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Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.102/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
6B_102/2012

Arrêt du 22 juin 2012
Cour de droit pénal

Composition
MM. et Mme les Juges Mathys, Président,
Jacquemoud-Rossari et Denys.
Greffière: Mme Livet.

Participants à la procédure
X.________, représenté par Me Hans Henzen, avocat,
recourant,

contre

Ministère public du canton de Genève, case postale 3565, 1211 Genève 3,

A.________, représenté par Me Daniel J. Senn, avocat,

intimés.

Objet
Courte peine privative de liberté ferme (art. 41 CP),

recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre
pénale d'appel et de révision, du 2 janvier 2012.

Faits:

A.
Le 13 décembre 2009 à 5 h 30, A.________ circulait à vélo lorsque X.________
l'a agressé. Celui-ci lui a asséné un "coup de boule", a piétiné son vélo puis
lui a donné des coups de poing à la tête et sur le corps, des coups de pied à
la jambe droite et des coups de genou au niveau des reins. A.________ a reçu
plus d'une soixantaine de coups sur le corps, a souffert de nombreuses
blessures et s'est trouvé en incapacité de travail jusqu'au 28 décembre 2009.
Interpellé par la police une heure après les faits, X.________ présentait une
alcoolémie de 1.97 o/oo mais ne vacillait pas sur ses jambes, s'exprimait
aisément et se souvenait des détails de la soirée. Une pleine responsabilité a
été retenue.

B.
Par jugement du 2 septembre 2011, le Tribunal de police du canton de Genève a
condamné X.________, pour lésions corporelles simples et dommages à la
propriété, à une peine privative de liberté de 2 mois.

Statuant sur l'appel de X.________, la Chambre pénale d'appel et de révision de
la Cour de justice genevoise l'a rejeté par arrêt du 2 janvier 2012.

C.
X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre cet
arrêt et conclut, sous suite de dépens, à sa réforme en ce sens qu'il est
condamné à une peine pécuniaire de 60 jours, respectivement à un travail
d'intérêt général de 240 heures.

La Chambre pénale d'appel et de révision a déclaré n'avoir pas d'observations à
formuler et le Ministère public ne s'est pas déterminé.

Considérant en droit:

1.
D'après l'art. 42 al. 1 LTF, les mémoires de recours doivent être rédigés dans
une langue officielle. Selon l'art. 54 al. 1 LTF, la procédure devant le
Tribunal fédéral est conduite dans l'une des langues officielles (allemand,
français, italien, rumantsch grischun), en règle générale dans la langue de la
décision attaquée. Le recourant peut rédiger le mémoire de recours dans la
langue (officielle) de son choix, qui ne doit pas nécessairement correspondre à
celle de la procédure devant le Tribunal de céans. En l'occurrence, le
recourant a entrepris l'arrêt du 2 janvier 2012, rendu en langue française, à
l'aide d'un mémoire rédigé en allemand. Ainsi qu'il vient d'être dit, ce
procédé est admissible. La langue de la procédure est toutefois le français et
la présente décision sera rendue dans cette langue.

2.
Se plaignant d'une violation de l'art. 41 CP, le recourant considère que la
cour cantonale lui a infligé à tort une peine privative de liberté ferme d'une
durée inférieure à six mois en lieu et place d'une peine pécuniaire ou d'un
travail d'intérêt général. Il se plaint aussi d'une motivation insuffisante.

2.1 Aux termes de l'art. 41 al. 1 CP, le juge peut prononcer une peine
privative de liberté ferme de moins de six mois uniquement si les conditions du
sursis à l'exécution de la peine (art. 42) ne sont pas réunies et s'il y a lieu
d'admettre que ni une peine pécuniaire, ni un travail d'intérêt général ne
peuvent être exécutés.

A titre de sanctions, le nouveau droit fait de la peine pécuniaire (art. 34 CP)
et du travail d'intérêt général (art. 37 CP) la règle dans le domaine de la
petite criminalité, respectivement de la peine pécuniaire et de la peine
privative de liberté la règle pour la criminalité moyenne. Dans la conception
de la nouvelle partie générale du Code pénal, la peine pécuniaire constitue la
sanction principale. Les peines privatives de liberté ne doivent être
prononcées que lorsque l'Etat ne peut garantir d'une autre manière la sécurité
publique. Quant au travail d'intérêt général, il suppose l'accord de l'auteur.
En vertu du principe de la proportionnalité, il y a en règle générale lieu,
lorsque plusieurs peines entrent en considération et apparaissent sanctionner
de manière équivalente la faute, de choisir celle qui restreint le moins
sévèrement la liberté personnelle de l'intéressé, respectivement qui le touche
le moins durement. La peine pécuniaire et le travail d'intérêt général
représentent des atteintes moins importantes et constituent ainsi des peines
plus clémentes. Cela résulte également de l'intention essentielle, qui était au
coeur de la révision de la partie générale du Code pénal en matière de
sanction, d'éviter les courtes peines de prison ou d'arrêt, qui font obstacle à
la socialisation de l'auteur, et de leur substituer d'autres sanctions. Pour
choisir la nature de la peine, le juge doit prendre en considération
l'opportunité de la sanction déterminée, ses effets sur l'auteur et son milieu
social, ainsi que son efficacité préventive (ATF 134 IV 97 consid. 4 p. 100 ss;
arrêt 6B_128/2011 du 14 juin 2011 consid. 3.1).

