Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.219/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
4A_219/2012

Arrêt du 30 juillet 2012
Ire Cour de droit civil

Composition
Mmes et M. les Juges Klett, Présidente, Corboz et Kiss.
Greffier: M. Piaget.

Participants à la procédure
X.________ SA, représentée par Me Claudio Fedele,
recourante,

contre

1. Y.________, représenté par Me Laurent Panchaud,
2. Caisse Z.________,
intimés.

Objet
indemnités de licenciement,

recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre des
prud'hommes, du 5 mars 2012.

Faits:

A.
Par contrat signé environ deux mois avant le 1er octobre 2009 (début des
rapports de travail), X.________ SA (ci-après : l'employeuse) - avec siège
social à Genève et ayant pour but "toutes activités liées au commerce de
produits chimiques et pétroliers" - a engagé, en qualité de "directeur
financier", Y.________ (ci-après: l'employé) pour une durée indéterminée,
moyennant un salaire annuel brut de 140'000 fr.
Selon l'art. 4.2 du contrat, celui-ci était résiliable, par écrit, de part et
d'autre, moyennant un délai de congé de six mois pour la fin d'un mois.
Le contrat contenait en outre la clause suivante (art. 6.2) intitulée
"Indemnités":
"Le Collaborateur se verra attribuer une indemnité en cas de licenciement pour
toute cause excepté en cas de faute grave. Cette indemnité pourra être
équivalente à 24 mois de salaire et sera calculée au prorata temporis pour la
période de travail allant du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2011. Cette
indemnité est un forfait incluant toutes les cotisations sociales ainsi que les
droits sociaux relatifs aux vacances. A titre d'exemple, si la Société décide
de mettre fin au contrat de travail du collaborateur en période non travaillée
restante, c'est-à-dire, la période allant du 1er juin 2010 au 30 septembre 2011
et calculée comme suit (sic):

Salaire annuel brut
Fr. 140'000,-- sur 13 mois

Période maximale indemnisée
1er octobre 2009 au 30 septembre 2011

Période travaillée
1er octobre 2009 au 31 mai 2011 [recte: 2010]

Période réelle à indemniser
1er juin 2010 au 30 septembre 2011

Montant de l'indemnisation
Fr. 161'538,46 (Fr. 10'769,23 x 15 [sic] mois)

Le montant de l'indemnité et la rémunération au titre du préavis ne sont pas
cumulables.

Si le collaborateur décide de résilier son contrat avant le 30 septembre 2011,
aucune indemnité, outre celle due au titre de la période de préavis, ne lui
sera due."
Les parties ont également intégré dans leur accord une clause de
non-concurrence prévoyant, en cas de violation, une peine conventionnelle de
140'000 fr. (art. 13).
Lors des pourparlers contractuels, l'employeuse s'est faite représenter par
A.________, son directeur. L'employé a présenté un "modèle de contrat"; il
tenait en particulier à un délai de préavis assez long, et à une "garantie de
salaire" en cas de licenciement avant l'échéance de deux ans. Le texte
définitif du contrat a été rédigé par A.________.
Les parties n'ont pas défini, lors des pourparlers, la notion de "faute grave"
figurant à l'art. 6.2 du contrat.
Le 29 janvier 2009, une collaboratrice de la société s?ur de X.________ SA à
... a fait suivre à Y.________ un courriel (contenant une liste de paiements à
effectuer) qu'une consultante de X.________ SA avait envoyé précédemment à
celui-ci, notamment avec copie à B.________, administrateur unique de la
société. Le même jour, l'employé a transféré le courriel à B.________; il lui
indiquait qu'il n'avait jamais reçu ce message et qu'il faisait l'objet de
manipulations de la part d'autres employés du groupe; il demandait à B.________
de mener son enquête, l'informant qu'il avait déjà lui-même mandaté un
informaticien externe afin de procéder à une première analyse visant à établir
l'existence du message électronique litigieux.
Après diverses discussions, notamment sur les "emails prétendument manipulés",
B.________, le 2 février 2010, a envoyé à l'employé (alors en vacances) un
courriel qui lui "confirmait" son licenciement immédiat pour justes motifs. Au
matin du 4 février 2010, l'employé en a pris connaissance et, le 5 février
2010, par l'intermédiaire de son avocat, il a protesté contre son renvoi
immédiat.
L'employé, qui s'est immédiatement inscrit au chômage, a perçu son salaire
jusqu'à fin janvier 2010.

