Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.329/2012
Zurück zum Index II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 2012
Retour à l'indice II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 2012



Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
5A_329/2012

Arrêt du 5 septembre 2012
IIe Cour de droit civil

Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux Hohl, Présidente,
Escher et Herrmann.
Greffier: M. Richard.

Participants à la procédure
Banque X.________, représentée par Me Martin Bernet, avocat,
recourante,

contre

Fiduciaire Y.________ SA,
intimée,

Office cantonal des faillites de l'État de Fribourg.

Objet
état de collocation,

recours contre l'arrêt de la Chambre des poursuites et faillites du Tribunal
cantonal de l'État de Fribourg, en qualité d'Autorité de surveillance, du 24
avril 2012.

Faits:

A.
Le 2 mai 2011, le Président du Tribunal civil de la Sarine a prononcé la
dissolution de la société A.________ Sàrl (anciennement B.________ Sàrl) en
raison de carences organisationnelles et a ordonné sa liquidation selon les
règles applicables à la faillite.

B.
B.a L'office cantonal des faillites a déposé l'état de collocation le 17
février 2012. Il n'y figure que deux créances, colloquées en troisième classe,
à savoir 3'849 fr. 10 en faveur de Fiduciaire Y.________ SA et 72'917'289 fr.
65 en faveur de Banque X.________. La première concerne des honoraires et frais
facturés par la fiduciaire de la faillie pour des prestations jusqu'au 21 juin
2011; la seconde se rapporte à deux contrats de prêt conclus les 6 et 27 août
2008 entre Banque X.________ et B.________ Sàrl, lesquels sont l'objet d'une
procédure pendante aux Iles Vierges britanniques.
B.b Le 27 févier 2012, Fiduciaire Y.________ SA et Banque X.________ ont toutes
deux déposé une plainte contre l'état de collocation, chacune d'elles ayant
conclu à ce que la créance de l'autre soit écartée de l'état de collocation.
Banque X.________ a en outre requis que le contrat de prêt du 27 août 2008 soit
mentionné, en sus de celui du 6 août 2008, comme cause de l'obligation.
B.c Par arrêt du 24 avril 2012, la Chambre des poursuites et faillites du
Tribunal cantonal de l'État de Fribourg, autorité de surveillance, a rejeté la
plainte formée par Fiduciaire Y.________ SA et déclaré sans objet, dans la
mesure où elle était recevable, celle de Banque X.________.

C.
Le 7 mai 2012, Banque X.________ exerce un recours en matière civile au
Tribunal fédéral contre cet arrêt et conclut à son annulation en tant qu'il
concerne l'irrecevabilité de sa plainte. Elle requiert que la créance de
Fiduciaire Y.________ SA soit supprimée de l'état de collocation;
subsidiairement, qu'il soit constaté que la décision colloquant dite créance
est nulle; et, plus subsidiairement, que la cause soit renvoyée en instance
cantonale pour nouvelle décision avec instruction de requérir de plus amples
informations concernant la créance de Fiduciaire Y.________ SA. À l'appui de
ses conclusions, elle invoque une violation de l'art. 29 al. 2 Cst. et de
l'art. 53 al. 1 CPC, de l'art. 20a al. 2 ch. 2 phr. 1 LP, de l'art. 244 LP,
ainsi que des art. 245 et 247 al. 1 LP en relation avec les art. 20a al. 2 ch.
2 phr. 1 et 22 al. 1 phr. 2 LP. Elle demande en outre l'octroi de l'effet
suspensif.

Par ordonnance du 25 juin 2012, l'effet suspensif a été accordé au recours.

Des réponses sur le fond n'ont pas été requises.

