Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.383/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
4A_383/2012

Arrêt du 9 octobre 2012
Ire Cour de droit civil

Composition
Mmes et MM. les juges Klett, présidente, Corboz, Rottenberg Liatowitsch, Kolly
et Fellrath Gazzini, juge suppléante.
Greffier: M. Thélin.

Participants à la procédure
X.________,
représenté par Me Irène Buche,
défendeur et recourant,

contre

Z.________,
représenté par Me Raphaël Quinodoz,
demandeur et intimé.

Objet
bail à loyer; résiliation

recours contre l'arrêt rendu le 21 mai 2012 par la Chambre des baux et loyers
de la Cour de justice du canton de Genève.

Faits:

A.
Dès le 16 décembre 1988, X.________ a pris à bail un appartement de cinq pièces
au premier étage d'un bâtiment sis dans la Vieille-ville de Genève. Le contrat
était conclu pour une durée initiale de trois ans, échéant le 15 décembre 1991,
avec renouvellement tacite d'année en année. Le locataire habite l'appartement
avec sa mère qui est âgée et malade.
Par lettre du 1er février 2009, le locataire a demandé l'exécution de divers
travaux dans l'appartement; n'ayant reçu aucune réponse, il a insisté le 12
juin suivant en menaçant de mettre en oeuvre les procédures nécessaires s'il
n'obtenait pas satisfaction. Les travaux ont été exécutés au mois de juin 2009.
Le 27 août 2009, usant d'une formule officielle, le bailleur Z.________ a
résilié le contrat avec effet au 15 décembre 2009. Il a simultanément et
spontanément motivé le congé par le besoin de loger sa propre fille dans
l'appartement loué. Le loyer annuel était alors fixé à 42'000 fr., frais
accessoires non compris.
X.________ a saisi la commission de conciliation compétente le 5 octobre 2009.
Par décision du 12 mai 2010, la commission a annulé le congé.

B.
Le 17 juin 2010, Z.________ a ouvert action contre X.________ devant le
Tribunal des baux et loyers du canton de Genève. Le tribunal était requis de
constater que le congé du 27 août 2009, avec effet au 15 décembre 2009, était
valable.
X.________ a conclu principalement à l'annulation du congé et subsidiairement à
la prolongation du bail pour une durée de quatre ans.
Le tribunal a entendu divers témoins et il a procédé à une inspection des
lieux.
Le tribunal s'est prononcé le 4 octobre 2011. Accueillant partiellement
l'action, il a prononcé que le bail a été valablement résilié pour le 15
décembre 2009; conformément à ses conclusions subsidiaires, le locataire
obtient une prolongation de quatre ans échéant le 15 décembre 2013.
La Chambre des baux et loyers de la Cour de justice a statué le 21 mai 2012 sur
l'appel du locataire; elle a confirmé le jugement.

C.
Agissant par la voie du recours en matière civile, X.________ requiert le
Tribunal fédéral de réformer l'arrêt de la Cour de justice en ce sens que le
congé soit annulé.
L'intimé n'a pas été invité à répondre.
Par ordonnance du 13 août 2012, le Tribunal fédéral a rejeté une demande
d'assistance judiciaire jointe au recours.

Considérant en droit:

1.
L'arrêt de la Cour de justice est une décision finale (art. 90 LTF) relative
aux actions concernant la résiliation ou la prolongation d'un bail prévues par
l'art. 273 CO, rendue en dernière instance cantonale (art. 75 al. 1 LTF).
Dans une contestation portant sur la validité d'une résiliation de bail, la
valeur litigieuse est égale au loyer de la période minimum pendant laquelle le
contrat subsiste si la résiliation n'est pas valable, période qui s'étend
jusqu'à la date pour laquelle un nouveau congé peut être donné; il faut prendre
ici en considération, s'il y a lieu, la période de protection de trois ans dès
la fin de la procédure judiciaire qui est prévue par l'art. 271a al. 1 let. e
CO (ATF 137 III 389 consid. 1.1; ATF 136 III 196 consid. 1.1 p. 197). En
l'espèce, compte tenu d'un loyer annuel de 42'000 fr., la valeur minimale de
15'000 fr. (art. 74 al. 1 let. a LTF) est atteinte.
Le recours est formé par une partie qui a pris part à l'instance précédente et
succombé dans ses conclusions (art. 76 al. 1 LTF). Introduit en temps utile
(art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes requises (art. 42 al. 1 à 3 LTF), le
recours en matière civile est en principe recevable.

