Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.230/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
5A_230/2012

Arrêt du 23 octobre 2012
IIe Cour de droit civil

Composition
Mmes et MM. les juges fédéraux Hohl, Présidente, Escher, L. Meyer, Marazzi et
von Werdt.
Greffier: M. Thélin.

Participants à la procédure
X.________,
représentée par Mes Guillaume Fatio et
Olivier Bloch, avocats,
recourante,

contre

Y.________,
représenté par Me Stefan Graf, avocat,
intimé.

Objet
exécution d'une décision étrangère

recours contre l'arrêt rendu le 17 février 2012 par la Cour des poursuites et
faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Faits:

A.
Au mois de juin 2011, X.________ a fait citer Y.________ et trois personnes
morales devant le Tribunal d'Amsterdam. Un huissier de justice s'est chargé de
remettre un exploit et sa traduction en langue russe au Procureur de la reine à
Amsterdam, à l'intention de Y.________, afin de transmission aux autorités
russes. Celles-ci étaient requises de notifier les documents à leur
destinataire, à l'adresse ainsi libellée: «rue ..., village de ..., région de
..., Fédération de Russie». La notification devait s'accomplir par simple
remise des documents, ou, à défaut d'acceptation volontaire par la partie
citée, selon les formes prescrites en Russie. L'huissier se disposait également
à envoyer les documents par lettre recommandée à la même adresse. Le
procès-verbal n'indique ni l'identité de l'huissier ni la date précise de ses
opérations.
L'avocat de la requérante a par ailleurs envoyé des documents à Y.________ par
les soins d'une entreprise de messageries, à la même adresse, à deux autres
adresses en Russie et à celles d'anciens conseils de ce défendeur. D'après un
rapport d'acheminement non signé, extrait du site internet de l'entreprise,
l'envoi adressé rue ... à ... a été «livré le 20 juin 2011 à midi en Russie» et
une personne nommée «A.________» a attesté la réception. L'avocat a aussi
envoyé des documents par courriel, mais sans succès.
L'adresse rue ... à ... figurait dans un contrat souscrit par Y.________ le 17
novembre 2009. Il était expressément convenu que «chaque partie reconnaît et
accepte que l'adresse indiquée en regard de sa signature correspond à son
adresse légale pour toutes notifications et communications et admet la validité
de telles notifications ou communications à dite adresse, à moins que la banque
ne reçoive de la partie concernée un avis écrit de changement d'adresse».
Le Tribunal d'Amsterdam a tenu audience le 6 juillet 2011. Par un jugement en
référé du lendemain, il a condamné par contumace les quatre parties citées à
payer «individuellement» diverses sommes au total de plus de 2'700'000 dollars
étasuniens, avec intérêts au taux de 22% par an dès le 10 décembre 2010.

B.
Le 21 juillet 2011, X.________ a saisi le Juge de paix du district de la
Riviera - Pays-d'Enhaut d'une requête d'exequatur et de séquestre, à
concurrence de 2'243'481 fr.15.
Par prononcé du 22 juillet 2011, communiqué le 26, le Juge de paix a déclaré
exécutoire le jugement rendu le 7 juillet 2011 par le Tribunal d'Amsterdam; il
a renvoyé la requête de séquestre à une ordonnance séparée.
Par ordonnance du même jour, le Juge de paix a accordé le séquestre sur
l'immeuble et les autres biens désignés par la requérante, à concurrence du
montant précité. L'office des poursuites du même district a exécuté le
séquestre le 26 juillet 2011.
Y.________ a attaqué la décision d'exequatur devant le Tribunal cantonal du
canton de Vaud. La Cour des poursuites et faillites de ce tribunal a accueilli
son recours par arrêt du 17 février 2012; elle a réformé le prononcé attaqué en
ce sens que le jugement du Tribunal d'Amsterdam n'est ni reconnu ni exécutoire;
au surplus, la Cour a révoqué le séquestre.

C.
Exerçant le recours en matière civile par mémoire du 20 mars 2012, X.________
requiert le Tribunal fédéral de confirmer les deux décisions du Juge de paix.
Bien qu'invité à le faire, l'intimé Y.________ n'a pas pris position sur une
demande d'effet suspensif jointe au recours. L'effet suspensif a été accordé
par ordonnance du 23 mars 2012 en ce sens que jusqu'à droit connu, seul le
séquestre déploie ses effets.
Invité à répondre au recours, l'intimé n'a pas déposé de mémoire et s'est borné
à conclure au rejet du recours.