Considérant en droit:

1.
Interjeté dans le délai (art. 100 al. 2 let. a LTF) et la forme (art. 42 LTF)
prévus par la loi par une partie qui a succombé dans ses conclusions prises
devant l'autorité précédente (art. 76 al. 1 LTF) et dirigé contre une décision
finale (art. 90 LTF) rendue en matière de poursuite pour dettes et de faillite
(art. 72 al. 2 let. a LTF) par une autorité cantonale de surveillance de
dernière (unique) instance (art. 75 al. 1 LTF), le recours est en principe
recevable, ce indépendamment de la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. c
LTF).

2.
2.1 Saisi d'un recours en matière civile, le Tribunal fédéral applique le droit
d'office (art. 106 al. 1 LTF) sans être lié ni par les motifs de l'autorité
précédente, ni par les moyens des parties; il peut donc admettre le recours en
se fondant sur d'autres arguments que ceux invoqués par le recourant, comme il
peut le rejeter en opérant une substitution de motifs (ATF 133 III 545 consid.
2.2). Il ne connaît cependant de la violation des droits fondamentaux ou du
droit cantonal que si ce grief a été soulevé et motivé (art. 106 al. 2 LTF; ATF
134 I 83 consid. 3.2; 133 II 249 consid. 1.4.2). Si le recourant se plaint de
la violation de tels droits, il doit ainsi satisfaire au principe d'allégation
(Rügeprinzip, principio dell'allegazione), en indiquant précisément quelle
disposition constitutionnelle ou légale a été violée et en démontrant, par une
argumentation précise, en quoi consiste la violation (ATF 133 IV 286 consid.
1.4; 133 II 249 consid. 1.4.2).

2.2 Le Tribunal fédéral ne peut s'écarter des faits établis par l'autorité
précédente que si ceux-ci l'ont été de façon manifestement inexacte ou en
violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF) et si la
correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97
al. 1 LTF). Le recourant qui soutient que les faits ont été établis d'une
manière manifestement inexacte (art. 97 al. 1 LTF), c'est-à-dire que les
constatations de fait sont arbitraires au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 133 II 249
consid. 1.2.2), doit satisfaire au principe d'allégation susmentionné (cf.
supra consid. 2.1).

3.
La recourante invoque tout d'abord une violation de son droit d'être entendu
(art. 29 al. 2 Cst. et 53 al. 1 CPC) en tant que la cour cantonale n'aurait pas
correctement examiné le grief soulevé devant elle. Elle prétend que, dans ses
écritures cantonales, elle aurait expressément invoqué que la créance de
Fiduciaire Y.________ SA n'était pas suffisamment précise et n'avait pas été
prouvée puisqu'il n'était pas possible de déterminer sur quelle période
portaient les opérations dont le paiement était réclamé et donc d'intenter une
action en contestation de l'état de collocation.

La question de savoir si la cour cantonale a correctement examiné le grief de
la recourante - à supposer que celui-ci ait été développé de manière
suffisamment claire pour être compris - peut demeurer indécise en l'espèce dès
lors que la plainte était de toute manière irrecevable (cf. infra consid. 4.5).

4.
4.1 La recourante invoque l'art. 244 LP et fait valoir qu'il appartenait à
l'office des faillites de vérifier la créance en cause et que, compte tenu des
pièces produites et des incertitudes liées à la période pour laquelle les
honoraires étaient réclamés, elle aurait dû refuser de l'admettre au passif.
Elle ajoute que c'est bien par la voie de la plainte qu'il y avait lieu d'agir
et qu'il ne lui était pas possible d'intenter une action en contestation de
l'état de collocation faute d'être suffisamment renseignée sur la créance de
l'intimée.

4.2 L'office des faillites a précisé, dans sa détermination devant l'autorité
cantonale de surveillance, les raisons pour lesquelles il avait jugé
vraisemblable l'existence de la prétention de l'intimée et l'avait donc admise
au passif. Il a indiqué qu'il ressortait des déclarations de l'ancienne gérante
de la faillie que Fiduciaire Y.________ SA avait été mandatée, fait qui était,
de surcroît, corroboré par les documents de la comptabilité de la faillie.
Concernant la date des opérations, il a mentionné qu'une créance pouvait
prendre naissance postérieurement à la conclusion du rapport d'obligation,
lequel existait en l'espèce bien avant l'ouverture de la faillite. L'office des
faillites note enfin que, dans la mesure où l'intimée n'avait jamais été
mandatée par l'office, sa créance ne pouvait être qualifiée de dette de la
masse et la production en cause ne pouvait constituer qu'une dette de la
faillie.