2.
Le recours peut être exercé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a
LTF). Le Tribunal fédéral applique ce droit d'office, hormis les droits
fondamentaux (art. 106 LTF). Il n'est pas lié par l'argumentation des parties
et il apprécie librement la portée juridique des faits; il s'en tient
cependant, d'ordinaire, aux questions juridiques que la partie recourante
soulève conformément aux exigences légales relatives à la motivation du recours
(art. 42 al. 2 LTF; ATF 133 II 249 consid. 1.4.1 p. 254).
Le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement juridique sur la base des
faits constatés dans la décision attaquée (art. 105 al. 1 LTF); les allégations
de fait et les moyens de preuve nouveaux sont en principe irrecevables (art. 99
al. 1 LTF). Le tribunal peut compléter ou rectifier même d'office les
constatations de fait qui se révèlent manifestement inexactes, c'est-à-dire
arbitraires aux termes de l'art. 9 Cst. (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; 133
II 249 consid. 1.1.2 p. 252), ou établies en violation du droit (art. 105 al. 2
LTF). La partie recourante est autorisée à attaquer des constatations de fait
ainsi irrégulières si la correction du vice est susceptible d'influer sur le
sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).
En matière d'appréciation des preuves et de constatation des faits, l'autorité
tombe dans l'arbitraire lorsqu'elle ne prend pas en considération, sans aucune
raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision,
lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore
lorsque, sur la base des éléments recueillis, elle parvient à des constatations
insoutenables (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; 136 III 552 consid. 4.2 p.
560; 129 I 8 consid. 2.1).

3.
Aux termes de l'art. 271 al. 1 CO, la résiliation d'un bail d'habitation ou de
locaux commerciaux est annulable lorsqu'elle contrevient aux règles de la bonne
foi. Cette disposition protège le locataire, notamment, contre le congé
purement chicanier qui ne répond à aucun intérêt objectif, sérieux et digne de
protection, et dont le motif n'est qu'un prétexte. Le locataire est aussi
protégé en cas de disproportion grossière des intérêts en présence; il l'est
également lorsque le bailleur use de son droit de manière inutilement
rigoureuse ou adopte une attitude contradictoire. La protection ainsi conférée
procède à la fois du principe de la bonne foi et de l'interdiction de l'abus de
droit, respectivement consacrés par les al. 1 et 2 de l'art. 2 CC; il n'est
toutefois pas nécessaire que l'attitude de la partie donnant congé à l'autre
constitue un abus de droit « manifeste » aux termes de cette dernière
disposition (ATF 120 II 105 consid. 3 p. 108; 31 consid. 4a p. 32; voir aussi
ATF 135 III 112 consid. 4.1 p. 119; 136 III 190 consid. 2 p. 192).
En l'espèce, le bailleur a d'emblée invoqué le besoin de loger sa propre fille.
Le recourant soutient que son adverse partie a résilié le bail afin de se
débarrasser d'un locataire résolu à exercer ses droits, que le besoin de loger
sa fille est un simple prétexte et que le congé est donc annulable sur la base
de l'art. 271 al. 1 CO. Le recourant fait valoir qu'après la résiliation
présentement litigieuse, plusieurs appartements se sont libérés dans les
bâtiments appartenant à son cocontractant. Il affirme que ce dernier aurait pu
attribuer l'un ou l'autre de ces logements à sa fille, ou le proposer à
lui-même en remplacement de son appartement actuel. A son avis, l'attitude du
bailleur dénote que le motif allégué n'était pas le motif réel du congé.
La validité d'un congé doit être appréciée en fonction des circonstances
présentes au moment de cette manifestation de volonté (ATF 109 II 153 consid.
3b p. 156). Elucider le motif d'un congé relève de la constatation des faits (
ATF 136 III 190 consid. 2 p. 192; 115 II 484 consid. 2b p. 486), de sorte que,
sous réserve du contrôle restreint prévu par les art. 97 al. 1 et 105 al. 2
LTF, ce point échappe au contrôle du Tribunal fédéral. Les déductions opérées
ou à opérer sur la base d'indices relèvent elles aussi de la constatation des
faits (ATF 117 II 256 consid. 2b p. 258; 136 III 486 consid. 5 p. 489; 128 III
390 consid. 4.3.3 in fine p. 398).
Selon les constatations de la Cour de justice, A.Z.________ est âgée de
quarante-neuf ans. Elle a vécu aux Etats-Unis d'Amérique durant douze ans,
jusqu'à la fin de 2009; elle est alors revenue en Suisse parce que l'entreprise
qu'elle avait fondée n'était pas rentable. Depuis 2000, elle souffre d'une
maladie respiratoire chronique sévère qui nécessite un traitement permanent et
l'oblige à éviter les efforts physiques et les lieux humides. Le logement
qu'elle occupe actuellement, à Genève, n'offre qu'une surface de 40 m² et il
est exposé à l'humidité. Son père a donné congé au recourant à fin août 2009,
soit dès le moment où elle a annoncé son prochain retour. A cette époque, aucun
logement adapté à ses besoins n'était disponible dans les bâtiments dont le
père est propriétaire dans la Vieille-ville de Genève. Plus tard, deux
appartements précédemment loués ont été restitués au propriétaire, l'un à la
fin de 2009, par suite du décès du locataire, et l'autre pendant l'été de 2010.
En dépit de l'opinion différente du recourant, le comportement de l'intimé
relatif aux logements dont il a pu recouvrer l'usage après août 2009 n'exclut
pas avec certitude qu'au moment du congé litigieux, le 27 de ce mois, ce
propriétaire eût effectivement l'intention de loger sa fille dans l'appartement
concerné. Le juge du fait peut donc retenir sans arbitraire que le besoin de
loger A.Z.________ n'était pas un simple prétexte, selon la thèse développée à
l'appui du recours, mais bien le motif réel du congé. Pour le surplus, ce motif
est de toute évidence compatible avec l'art. 271 al. 1 CO.

