Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.352/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
4A_352/2012; 4A_358/2012

Arrêt du 21 novembre 2012
Ire Cour de droit civil

Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux Klett, Présidente, Corboz et Rottenberg
Liatowitsch.
Greffier: M. Piaget.

Participants à la procédure
X.________, représenté par Me Philippe Reymond,
recourant,

contre

1. Société Y.________, représentée par
Me Alain Vuithier,
2. Z.________, représentée par
Me Laurent Moreillon,
intimées.

Objet
bail à loyer; arriérés de loyer,

recours contre l'arrêt de la Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton
de Vaud du 15 février 2012.

Faits:

A.
Par contrat de bail à loyer pour locaux commerciaux du 22 décembre 1987, la
Société Y.________ (ci-après: la bailleresse ou la défenderesse) a remis en
location à Z.________ (ci-après: la demanderesse) et à X.________ (ci-après: le
défendeur) un cabinet dentaire d'environ 77 m2 au lieu dit ... à l'entrée du
parc A.________.
Conclu pour durer initialement du 1er janvier 1988 au 31 décembre 1998, il
était prévu que le bail se renouvellerait tacitement tous les cinq ans, sauf
avis de résiliation donné au moins une année à l'avance. Le loyer mensuel a été
fixé en dernier lieu à 1'750 fr., plus 100 fr. d'acompte de chauffage et d'eau
chaude.
Le chiffre 6 du contrat, qui porte sur la sous-location et la cession du bail,
prévoit ce qui suit:
"(...)
La cession du bail est autorisée à la condition que le cessionnaire exerce la
même activité que le locataire et possède les capacités morales,
professionnelles et financières pour assurer la marche normale de l'entreprise.
Cette cession nécessite l'accord écrit préalable du propriétaire. Les
honoraires et frais inhérents à la cession sont à la charge du locataire
cédant.
Le propriétaire a le droit de se substituer au cessionnaire à condition de
payer une indemnité adaptée aux critères ci-dessous. Il est tenu de se
déterminer dans les 15 jours à compter du moment où il a connaissance de la
volonté du locataire de céder son bail.
(...)"
A la même époque, la demanderesse et le défendeur ont signé un "contrat de
société" non daté ayant pour but d'acquérir un appartement et d'y exploiter un
cabinet dentaire.
Dès le 1er janvier 1998, ils ont commencé à exercer tous les deux leur activité
de dentiste dans les locaux. Ils ont ouvert un compte commun auprès de la
Banque V.________ pour payer les frais en relation avec l'exploitation du
cabinet.
Les relations entre la demanderesse et le défendeur s'étant détériorées,
celui-ci a pris la décision de quitter les locaux.
Par ordonnance de mesures provisionnelles du 29 août 2002, le Président du
Tribunal civil de l'arrondissement de Lausanne a notamment interdit au
défendeur d'exploiter le cabinet se situant dans les locaux litigieux et d'y
pénétrer sans l'accord de la demanderesse.
Par lettre du 12 novembre 2002, la bailleresse s'est référée à un courrier du 2
août 2002 du défendeur (qui demandait de ne pas prévoir des modifications au
contrat de bail en cause) et elle a rappelé à ses deux partenaires contractuels
qu'ils étaient de par la loi responsables de toutes les conditions du bail;
elles les a invités à l'informer de leurs intentions quant à la continuation du
bail.
Par lettre du 19 novembre 2002, le défendeur a déclaré résilier sa part du bail
en cause pour la prochaine échéance, soit avec effet au 31 décembre 2003.
Dans un courrier du 28 février 2003, la bailleresse a expliqué s'être attendue
à "plus d'éclaircissement dans le cadre des problèmes entre les parties de
(...) la société simple". Elle a constaté que le bail était prolongé pour une
nouvelle période de cinq ans et a laissé au défendeur "le soin de régler la
responsabilité découlant du bail à loyer entre parties de la société simple" et
de l'informer de ses intentions, la bailleresse ajoutant qu'elle se
déterminerait sur les propositions du défendeur "au moment venu".
De 2002 à 2005, l'entier du loyer a été payé par le débit du compte bancaire
exploité en commun par la demanderesse et le défendeur. Dès le 1er août 2005,
celle-là n'a plus payé que la moitié du loyer, soit 925 fr. par mois.
Le 6 mars 2006, le 19 décembre 2007, puis le 29 février 2008, la bailleresse a
réclamé les arriérés de loyer au défendeur.
Le 12 décembre 2007, la demanderesse a réclamé une baisse de loyer à la
bailleresse et elle a indiqué que les locaux étaient affectés de plusieurs
défauts.
Le 14 août 2008, la bailleresse a fait notifier au défendeur un commandement de
payer représentant la moitié des loyers encore due pour la période courant du
1er août 2005 au 31 août 2008. Le défendeur a formé opposition totale.
Par courriers recommandés du 4 septembre 2008, la bailleresse a sommé chacun
des locataires, sous peine de faire application de l'art. 257d CO, de
s'acquitter de l'arriéré des loyers pour la période courant du 1er août 2005 au
30 septembre 2008. Le 24 septembre 2008, elle a fait notifier à la demanderesse
un commandement de payer pour une somme représentant la moitié des loyers
encore due pour la période courant du 1er août 2005 au 31 août 2007. La
demanderesse a fait opposition totale.
Le 2 octobre 2008, la demanderesse a informé la bailleresse que de nouveaux
défauts étaient apparus et que, conformément à l'art. 259g CO, elle lui fixait
un délai pour procéder aux réparations nécessaires.
Le 31 octobre 2008, la demanderesse a quitté les locaux litigieux et, le 21
novembre 2008, elle a résilié le bail avec effet immédiat en application de
l'art. 259b CO.
Par formules officielles du 22 janvier 2009 adressées à chacun des
colocataires, la bailleresse a résilié le bail en application de l'art. 257d
al. 2 CO.
Le 26 janvier 2009, elle a fait notifier à la demanderesse un commandement de
payer pour un montant représentant les loyers dus pour la période courant du
1er septembre 2008 au 31 janvier 2009. La demanderesse a formé opposition
totale.
Le 28 janvier 2009, la défenderesse a fait notifier au défendeur un
commandement de payer portant sur la même somme. Le défendeur a formé
opposition totale.
La commission de conciliation compétente a été saisie par chacune des parties
entre mars et mai 2009. Le 6 mai 2009, elle a constaté l'échec de la
conciliation.

