Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.316/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
4A_316/2012

Arrêt du 1er novembre 2012
Ire Cour de droit civil

Composition
Mme et MM. les Juges fédéraux Klett, Présidente, Corboz et Kolly.
Greffier: M. Piaget.

Participants à la procédure
A.________,
représentée par Me Christian Bruchez,
recourante,

contre

1.X.________ & Cie,
2.Y.________ SA,
tous les deux représentés par
Me Serge Fasel,
3.Caisse de chômage Z.________,
intimés.

Objet
motif justifié de licenciement,

recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre des
prud'hommes, du 24 avril 2012.

Faits:

A.
X.________ & Cie (ci-après : X.________), société en nom collectif dont le
siège est à Genève, a engagé A.________, domiciliée à Genève, en qualité de
collaboratrice de vente temporaire dès le 18 novembre 2005. Elle a travaillé au
rayon lingerie et confection homme du magasin " X.________ " à Genève. En
dernier lieu, son salaire mensuel brut était de 3'375 fr. pour un taux
d'activité de 80 %.
Il existe par ailleurs une société Y.________ SA dont le siège est à Bâle, mais
il a été constaté que celle-ci n'avait aucun lien contractuel avec A.________
et cette question n'est plus litigieuse devant le Tribunal fédéral.
X.________ & Cie était signataire, comme le syndicat Z.________, de la
convention collective cadre du commerce de détail 2008-2010, qui s'appliquait à
tout le personnel de X.________. L'art. 17.2 de cette convention a la teneur
suivante : " Il est interdit de discriminer ou de licencier un employé en
raison de son activité exercée en qualité de représentant, de délégué syndical
ou de membre des commissions du personnel des employés ".
A.________ était membre du syndicat Z.________. Elle a représenté ce syndicat
lors de séances de la commission paritaire de la convention collective cadre du
commerce de détail genevois, ainsi que lors de réunions tripartites organisées
par le Département de l'économie et de la santé. Le 10 décembre 2006, lors du
Noël des familles du personnel, elle a porté un badge évoquant le conflit
syndical sur l'ouverture nocturne des magasins. Au début 2007, elle a distribué
des tracts à l'intérieur du magasin, ce qui lui a valu, à la suite de plaintes
de collègues, un avertissement de l'employeur, dont le bien-fondé a été
contesté par le syndicat. En décembre 2008, elle a été élue présidente de la
section genevoise du syndicat. Alors que les rapports entre le syndicat
Z.________ et X.________ étaient tendus, A.________ a été pressentie pour
siéger au sein de la commission du personnel que le syndicat souhaitait mettre
en place au sein des magasins X.________.
Le comportement au travail de A.________ a donné lieu à des critiques. Lors de
deux entretiens d'évaluation en 2008, son supérieur a relevé qu'elle
entretenait des relations difficiles avec une majorité de ses collègues,
qu'elle avait des difficultés de communication, qu'elle pouvait avoir des
comportements difficiles lors des soldes, qu'elle avait du mal à accepter les
remarques de ses supérieurs, qu'elle était impulsive et que ces attitudes
avaient une forte répercussion sur son humeur et son comportement avec ses
collègues. S'il est vrai qu'elle était très disponible à l'égard de ceux qui
avaient des problèmes avec l'employeur, elle était perçue par ses collègues et
ses supérieurs directs comme autoritaire et arrogante. La responsable du
personnel a affirmé que A.________ insultait ses collègues. Le gestionnaire de
vente a déclaré que deux collègues de A.________ se disaient rabaissées et
dévalorisées par cette dernière, au point que l'une d'elles a développé des
problèmes de sommeil. Son supérieur a affirmé qu'elle contestait
systématiquement les points soulevés et n'acceptait pas les suggestions qui lui
étaient faites. Le gestionnaire des ventes a demandé son transfert dans un
autre magasin X.________ parce qu'il ne supportait plus la gestion récurrente
des conflits avec A.________. Son supérieur direct a également relevé que
l'ambiance au travail s'était dégradée du fait des critiques constantes de
A.________ tant à son égard qu'à celui d'autres collègues.
Dans un article de la Tribune de Genève du 24 décembre 2008, A.________,
présentée comme vendeuse dans une grande surface genevoise, sans aucune
référence à son activité syndicale, a déclaré : "Il est faux de croire que nous
nous portons volontaires pour travailler certains soirs. La plupart des
magasins imposent leur planning hebdomadaire. Ils diminuent arbitrairement le
temps de travail certaines semaines, ce qui nous oblige à les rendre en
travaillant les soirs (...). Les magasins créent le besoin de se porter
volontaire (...). Ce procédé est généralisé et l'inspection du travail laisse
faire (...). Et pas question de s'en plaindre, sinon c'est la porte ! (...).
Les pressions durent toute l'année. Quand on est jeune, cette contrainte passe
encore. Mais avec une charge de famille, c'est intolérable. Alors que l'on
n'aille pas me parler maintenant d'ouverture dominicale !".
Par courrier du 18 février 2009, X.________ a remis à A.________ une lettre de
licenciement pour le 30 avril 2009, invoquant d'une part son comportement au
travail et, d'autre part, sa déclaration au quotidien la Tribune de Genève qui
avait porté atteinte à la considération de l'entreprise.
Par courrier de son syndicat du 24 février 2009, A.________ s'est opposée au
licenciement.