Considérant en droit:

1.
Le recours est dirigé contre une décision concernant l'exécution d'un jugement
rendu en matière civile (art. 72 al. 2 let. b ch. 1 LTF), finale (art. 90 LTF)
et prise en dernière instance cantonale (art. 75 al. 1 LTF). La valeur
litigieuse excède le minimum légal de 30'000 fr. (art. 51 al. 1 let. a et 74
al. 1 let. b LTF). Le recours est formé par une partie qui a pris part à
l'instance précédente et succombé dans ses conclusions (art. 76 al. 1 LTF).
Introduit en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes requises (art.
42 al. 1 à 3 LTF), le recours est en principe recevable.
Le recours peut être exercé pour violation du droit fédéral ou international
(art. 95 let. a et b LTF). Le Tribunal fédéral applique ce droit d'office,
hormis les droits fondamentaux (art. 106 LTF). Il n'est pas lié par
l'argumentation des parties et il apprécie librement la portée juridique des
faits; il s'en tient cependant, d'ordinaire, aux questions juridiques que la
partie recourante soulève conformément aux exigences légales relatives à la
motivation du recours (art. 42 al. 2 LTF; ATF 133 II 249 consid. 1.4.1 p. 254),
et il ne se prononce sur la violation de droits fondamentaux que s'il se trouve
saisi d'un grief invoqué et motivé de façon détaillée (art. 106 al. 2 LTF; même
arrêt, consid. 1.4.2). Dans une contestation pécuniaire, le Tribunal fédéral ne
contrôle pas l'application du droit étranger qui est, le cas échéant, désigné
par le droit international privé suisse (art. 96 LTF).
Le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement juridique sur la base des
faits constatés dans la décision attaquée (art. 105 al. 1 LTF). Il peut
compléter ou rectifier même d'office les constatations de fait qui se révèlent
manifestement inexactes, c'est-à-dire arbitraires aux termes de l'art. 9 Cst. (
ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; 133 II 249 consid. 1.1.2 p. 252), ou établies
en violation du droit (art. 105 al. 2 LTF). La partie recourante est autorisée
à contester, outre l'application du droit, des constatations de fait ainsi
irrégulières si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de
la cause (art. 97 al. 1 LTF). Cette partie ne peut toutefois pas se borner à
contredire les constatations litigieuses par ses propres allégations ou par
l'exposé de sa propre appréciation des preuves; elle doit plutôt indiquer de
façon précise en quoi ces constatations sont contraires au droit ou entachées
d'une erreur indiscutable, et une critique qui ne satisfait pas à cette
exigence est irrecevable (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3 p. 254; voir aussi ATF
130 I 258 consid. 1.3 p. 261/262; 125 I 492 consid. 1b p. 495).

2.
La Suisse et les Pays-Bas sont parties à la Convention de Lugano concernant la
compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en
matière civile et commerciale, conclue le 30 octobre 2007, entrée en vigueur le
18 mai 2009 pour les Pays-Bas et le 1er janvier 2011 pour la Suisse (CL; RS
0.275.12). Les deux Etats étaient aussi parties à la Convention de Lugano
conclue le 16 septembre 1988 portant sur les mêmes matières, désormais
remplacée par celle de 2007 (aCL; RO 1991 p. 2436).
Le Tribunal d'Amsterdam a été saisi après l'entrée en vigueur, pour les deux
Etats, de la Convention de 2007, de sorte que l'exécution de sa décision en
Suisse est soumise à ce récent traité (art. 63 par. 1 CL; ATF 138 III 82
consid. 2.1 p. 84).
Conformément à l'art. 1er al. 2 de la loi fédérale sur le droit international
privé (LDIP), les dispositions de la convention applicable priment les règles
du droit interne en matière de reconnaissance et d'exécution des décisions
étrangères.