B.
Le 5 juin 2009, la demanderesse a ouvert action devant le Tribunal des baux du
canton de Vaud contre la bailleresse et le défendeur. Elle a conclu à ce
qu'elle soit libérée de toute dette à l'égard de la défenderesse et,
subsidiairement, pour le cas où elle serait reconnue codébitrice solidaire, à
ce que le défendeur soit condamné à la relever, à l'égard de la défenderesse,
du paiement de la part des loyers lui afférant.
Dans une requête du même jour, la demanderesse a également conclu à ce que la
validité de la résiliation donnée par elle le 21 novembre 2008 soit constatée.
Le 8 juin 2009, le défendeur a aussi ouvert action devant le Tribunal des baux.
Il a conclu à ce qu'il soit libéré de toute obligation à l'égard de la
bailleresse, subsidiairement, au cas où il serait reconnu codébiteur solidaire,
à ce que la demanderesse soit tenue de le relever, à l'égard de la
défenderesse, de toutes prétentions.
Par jugement du 13 juillet 2010, le Tribunal des baux a déclaré inefficace la
résiliation de bail signifiée par la demanderesse le 21 novembre 2008, dit que
cette dernière et le défendeur sont les débiteurs solidaires de la défenderesse
pour une somme totale de 32'375 fr., intérêts en sus, correspondant aux loyers
encore en souffrance, et a levé les oppositions correspondantes. En substance,
les premiers juges ont considéré que la demanderesse et le défendeur étaient
liés par un contrat de société simple, que la défenderesse n'avait pas accepté
de délier le défendeur de ses obligations contractuelles, que ce soit par
accord écrit, oral ou par actes concluants, de sorte que ce dernier était
demeuré lié par le bail. Enfin, elle a considéré que les motifs invoqués par la
demanderesse à l'appui de la résiliation du 21 novembre 2008 constituaient des
prétextes pour se délier du bail de manière anticipée.
Par arrêt du 15 février 2012, la Chambre des recours du Tribunal cantonal
vaudois a rejeté les recours formés par le défendeur et la demanderesse et
confirmé le jugement entrepris.

