Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.825/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
5A_825/2012

Arrêt du 17 avril 2013
IIe Cour de droit civil

Composition
Mme et MM. les Juges fédéraux von Werdt, Président,
Hohl, Marazzi, Hermann et Schöbi.
Greffière: Mme Jordan.

Participants à la procédure
A.________,
recourant,

contre

Agence d'assurances sociales caisse AVS 22.132,
intimée.

Objet
mainlevée définitive de l'opposition,

recours contre l'arrêt de la IIe Cour d'appel civil
du Tribunal cantonal du canton de Fribourg
du 9 octobre 2012.

Faits:

A.
Par deux décisions du 23 janvier 2006, l'agence communale d'assurances sociales
- caisse AVS 22.132, à Lausanne, a astreint A.________ à lui verser les sommes
de xxxx fr. et de xxxx fr., ces montants constituant un dommage au sens de
l'art. 52 LAVS causé à la caisse de compensation à la suite de la faillite de
la société B.________ SA prononcée le 9 octobre 2003.
Le 16 avril 2007, rejetant le recours de A.________, le Tribunal des assurances
du canton de Vaud a confirmé ces décisions. Ce jugement est définitif et
exécutoire.

B.
En rapport avec ces créances, un premier commandement de payer no 1 a été
notifié à A.________ par l'Office des poursuites de la Gruyère le 18 décembre
2009. Il a été frappé d'opposition. Malgré l'existence d'une décision de
mainlevée qui aurait été accordée le 24 juin 2010, aucune réquisition de
continuer la poursuite n'a été déposée dans le délai légal d'une année,
prolongé de la durée de la procédure de mainlevée, prévu par l'art. 88 al. 2
LP.

C.
Le 15 octobre 2011, à la requête de l'agence d'assurances sociales - caisse AVS
22.132, ce même office a fait notifier à A.________ un nouveau commandement de
payer no 2 la somme de xxxx fr., plus 200 fr. pour les frais du commandement de
payer no 1. Il était indiqué comme titre de créance: "[...] réparation du
dommage selon décision du 23 janvier 2006 (dossier B.________)". Le poursuivi a
fait opposition totale.
Par ordonnance du 10 juillet 2012, le Président du Tribunal civil de
l'arrondissement de la Gruyère a prononcé la mainlevée définitive de
l'opposition à concurrence de xxxx fr. en capital, plus les frais de la
précédente poursuite par 200 fr. et les frais de poursuite. Il a en outre
alloué un montant de 50 fr. à la créancière, à charge du débiteur, à titre
d'équitable indemnité de partie et statué sur les frais de justice.
Statuant le 9 octobre 2012 sur le recours du poursuivi, la IIe Cour d'appel
civil du Tribunal cantonal fribourgeois a confirmé cette ordonnance, mettant
les frais judiciaires de la procédure de recours à la charge du recourant. Elle
n'a pas alloué d'indemnité équitable.

D.
Par écriture du 8 novembre 2012, A.________, qui n'est pas assisté par un
mandataire, exerce un recours intitulé "recours en matière civile et recours
constitutionnel subsidiaire" au Tribunal fédéral. Il conclut à l'annulation de
la décision de mainlevée du 10 juillet 2012 du Président du Tribunal civil de
la Gruyère ainsi que de l'arrêt du 9 octobre 2012 de la IIe Cour d'appel civil
du Tribunal cantonal fribourgeois.
Si l'intimée ne propose pas formellement le rejet du recours, il résulte de sa
détermination que tel est le cas. L'autorité cantonale déclare n'avoir pas
d'observations à formuler sur le fond du recours.

E.
Par ordonnance du 5 décembre 2012, la Présidente de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral a accordé l'effet suspensif au recours.