B.
Le 11 mars 2010, l'employé a assigné l'employeuse devant le Tribunal des
prud'hommes du canton de Genève en paiement de 215'384 fr. 59, intérêts en sus,
soit 213'769 fr. 21 à titre de paiement de l'indemnité prévue contractuellement
en cas de licenciement sans faute grave, et 1'615 fr. 38 à titre de salaire du
1er au 4 février 2010.
L'employeuse a conclu au déboutement du demandeur et, reconventionnellement, à
ce qu'il soit condamné à lui verser la somme de 140'000 fr., intérêts en sus, à
titre de paiement de la peine conventionnelle prévue à l'art. 13 du contrat.
La Caisse Z.________, comme partie intervenante, a conclu à ce que l'employeuse
soit condamnée à lui verser un total de 56'943 fr. net.
Plusieurs témoins ont été entendus et des pièces déposées.
Par jugement du 22 mars 2011, le Tribunal des prud'hommes a condamné
l'employeuse à verser à sa partie adverse le montant brut de 215'384 fr. 60,
intérêts en sus, sous déduction de la somme nette de 48'016 fr. 45 due à la
Caisse Z.________. Il a également condamné l'employeuse à verser à cette
dernière diverses sommes nettes entre avril et septembre 2010. Il a rejeté,
pour le surplus, toute autre conclusion.
Sur appel de l'employeuse, la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice de
Genève, par arrêt du 5 mars 2012, a confirmé le jugement entrepris. En
substance, elle a considéré que l'employeuse ne pouvait se prévaloir de justes
motifs (au sens de l'art. 337 CO) à l'appui du licenciement immédiat de
l'employé, que la notion de "faute grave" contenue à l'art. 6.2 du contrat
correspondait à celle de "justes motifs" au sens de l'art. 337 CO et que,
partant, l'employé n'avait commis aucune faute grave, de sorte qu'il avait
droit à l'indemnité de licenciement prévue contractuellement. Enfin, la cour
cantonale a retenu que l'employeuse n'avait pas apporté la preuve de la
violation de la clause de prohibition de concurrence (art. 13 du contrat), de
sorte qu'elle ne pouvait prétendre à aucune peine conventionnelle.

C.
L'employeuse exerce un recours en matière civile contre l'arrêt cantonal du 5
mars 2012. Elle conclut à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité
précédente. En substance, la recourante reproche à la cour cantonale d'avoir
violé le droit fédéral en retenant, dans son interprétation de l'art. 6.2 du
contrat selon le principe de la confiance, que la notion de "faute grave"
figurant dans cette disposition devait être considérée comme identique à celle
de "justes motifs" au sens de l'art. 337 CO.
L'intimé (Y.________) conclut au rejet du recours et à la confirmation de
l'arrêt entrepris.
L'intimée (Caisse Z.________), partie intervenante en procédure cantonale, a
renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
1.1 Le recours en matière civile étant un recours en réforme (cf. art. 107 al.
2 LTF), la partie recourante doit en principe prendre des conclusions sur le
fond et non se borner à conclure à l'annulation de l'arrêt attaqué; elle ne
peut s'abstenir de conclusions sur le fond que si le Tribunal fédéral, dans
l'hypothèse où il admettrait le recours, ne serait pas en mesure de statuer
lui-même sur le fond (ATF 134 III 379 consid. 1.3 p. 383; 133 III 489 consid.
3.1 p. 489 s.).
En l'espèce, on ne voit pas ce qui empêcherait le Tribunal fédéral, s'il
suivait l'argumentation de la recourante, de rejeter la demande. Les
conclusions sont donc mal prises puisque la recourante aurait dû conclure sur
le fond au rejet de la demande formée contre elle par l'intimé, plus
particulièrement en ce qui concerne l'indemnité de 213'769 fr. 20 qu'elle doit
verser à celui-ci en vertu de l'art. 6.2 du contrat de travail (arrêt entrepris
consid. 4.6 p. 24). Les conclusions doivent toutefois être interprétées à la
lumière de la motivation contenue dans le mémoire (ATF 127 IV 101 consid. 1 p.
102 s.). On comprend, sur la base des arguments fournis par la recourante,
qu'en concluant à l'annulation de la décision attaquée, elle entend précisément
conclure au rejet de la demande s'agissant de cette indemnité; il serait donc
excessivement formaliste de déclarer irrecevable le recours pour ce défaut dans
les conclusions (cf. récemment: arrêts 4A_490/2011 du 10 janvier 2012 consid.
1.1; 4A_266/2011 du 19 août 2011 consid. 1.2).