C.
La demanderesse exerce un recours en matière civile et un recours
constitutionnel subsidiaire au Tribunal fédéral contre l'arrêt cantonal du 15
février 2012. Sous suite de dépens, elle conclut, principalement, à la réforme
de l'arrêt entrepris en ce sens que la résiliation du bail notifiée le 21
novembre 2008 est valable, qu'en conséquence elle ne doit payer aucun loyer
depuis cette date, que les oppositions formées aux commandements de payer qui
lui ont été notifiés sont maintenues, qu'elle est libérée de toute dette à
l'égard de la bailleresse en ce qui concerne les loyers arriérés du 1er août
2005 au 31 août 2007; subsidiairement, elle requiert le renvoi de la cause à
l'autorité précédente pour nouvelle décision.
Le défendeur et la bailleresse concluent "au rejet du recours".
La demanderesse a répliqué et le défendeur dupliqué.

D.
Agissant par la voie du recours en matière civile, le défendeur requiert le
Tribunal fédéral, avec suite de frais et dépens, de réformer l'arrêt de la
Chambre des recours du 15 février 2012 en ce sens qu'il n'est pas le débiteur
de la bailleresse et qu'il est libéré de toute obligation à l'égard de celle-ci
avec effet au 1er septembre 2002, et de donner l'ordre à l'office des
poursuites compétent de radier les poursuites correspondantes.
La demanderesse et la bailleresse concluent au rejet du recours.
Le défendeur a transmis une réplique et la demanderesse une duplique, sur
laquelle le défendeur a encore fait quelques observations.

Considérant en droit:

1.
Les recours soumis à l'examen du Tribunal fédéral visent le même arrêt
cantonal, lequel a été rendu à l'égard de l'ensemble des parties intéressées.
Ils ont trait à la même affaire et soulèvent des questions juridiques qui leurs
sont communes sur plusieurs points. Dans ces conditions, l'économie de la
procédure justifie que les causes 4A_352/2012 et 4A_358/2012 soient jointes
pour être traitées dans un seul et même arrêt.

2.
2.1 Les recours sont dirigés contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en
matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par une autorité cantonale de dernière
instance statuant sur recours (art. 75 LTF) dans une affaire pécuniaire dont la
valeur litigieuse atteint le seuil de 15'000 fr. déterminante en matière de
droit du bail (art. 74 al. 1 let. a LTF). Les recours en matière civile sont
donc recevables, puisqu'ils ont été déposés dans le délai (48 al. 1 et 100 al.
1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi.
Il en résulte que le recours constitutionnel formé par la demanderesse, qui est
subsidiaire (art. 113 LTF), est irrecevable.

2.2 Le recours en matière civile peut être interjeté pour violation du droit,
tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Il peut donc également être
formé pour violation d'un droit constitutionnel (ATF 136 I 241 consid. 2.1 p.
247; 136 II 304 consid. 2.4 p. 313).
Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est
limité ni par les arguments soulevés dans le recours, ni par la motivation
retenue par l'autorité précédente; il peut admettre un recours pour un autre
motif que ceux qui ont été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant
une argumentation différente de celle de l'autorité précédente (ATF 137 II 313
consid. 1.4 p. 317 s.; 135 III 397 consid. 1.4 et l'arrêt cité). Compte tenu de
l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine
d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), le Tribunal fédéral n'examine en
principe que les griefs invoqués; il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait
une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui se
posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 137 III 580
consid. 1.3 p. 584; 135 II 384 consid. 2.2.1 p. 389; 135 III 397 consid. 1.4).
Par exception à la règle selon laquelle il applique le droit d'office, le
Tribunal fédéral ne peut entrer en matière sur la violation d'un droit
constitutionnel ou sur une question relevant du droit cantonal ou intercantonal
que si le grief a été invoqué et motivé de manière précise par la partie
recourante (art. 106 al. 2 LTF).

2.3 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des
faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en
écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce
qui correspond à la notion d'arbitraire (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; 137
II 353 consid. 5.1 p. 356) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF
(art. 105 al. 2 LTF).
La partie recourante qui entend s'écarter des constatations de l'autorité
précédente doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions
d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de
quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de
celui contenu dans la décision attaquée (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; 136
I 184 consid. 1.2 p. 187). Une rectification de l'état de fait ne peut être
demandée que si elle est de nature à influer sur le sort de la cause (art. 97
al. 1 LTF). Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins
de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF).

2.4 Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art.
107 al. 1 LTF). Toute conclusion nouvelle est irrecevable (art. 99 al. 2 LTF).