3.
Aux termes de l'art. 38 par. 1 CL, les décisions rendues dans un Etat
contractant et qui y sont exécutoires sont mises à exécution dans un autre Etat
contractant après y avoir été déclarées exécutoires sur requête de toute partie
intéressée.
Selon les art. 41 et 54 CL, l'autorité compétente de l'Etat d'exécution déclare
la décision exécutoire sur la base d'un certificat délivré par le tribunal qui
a prononcé cette décision, établi selon le modèle figurant à l'annexe V de la
Convention. En l'espèce, le Juge de paix a accordé l'exequatur sur la base d'un
pareil certificat.
Selon les art. 34 par. 2, 43 par. 1 et 45 par. 1 CL, la partie contre laquelle
l'exécution doit avoir lieu peut exercer un recours et faire valoir, parmi
d'autres moyens, que «l'acte introductif d'instance ou un acte équivalent n'a
pas été notifié ou signifié au défendeur défaillant en temps utile et de telle
manière qu'il puisse se défendre». En l'espèce, il est incontesté que le
recourant a fait défaut devant le Tribunal d'Amsterdam. Devant la Cour des
poursuites et faillites du Tribunal cantonal, il a précisément soulevé, et avec
succès, le moyen ainsi prévu par l'art. 34 par. 2 CL.

4.
4.1 Le concept d'une notification en temps utile et de telle manière que la
partie recherchée puisse se défendre revêt une signification autonome dans la
Convention; il est indépendant des règles de l'Etat d'origine, de celles de
l'Etat d'exécution ou de celles d'un éventuel Etat tiers relatives aux
notifications judiciaires. La partie recherchée doit avoir été mise en mesure
de comparaître devant le juge d'origine et de présenter sa défense, y compris
de faire valoir un éventuel vice dans la notification de l'acte introductif de
l'instance. A la différence de l'art. 27 ch. 2 aCL, l'art. 34 par. 2 CL n'exige
plus une notification régulière, c'est-à-dire conforme aux règles du droit de
procédure déterminant; sous le régime actuel, une notification formellement
viciée n'empêche l'exécution prévue par l'art. 38 par. 1 CL que si le défendeur
défaillant s'est trouvé concrètement hors d'état de prendre part à l'instance
et d'y faire valoir ses droits. La Convention de 2007 met ainsi un terme aux
possibilités d'abus que l'exigence d'une notification régulière, selon l'art.
27 ch. 2 aCL, offrait trop fréquemment à la partie contre qui l'exécution est
demandée (Andreas Bucher, in Commentaire romand, 2011, nos 34 à 41 ad art. 34
CL; Reinhold Geimer/Rolf Schütze, Europäisches Zivilverfahrensrecht, 3e éd.,
Munich 2010, nos 128 à 137 p. 663; Jan Kropholler/Jan von Hein, Europäisches
Zivilprozessrecht, 9e éd., Francfort-sur-le-Main 2011, n° 33 p. 580 et nos 38 à
41 p. 583; voir aussi ATF 135 III 623 c. 3.4 p. 631/632).
D'une manière générale, les règles applicables aux notifications judiciaires
tendent principalement à ce que l'acte concerné parvienne sûrement à son
véritable destinataire, même si la personne chargée de notifier ne le rencontre
pas directement, et à ce que les opérations accomplies dans ce but soient
constatées avec certitude (ATF 132 I 249 consid. 7 p. 254). Elles tendent aussi
à protéger le destinataire en le rendant attentif à l'importance de l'acte qui
lui est remis et en lui apportant une première information sur son contenu (ATF
135 III 623 consid. 2.2 p. 626 i.f., consid. 3.4 p. 631). Comme on vient de le
voir, l'art. 34 par. 2 CL n'exige plus une notification entièrement conforme à
ces règles telles qu'énoncées par le droit de procédure applicable. Il n'en
résulte toutefois pas que le juge de l'exécution doive désormais tenir
n'importe quel mode de communication de l'acte introductif d'instance, même
aléatoire, équivoque ou inusité, pour pertinent au regard de cette disposition
conventionnelle; le juge est au contraire fondé à exiger la preuve stricte que
le destinataire a été mis en mesure d'exercer ses droits par une communication
offrant des garanties au moins comparables à celles d'une notification
régulière.
Pour le surplus, savoir si une citation ou une assignation est parvenue à la
partie défaillante est un point de fait sur lequel le Tribunal fédéral n'exerce
que le contrôle restreint prévu par les art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF.