Considérant en droit:

1.
La décision prononçant la mainlevée définitive de l'opposition est une décision
finale au sens de l'art. 90 LTF puisqu'elle met fin à l'instance (ATF 134 III
115 consid. 1.1 p. 117; 133 III 399 consid. 1.4 p. 400). Elle peut faire
l'objet du recours en matière civile (art. 72 al. 2 let. a LTF; ATF 134 III 141
consid. 2 p. 143) lorsque la valeur litigieuse atteint, comme en l'espèce, le
seuil minimal de 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF). Interjeté en temps
utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans la forme prévue par la loi (art. 42 LTF),
par la partie qui a succombé en instance cantonale (art. 76 al. 1 LTF), à
l'encontre d'une telle décision prise sur recours en dernière instance
cantonale (art. 75 al. 1 et 2 LTF), la présente écriture est en principe
recevable comme recours en matière civile. Il s'ensuit que le recours
constitutionnel subsidiaire ne l'est pas (art. 113 LTF).

2.
Le recours en matière civile étant une voie de réforme (art. 107 al. 2 LTF), le
recourant doit en principe prendre des conclusions sur le fond. Le Tribunal
fédéral conserve néanmoins la faculté de renvoyer l'affaire à l'autorité
précédente pour qu'elle rende une nouvelle décision, en particulier en cas de
violation du droit d'être entendu (arrêts 5A_460/2012 du 14 septembre 2012
consid. 1.2; 5A_279/2010 du 24 juin 2010 consid. 2.2. et 3.3; cf. MEYER/
DORMANN, in: Basler Kommentar, 2e éd., 2010, n° 13 ad art. 107 LTF et les
citations).
En l'espèce, le recourant, qui n'est pas assisté d'un mandataire, se plaint
essentiellement d'une violation de son droit d'être entendu. C'est ainsi à bon
droit qu'il conclut formellement à l'annulation de l'arrêt cantonal, la réforme
se déduisant par ailleurs de son écriture. En revanche, le chef de conclusions
tendant à l'annulation de la décision du Président du Tribunal civil de la
Gruyère est irrecevable, le recours en matière civile n'étant ouvert que contre
une décision de dernière instance cantonale prise sur recours (art. 75 LTF).

3.
Le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu au sens des
art. 29 Cst. et 6 CEDH, plus précisément de son droit "de prendre connaissance
de toute pièce ou observation présentée au juge et de la discuter". Il reproche
à la Cour d'appel civil du Tribunal cantonal fribourgeois de lui avoir "dénié
ce droit" en considérant que le Président du Tribunal civil de la Gruyère
n'avait pas violé son droit d'être entendu en ne lui communiquant pas la
requête de radiation du 1er juin 2012 de la poursuite no 1 que la créancière
avait transmise, en copie, à ce magistrat.

3.1 Le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de nature
formelle, dont la violation entraîne l'annulation de la décision attaquée sans
égard aux chances de succès du recours sur le fond (ATF 127 V 431 consid. 3d/aa
p. 437). Ce moyen doit par conséquent être examiné en premier lieu (ATF 124 I
49 consid. 1 p. 50) et avec un plein pouvoir d'examen (ATF 127 III 193 consid.
3 p. 194 et la jurisprudence citée).
Compris comme l'un des aspects de la notion générale de procès équitable au
sens des art. 29 Cst. et 6 CEDH, le droit d'être entendu garantit notamment le
droit pour une partie à un procès de prendre connaissance de toute
argumentation présentée au tribunal et de se déterminer à son propos, que
celle-ci contienne ou non de nouveaux éléments de fait ou de droit, et qu'elle
soit ou non concrètement susceptible d'influer sur le jugement à rendre. Il
appartient en effet aux parties, et non au juge, de décider si une prise de
position ou une pièce nouvellement versée au dossier contient des éléments
déter-minants qui appellent des observations de leur part. Ce droit à la
réplique vaut pour toutes les procédures judiciaires. Toute prise de position
ou pièce nouvelle versée au dossier doit dès lors être commu-niquée aux parties
pour leur permettre de décider si elles veulent ou non faire usage de leur
faculté de se déterminer (ATF 137 I 195 consid. 2.3.1; 133 I 100 consid. 4.5 p.
103 s; 133 I 270 consid. 3.1 p. 277; 135 I 187 consid. 2.2. p. 190; arrêt
1C_196/2011 du 11 juillet 2011 consid. 2.2 publié in SJ 2012 I p. 117; arrêt
5A_779/2010 du 1er avril 2011 consid. 2.2 publié à la FamPra.ch 2012 no 1 p.
1).