1.2 Interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions libératoires
(art. 76 al. 1 LTF) et dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en
matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par une autorité cantonale de dernière
instance statuant sur recours (art. 75 LTF) dans une affaire pécuniaire dont la
valeur litigieuse atteint le seuil de 15'000 fr. déterminante en matière de
droit du travail (art. 74 al. 1 let. a LTF), le recours en matière civile est
recevable, puisqu'il a été déposé dans le délai (48 al. 1 et 100 al. 1 LTF) et
la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi.

1.3 Le recours peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est
délimité par les art. 95 et 96 LTF. Il peut donc également être formé pour
violation d'un droit constitutionnel (ATF 136 I 241 consid. 2.1 p. 247; 136 II
304 consid. 2.4 p. 313). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art.
106 al. 1 LTF). Il n'est limité ni par les arguments soulevés dans le recours,
ni par la motivation retenue par l'autorité précédente; il peut admettre un
recours pour un autre motif que ceux qui ont été invoqués et il peut rejeter un
recours en adoptant une argumentation différente de celle de l'autorité
précédente (ATF 137 II 313 consid. 1.4 p. 317 s.; 135 III 397 consid. 1.4 et
l'arrêt cité). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al.
1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), le
Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués; il n'est pas
tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les
questions juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées
devant lui (ATF 137 III 580 consid. 1.3 p. 584; 135 II 384 consid. 2.2.1 p.
389; 135 III 397 consid. 1.4). Par exception à la règle selon laquelle il
applique le droit d'office, le Tribunal fédéral ne peut entrer en matière sur
la violation d'un droit constitutionnel ou sur une question relevant du droit
cantonal ou intercantonal que si le grief a été invoqué et motivé de manière
précise par la partie recourante (art. 106 al. 2 LTF).

1.4 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des
faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en
écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce
qui correspond à la notion d'arbitraire (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; 137
II 353 consid. 5.1 p. 356) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF
(art. 105 al. 2 LTF).
La partie recourante qui entend s'écarter des constatations de l'autorité
précédente doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions
d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de
quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de
celui contenu dans la décision attaquée (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; 136
I 184 consid. 1.2 p. 187). Une rectification de l'état de fait ne peut être
demandée que si elle est de nature à influer sur le sort de la cause (art. 97
al. 1 LTF). Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins
de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF).

1.5 Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art.
107 al. 1 LTF). Toute conclusion nouvelle est irrecevable (art. 99 al. 2 LTF).

2.
2.1 A l'instar du Tribunal des prud'hommes, la Chambre des prud'hommes de la
Cour de justice considère que la notion de "faute grave" figurant à l'art. 6.2
du contrat correspond à celle de "justes motifs" au sens de l'art. 337 CO. Elle
retient ainsi que, la recourante ayant licencié l'intimé avec effet immédiat
sans juste motif, cela signifie que l'employé n'a pas commis de "faute grave"
au sens de la clause précitée, et, partant, que la recourante lui doit
l'indemnité de licenciement prévue contractuellement.
La recourante ne remet pas en cause l'absence de juste motif. Elle soutient par
contre que l'art. 6.2 du contrat, interprété selon le principe de la confiance,
n'a pas la signification que la cour cantonale lui attribue. Selon elle, la
clause lui permettait de licencier son employé pour faute grave (moyennant le
respect du délai de congé de six mois), alors même qu'elle ne pouvait le faire
avec effet immédiat sur la base de justes motifs (cf. art. 337 CO). La
recourante ne donne pas de définition positive de la "faute grave", mais, selon
sa thèse, cette notion n'exige pas l'intensité requise pour fonder une
résiliation pour justes motifs au sens de l'art. 337 CO.