B.
Par demande du 30 avril 2009, le syndicat Z.________, agissant en sa qualité de
signataire de la convention collective, a saisi la Chambre genevoise des
relations collectives de travail d'une demande en annulation du licenciement de
A.________. A titre provisionnel, cet organisme a ordonné la réintégration de
A.________ jusqu'à droit jugé. Par décision du 16 mars 2010, la Chambre des
relations collectives de travail a déclaré irrecevable la demande formée par le
syndicat Z.________.
Cette décision a fait l'objet d'un recours au Tribunal fédéral, qui a constaté,
par arrêt du 12 juillet 2010, que la demande aurait dû être rejetée plutôt que
déclarée irrecevable, parce que l'argumentation cantonale, fondée, revenait à
dire que le syndicat n'avait pas la légitimation active pour demander
l'annulation d'un congé donné dans un cas individuel (cause 4A_248/2010).

C.
Par demande déposée le 10 septembre 2010 au greffe de la Juridiction des
prud'hommes du canton de Genève, A.________ a conclu à ce que son employeur
soit condamné à lui verser, en capital, la somme de 18'390 francs. Elle a
soutenu que le congé était nul et qu'elle était en droit de continuer de
réclamer son salaire, raison pour laquelle elle a, par la suite, amplifié sa
demande.
X.________ s'est opposée à la prétention en totalité.
La Caisse de chômage Z.________ est intervenue dans la procédure pour se
substituer aux droits de A.________ à concurrence des indemnités journalières
de chômage qu'elle a versées.
Par jugement du 24 août 2011, le Tribunal des prud'hommes a rejeté les
conclusions prises tant par A.________ que par la Caisse de chômage Z.________.
Il a considéré que le congé n'était ni nul ni abusif, parce qu'il avait pour
cause, non pas les activités syndicales de l'employée, mais son comportement
sur son lieu de travail et ses problèmes relationnels.
Saisie d'un appel formé par l'employée, la Chambre des prud'hommes de la Cour
de justice, par arrêt du 24 avril 2012, a débouté A.________ et la Caisse de
chômage Z.________ de toutes leurs conclusions, estimant également que le motif
prépondérant du congé résidait dans le comportement de l'employée sur son lieu
de travail, tant à l'égard de ses collègues que de ses supérieurs. Le jugement
de première instance n'a été rectifié que sur un point - qui n'est aujourd'hui
plus litigieux - à savoir que l'employeur de A.________ était la société en nom
collectif X.________ & Cie, et non pas la société anonyme Y.________ SA à Bâle.