3.
Le défendeur estime que c'est à tort que la cour cantonale a jugé qu'il était
encore lié par le contrat de bail depuis le 19 novembre 2002, date à laquelle
il a signifié à la bailleresse son "avis de résiliation de bail". Il soutient
que la société simple qu'il formait avec l'intimée avait déjà pris fin
lorsqu'il a adressé sa lettre de résiliation à la bailleresse. Selon lui, c'est
en violant le droit fédéral (principalement l'art. 263 CO) et en sombrant dans
l'arbitraire que la cour cantonale a écarté tout accord portant sur une cession
entre les colocataires et nié le consentement de la bailleresse quant au
transfert.

3.1 Selon l'art. 530 al. 1 CO, la société simple est un contrat par lequel deux
ou plusieurs personnes conviennent d'unir leurs efforts ou leurs ressources en
vue d'atteindre un but commun. Il faut encore - ce qui ne donne pas matière à
discussion en l'espèce - que la société ne présente pas les caractéristiques
distinctives d'une autre société réglée par la loi (art. 530 al. 2 CO).
La société simple se présente comme un contrat de durée dont les éléments
caractéristiques sont, d'une part, le but commun qui rassemble les efforts des
associés et, d'autre part, l'existence d'un apport, c'est-à-dire une prestation
que chaque associé doit faire au profit de la société (ATF 137 III 455 consid.
3.1 p. 456 s.).
S'agissant du but commun, acheter ensemble un immeuble (ATF 130 III 248 let. A
p. 249; 127 III 46 consid. 3b p. 52) ou construire un bâtiment en commun (ATF
134 III 597 consid. 3.2 p. 601) constitue typiquement un but de société simple.
Il en va de même de la location en commun d'un local ou d'un appartement (ATF
108 II 204 consid. 4b p. 209) et, excepté dans certaines circonstances, de
l'exploitation d'une étude d'avocats (pour les détails: FRANÇOIS CHAIX, in
Commentaire romand, Code des obligations I, 2008, no 19 ad art. 530 CO et les
références). L'art. 530 CO n'exige pas que la société soit conçue pour durer de
manière illimitée (ATF 137 III 455 consid. 3.1 p. 457).
Pour ce qui est de l'apport que chaque associé doit fournir, il peut consister
aussi bien dans une prestation patrimoniale que dans une prestation
personnelle. Il n'est pas nécessaire que les apports soient égaux, puisque le
contraire peut être convenu tacitement, sous réserve d'une violation de l'art.
27 al. 1 CC, cette dernière question n'étant toutefois pas discutée ici (ATF
137 III 455 consid. 3.1 p. 457 et les références citées).

3.2 En l'espèce, il résulte des constatations cantonales - qui lient le
Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF) - que la demanderesse et le défendeur ont
conçu le projet de s'associer en vue d'acquérir un local et d'y exploiter un
cabinet dentaire. Chacun devait faire un apport, puisque les frais en relation
avec l'exploitation du cabinet étaient partagés, ces frais étant payés par le
débit d'un compte commun alimenté aussi bien par le défendeur que par la
demanderesse. Le projet a été mis en ?uvre puisque ces derniers ont conclu
ensemble le contrat de bail commercial (signé le 22 décembre 1987) et qu'ils
ont commencé, dès le 1er janvier 1988, à exercer leur activité dans les locaux
litigieux.
Il en résulte qu'ils ont uni leurs efforts et leurs ressources en vue de
réaliser un but commun. Le rapport juridique noué entre eux se caractérise donc
comme une société simple au sens de l'art. 530 CO.
Selon les constatations cantonales, le contrat de bail a été signé par la
bailleresse, ainsi que par la demanderesse et le défendeur, à titre de
colocataires.
La bailleresse ayant conclu un contrat avec deux colocataires, formant une
société simple en vue de la réalisation de leur projet, le congé devait être
donné par ceux-ci conjointement, sous peine de nullité (arrêt 4A_437/2009 du 11
novembre 2009 consid. 4.3.3; DAVID LACHAT, Le bail à loyer, nouvelle éd., 2008,
n. 6.3 p. 637 et les auteurs cités; PETER HIGI, Berner Kommentar, 3e éd. 1994,
no 120 ad Vorbem. zu Art. 253-274g CO; LAURA JACQUEMOUD ROSSARI, Jouissance et
titularité du bail, CdB 4/99, p. 103; JACQUES MICHELI, Les colocataires dans le
bail commun, in 8e Séminaire sur le droit du bail, 1994, p. 12).
En l'espèce, cette exigence n'est pas contestée. Le défendeur soutient
toutefois qu'il pouvait agir seul, son courrier de résiliation du 19 novembre
2002 valant également, selon lui, transfert de bail (à la demanderesse) au sens
de l'art. 263 CO.

