Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.126/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
6B_126/2012

Arrêt du 11 juin 2012
Cour de droit pénal

Composition
Mme et MM. les Juges Mathys, Président,
Jacquemoud-Rossari et Denys.
Greffière: Mme Livet.

Participants à la procédure
X.________,
représenté par Me Jean-Pierre Bloch, avocat,
recourant,

contre

1. Ministère public central du canton de Vaud,
2. La Poste Suisse,
représentée par Me Yves Burnand, avocat,
intimés.

Objet
Vol par métier; fixation de la peine; arbitraire,

recours contre le jugement de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du
canton de Vaud du 8 décembre 2011.

Faits:

A.
Par jugement du 17 août 2011, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de
la Broye et du Nord vaudois a libéré X.________ de l'accusation de vol, l'a
reconnu coupable de vol par métier et de violation du secret des postes et
télécommunications, l'a condamné à 36 mois de peine privative de liberté, sous
déduction de la détention avant jugement, peine partiellement complémentaire à
celle de 9 jours d'emprisonnement prononcée le 18 juin 2003, a suspendu
l'exécution de la peine à raison de 24 mois avec délai d'épreuve de 3 ans, a
ordonné la restitution à La Poste Suisse des montants séquestrés et dit que
X.________ est le débiteur de La Poste Suisse de 404'997 fr., sous déduction
des montants séquestrés restitués, acte étant donné à celle-ci de ses réserves
civiles pour le surplus.

B.
Statuant sur l'appel de X.________, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal
vaudois l'a rejeté par jugement du 8 décembre 2011, ramenant d'office le
montant dû à La Poste Suisse à 401'393 francs. En bref, il est reproché à
X.________, alors qu'il était employé par La Poste Suisse, d'avoir détourné de
nombreux plis bancaires contenant des espèces, du 17 avril 2003 au 25 février
2009, jour de son arrestation.

C.
X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre ce
jugement, concluant, sous suite de dépens, au renvoi de la cause à l'autorité
précédente. Il sollicite par ailleurs l'assistance judiciaire.

La Cour d'appel et le Ministère public ont renoncé à se déterminer et se sont
référés au jugement attaqué.

Considérant en droit:

1.
Le recourant n'a pas formellement conclu à la réforme du jugement attaqué ni à
son annulation mais s'est borné à demander le renvoi à l'autorité précédente.
Sur le plan pénal, on comprend toutefois de la motivation présentée que le
recourant n'admet qu'une petite partie des vols et conteste pour le surplus les
vols reprochés, dont il entend être libéré. Cette motivation s'interprète comme
conclusion suffisante. Sur le plan civil, le recourant conteste la prise en
compte de 657 fr. dans le montant du dommage alloué et est d'avis que
l'autorité précédente n'était pas en mesure de statuer et aurait dû renvoyer
l'intimée à agir devant le juge civil en application de l'art. 126 al. 3 CPP.
Dans cette mesure, on peut admettre que le mémoire contient une conclusion
recevable quant à l'aspect civil. En revanche, faute de conclusions chiffrées
et d'indications précises dans le mémoire quant aux postes du dommage
contestés, sous réserve des 657 fr. précités, le recourant ne formule aucune
conclusion recevable susceptible de mettre en cause la quotité du dommage
alloué (cf. ATF 134 III 235 consid. 2 p. 237).

2.
Le recourant s'en prend à l'établissement des faits. Il conteste être l'auteur
des détournements de fonds reprochés.

2.1 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits retenus par l'arrêt
entrepris (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2
LTF. La partie recourante ne peut ainsi critiquer ces faits que s'ils ont été
établis en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière
manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (sur
la notion d'arbitraire, cf. ATF 137 I 1 consid. 2.4 p. 5; 58 consid. 4.1.2 p.
62), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la
cause (art. 97 al. 1 LTF). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, le Tribunal
fédéral n'entre en matière sur les moyens fondés sur la violation de droits
fondamentaux que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise. L'acte
de recours doit, à peine d'irrecevabilité, contenir un exposé succinct des
droits violés et préciser en quoi consiste la violation (ATF 136 II 489 consid.
2.8 p. 494). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 137 IV
1 consid. 4.2.3 p. 5).