4.2 Les Pays-Bas et la Russie sont parties à la Convention de La Haye du 15
novembre 1965 relative à la signification et la notification à l'étranger des
actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale (RS
0.274.131). Ainsi que le permet l'art. 10 de cette convention, la Russie a
déclaré ne pas accepter les notifications directes, notamment par la poste,
prévues par la même disposition. Par l'intermédiaire d'un huissier de justice
puis du Procureur de la reine, la recourante a requis une notification à
accomplir par l'autorité compétente en Russie, conformément à l'art. 5 de la
convention. Dans son jugement, le Tribunal d'Amsterdam constate que la
recourante n'a pas reçu le rapport d'exécution prévu par l'art. 6 de la
convention, destiné à rendre compte de l'issue de la procédure d'entraide
internationale; néanmoins, en raison des démarches informelles aussi accomplies
par cette partie et de l'urgence résultant d'une dégradation rapide de la
situation patrimoniale des parties citées, le tribunal retient que lesdites
parties, y compris l'intimé, ont été valablement assignées.

4.3 Au regard de l'art. 34 par. 2 CL et sur la base des pièces produites devant
elle, la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois retient
qu'une remise effective de l'assignation à son destinataire, c'est-à-dire à
l'intimé, n'est pas suffisamment établie; c'est pourquoi elle refuse de
déclarer le jugement du 7 juillet 2011 exécutoire en Suisse.
4.3.1 La recourante conteste cette appréciation. Elle se prévaut surtout du
rapport d'acheminement extrait du site internet de l'entreprise de messageries
commise par elle, d'où il ressort que son envoi informel de divers documents a
été reçu le 20 juin 2011 en Russie, par une personne nommée «A.________».
La recourante affirme que l'envoi contenait «l'assignation avec les pièces, de
même qu'une traduction anglaise et russe ainsi qu'un résumé en anglais et en
russe», mais elle n'a fourni aucune preuve à ce sujet. Sur la base de cette
affirmation, la Cour des poursuites et faillites présume que l'envoi contenait
effectivement l'assignation. Or, une notification conforme à la convention de
La Haye aurait permis de reconnaître avec certitude quels étaient les documents
transmis. La recourante affirme aussi que la personne nommée «A.________» est
le père, la mère ou un autre membre de la proche famille de l'intimé, mais elle
n'a là non plus avancé aucune preuve devant l'autorité précédente. Le document
qu'elle produit pour la première fois devant le Tribunal fédéral - une demande
de renouvellement de passeport souscrite par l'intimé, indiquant l'identité de
ses père et mère - est irrecevable au regard de l'art. 99 al. 1 LTF.
A la différence d'une notification exécutée par une autorité ou un officier
public, la remise d'un envoi par le livreur d'une entreprise de messageries
privée ne comporte aucune garantie que l'attention de la personne recevant
effectivement cet envoi, et donnant quittance au livreur, soit attirée sur
l'importance et la nature particulières des documents remis, et sur l'urgence
de les transmettre sans retard à leur destinataire final. Dans ces conditions,
en considération de l'ensemble des circonstances dont elle était informée par
l'étude des documents produits, la Cour des poursuites et faillites a jugé sans
arbitraire que le rapport d'acheminement ne prouve pas que l'intimé se soit
effectivement trouvé en mesure de prendre connaissance de la citation, cela
suffisamment tôt pour qu'il pût se préparer à comparaître à l'audience du 6
juillet 2011 devant le Tribunal d'Amsterdam, ou s'y faire représenter, et
préparer sa défense.
La recourante se prévaut de la clause insérée dans le contrat du 17 novembre
2009 relative à l'adresse de l'intimé et à la communication de son éventuel
changement d'adresse. Les parties ont en effet convenu du lieu où une
notification pourrait intervenir mais elles n'ont pas réglé par avance les
modalités d'une notification judiciaire. Une notification entièrement
informelle n'est pas suffisante, au regard de l'art. 34 par. 2 CL, du seul fait
que la partie instante y procède au lieu contractuellement prévu.
4.3.2 La recourante soutient aussi que ses envois informels ont atteint des
personnes liées à la société Z.________ SA dont l'intimé est l'administrateur
et qui était elle aussi citée devant le Tribunal d'Amsterdam. D'après la
décision attaquée, ces envois sont parvenus à l'organe de révision de la
société. La recourante affirme et prétend avoir prouvé qu'ils sont aussi
parvenus aux avocats qui conseillent la société dans une procédure de faillite
ouverte contre elle à Genève. Là encore, elle se prévaut d'une communication
entièrement informelle et aléatoire, dépourvue de toute similitude avec une
notification judiciaire régulière. En tant qu'elle se prétend elle-même
dispensée d'observer les formes procédurales prévues par la Convention de La
Haye pour les notifications judiciaires, elle argue vainement de la diligence à
attendre de ces avocats avec qui elle a correspondu, et elle fait tout aussi
inutilement valoir que la dualité juridique d'une société anonyme et de son
actionnaire unique ne doit pas être prise en considération lorsqu'il y a abus
de droit à l'invoquer (ATF 132 III 737 consid. 2.3 p. 742; 132 III 489 consid.
3.2 p. 493). Au regard de l'art. 34 par. 2 CL, les envois informels de la
recourante ne seraient concluants que s'il était prouvé que ceux-ci aient
concrètement mis l'intimé en mesure de procéder devant le Tribunal d'Amsterdam.
Or, la Cour des poursuites et faillites peut juger sans arbitraire que cette
preuve n'est pas apportée.