3.3 Lorsque des locaux commerciaux sont loués à deux colocataires et que l'on
assiste au départ de l'un d'entre eux, les colocataires procèdent à un
transfert de bail à celui d'entre eux qui reste en place. Les règles sur le
transfert de bail (art. 263 CO) sont ainsi applicables par analogie (LACHAT,
op. cit., n. 6.5 p. 638; MICHELI, op. cit., p. 15; ROGER WEBER, Der gemeinsame
Mietvertrag, thèse Zurich 1993, p. 153 s.).
Selon l'art. 263 al. 1 CO, le locataire d'un local commercial peut transférer
son bail à un tiers avec le consentement écrit du bailleur. Le bailleur ne peut
refuser son consentement que pour de justes motifs (art. 263 al. 2 CO).
Le transfert du bail opérant une substitution de locataire, il a pour résultat
de modifier fondamentalement le rapport contractuel initial, de sorte qu'on ne
saurait concevoir qu'il intervienne à l'insu du bailleur (ATF 125 III 226
consid. 2b p. 228). Il n'en va pas différemment lorsque le contrat de bail
signé initialement par deux colocataires est transféré à l'un d'entre eux, le
colocataire restant n'ayant pas nécessairement la surface financière lui
permettant d'assumer le loyer ou les capacités pour exploiter seul le commerce
(cf. LACHAT, op. cit., n. 6.5 p. 638; WEBER, op. cit., p. 154).
Le consentement du bailleur, exigé par l'art. 263 al. 1 CO, suppose qu'une
demande de transfert lui ait été présentée par le locataire, demande dont
celui-ci doit apporter la preuve (ATF 125 III 226 consid. 2b p. 228 et les
auteurs cités). En cas de pluralité de locataires, le transfert est effectué
par les colocataires et il leur appartient de présenter conjointement la
demande de transfert au bailleur (cf. MICHELI, op. cit., p. 11).
Le bailleur doit ensuite consentir au transfert. Faute de consentement de sa
part, la convention passée entre le locataire sortant (en l'espèce le
colocataire sortant) et le tiers reprenant (en l'occurrence le colocataire
restant) n'a aucun effet sur les rapports juridiques entre le locataire (soit
les colocataires) et le bailleur. Le consentement du bailleur est une condition
suspensive du transfert (arrêt 4C.15/1992 du 15 juillet 1992 consid. 2b; Le
droit suisse du bail à loyer - Commentaire SVIT, adaptation française de
Burkhalter/Martinez-Favre, 2011, no 20 ad art. 263 CO; LACHAT, op. cit., n.
3.3.6 p. 586).
Pour des raisons de preuve, l'art. 263 al. 1 CO exige que le consentement soit
donné sous la forme écrite. Il peut y avoir abus de droit à invoquer l'absence
de forme écrite si le consentement a été donné par actes concluants (ATF 125
III 226 consid. 2b p. 229). L'art. 263 al. 1 CO prévoyant explicitement
l'exigence de la forme écrite pour l'octroi du consentement, l'existence d'un
abus de droit ne doit être admise qu'avec retenue (HIGI, op. cit., no 28 ad
art. 263 CO). Cette question ne se pose pas si aucun consentement du bailleur
n'a été prouvé (ATF 125 III 226 consid. 2b p. 229 et les auteurs cités).