2.2 Au regard des trois condamnations antérieures dont le recourant avait fait
l'objet, la cour cantonale a considéré que seul un pronostic défavorable
pouvait être posé et que, par conséquent, un sursis au sens de l'art. 42 CP
était exclu. Le recourant ne remet pas en cause cette approche. En revanche, il
est d'avis que la cour cantonale a omis d'examiner la seconde condition posée
par l'art. 41 al. 1 CP, soit de déterminer si une peine pécuniaire,
respectivement un travail d'intérêt général, peuvent être exécutés.

2.3 Comme l'a relevé la cour cantonale, les condamnations antérieures du
recourant ne concernent pas des infractions de même nature que celles de la
présente cause, mais attestent un mépris des règles et une absence de
considération pour l'intégrité corporelle d'autrui. La plupart des infractions
commises par le recourant l'ont été sous l'emprise de l'alcool, de sorte qu'il
n'a pas pris conscience de la dangerosité de son comportement dans cet état
(cf. arrêt p. 11). La dernière condamnation date du 19 mars 2008. Le recourant
a été condamné à une peine de 60 jours-amende à 90 francs (cf. arrêt p. 7).
Cette condamnation ferme n'a pas eu d'effet dissuasif. Dans ces conditions, on
peut considérer qu'une peine pécuniaire ferme est dénuée de toute efficacité et
peut être exclue. Les critiques du recourant à cet égard sont infondées.

2.4 Il reste donc l'option entre un travail d'intérêt général et une peine
privative de liberté ferme de moins de six mois (cf. arrêt 6B_128/2011 du 14
juin 2011 consid. 3.5).

Aux termes de l'art. 37 CP, à la place d'une peine privative de liberté de
moins de six mois ou d'une peine pécuniaire de 180 jours-amende au plus, le
juge peut ordonner, avec l'accord de l'auteur, un travail d'intérêt général de
720 heures au plus (al. 1). Le travail d'intérêt général doit être accompli au
profit d'institutions sociales, d'oeuvres d'utilité publique ou de personnes
dans le besoin. Il n'est pas rémunéré (al. 2). L'art. 38 CP précise que
l'autorité d'exécution fixe au condamné un délai de deux ans au plus pour
accomplir le travail d'intérêt général. Ainsi, toute personne dont la
culpabilité justifierait une condamnation à six mois de privation de liberté ou
à 180 jours-amende au plus peut en principe être condamnée, si elle accepte ce
genre de peine et s'il n'est pas nécessaire de prononcer une peine privative de
liberté ferme, à fournir un travail d'intérêt général (ATF 134 IV 97 consid.
6.3.3.2 p. 107 s.). Cette peine tend à favoriser, à des fins de prévention
spéciale, le maintien de l'auteur dans son milieu social, en le faisant
compenser l'infraction par une prestation personnelle en faveur de la
communauté plutôt que par une privation de liberté ou une peine pécuniaire (ATF
134 IV 97 consid. 6.3.2 p. 107). Bien que le texte légal ne prévoie aucune
cause d'exclusion tenant à la personne de l'auteur, seule peut être condamnée à
fournir un travail d'intérêt général une personne apte au travail (ATF 134 IV
97 consid. 6.3.3.3 p. 109).

En instance cantonale, le recourant a conclu à sa libération et,
subsidiairement, a notamment sollicité le prononcé d'un travail d'intérêt
général (cf. arrêt p. 6). Il a par conséquent donné son accord, condition
prévue à l'art. 37 al. 1 CP.

La cour cantonale s'est contentée de dire qu'elle avait acquis la conviction
que seule une peine privative de liberté ferme était susceptible de détourner
le recourant de la commission de nouvelles infractions (cf. arrêt p. 11/12).
Elle n'a pas exposé pour quelle raison un travail d'intérêt général n'entrait
pas en ligne de compte dans la situation du recourant, lequel apparaît apte au
travail dès lors qu'il est actif professionnellement (cf. arrêt p. 6 in fine).
Cette absence de motivation ne permet pas de distinguer comment le droit
fédéral a été appliqué. La cour de céans ne saurait se substituer à
l'appréciation de la cour cantonale. Le recours doit être admis sur ce point et
la cause renvoyée à l'autorité cantonale, à qui il incombera d'examiner si un
travail d'intérêt général pourrait avoir un effet dissuasif suffisant, qui
justifierait de ne pas prononcer une courte peine privative de liberté.

3.
Le recourant obtient partiellement gain de cause. Vu l'issue de la cause, il
supporte une part des frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF) et peut prétendre à
une indemnité réduite de dépens à la charge du canton de Genève (art. 68 al. 1
et 2 LTF).

Dès lors que l'aspect litigieux concernait uniquement la peine, seul le
ministère public et la cour cantonale ont été invités à se déterminer, l'intimé
A.________ n'ayant pas d'intérêt à pouvoir se déterminer à cet égard.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est partiellement admis, l'arrêt attaqué est annulé et la cause est
renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision au sens des
considérants.

2.
La part des frais judiciaires mise à la charge du recourant est arrêtée à 1'000
fr., le solde demeurant à la charge de l'Etat.

3.
Une indemnité de 1'000 fr., à verser au recourant à tire de dépens, est mise à
la charge du canton de Genève.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton
de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision.

Lausanne, le 22 juin 2012

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Mathys

La Greffière: Livet