5.
On a vu que selon l'art. 34 par. 2 CL, la partie qui s'oppose à l'exécution
peut faire valoir que «l'acte introductif d'instance ou un acte équivalent n'a
pas été notifié ou signifié au défendeur défaillant en temps utile et de telle
manière qu'il puisse se défendre». Selon les mots qui suivent dans la même
phrase du texte de la Convention, la partie opposante est déchue de cette
exception si le défendeur défaillant «n'a pas exercé de recours à l'encontre de
la décision alors qu'il était en mesure de le faire».
Selon l'art. III par. 1 du Protocole n° 1 relatif à certains problèmes de
compétence, de procédure et d'exécution de la Convention de Lugano, la Suisse a
le droit de déclarer, lors de la ratification de ce traité, qu'elle
n'appliquera pas ce dernier passage de l'art. 34 par. 2 CL. La Suisse a usé de
ce droit et présenté la déclaration correspondante.
La recourante soutient que cette réserve de la Suisse n'est opérante que
lorsque le défendeur défaillant a son domicile dans un Etat partie à la
Convention. Elle fait valoir que l'intimé n'a son domicile dans aucun de ces
Etats et qu'il n'a pas recouru contre le jugement contumacial rendu par le
Tribunal d'Amsterdam, alors qu'il avait la possibilité de le faire.
Ni l'art. 34 par. 2 CL ni l'art. III par. 1 du Protocole n° 1 ne spécifient de
condition ou restriction ayant pour objet le domicile de la partie
défenderesse. Par conséquent, le régime et les modalités de l'exécution des
décisions étrangères - c'est-à-dire provenant d'un Etat partie à la Convention,
autre que celui où l'exécution est entreprise - ne varient pas selon que la
partie contre qui l'exécution est demandée ait son domicile en Suisse, dans un
autre Etat partie à la Convention de Lugano ou dans un Etat tiers. L'un des
commentaires cités par la recourante souligne même que par suite de la réserve
présentée par la Suisse, le passage final de l'art. 34 par. 2 CL ne s'applique
pas dans ce pays, cela «sans égard au domicile du défendeur» (Bucher, op. cit.,
n° 44 ad art. 34 CL). Pour le surplus, cette réserve doit être prise en
considération nonobstant les critiques qu'elle suscite en doctrine. La Cour des
poursuites et faillites s'est donc abstenue à bon droit de rechercher si
l'intimé aurait pu exercer un recours contre le jugement du 7 juillet 2011.

6.
Le recours en matière civile se révèle privé de fondement, ce qui conduit à son
rejet. A titre de partie qui succombe, son auteur doit acquitter les frais
judiciaires à percevoir par le Tribunal fédéral. L'intimé n'a déposé aucun
mémoire et il ne lui sera donc pas alloué de dépens.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 15'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.
Il n'est pas alloué de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à l'office des poursuites du
district de la Riviera - Pays-d'Enhaut, à l'office du registre foncier de Vevey
et à la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal du canton de
Vaud.

Lausanne, le 23 octobre 2012
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La présidente: Hohl

Le greffier: Thélin