2.2 La cour d'appel s'est référée au raisonnement du tribunal correctionnel. Le
tribunal a considéré que l'activité délictuelle du recourant était beaucoup
plus importante que celle admise par celui-ci. Le tribunal a en particulier mis
en avant les éléments suivants pour retenir la culpabilité du recourant. La
plupart des vols commis depuis le 17 avril 2003 concernait des envois express
de banques. Le recourant était présent à son poste de travail s'agissant des
vols qui lui ont été imputés. Aucun cas de vol concernant les envois de la
Banque Y.________ n'a été recensé lorsqu'il était absent. Aucun autre employé
n'était présent de manière systématique lors de tous les cas imputés au
recourant.

2.3 Le recourant se contente d'opposer sa propre version des faits à l'approche
suivie par la cour d'appel. Il met en avant que d'autres vols ont également eu
lieu lorsqu'il était absent, que de nombreux employés pouvaient être concernés,
que d'autres vols se sont passés après son départ. Ce faisant, le recourant
formule une argumentation appellatoire, partant irrecevable. Il ne formule
aucun grief susceptible de faire apparaître l'appréciation des preuves comme
arbitraire.

3.
Le recourant relève que le tribunal correctionnel lui a imputé 173 vols (cf.
jugement première instance p. 22), alors que la cour d'appel a retenu 134 vols,
soit les vols commis de nuit lorsque le recourant était présent, excluant au
bénéfice du doute ceux commis le jour (cf. jugement attaqué p. 16). Selon lui,
cette diminution du nombre de vols aurait dû conduire à une réduction de la
peine ou, à tout le moins, à ce que la question de la peine fasse l'objet d'une
motivation spécifique par la cour d'appel. Il invoque une motivation
insuffisante.

Le recourant ne remet pas en cause la qualification de vol par métier (art. 139
ch. 2 CP) retenue. Lorsque la qualification de vol par métier s'applique, elle
exclut un concours (art. 49 CP) entre les vols commis. Les différents actes
forment une entité juridique (cf. MARCEL ALEXANDER NIGGLI / CHRISTOF RIEDO,
BasK, 2ème éd., n. 107 ad art. 139 CP). Il n'en reste pas moins que l'ampleur
des actes est susceptible de jouer un rôle du point de vue de la culpabilité,
donc de la fixation de la peine. En l'espèce, la cour d'appel a abandonné près
d'un quart des vols par rapport à ceux reprochés par le tribunal correctionnel,
n'en retenant ainsi que 134 au lieu de 173. Dans sa motivation quant à la
fixation de la peine, elle s'est contentée, en quelques brèves phrases, de se
référer à la motivation de première instance et de dire que la peine fixée ne
relevait ni d'un abus ni d'un excès du pouvoir d'appréciation dont jouissait
l'autorité de première instance (jugement attaqué, p. 17 in fine et 18). Cette
approche méconnaît le libre pouvoir d'examen dont dispose la cour d'appel,
aussi en matière de fixation de la peine (cf. art. 398 al. 2 CPP; LUZIUS
EUGSTER, BasK, n. 1 ad art. 398 CPP; MARKUS HUG, Kommentar zur StPO, Donatsch/
Hansjakob/Lieber éditeurs, n. 20 ad art. 398 CPP p. 1921). Surtout, ce faisant,
la cour d'appel n'a pas expliqué quelle portée avait l'abandon d'une partie des
vols du point de vue de la fixation de la peine. Il lui incombait de fournir
une motivation explicite à cet égard. Le jugement attaqué viole les art. 47 et
50 CP. Le recours doit être admis sur ce point.