3.2 En considérant que les questions liées au principe, à la validité ou à la
date du retrait de la poursuite no 1 étaient sans pertinence aucune pour la
solution du litige et que, partant, en ne communiquant pas la pièce y relative
au débiteur poursuivi, le premier juge n'avait pas violé le droit d'être
entendu de ce dernier, l'autorité cantonale a méconnu les principes
susmentionnés. Cette conclusion ne conduit pas pour autant à l'admission du
grief pour les motifs qui suivent.

3.3 Le droit de prendre connaissance et de se déterminer sur les pièces du
dossier est garanti sous réserve d'un abus de droit. La protection des droits
fondamentaux ne doit pas être une protection théorique et abstraite, mais
concrète et effective. Le droit de prendre connaissance et de se déterminer sur
les pièces du dossier vise à garantir une procédure équitable, soit que les
parties aient la possi-bilité de se déterminer de façon substantielle sur les
allégations de la partie adverse (dans ce sens: ATF 138 I 154 consid. 2.8 p.
159/169 et les références).
En l'espèce, la pièce dont le recourant se plaint qu'elle ne lui a pas été
communiquée consiste, ainsi que le relevait la décision de mainlevée du 10
juillet 2012, en la copie que la créancière poursuivante a fait parvenir au
tribunal de "sa demande à l'office des poursuites de la Gruyère de radier la
poursuite no 1". Il ne s'agit là ni plus ni moins que du compte-rendu du
contenu du document visé. Que le recourant ait eu ou non ce dernier devant les
yeux n'aurait rien changé à sa possibilité de se déterminer. Son recours à la
Cour d'appel montre d'ailleurs qu'il a pu s'exprimer de façon substantielle sur
la portée de cette requête de radiation. Dans ces conditions, le recourant ne
se prévaut manifestement pas de son droit de prendre connaissance et de se
déterminer sur la pièce litigieuse pour défendre ses droits de partie. Il
s'obstine à faire valoir une formalité vaine (cf. ARTHUR HAEFLIGER, Alle
Schweizer sind vor dem Gesetze gleich, 1985, p. 146 in fine). Un tel
comportement ne mérite aucune protection (cf. ATF 138 précité).

4.
Au fond, autant qu'on puisse le comprendre, le recourant prétend
péremptoirement que rien en l'état ne permet d'exclure l'existence d'une
poursuite antérieure portant sur le même montant. Ce faisant, il se contente de
reprendre l'argument qu'il avait soulevé dans son recours cantonal sans
discuter, au moins succinctement, les considérations de la Cour d'appel déniant
toute pertinence à cette question, motif pris que le risque invoqué par le
poursuivi est de toute façon exclu, la créancière n'ayant pas requis la
continuation de la première poursuite et n'étant plus en droit de le faire, le
délai d'un an prévu par l'art. 88 al. 2 LP étant échu et le commandement de
payer périmé. Faute de motivation suffisante, le recours est dès lors
irre-cevable dans cette mesure (art. 42 al. 2 LTF; ATF 134 II 244 consid. 2.1
p. 245/246).

5.
Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est
recevable. Le recourant, qui succombe, supportera les frais de la procédure
(art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens à l'intimée qui
n'est pas représentée par un avocat et n'a pas fait état de dépenses
particulières (cf. ATF 133 III 439 consid. 4 p. 446).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable.

2.
Le recours en matière civile est rejeté dans la mesure où il est recevable.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

4.
Il n'est pas alloué de dépens.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la IIe Cour d'appel civil du
Tribunal cantonal du canton de Fribourg.

Lausanne, le 17 avril 2013
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: von Werdt

La Greffière: Jordan