4.3 Constatant que la recourante reprochait à l'office des faillites d'avoir
colloqué la créance de Fiduciaire Y.________ SA alors que celle-ci concernait
des prestations tant postérieures qu'antérieures au prononcé de la faillite, la
cour cantonale a considéré qu'elle n'était pas compétente pour statuer sur la
question de savoir si une créance devait être qualifiée de dette du failli ou
de la masse, cette question relevant de la situation juridique matérielle et
non du respect des dispositions de forme et de procédure lors de
l'établissement de l'état de collocation.

4.4 L'état de collocation dans la faillite peut être contesté par la voie de la
plainte (art. 17 LP) ou par celle de l'action en contestation de l'état de
collocation (art. 250 LP).
4.4.1 La voie de la plainte est ouverte lorsque l'état de collocation est
imprécis, inintelligible ou entaché de vices de forme (lorsque, par exemple, il
n'indique pas les motifs de rejet d'une créance) ou encore lorsque certaines
prescriptions de procédure avec incidence de droit matériel n'ont pas été
observées: ainsi, lorsqu'une décision a été prise en faveur d'une créance non
produite ou insuffisamment établie, ou lorsqu'aucune décision n'est intervenue
à propos d'une prétention produite ou inscrite au registre foncier.

L'action porte, elle, sur le fond; elle a pour but de déterminer si et dans
quelle mesure la créance litigieuse doit participer à la liquidation de la
faillite (ATF 119 III 84 consid. 2; GILLIÉRON, Commentaire de la LP, 2001, n°s
27 ss ad art. 250 LP; HIERHOLZER, Basler Kommentar, 2010, n°s 23 ss ad art. 249
LP et 8 ad art. 250 LP).
4.4.2 Doit ainsi être invoqué par la voie de la plainte le fait que la décision
de collocation a été prise sans qu'il ait été procédé aux vérifications
nécessaires (ATF 96 III 106 consid. 2; 93 III 59 consid. 2; arrêt 5A_476/2007
du 2 novembre 2007 consid. 3). En revanche, il n'appartient pas aux autorités
de surveillance de statuer sur les litiges portant sur la qualification d'une
dette comme obligation de la masse ou obligation du failli, mais à l'autorité
compétente pour statuer sur le fond de la prétention en cause, à savoir le juge
civil ou les autorités ou les juridictions administratives suivant la nature du
contentieux (ATF 125 III 293 consid. 2; 113 III 148 consid. 1; 106 III 118
consid. 1; 78 III 172 consid. 2; 75 III 57 consid. 2; 75 III 19 consid. 3).
4.4.3 Selon l'art. 244 LP, l'administration examine chaque production et fait
les vérifications nécessaires; elle consulte le failli. Bien que
l'administration ait l'obligation de vérifier précisément chaque créance
produite, l'examen doit rester sommaire, comme cela découle déjà du court délai
qui lui est imparti pour dresser l'état de collocation. L'administration de la
faillite ne vérifie pas l'existence de la production, mais elle admet au passif
la prétention dont l'existence lui paraît vraisemblable (arrêt 5A_141/2008 du 6
août 2008 consid. 3.1; GILLIÉRON, op. cit., n° 3 ad rem. introductives aux art.
244-251 LP; HIERHOLZER, op. cit., n° 18 ad. art. 244 LP; JAQUES, Poursuite et
faillite, Commentaire romand, 2005, n°s 10 ss ad art. 244 LP).

