande d'assistance judiciaire du recourant est admise dans la mesure où
elle n'est pas sans objet et Me Charlotte Iselin, avocate à Lausanne lui est
désignée comme conseil d'office.

5.
La caisse du Tribunal fédéral versera une indemnité de 2000 fr. à Me Charlotte
Iselin, au titre de l'assistance judiciaire.

6.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du
Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 24 janvier 2013

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Mathys

La Greffière: Livet