2.2 En présence d'un litige sur l'interprétation d'une disposition
contractuelle, le juge doit tout d'abord s'efforcer de déterminer la commune et
réelle intention des parties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations
inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la
nature véritable de la convention (art. 18 al. 1 CO); s'il y parvient, il
s'agit d'une constatation de fait qui lie en principe le Tribunal fédéral
conformément à l'art. 105 LTF (cf. ATF 135 III 410 consid. 3.2 p. 412 s.; 131
III 606 consid. 4.1; 129 III 118 consid. 2).
Si la volonté réelle des parties ne peut pas être établie ou si leurs volontés
intimes divergent, le juge doit interpréter les déclarations faites et les
comportements selon la théorie de la confiance; il doit donc rechercher comment
une déclaration ou une attitude pouvait être comprise de bonne foi en fonction
de l'ensemble des circonstances; le principe de la confiance permet ainsi
d'imputer à une partie le sens objectif de sa déclaration ou de son
comportement, même s'il ne correspond pas à sa volonté intime (ATF 130 III 417
consid. 3.2; 129 III 118 consid. 2.5). L'application du principe de la
confiance est une question de droit que le Tribunal fédéral peut examiner
librement (art. 106 al. 1 LTF); pour trancher cette question, il faut cependant
se fonder sur le contenu de la manifestation de volonté et sur les
circonstances, dont la constatation relève du fait (ATF 135 III 410 consid. 3.2
p. 413; 131 III 586 consid. 4.2.3.1; 130 III 417 consid. 3.2).
Le principe selon lequel l'interprétation subjective a la priorité sur
l'interprétation objective relève du droit (ATF 131 III 606 consid. 4.1 p.
611).

2.3 La cour cantonale indique qu'elle n'a pas pu déterminer la volonté réelle
et commune des parties par rapport à la notion de "faute grave".
Dans le cadre de l'interprétation objective, elle retient que les deux
personnes qui ont rédigé le contrat ont baigné dans un environnement français:
A.________, directeur de la société recourante, est ressortissant français;
l'intimé a, quant à lui, travaillé dans un établissement bancaire français à
Genève, où, de façon notoire, le référentiel aux notions juridiques françaises,
y compris dans les contrats de travail, est important (arrêt entrepris consid.
3.3.3 p. 21).
La cour cantonale observe que tant l'institution de "l'indemnité de
licenciement" que la notion de "faute grave" relèvent du droit du travail
français. Selon l'art. 1234-9 al. 1 du Code du travail français, "le salarié
titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il
compte [au moins] une année d'ancienneté ininterrompue au service du même
employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de
licenciement" (arrêt entrepris consid. 3.3.4 p. 21). L'autorité précédente
relève que, selon la Cour de cassation française, "la faute grave résulte d'un
fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une
violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance
telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise durant
le préavis" (arrêt entrepris consid. 3.3.6 p. 21).
L'autorité cantonale est "convaincue que les deux parties [au] contrat
(respectivement: les deux personnes ayant négocié et signé le contrat) se sont
référées - consciemment ou non - à la notion de faute grave telle qu'elle est
reçue et comprise en droit du travail français". Elle constate à cet égard que
la définition française de cette notion correspond largement à celle de "justes
motifs" au sens de l'art. 337 CO, constat que la recourante ne remet d'ailleurs
pas en question.

2.4 Sur la base des constatations cantonales, il faut distinguer deux
hypothèses: soit les parties au contrat ont consciemment fait référence à la
notion de "faute grave" telle qu'elle est définie en droit du travail français,
soit elles ont utilisé le référentiel français de façon inconsciente.
Dans la première hypothèse, les parties contractantes avaient donc bien
l'intention de se référer à la notion française de "faute grave" et,
contrairement à ce qu'affirme la cour cantonale, leur volonté réelle et commune
a bien été établie. Il s'agit d'une constatation qui, à défaut d'avoir été
taxée d'arbitraire (art. 9 Cst.) par la recourante, lie le Tribunal fédéral
(art. 105 al. 1 LTF). On doit alors conclure que, la recourante ayant licencié
l'intimé avec effet immédiat sans juste motif, ce dernier n'a pas non plus
commis de "faute grave" selon l'art. 6.2 du contrat, cette notion correspondant
à celle de "justes motifs" (ce qui n'est pas contesté); dans cette hypothèse,
la cour cantonale a jugé à bon droit que la recourante est tenue de s'acquitter
de l'indemnité de licenciement prévue contractuellement.