3.4 En l'occurrence, la question de l'existence d'un accord de cession entre
les colocataires peut rester ouverte, puisque le consentement de la bailleresse
au transfert n'a pu être établi (cf. infra).
3.4.1 Il n'est pas contesté qu'il n'y a jamais eu de consentement écrit de la
part de la bailleresse. Le défendeur insiste toutefois sur le fait qu'il a
signifié un avis de résiliation de bail le 19 novembre 2002; il tente de
démontrer que, si elle n'entendait pas poursuivre la relation contractuelle
avec un seul locataire, la bailleresse aurait dû de bonne foi réagir à son
courrier, de manière à ne pas lui porter préjudice, ce d'autant plus que, passé
le 31 décembre 2002, les parties étaient liées pour une nouvelle période
quinquennale.
L'argumentation ne convainc pas.
Si le défendeur et la demanderesse entendaient céder le bail à celle-ci, ils
devaient présenter une demande commune à la bailleresse. Or, il a été constaté
que le défendeur a toujours agi en son nom propre, et non au nom de son
associée. A ce sujet, la cour cantonale a d'ailleurs précisé très clairement
que les dissensions existant entre la demanderesse et le défendeur,
communiquées à la bailleresse, excluaient totalement l'idée que l'un des
associés pouvait représenter l'autre vis-à-vis de celle-ci.
On ne saurait donc reprocher à la bailleresse de n'avoir pas réagi à l'avis
envoyé par le seul défendeur, celui-ci n'étant pas légitimé à demander seul le
transfert du bail. Autre est la question de savoir si la bailleresse a, par le
comportement qu'elle a adopté ultérieurement, donné son consentement par actes
concluants (cf. infra consid. 3.4.2).
D'une manière générale, on ne saurait d'ailleurs faire grief à la bailleresse
de n'avoir pas réagi, ou seulement tardivement (dans son courrier du 28 février
2003). Il est en effet de jurisprudence que si le bailleur ne donne pas de
réponse ou refuse son consentement, il appartient au locataire de saisir le
juge en invoquant un refus sans justes motifs (ATF 125 III 226 consid. 2b p.
229).
Les parties n'ont en outre pas prévu de clause contractuelle présumant le
consentement de la bailleresse, dans l'hypothèse où celle-ci ne répondrait pas
à une demande de transfert dans un certain délai (la validité d'une telle
clause étant par ailleurs controversée: cf. LACHAT, op. cit., n. 3.3.5 p. 585
et les auteurs cités). Quant au délai de quinze jours fixé à l'art. 6 al. 3 du
contrat, il n'a pas trait au consentement devant être donné selon l'art. 263 CO
(cf. également art. 6 al. 2 du contrat); il s'agit du délai dans lequel la
bailleresse doit, le cas échéant, faire état de son intention de reprendre les
locaux loués, moyennant indemnité.
3.4.2 Le défendeur considère que la bailleresse a, ultérieurement, adopté un
comportement qui démontrerait que le consentement a été donné par actes
concluants. Il en veut pour preuve que, depuis l'envoi de son avis de
résiliation du 19 novembre 2002, la bailleresse a accepté sans réagir, entre
2002 et 2006, les loyers payés par la seule demanderesse.
L'argument tombe à faux.
On observe d'emblée que l'avis de résiliation du 19 novembre 2002 ne faisait
pas expressément référence au transfert de bail, mais le défendeur communiquait
sa volonté de "résilier sa part du bail en cause pour la prochaine échéance".
La bailleresse, dans sa réponse du 28 février 2003, n'a pas indiqué consentir à
un transfert, mais précisé qu'elle attendait "plus d'éclaircissement dans le
cadre des problèmes entre les parties de [la] société simple".
Ensuite, il a été retenu qu'entre 2002 et 2005 l'entier du loyer a été payé par
le débit du compte bancaire exploité en commun par le défendeur et la
demanderesse, comme cela avait été le cas auparavant. Le fait que le loyer ait
été payé depuis ce compte commun constitue plutôt un indice, dans la
perspective de la bailleresse, corroborant que les deux colocataires se
considéraient toujours comme débiteurs solidaires. Contrairement à ce que pense
la demanderesse, il n'importe de savoir qui alimentait le compte commun, cette
information ne pouvant être opposée à la bailleresse.
On ne peut en outre rien déduire du fait que la bailleresse ait accepté des
versements (partiels) par le débit du seul compte de la demanderesse (depuis
août 2005). Il est en effet de jurisprudence qu'il ne s'agit pas là d'un indice
en faveur d'un consentement (quant au transfert de bail); le loyer ne devait en
effet pas nécessairement être payé par les colocataires, ceux-ci pouvant
charger l'un d'eux d'effectuer les versements (cf. ATF 125 III 226 consid. 2c
p. 229).
Certes, les circonstances d'espèce révèlent une situation peu claire que la
bailleresse entendait éclaircir (cf. réponse du 23 février 2003); elle n'a
toutefois entrepris aucune démarche en ce sens par la suite. La rigueur de
l'art. 263 CO - qui exige un consentement écrit - est toutefois précisément
conçue pour permettre de trancher lorsqu'une situation confuse s'est installée
(cf. ATF 125 III 226 consid. 2c p. 230).
Dans ce contexte, on ne saurait dire que l'existence d'un consentement de la
bailleresse au transfert du bail a été prouvée.
En l'absence d'un accord de la bailleresse, il ne peut y avoir de transfert du
bail, si bien que la décision entreprise ne viole pas l'art. 263 CO ou l'art. 2
CC.