D.
A.________ exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre
l'arrêt cantonal du 24 avril 2012. Invoquant l'arbitraire dans l'établissement
du motif réel et causal du licenciement, ainsi qu'une violation de l'art. 336
al. 1 let. b et al. 2 let. a et b CO, de même que de l'art. 17.2 de la
convention collective, elle conclut, sous suite de frais et dépens (y compris
le remboursement de l'émolument cantonal), à l'annulation de l'arrêt attaqué et
réclame, en invoquant la nullité du congé, la somme de 61'439 fr. 50 en capital
(correspondant à des salaires de mars 2010 à août 2011), et, subsidiairement,
la somme de 18'290 fr. 30 avec intérêts, à titre d'indemnité pour le cas où le
congé serait seulement déclaré abusif; plus subsidiairement, elle demande le
renvoi de la cause à la cour cantonale.
Les intimées ont conclu au rejet du recours avec suite de dépens.
La Caisse de chômage Z.________ n'a pas participé à la procédure devant le
Tribunal fédéral.

Considérant en droit:

1.
1.1 Interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions en paiement et
qui a donc qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF), dirigé contre un arrêt
final (art. 90 LTF) rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par un tribunal
supérieur statuant sur recours en dernière instance cantonale (art. 75 LTF)
dans une affaire pécuniaire dont la valeur litigieuse atteint le seuil de
15'000 fr. requis en matière de droit du travail (art. 74 al. 1 let. a LTF), le
recours est recevable, puisqu'il a été déposé dans le délai (art. 45 al. 1, 48
al. 1 et 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi.

1.2 Le recours peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est
délimité par les art. 95 et 96 LTF. Il peut donc également être formé pour
violation d'un droit constitutionnel (ATF 136 I 241 consid. 2.1 p. 247; 136 II
304 consid. 2.4 p. 313).
Le Tribunal fédéral applique d'office le droit dont il peut contrôler le
respect (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc limité ni par les arguments
soulevés dans le recours, ni par la motivation retenue par l'autorité
précédente; il peut admettre un recours pour un autre motif que ceux qui ont
été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant une argumentation
différente de celle de l'autorité précédente (ATF 137 II 313 consid. 4 p. 317
s.; 135 III 397 consid. 1.4 p. 400). Compte tenu de l'exigence de motivation
contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al.
1 let. b LTF), le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs
invoqués. Il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de
première instance, toutes les questions juridiques qui se posent, lorsque
celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 137 III 580 consid. 1.3 p.
584; 135 II 384 consid. 2.2.1 p. 389; 135 III 397 consid. 1.4 p. 400).
Par exception à la règle selon laquelle il applique le droit d'office, le
Tribunal fédéral ne peut entrer en matière sur la violation d'un droit
constitutionnel ou sur une question relevant du droit cantonal ou intercantonal
que si le grief a été invoqué et motivé de manière précise par la partie
recourante (art. 106 al. 2 LTF).

1.3 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des
faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en
écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce
qui correspond à la notion d'arbitraire (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; 137
II 353 consid. 5.1 p. 356) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF
(art. 105 al. 2 LTF).
La partie recourante qui entend s'écarter des constatations de l'autorité
précédente doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions
d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de
quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de
celui contenu dans la décision attaquée (ATF 137 II 353 consid. 5.1 p. 356; 136
I 184 consid. 1.2 p. 187). Si la partie recourante invoque l'arbitraire dans
l'appréciation des preuves et l'établissement des faits, elle doit présenter
une motivation répondant aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 137 I 58
consid. 4.1.2 p. 62). Une rectification de l'état de fait ne peut être demandée
que si elle est de nature à influer sur le sort de la cause (art. 97 al 1 LTF).
Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter
de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF).

1.4 Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art.
107 al. 1 LTF). Toute conclusion nouvelle est irrecevable (art. 99 al. 2 LTF).

