Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.281/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
4A_281/2012

Arrêt du 22 mars 2013
Ire Cour de droit civil

Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux Klett, Présidente, Kolly et Niquille.
Greffière: Mme Godat Zimmermann.

Participants à la procédure
1. X.________,
2. Y.________,
représentées par Me Christian Lüscher,
recourantes,

contre

H.Z.________ et F.Z.________,
intimés.

Objet
bail à loyer; restitution en procédure de conciliation,

recours contre la décision de la Commission de conciliation en matière de baux
et loyers du canton de Genève du 30 mars 2012.

Faits:

A.
H.Z.________ et F.Z.________ sont locataires d'une villa sise 125, chemin ...,
à .... Depuis le 1er avril 2002, le loyer annuel hors charges s'élève à 55'860
fr.
Par avis officiel du 10 novembre 2011, X.________ et Y.________, les
bailleresses, ont résilié le bail pour défaut de paiement du loyer, avec effet
au 31 décembre 2011.

B.
Le 22 novembre 2011, H.Z.________ et F.Z.________ ont saisi la Commission de
conciliation en matière de baux et loyers du canton de Genève d'une requête en
contestation du congé; ils faisaient également valoir une créance de 147'920
fr. en remboursement de travaux qu'ils alléguaient avoir effectués dans la
villa.
Par pli du 9 février 2012, la Commission de conciliation a convoqué, dans les
deux causes, une audience pour le 27 février 2012 à 10 h 55. Les locataires ne
se sont pas présentés à cette audience et ne s'y sont pas fait représenter. Vu
le défaut des demandeurs, la Commission a rayé les causes du rôle en
application de l'art. 206 al. 1 CPC.
Par courrier du 27 février 2012 auquel était joint un certificat médical, les
locataires ont demandé à la Commission de convoquer une nouvelle audience de
conciliation; ils expliquaient que leur absence à l'audience du jour était due
à un problème de santé de H.Z.________.
La Commission a convoqué les parties à une nouvelle audience le 30 mars 2012. A
cette occasion, les bailleresses se sont opposées à la requête de restitution
des locataires; elles étaient d'avis que la procédure de restitution du défaut
n'était pas applicable en conciliation et faisaient valoir, subsidiairement,
que F.Z.________ n'avait fourni aucune excuse pour son absence à l'audience du
27 février 2012.
Par décision du 30 mars 2012, la Commission a admis la demande de restitution.
En substance, elle a jugé que le certificat médical fourni par H.Z.________
constituait une excuse suffisante pour accorder la restitution sur la base de
l'art. 148 al. 1 CPC. Le même jour, la Commission a constaté l'échec de la
tentative de conciliation et autorisé les demandeurs à procéder dans le litige
concernant le congé extraordinaire.

C.
X.________ et Y.________ forment un recours en matière civile contre la
décision de restitution du 30 mars 2012. Elles demandent au Tribunal fédéral
d'annuler cette décision et de constater que l'affaire est rayée du rôle dès
lors que la procédure est sans objet.
Parallèlement, les recourantes ont interjeté appel de la décision du 30 mars
2012 auprès de la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du canton de
Genève.
Par ordonnance présidentielle du 23 mai 2012, la procédure de recours au
Tribunal fédéral a été suspendue jusqu'à droit connu sur l'appel cantonal.
Par arrêt du 5 novembre 2012, la Chambre des baux et loyers a déclaré l'appel
irrecevable.
Invités à répondre au recours, H.Z.________ et F.Z.________ n'ont pas donné
suite.
Pour sa part, la Commission de conciliation persiste dans sa décision.

Considérant en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours
qui lui sont soumis (ATF 138 I 475 consid. 1 p. 476; 138 III 46 consid. 1, 471
consid. 1 p. 475).