3.5 Subsidiairement, le recourant reproche à la cour cantonale de ne pas avoir
fait application de l'art. 266g CO et d'avoir transgressé son obligation de
motiver (art. 29 al. 2 Cst.). Il soutient qu'il a avisé la bailleresse, dans sa
lettre du 19 novembre 2002, de son impossibilité de continuer à exécuter le
contrat de bail au motif qu'une ordonnance présidentielle, rendue le 29 août
2002, lui faisait interdiction d'entrer dans les locaux et d'exploiter le
cabinet dentaire.
Selon l'art. 266g al. 1 CO, chacune des parties peut résilier le bail à
n'importe quel moment en observant le délai de congé légal si, pour de justes
motifs, l'exécution du contrat lui devient intolérable.

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, il est indispensable que le
destinataire de la manifestation de volonté puisse comprendre qu'il ne s'agit
pas d'une résiliation ordinaire, mais que le résiliant veut mettre fin au
contrat pour de justes motifs (ATF 92 II 184 consid. 4a p. 186; arrêt 4C.202/
1994 du 3 octobre 1995 consid. 2b/aa); l'allégation ultérieure de justes motifs
dans la procédure ne peut pas valider une résiliation pour justes motifs qui
n'a pas été donnée (arrêt 4A_596/2010 du 12 janvier 2011 consid. 2.3).
Il faut à nouveau observer que le courrier du 19 novembre 2002 a été signifié
par le seul défendeur, alors même que la résiliation du bail avant son échéance
aurait dû être effectuée par l'ensemble des colocataires (cf. MICHELI, op.
cit., p. 13). Au demeurant, le défendeur se limite à faire part de son
intention de résilier le contrat, sans faire aucune référence à l'art. 266g CO
ou à de justes motifs. De surcroît, le "congé" adressé à la bailleresse ne
prévoyait pas un congé dans le délai légal, mais respectait le terme
contractuel, de telle sorte que le destinataire du document (la bailleresse)
devait penser à un congé ordinaire et que rien ne lui permettait d'envisager
qu'il s'agissait d'un congé extraordinaire.
Le moyen tiré de la violation de l'art. 266g CO est dépourvu de toute
consistance.
La critique soulevée par le défendeur en rapport avec l'art. 29 al. 2 Cst.
tombe dès lors à faux. Les juges, même s'ils ne l'ont pas fait expressément en
lien avec l'art. 266g CO, ont signalé que les colocataires qui formaient une
société simple devaient agir en commun dans le cadre de leurs relations avec la
bailleresse. Dans l'état de fait, ils ont également constaté que le courrier du
19 novembre 2002 faisait état d'une résiliation pour le prochain terme (cf.
arrêt entrepris p. 4), donc d'une résiliation ordinaire. Faisant référence à
l'art. 266g CO, ils ont signalé que le droit d'être entendu "n'implique
nullement que l'autorité retienne en droit l'argumentation juridique présentée,
ni qu'elle retienne des faits à la suite d'une instruction sans pertinence avec
la solution juridique à retenir" (arrêt entrepris p. 17).
La lecture de l'arrêt entrepris permet de comprendre que la cour cantonale ne
s'est pas étendue sur la disposition invoquée par le défendeur faute de
pertinence, et on ne saurait y voir une violation du droit d'être entendu (cf.
ATF 134 I 83 consid. 4.1 p. 88).

3.6 Dans une argumentation subsidiaire, le défendeur invoque l'art. 264 CO,
soutenant que, dans son courrier du 19 novembre 2002, il aurait "présenté" en
la personne de la demanderesse une candidate de remplacement, prête à être la
seule locataire des locaux, et que la bailleresse ne pouvait refuser, la
locataire étant déjà connue, admise et solvable.
L'argumentation ne convainc pas, le droit de restituer la chose louée aux
conditions de l'art. 264 CO n'ayant pas été exercé conjointement par tous les
colocataires (cf. MICHELI, op. cit., p. 11).
Le recours formé par le défendeur se révèle mal fondé et il sera donc rejeté.