2.
2.1 Il résulte des constatations cantonales - qui lient le Tribunal fédéral
(art. 105 al. 1 LTF) - que les parties ont conclu un contrat individuel de
travail (art. 319 al. 1 CO), qui ne présente aucun caractère international et
qui est donc soumis au droit suisse.
L'employeur a adressé à l'employée une résiliation ordinaire du contrat de
travail (art. 335 et 335c CO).
L'employée (la recourante) soutient que ce congé est abusif en regard de l'art.
336 al. 1 let. b CO (congé donné en raison de l'exercice d'un droit
constitutionnel), de l'art. 336 al. 2 let. a CO (congé donné en raison de
l'appartenance à une organisation syndicale ou en raison de l'exercice conforme
au droit d'une activité syndicale), ainsi que de l'art. 336 al. 2 let. b CO
(congé donné pendant que l'employé, représentant élu des travailleurs, est
membre d'une commission d'entreprise ou d'une institution liée à l'entreprise).
Pour dire si les conditions de l'une ou l'autre de ces dispositions sont
réalisées, il faut en particulier déterminer quel est le motif réel de la
résiliation; il s'agit d'une question de fait et le fardeau de la preuve
incombe au travailleur, en tant que partie demanderesse (ATF 130 III 699
consid. 4.1 p. 702 s.). Toutefois, si le travailleur établit que le congé lui a
été donné à un moment où il était, en tant que représentant élu des
travailleurs, membre d'une commission d'entreprise ou d'une institution liée à
l'entreprise, il incombe à l'employeur de prouver les faits permettant de
constater que la résiliation a été causée par un motif justifié (art. 336 al. 2
let. b CO; ATF 133 III 512 consid. 6.1 p. 513 s.). Lorsqu'il y a plusieurs
motifs réels de résiliation et que certains d'entre eux ne sont pas
admissibles, il faut rechercher - ce qui relève également de l'établissement
des faits - si le congé aurait été de toute manière donné même sans les motifs
qui ne sont pas admissibles (arrêt 4C.87/1993 du 11 novembre 1993 consid. 2c
publié in SJ 1995 p. 798). Déterminer quels sont les motifs réels d'une
résiliation étant une question de fait (ATF 131 III 535 consid. 4.3 p. 540; 130
III 699 consid. 4.1 p. 702), le Tribunal fédéral ne peut la revoir que sous
l'angle restreint de l'arbitraire (art. 9 Cst.) et il incombe à la partie
recourante de démontrer en quoi la décision cantonale serait insoutenable (art.
106 al. 2 LTF; ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62).
A supposer que les conditions de l'une ou l'autre des dispositions invoquées
soient réalisées, on ne pourrait pas en déduire que la résiliation serait nulle
ou annulable et que le travailleur continue d'avoir droit à son salaire. Un
congé abusif permet seulement au travailleur de réclamer l'indemnité prévue par
l'art. 336a CO (ATF 134 III 67 consid. 4 p. 69).
Un cumul avec une prétention pour tort moral fondée sur l'art. 49 CO ne peut
entrer en considération que si le travailleur a subi une atteinte à sa
personnalité qui se distingue nettement de celle qui résulte déjà d'un congé
abusif (ATF 135 III 405 consid. 3.2 p. 408 s.). En l'espèce, il ne ressort pas
des constatations cantonales - qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1
LTF) - que la recourante aurait subi une atteinte distincte de celle qui
résulte de la résiliation, de sorte qu'elle ne peut prétendre, en cas de
résiliation abusive, qu'à l'indemnité prévue par l'art. 336a CO.
Pour qu'une telle indemnité puisse être octroyée, il faut que le travailleur
ait observé les délais fixés par l'art. 336b CO. Il s'agit de délais de
péremption, de sorte que leur non-respect entraîne la perte du droit (ATF 134
III 67 consid. 5 p. 70).
Avant tout autre examen, il faut donc se demander si ces délais ont été
respectés.