2.5 Dans la deuxième hypothèse, la cour n'a effectivement pas déterminé la
volonté réelle et commune des parties. Il faut alors procéder à
l'interprétation objective. Les circonstances déterminantes, sur la base
desquels le juge doit rechercher la volonté objective des parties, sont celles
qui ont précédé ou accompagné la manifestation de volonté (ATF 131 III 377
consid. 4.2. p. 382 et l'arrêt cité), à l'exclusion des événements postérieurs
(arrêts 4A_186/2009 du 3 mars 2010 consid. 5.2; 4C.321/2005 du 27 février 2006
consid. 3.1).
La recourante ne tente à aucun moment de démontrer que les notions d'"indemnité
de licenciement" et celle de "faute grave" auraient été utilisées de façon
imprécises à l'art. 6.2 du contrat. Or, la cour cantonale a constaté que les
deux notions relèvent du droit du travail français. Il résulte également de
l'arrêt entrepris que les personnes qui ont rédigé le contrat ont baigné dans
un environnement français: le directeur de la société recourante était
ressortissant français et l'intimé avait travaillé dans un établissement
bancaire français où le référentiel aux notions juridiques françaises est
fréquemment utilisé.
Dans ces circonstances, on peut raisonnablement penser que les termes employés
à l'art. 6.2 du contrat devaient de bonne foi être compris par les parties
selon le référentiel français. Dans l'état de fait établi par l'autorité
cantonale, on ne discerne d'ailleurs aucune autre circonstance ayant précédé ou
accompagné les manifestations de volonté qui conduirait à exclure ce
référentiel.
C'est en vain que la recourante tente de soutenir, en citant diverses
références au droit suisse contenues dans le contrat, que les parties étaient
"conscientes et imprégnées de la législation suisse applicable à leurs
relations contractuelles". A l'art. 6.2 du contrat, les parties n'ont
précisément pas fait référence à des règles du droit suisse, mais bien employé
une terminologie inhérente au droit français.
On conçoit d'ailleurs mal, dans la recherche de la volonté objective des
parties, qu'on puisse en l'occurrence déterminer la signification de la "faute
grave" en faisant abstraction du référentiel français. La recourante le
démontre d'ailleurs elle-même puisqu'elle se limite à affirmer, à réitérées
reprises dans son mémoire, qu'il doit exister des situations dans lesquelles
elle n'était pas en droit de licencier son employé avec effet immédiat pour
justes motifs, mais où elle pouvait néanmoins résilier son contrat (pour faute
grave) en respectant le délai de congé conventionnel, sans avoir à lui verser
l'indemnité prévue à l'art. 6.2 du contrat. Force est de constater qu'elle se
borne ainsi à donner une définition négative de la notion de "faute grave",
soutenant que celle-ci ne correspond pas aux "justes motifs" (au sens de l'art.
337 CO); elle ne parvient toutefois pas à fournir une définition positive à
cette notion.
Cela étant, on ne voit pas qu'on puisse reprocher à la cour précédente d'avoir
violé les règles du droit fédéral sur l'interprétation des manifestations de
volonté en retenant que la notion de "faute grave" doit être comprise selon le
droit du travail français, et, partant, qu'elle correspond largement à la
notion de "justes motifs" au sens de l'art. 337 CO (ce dernier constat n'étant
pas remis en question).