4.
Selon l'art. 271a al. 1 let. e ch. 4 CO, parmi d'autres cas spécialement
énumérés, le congé est annulable lorsqu'il est donné par le bailleur dans les
trois ans à compter de la fin d'une procédure judiciaire ou de conciliation
relative au bail, si le bailleur a alors conclu une transaction ou s'est
entendu de toute autre manière avec le locataire. L'art. 271a al. 2 CO étend
l'application de cette règle au cas où le locataire peut prouver par des écrits
qu'il s'est entendu avec le bailleur, en dehors d'une procédure judiciaire ou
de conciliation, sur une prétention relative au bail.
L'annulation du congé suppose que dans les trois années qui l'ont précédé, les
parties se soient trouvées en litige et qu'elles aient abouti à une solution
amiable par suite de concessions du bailleur. L'annulation est donc exclue si
l'une des parties a accepté aussitôt et sans discussion une prétention annoncée
par l'autre partie (ATF 130 III 563 consid. 2.1 p. 566).
Le recourant se prévaut de l'art. 271a al. 2 CO; il soutient qu'un litige s'est
élevé au sujet des travaux réclamés par lui dès le 1er février 2009, jusqu'à ce
que l'intimé eût enfin accepté de les exécuter. Rejetant cette argumentation,
la Cour de justice retient que le bailleur « a donné suite aux prétentions de
l'appelant et qu'aucune divergence n'a opposé les parties au sujet des travaux
».
Savoir s'il y a eu litige entre les parties, selon la jurisprudence précitée,
est une question juridique que le Tribunal fédéral examine librement sur la
base des faits constatés. Le 1er février 2009, le locataire a demandé les
travaux et il n'a d'abord reçu aucune réponse; le bailleur n'a réagi et
accepté, rapidement, qu'après une deuxième lettre, du 12 juin 2009, où son
cocontractant le menaçait de mettre en oeuvre une procédure juridique. Le
silence qui a suivi la première lettre ne peut pas être interprété comme un
désaccord du bailleur; il est possible que celui-ci ait voulu prendre le temps
d'étudier la demande et d'envoyer un artisan sur place, ou que son inaction ait
résulté d'une simple négligence. La deuxième lettre a reçu aussitôt une suite
favorable. Faute d'un litige entre les parties, les précédents juges ont
correctement appliqué le droit fédéral en refusant l'annulation du congé.

5.
Le Tribunal des baux et loyers a prolongé le contrat d'une durée de quatre ans,
selon les conclusions subsidiaires du locataire. Le bailleur n'a toutefois pas
appelé du jugement et cette mesure n'est donc plus litigieuse.
Le recours se révèle privé de fondement, ce qui conduit à son rejet. A titre de
partie qui succombe, son auteur doit acquitter l'émolument à percevoir par le
Tribunal fédéral. L'adverse partie n'a pas été invitée à répondre et il ne lui
sera donc pas alloué de dépens.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Le recourant acquittera un émolument judiciaire de 5'000 francs.

3.
Il n'est pas alloué de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton
de Genève.

Lausanne, le 9 octobre 2012
Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La présidente: Klett

Le greffier: Thélin