2.2 Probablement pour échapper à ce problème, la recourante soutient que le
congé serait radicalement nul (art. 20 CO), parce qu'il contreviendrait à
l'art. 17.2 de la convention collective applicable.
Il se pose donc un problème d'interprétation de la clause invoquée (sur
l'interprétation des clauses normatives des conventions collectives : ATF 136
III 283 consid. 2.3.1 p. 284).
Il résulte de la clause invoquée - telle qu'elle est constatée par la cour
cantonale (art. 105 al. 1 LTF) - qu'elle interdit la discrimination ou le
licenciement d'un employé en raison de son activité exercée en qualité de
représentant des travailleurs, de délégué syndical ou de membre d'une
commission du personnel. Il faut toutefois observer que cette disposition ne
prévoit aucune sanction spéciale en cas de violation de la norme. S'agissant
plus précisément du cas du licenciement, la clause a manifestement pour but de
protéger dans leur activité les représentants des travailleurs, les délégués
syndicaux et les membres des commissions du personnel. On retrouve la même
préoccupation à l'art. 336 al. 2 let. a et b CO. En l'absence d'une sanction
spécialement prévue, on doit supposer que cette disposition a pour but de
compléter ou de préciser la protection légale figurant déjà à l'art. 336 al. 2
let. a et b CO. On ne peut donc pas, par voie d'interprétation, déduire de la
clause citée que les parties ont voulu la nullité ou l'annulabilité des congés
qui y contreviendraient; il s'agit en réalité d'un complément qui s'insère dans
le système légal, de sorte que sa violation ne trouve pas d'autre sanction que
celle prévue par l'art. 336a CO. Dès lors qu'il ne s'agit que de compléter le
système légal sans aucune précision de procédure ou de sanction, il faut
admettre que l'art. 336b CO est également applicable.