2.6 La recourante ne critique pas véritablement le raisonnement qui précède.
Elle tente plutôt de démontrer qu'en s'étant limitée à tenir compte du
référentiel français, la cour cantonale n'a pas recherché le sens de
l'expression litigieuse ("faute grave") en fonction de l'ensemble des
circonstances, et qu'elle a ignoré le résultat auquel son raisonnement conduit.
A considérer les arguments successifs alors présentés par la recourante, on
constate que celle-ci reproche en réalité à l'autorité précédente d'avoir
procédé à une interprétation contraire à la logique du contrat (cf. arrêts
4C.12/2007 du 26 juin 2007 consid. 2.1; 4C.283/2002 du 6 janvier 2003 consid.
4).
2.6.1 La recourante est d'avis que le résultat auquel parvient la cour
cantonale est en contradiction avec d'autres clauses contractuelles. Elle
relève que, selon l'interprétation faite par la cour cantonale, tout
licenciement de l'employé qui serait prononcé en respectant le délai
conventionnel de congé de six mois de l'art. 4.2 du contrat (soit dans tous les
cas où il n'existe pas de juste motif) obligerait l'employeur à payer au
travailleur une indemnité de licenciement. Elle critique cette interprétation,
relevant que les parties n'avaient alors aucun intérêt à préciser, à l'art. 6.2
§ 3 du contrat, que le montant de l'indemnité et le salaire pendant la durée du
délai de congé ("préavis") ne sont pas cumulables.
L'argument, pour autant qu'on le comprenne, tombe à faux. Il n'était en effet
pas superflu de prévoir dans le contrat que même si, les deux premières années,
l'indemnité devait être versée au travailleur dans tous les cas de résiliation
ordinaire du contrat, il n'était pas possible de la cumuler avec la
rémunération due pendant le délai de résiliation de six mois. A défaut d'une
clause excluant le cumul, l'employé aurait pu soutenir avoir droit, pour la
même période, à l'indemnité résultant de l'art. 6.2 du contrat et au salaire dû
pendant la durée du délai de congé.
Au demeurant, l'exemple chiffré du mécanisme de l'indemnité, qui figure à
l'art. 6.2 § 2 du contrat, est plutôt un indice qui contredit la thèse défendue
par la recourante. En effet, cet exemple énonce les conséquences d'un
licenciement ordinaire, sans toutefois réserver l'hypothèse où l'indemnité ne
serait pas due.
2.6.2 La recourante ajoute que, à retenir l'interprétation de l'autorité
cantonale, il n'y avait pas non plus d'intérêt à préciser à l'art. 4.2 du
contrat que celui-ci pouvait être résilié "moyennant un délai de préavis de 6
mois dès la première année de service"; il aurait été plus approprié que cette
disposition indique que le délai de congé était de six mois dès la troisième
année de service. Dans cette perspective, la recourante se demande aussi pour
quelle raison les parties auraient envisagé un délai de congé aussi long (six
mois) dès la première année de service, puisqu'une protection de salaire de 24
mois était de toute façon prévue. Cela démontrerait également qu'elles
envisageaient des cas où la recourante pouvait licencier avec préavis, mais
sans être tenue de payer l'indemnité.
L'argumentation ne convainc pas. D'une part, il semble que la recourante
confonde la question de la résiliation ordinaire du contrat (qui présuppose un
délai de congé déterminé) et celle, distincte, de l'indemnité due à l'employé.
D'autre part, la thèse de la recourante repose sur la prémisse que le congé est
donné par l'employeuse. Or, le licenciement aurait également pu être donné par
l'employé. Dans cette hypothèse, il était indispensable de prévoir que le délai
de résiliation était de six mois dès la première année de service, puisque la
durée de ce délai déterminait le montant dû à l'employé (cf. art. 6.2 § 4 du
contrat qui prévoit que "si le collaborateur décide de résilier son contrat
avant le 30 septembre 2011, aucune indemnité, outre celle due au titre de la
période de préavis, ne lui sera due").
2.6.3 La recourante soutient encore que, l'art. 337 CO étant impératif, les
parties n'avaient pas besoin de préciser que l'employé n'aurait pas droit à
l'indemnité de licenciement prévue à l'art. 6.2 du contrat s'il était licencié
avec effet immédiat pour justes motifs. Cela reviendrait à démontrer que la
signification de la notion de "faute grave" ne peut correspondre à celle de
"justes motifs" au sens de l'art. 337 CO.
Il est toutefois notoire que les contrats de travail reprennent des
dispositions légales, de sorte que la critique de la recourante se révèle
d'emblée sans consistance. Au demeurant, les parties n'ont ici pas formellement
repris le contenu de l'art. 337 CO. Prenant comme référence le droit du travail
français, elles ont simplement prévu une disposition contractuelle dont le
contenu se révèle, au final, similaire à celui de l'art. 337 CO.
2.6.4 Quant à l'argumentation fournie par la recourante en lien avec le droit
suisse, elle tombe à faux. La cour cantonale n'a examiné la notion de "faute
grave" selon l'acception suisse qu'à titre subsidiaire ("Dût-on faire
abstraction du référentiel français utilisé par les parties..."). Il n'y a dès
lors pas lieu de se pencher sur la question, l'argumentation principale retenue
par la cour cantonale (référentiel français) ne prêtant pas le flanc à la
critique.

2.7 On ne voit donc pas que la logique du contrat remettrait en question la
conclusion tirée précédemment (consid. 2.5), selon laquelle la notion de "faute
grave", interprétée objectivement, équivaut à celle de "justes motifs" au sens
de l'art. 337 CO.
En l'absence de "justes motifs", donc également de "faute grave", l'employé
avait droit à l'indemnité prévue contractuellement. Il n'y a pas lieu de
revenir sur son montant, ce point n'étant plus discuté (cf. supra consid. 1.3).

3.
Il résulte des considérations qui précèdent que le recours doit être rejeté.
Les frais judiciaires et les dépens, en faveur de l'intimé (Y.________), sont
mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 66 al. 1 et 68 al. 1 et 2
LTF). Il n'y a en revanche pas lieu d'allouer de dépens à l'intimée (Caisse
Z.________) qui a renoncé à se déterminer.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 6'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.
La recourante versera à l'intimé une indemnité de 7'000 fr. à titre de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton
de Genève, Chambre des prud'hommes.

Lausanne, le 30 juillet 2012

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La Présidente: Klett

Le Greffier: Piaget