1.1 La décision de restitution attaquée est de nature incidente. La Commission
de conciliation l'a rendue en appliquant par analogie les art. 148 et 149 CPC.
Selon l'art. 149 CPC, le tribunal statue définitivement sur la restitution. Il
est admis en doctrine que la décision sur restitution ne peut, au niveau
cantonal, faire l'objet d'un recours immédiat; est réservé un appel (art. 308
ss CPC) ou un recours (art. 319 ss CPC) contre la décision finale qui
interviendra par la suite (NINA J. FREI, in Berner Kommentar, Schweizerische
Zivilprozessordnung, vol. I, 2013, n° 11 ad art. 149 CPC; ADRIAN STAEHELIN, in
Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung (ZPO), Sutter-Somm/
Hasenböhler/Leuenberger [éd.], 2e éd. 2013, n° 4 ad art. 149 CPC; ADRIAN
STAEHELIN/DANIEL STAEHELIN/PASCAL GROLIMUND, Zivilprozessrecht, 2e éd. 2013, p.
281 n° 16a; DENIS TAPPY, in CPC: Code de procédure civile commenté, Bohnet et
al. [éd.], 2011, n° 12 ad art. 149 CPC; BARBARA MERZ, in Schweizerische
Zivilprozessordnung (ZPO) Kommentar, Brunner/Gasser/Schwander [éd.], 2011, p.
149; NICCOLÒ GOZZI, in Basler Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung,
2010, n° 11 ad art. 149 CPC; URS H. HOFFMANN-NOWOTNY, in Schweizerische
Zivilprozessordnung, Kurzkommentar, Oberhammer [éd.], 2010, n° 5 ad art. 149
CPC).
Si d'aucuns sont d'avis qu'un recours au Tribunal fédéral contre une décision
de restitution est également exclu (MERZ, op. cit., n° 6 ad art. 149 CPC; plus
hésitant, TAPPY, op. cit., n° 12 ad art. 149 CPC), d'autres auteurs précisent
qu'une telle décision incidente pourra être revue par le Tribunal fédéral dans
le cadre d'un recours en matière civile (ou d'un recours constitutionnel
subsidiaire dans les cas où la valeur litigieuse n'est pas atteinte) contre la
décision finale ou partielle intervenue dans la procédure en cause,
conformément à l'art. 93 al. 3 LTF (FREI, op. cit., n° 12 ad art. 149 CPC;
GOZZI, op. cit., n° 14 ad art. 149 CPC), ou même faire l'objet d'un recours
immédiat pour autant que l'une ou l'autre des conditions posées à l'art. 93 al.
1 LTF soit réalisée (GOZZI, op. cit., n° 15 ad art. 149 CPC); encore faut-il,
dans ces hypothèses, que la décision entreprise émane d'un tribunal cantonal
supérieur au sens de l'art. 75 al. 2 LTF (GOZZI, op. cit., n° 13 ad art. 149
CPC).
En effet, dans les causes traitées par les autorités cantonales, le recours en
matière civile est exclusivement ouvert contre des décisions rendues par des
tribunaux supérieurs de dernière instance cantonale, statuant sur recours (art.
75 al. 2 LTF). Aucune exception n'est prévue pour les décisions incidentes,
hormis le cas où le tribunal supérieur a pris une telle décision dans le cadre
de la procédure de recours. La double instance cantonale n'est toutefois pas
exigée dans les cas énumérés de manière exhaustive à l'art. 75 al. 2 let. a à c
LTF, par exemple lorsqu'une loi fédérale prévoit une instance cantonale unique
(let. a) (ATF 138 III 41 consid. 1.1 p. 42 et les arrêts cités). Seule
l'exigence de la double instance est alors levée, mais non celle d'un tribunal
supérieur.

1.2 En l'espèce, la décision entreprise a été rendue par la Commission de
conciliation en matière de baux et loyers, qui n'a pas statué sur recours et
n'est pas un tribunal cantonal supérieur. Pour démontrer que le recours en
matière civile serait tout de même recevable contre une telle décision, les
recourantes invoquent l'arrêt publié aux ATF 134 III 524. Dans cette affaire,
le Tribunal fédéral avait admis que l'ancien art. 265a al. 1 LP - qui prévoyait
que le juge du for de la poursuite statuait définitivement sur l'opposition de
retour à meilleure fortune - était une norme spéciale qui dérogeait au principe
de la double instance et à l'exigence d'un tribunal supérieur, posés à l'art.
75 al. 2 LTF (consid. 1.3 et 1.4; jurisprudence confirmée après l'entrée en
vigueur de l'art. 265a al. 1 LP dans sa nouvelle teneur, selon laquelle la
décision n'est sujette à aucun recours [ATF 138 III 44 consid. 1.3 p. 45]).
Le parallèle entre l'ancien art. 265a al. 1 LP et l'art. 149 CPC n'est pas
convaincant. Il est à relever tout d'abord que la jurisprudence susmentionnée a
été rendue dans le domaine particulier de la poursuite pour dettes. Par
ailleurs, l'autorité qui précède immédiatement le Tribunal fédéral selon l'art.
75 al. 2 LTF doit, en tout état de cause, être un tribunal, ce qui signifie
notamment qu'elle doit avoir la cognition nécessaire, dont le pouvoir d'établir
librement les faits et d'appliquer d'office le droit pertinent (ATF 135 II 94
consid. 3.3). Tel est le cas du juge du for de la poursuite dont il est
question à l'art. 265a al. 1 LP. En revanche, la commission en cause dans le
cas présent est une autorité de conciliation qui, si elle dispose d'un certain
pouvoir de proposition (art. 210 al. 1 let. b CPC) et de décision (art. 212
CPC), doit avant tout chercher à concilier les parties (art. 208 CPC) et, en
cas d'échec de la conciliation, délivrer l'autorisation de procéder (art. 209
CPC). Il ne s'agit donc pas d'un tribunal (cf. TAPPY, op. cit., n° 5 ad art.
149 CPC), ce qui exclut d'emblée qu'une décision émanant de cette autorité
puisse faire l'objet d'un recours au Tribunal fédéral.
Il s'ensuit que le recours est irrecevable.

2.
Vu le sort réservé au recours, les frais judiciaires seront mis à la charge des
recourantes (art. 66 al. 1 LTF). Elles n'auront pas à verser de dépens aux
intimés, qui n'ont pas déposé de réponse (art. 68 al. 2 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est irrecevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis solidairement à la charge
des recourantes.

3.
Il n'est pas alloué de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Commission de conciliation
en matière de baux et loyers du canton de Genève.

Lausanne, le 22 mars 2013

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La Présidente: Klett

La Greffière: Godat Zimmermann