4.5 En l'occurrence, la créance de l'intimée a été colloquée comme dette de la
faillie et n'a pas été admise comme dette de la masse; la recourante ne peut
donc se plaindre de ce qu'elle ne sait pas contre qui et par quelle voie agir.
Il importe peu à cet égard que l'intimée prétende désormais qu'une partie de sa
prétention constituerait une dette de la masse puisqu'il ne ressort pas du
dossier, ni n'est allégué, qu'elle aurait agi dans ce sens. Quoi qu'il en soit
cette question ne relèverait pas, cas échéant, de la compétence de l'autorité
de surveillance (cf. supra consid. 4.4.2).

De plus, on ne saurait reprocher à l'office des faillites son examen de la
prétention, aussi sommaire fût-il. En effet, en présence d'une production
émanant d'une société qui, selon la gérante de la faillie, a été dûment
mandatée, ces dires étant en outre corroborés par la comptabilité de la
faillie, l'office des faillites pouvait considérer comme vraisemblable
l'existence de la créance, même si la facture produite indiquait que les
prestations avaient été prises en compte jusqu'à une date postérieure à
l'ouverture de la faillite.

Lorsque la recourante reproche à la cour cantonale de ne pas avoir suffisamment
vérifié la production de l'intimée, elle entend en réalité contester
l'existence de la prétention admise. Elle fait valoir, d'une part, qu'une
partie de la créance serait postérieure à la faillite et, d'autre part, qu'il
est probable que celle-ci ait, en partie, été acquittée puisqu'il n'est pas
indiqué la date à laquelle les opérations facturées ont débuté. Ces objections
relèvent précisément de la question du bien-fondé de l'admission de la
prétention, qui n'est pas du ressort de l'autorité de surveillance. S'il
n'appartient pas à celle-ci de statuer sur les litiges portant sur la
qualification d'une dette comme obligation de la masse ou obligation du failli,
elle ne doit, a fortiori, pas davantage trancher la question de savoir si une
obligation a pris naissance avant l'ouverture de la faillite, mais n'est
devenue exigible qu'ultérieurement, ou si elle ne lie tout simplement pas le
failli; d'ailleurs, la recourante l'admet elle-même dans ses écritures
lorsqu'elle en fait le reproche à l'office des faillites. Déterminer si une
partie de la créance aurait déjà été acquittée n'est pas non plus de sa
compétence. De tels griefs pourront cependant être examinés, cas échéant, dans
le cadre de l'action en contestation de l'état de collocation.

Il suit de là que c'est à juste titre que la cour cantonale a déclaré la
plainte de la recourante irrecevable.

5.
Dès lors que l'autorité de surveillance n'était pas habilitée à trancher la
question du bien-fondé de l'admission de la prétention au passif, elle ne
pouvait pas non plus prononcer la nullité éventuelle de l'état de collocation
pour des motifs de droit matériel. Elle n'avait pas davantage à compléter
d'office l'état de fait puisque les faits en cause, à savoir qu'une part des
prestations de l'intimée n'auraient été fournies qu'après l'ouverture de la
faillite et que l'intimée n'aurait pas été mandatée par l'office des faillites,
n'étaient pertinents que pour des questions de droit matériel dont elle n'avait
pas à juger. Le sort des griefs de la recourante en relation avec les art. 20a
al. 2 ch. 2 phr. 1, 22 al. 1 phr. 2, 245 et 247 al. 1 LP est ainsi scellé par
le considérant précédent.

6.
En définitive, le recours doit être rejeté. Les frais judiciaires, arrêtés à
3'000 fr., sont mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 66 al. 1
LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens, des réponses n'ayant pas été
requises (art. 68 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à l'Office cantonal des faillites
de l'État de Fribourg et à la Chambre des poursuites et faillites du Tribunal
cantonal de l'État de Fribourg, en qualité d'Autorité de surveillance.

Lausanne, le 5 septembre 2012

Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La Présidente: Hohl

Le Greffier: Richard