4.
Le recourant s'en prend ensuite aux prétentions civiles.

4.1 Il conteste le montant du dommage alloué à l'intimée. Selon lui, 657 fr.
doivent être retranchés.

La fixation du dommage constitue une question de fait (ATF 131 III 360 consid.
6.2 p. 366; 129 III 135 consid. 2.2 p. 141). La cour d'appel a arrêté le
dommage à 401'393 fr., montant qui correspond à l'addition des postes qui, à
partir du 17 avril 2003, ressortent en vert de la pièce 58 (cf. jugement
attaqué p. 16). Le recourant entend soustraire à ce montant des postes
antérieurs au 17 avril 2003 qui ressortent en bleu de la pièce 58. Les postes
en question ne paraissent pourtant pas avoir été pris en compte dans le montant
de 401'393 francs. Il incombait au recourant de fournir une explication claire
à cet égard de manière à démontrer l'arbitraire dans la détermination du
montant du dommage. La motivation qu'il présente est insuffisante au regard des
exigences accrues posées par l'art. 106 al. 2 LTF (supra consid. 2.1). Elle est
par conséquent irrecevable.

4.2 Invoquant une violation de l'art. 126 al. 3 CPP, le recourant prétend que
la cour d'appel aurait dû renvoyer l'intimée à agir devant le juge civil.

L'art. 126 al. 3 CPP prévoit que dans le cas où le jugement complet des
conclusions civiles exigerait un travail disproportionné, le tribunal peut
traiter celles-ci seulement dans leur principe et, pour le surplus, renvoyer la
partie plaignante à agir par la voie civile. Les prétentions de faible valeur
sont, dans la mesure du possible, jugées par le tribunal lui-même.

Pour le recourant, le travail disproportionné résiderait dans la conversion en
francs suisses des différents montants en monnaies étrangères qu'il a dérobés.
L'argument est infondé. Sur la pièce 58, l'intimée a elle-même indiqué la
correspondance en francs suisses des montants en monnaies étrangères. La
conversion de monnaies étrangères en francs suisses à propos de quelques
dizaines de postes du dommage ne saurait constituer un travail disproportionné
au sens de l'art. 126 al. 3 CPP.

4.3 Le recourant laisse encore entendre qu'il n'est pas possible de savoir
quels taux de change ont été appliqués. Il ne formule toutefois pas une
critique précise, poste par poste du dommage, en démontrant dans quel cas un
taux de change, qui constitue un fait notoire (ATF 137 III 623 consid. 3 p.
625), aurait faussement été appliqué. Son grief est insuffisamment motivé au
regard de l'art. 106 al. 2 LTF et est irrecevable. De plus, faute de conclusion
suffisante, le recourant n'est de toute façon pas habilité à mettre en cause la
quotité du dommage (cf. supra consid. 1 in fine), serait-ce par le biais des
taux de change appliqués.

5.
Le recours doit être partiellement admis (supra consid. 3). Pour le surplus, il
est rejeté dans la mesure où il est recevable. Vu le sort du recours, une
partie des frais sera supportée par le recourant (art. 66 al. 1 LTF), dont le
montant sera toutefois fixé en tenant compte de sa situation financière. Ce
dernier a requis l'assistance judiciaire. Cette requête est sans objet dans la
mesure où il obtient gain de cause et peut, à ce titre, prétendre à des dépens
réduits de la part du canton (art. 64 al. 2 et 68 al. 1 LTF). Le recours était,
pour le surplus, dénué de chance de succès, si bien que l'assistance judiciaire
doit être refusée dans cette mesure (art. 64 al. 1 LTF).

Dès lors que que le point sur lequel le recours est admis concerne la peine,
seul le ministère public et la cour cantonale ont été invités à se déterminer,
l'intimée n'ayant pas d'intérêt à pouvoir se déterminer à cet égard.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est partiellement admis, le jugement attaqué est annulé et la cause
est renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision au sens des
considérants. Pour le surplus, le recours est rejeté dans la mesure où il est
recevable.

2.
La part des frais judiciaires mise à la charge du recourant est arrêtée à 1'000
fr., le solde demeurant à la charge de l'Etat.

3.
La demande d'assistance judiciaires est rejetée dans la mesure où elle n'est
pas sans objet.

4.
Une indemnité de 1'000 fr., à verser au conseil du recourant à titre de dépens,
est mise à la charge du canton de Vaud.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du
Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 11 juin 2012

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Mathys

La Greffière: Livet