4.
4.1 La demanderesse et recourante soutient que la cour cantonale a constaté les
faits de façon manifestement inexacte - soit de façon arbitraire (cf. supra
consid. 2.3) - en retenant qu'il n'était pas établi que les défauts de la chose
louée excluaient ou entravaient de manière considérable l'usage pour lequel les
locaux avaient été loués.
D'emblée, on observe que les corrections que la demanderesse entend apporter à
l'état de fait au sujet des défauts constatés ne sont pas susceptibles d'avoir
une incidence sur le sort de la cause (cf. art. 97 al. 1 LTF). Il a été établi,
en fait (art. 105 al. 1 LTF), que les courriers adressés par le mandataire de
la demanderesse relatifs aux défauts de la chose louée, de même que la
résiliation du 21 novembre 2008, ont été notifiés au nom de la seule
demanderesse, et non par les deux associés (demanderesse et défendeur) formant
la société simple.
C'est donc avec raison que la cour cantonale a conclu que le congé que la
demanderesse a donné le 21 novembre 2008, sous l'angle de l'art. 259b let. a
CO, était nul, faute d'avoir été signifié par les deux colocataires
conjointement (cf. MICHELI, op. cit., p. 11). La nullité dispense d'examiner si
les conditions du congé extraordinaire de l'art. 259b let. a CO sont réunies en
l'espèce.

4.2 La demanderesse tente de revenir sur l'existence de la solidarité,
soutenant qu'elle était légitimée à résilier seule son contrat de bail
valablement, ce qu'elle a fait par écrit le 21 novembre 2008. Elle soutient que
deux contrats de bail coexisteraient, l'un liant la demanderesse et la
bailleresse, et l'autre engageant celle-ci et le défendeur.
La demanderesse ne démontre pas que l'autorité précédente aurait établi les
faits arbitrairement à cet égard. Elle se limite à affirmer que "si la
bailleresse avait considéré qu'il n'y avait qu'un seul contrat de bail, elle
aurait à l'évidence intenté des poursuites bien avant 2008 contre la
recourante"; ou elle met en évidence que la bailleresse, dans un avis du 6 mars
2006, a indiqué que la demanderesse a procédé au paiement de 50% du loyer, ce
qui "permet sans aucun doute d'en déduire que la bailleresse considérait
effectivement que deux contrats de bail la liaient, individuellement, à chacun
des deux locataires". Elle se limite ainsi à présenter sa version des faits
dans une argumentation purement appellatoire. Formuler des hypothèses
n'équivaut à l'évidence pas à démontrer l'arbitraire.
Plus loin dans son mémoire, la demanderesse revient à la charge, apparemment
sous l'angle du droit, en soutenant que la bailleresse avait renoncé au
bénéfice de la solidarité. Son argumentation repose à nouveau sur la prémisse -
écartée par les juges précédents - selon laquelle deux contrats de bail
coexisteraient. Il n'y a donc pas lieu d'y revenir.

4.3 S'agissant du moyen tiré de la violation du droit d'être entendu (art. 29
al. 2 Cst.) également soulevé par la demanderesse, il est, en tant qu'il porte
sur la question des défauts de la chose louée, sans consistance, cette question
étant sans pertinence pour l'issue de la cause (cf. supra consid. 4.1).
Le même grief, en tant qu'il porte sur les motifs qui ont poussé la cour
cantonale à retenir que la demanderesse et le défendeur sont débiteurs
solidaires de la bailleresse, doit être déclaré mal fondé. La cour cantonale a
explicitement retenu que les droits des locataires, membres d'une société
simple, doivent être exercer en commun et que c'est à tort que tant le
défendeur que la demanderesse ont cru être autorisés à résilier en leur nom
propre le bail (arrêt entrepris p. 20 s.). La motivation de la décision
attaquée permet indéniablement de comprendre pour quelle raison la cour
cantonale a reconnu l'existence de la solidarité et il ne saurait être question
de violation du droit d'être entendu.
Le recours de la demanderesse se révèle, lui aussi, privé de fondement et il
sera donc rejeté.

5.
Chaque partie recourante doit acquitter l'émolument judiciaire afférent à son
propre recours.
Quant aux dépens, ils seront compensés entre la demanderesse et le défendeur.
En revanche, ceux-ci verseront chacun à la bailleresse, qui a dû répondre aux
recours séparément, une indemnité de ce chef.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Les causes 4A_352/2012 et 4A_358/2012 sont jointes.

2.
Le recours constitutionnel subsidiaire formé par la demanderesse est
irrecevable.

3.
Les recours en matière civile sont rejetés.

4.
La demanderesse et le défendeur acquitteront chacun un émolument judiciaire de
2'000 francs.

5.
La demanderesse et le défendeur verseront chacun à la bailleresse une indemnité
de 2'500 fr. à titre de dépens.

6.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre des recours du
Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 21 novembre 2012

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La Présidente: Klett

Le Greffier: Piaget