2.3 Il convient donc, en toute hypothèse, de déterminer si la recourante a
respecté les règles de procédure de l'art. 336b CO.
Selon cette disposition, la partie qui entend demander l'indemnité fondée sur
les art. 336 et 336a CO doit faire opposition au congé par écrit auprès de
l'autre partie au plus tard jusqu'à la fin du délai de congé (art. 336b al. 1
CO). Il a été constaté en fait que la recourante, par l'entremise de son
syndicat, a respecté ce délai et s'est opposée au congé. Cette question n'est
d'ailleurs pas contestée.
Lorsque les parties ne s'entendent pas pour maintenir le rapport de travail (ce
qui est le cas en l'espèce), la partie qui a reçu le congé peut faire valoir sa
prétention à une indemnité; elle doit agir par voie d'action en justice dans
les 180 jours à compter de la fin du contrat, sous peine de péremption (art.
336b al. 2 CO).
Il a été constaté en fait - d'une manière qui lie le Tribunal fédéral (art. 105
al. 1 LTF) - que la recourante n'a pas agi en justice dans les 180 jours à
compter de la fin du contrat, fixée par la lettre de licenciement au 30 avril
2009.
En revanche, le syndicat dont elle est membre, agissant en sa qualité de
signataire de la convention collective, a saisi en temps utile la Chambre
genevoise des relations collectives de travail. Cet organisme a ordonné, à
titre de mesures provisionnelles, le maintien du statu quo, c'est-à-dire la
réintégration de l'employée jusqu'à droit jugé. Il ne s'est cependant pas
prononcé, dans cette décision sur mesures provisionnelles, sur l'existence ou
non d'un contrat de travail entre les parties durant la procédure. Il s'est
révélé que l'organisme en question ne pouvait pas statuer sur ce qui lui était
demandé; il est dès lors évident qu'il n'avait aucune qualité pour conclure,
contre la volonté de l'employeur, un nouveau contrat de travail ou pour faire
renaître celui qui était déjà éteint. La décision en question est donc sans
pertinence pour déterminer le moment de la fin du contrat au sens de l'art.
336b al. 2 CO.
La Chambre genevoise des relations collectives du travail a finalement déclaré
la demande irrecevable en considérant qu'elle ne pouvait pas statuer sur une
demande tendant à faire annuler un licenciement individuel. Statuant sur
recours contre cette décision, le Tribunal fédéral, par arrêt du 12 juillet
2010, a constaté que l'autorité cantonale aurait dû rejeter la demande, plutôt
que de la déclarer irrecevable, parce que son argumentation, fondée, revient à
dire que le syndicat n'avait pas la légitimation active pour demander
l'annulation d'un congé individuel.
Dès le prononcé du Tribunal fédéral, la recourante a su que la procédure
engagée par le syndicat était erronée.
Elle a introduit une action en justice, en son propre nom, le 10 septembre
2010, soit longtemps après l'expiration du délai de 180 jours à compter de la
fin du contrat de travail, le 30 avril 2009.
Il faut toutefois se demander si elle ne pouvait pas bénéficier de la
restitution de délai de 60 jours prévue par l'art. 139 CO, qui était en vigueur
à l'époque. Depuis lors, cette disposition a été abrogée et remplacée par
l'art. 63 CPC qui réduit d'ailleurs le délai à 30 jours.
La restitution de délai prévue par l'art. 139 CO ne s'applique pas seulement en
cas de délai de prescription, mais aussi s'il s'agit d'un délai de péremption,
comme c'est le cas en l'espèce (ATF 136 III 545 consid. 3.1 p. 547).
Elle suppose cependant que l'action mal introduite soit retirée ou écartée en
raison de l'incompétence de l'autorité saisie, d'un vice de forme réparable ou
parce qu'elle est prématurée. Cette liste est exhaustive (arrêt 4C.296/2003 du
12 mai 2004 consid. 3.5 publié in SJ 2004 I p. 589).
Dans son arrêt du 12 juillet 2010 (cause 4A_248/2010), le Tribunal fédéral a
déjà constaté en l'espèce que la décision rendue par la Chambre des relations
collectives de travail n'était pas une décision d'incompétence, mais une
décision de rejet fondée sur la constatation que le syndicat n'avait pas la
légitimation active pour demander l'annulation d'une résiliation en lieu et
place de l'employée individuellement touchée. La recourante, qui n'était pas
partie à la procédure ayant conduit à cet arrêt, ne conteste pas cette
argumentation juridique et il n'y a donc pas lieu d'y revenir.
Un vice de forme réparable au sens de l'art. 139 CO pourrait consister dans la
désignation défectueuse d'une partie, alors qu'il n'existe aucune incertitude
sur la personne que l'on voulait en réalité désigner (ATF 136 III 545 consid.
3.4.1 p. 550 s.; 114 II 335 consid. 3a p. 336 s.). Or, en l'espèce, il n'y a
pas eu une simple erreur de désignation. Le syndicat a agi en son propre nom,
en sa qualité de signataire de la convention collective, habilité en tant que
tel à saisir l'organisme cantonal. On ne saurait donc dire que c'était la
recourante qui agissait et que celle-ci a été seulement mal désignée.
On ne se trouve donc manifestement pas dans l'une des trois hypothèses visées
limitativement par l'art. 139 CO. L'action du syndicat n'a pas abouti, parce
que celui-ci n'avait pas la légitimation active. Or, la légitimation, active ou
passive, est une question de droit matériel, c'est-à-dire une question de fond
(ATF 136 III 365 consid. 2.1 p. 367; 130 III 424 consid. 3.1).
L'art. 139 CO n'est pas applicable si l'action a été rejetée pour un motif de
fond (PASCAL PICHONNAZ, in Commentaire romand, Code des obligations I, 2003, n°
9 ad art. 139 CO). Ainsi, il n'y a pas lieu d'appliquer l'art. 139 CO si
l'action a été rejetée pour défaut de légitimation passive (ATF 32 II 186
consid. 2 p. 189; BERTI, in Zürcher Kommentar, n° 28 ad art. 139 CO) ou pour
défaut de légitimation active (arrêt 4C.296/2003 déjà cité consid. 3.5; ROBERT
K. DÄPPEN, in Basler Kommentar, Obligationenrecht I, 4ème éd. 2007, n° 8a ad
art. 139 CO).
Dès lors que l'action introduite par le syndicat a été rejetée pour cause de
défaut de légitimation active, une restitution de délai sur la base de l'art.
139 CO est exclue et il faut constater que la recourante n'a pas agi dans le
délai péremptoire fixé par l'art. 336b al. 2 CO, ce qui entraîne le rejet de
ses conclusions sans autre examen.

3.
Il résulte des considérations qui précèdent que le recours doit être rejeté.
Les frais judiciaires et les dépens sont mis à la charge de la partie qui
succombe (art. 66 al. 1 et 68 al. 1 et 2 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des
dépens à la Caisse de chômage qui n'a pas participé à la procédure.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.
La recourante versera aux deux intimées qui ont participé à la procédure une
indemnité globale de 3'500 fr. à titre de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton
de Genève, Chambre des prud'hommes.

Lausanne, le 1er novembre 2012

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La Présidente: Klett

Le Greffier: Piaget