Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.12/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
4A_12/2012

Arrêt du 10 juillet 2012
Ire Cour de droit civil

Composition
Mmes et M. les juges Klett, présidente, Corboz et Rottenberg Liatowitsch.
Greffier: M. Thélin.

Participants à la procédure
B.________,
défendeur et recourant,

contre

SI Y.________ SA,
représentée par Me Mike Hornung,
demanderesse et intimée.

Objet
société simple; bail à loyer commun

recours contre l'arrêt rendu le 14 novembre 2011 par la Chambre des baux et
loyers de la Cour de justice du canton de Genève.

Faits:

A.
Selon le libellé d'un contrat conclu par écrit le 10 janvier 2000, la SI
Y.________ SA a remis à bail des locaux d'environ 75 m² à usage de bureaux,
aménagés au premier étage d'un bâtiment de la rue des ... à Genève. Les
locataires étaient ainsi désignés: « A.________ & Associés, cabinet d'études
juridiques et économiques, domicilié actuellement 100, rue du Rhône, 1204
Genève, représenté par Monsieur A.________ ». Celui-ci a signé le contrat à
titre de locataire, au nom de « A.________ & Associés ». Le loyer annuel était
fixé à 15'600 fr., charges en sus. Le contrat était conclu pour une période
initiale de trois ans et un mois, du 1er mars 2000 au 31 mars 2003, avec
renouvellement tacite de trois ans en trois ans.
Le 23 novembre 2000, usant d'une formule officielle, la bailleresse a résilié
le contrat avec effet au 31 décembre suivant, au motif que le loyer demeurait
impayé et qu'une sommation avec délai d'exécution n'avait reçu aucune suite.
La restitution des locaux s'est accomplie le 20 juillet 2007 seulement, en
exécution d'un jugement ordonnant leur évacuation.

B.
Au cours de leur activité, A.________ et ses associés ont notamment usé d'un
papier à lettres intitulé «A.________ - B.________ & Associés / Etude
d'avocats», à l'adresse des locaux loués à la rue des ..., sur lequel
B.________ était mentionné parmi six associés. Celui-ci a personnellement signé
deux lettres rédigées sur ce papier, le 24 octobre et le 16 novembre 2000,
concernant toutes deux le loyer desdits locaux, l'une adressée au mandataire de
la bailleresse, l'autre à la caisse du Palais de justice pour faire libérer une
somme alors consignée.
Dans le procès qui a précédé la restitution des locaux, un mandataire s'est
d'abord constitué au nom des six associés, y compris B.________. Contre le
jugement de dernière instance cantonale ordonnant l'évacuation, rendu le 9
octobre 2006, A.________ a personnellement introduit un recours en réforme
devant le Tribunal fédéral, en son propre nom et pour le compte des autres
associés. Toutefois, bien qu'il y eût été invité, il n'a pas remis de
procuration attestant de son pouvoir de les représenter, de sorte que son
recours n'a pas été pris en considération en tant qu'il impliquait les associés
(arrêt 4C.392/2006 du 27 février 2007).

C.
Le 29 juin 2009, devant la commission de conciliation compétente puis devant le
Tribunal des baux et loyers du canton de Genève, la bailleresse a ouvert action
contre A.________ et B.________. Les défendeurs devaient être condamnés à payer
solidairement 48'398 fr.40 à titre d'indemnité pour l'occupation illicite des
locaux dont la restitution n'avait pas été accomplie dès l'échéance du contrat,
avec intérêts au taux de 5% par an dès le 20 mars 2008 sur 31'204 fr. et dès le
29 juin 2009 sur 17'194 fr.40. Le tribunal devait donner mainlevée définitive
des oppositions aux commandements de payer que la demanderesse avait fait
notifier à chacun des défendeurs, au montant de 31'204 fr. avec intérêts dès le
20 mars 2008.
Les défendeurs ont conclu au rejet de l'action.
Le Tribunal des baux et loyers s'est prononcé le 6 décembre 2010. Il a
accueilli l'action en tant que celle-ci était dirigée contre A.________; il l'a
rejetée pour le surplus. Le tribunal a retenu que B.________ n'avait jamais été
membre de la société qui avait pris les locaux à bail, qu'il n'était pas partie
au contrat conclu avec la demanderesse et qu'il n'avait donc pas qualité pour
défendre.
La Chambre des baux et loyers de la Cour de justice a statué le 14 novembre
2011 sur l'appel de la demanderesse. Donnant gain de cause à cette partie, elle
a réformé le jugement et condamné les deux défendeurs selon les conclusions
initiales de la demande.

D.
Agissant par la voie du recours en matière civile, B.________ persiste à
contester sa qualité pour défendre; il requiert le Tribunal fédéral de réformer
l'arrêt de la Cour de justice en ce sens que la prétention élevée contre lui
soit rejetée. Des conclusions subsidiaires tendent à l'annulation de l'arrêt et
au renvoi de la cause à la Cour de justice pour nouvelle décision.
La demanderesse conclut au rejet du recours.
Par ordonnance du 7 mai 2012, le Tribunal fédéral a accueilli une demande
d'assistance judiciaire présentée par le recourant, en ce sens que, s'il y a
lieu, ce plaideur sera exonéré des frais judiciaires.

Considérant en droit:

1.
Le recours est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF), rendue en
dernière instance cantonale (art. 75 al. 1 LTF) et susceptible du recours en
matière civile (art. 72 al. 1 LTF). Son auteur a pris part à l'instance
précédente et succombé dans ses conclusions (art. 76 al. 1 LTF). La valeur
litigieuse excède le minimum légal de 15'000 fr. prévu en matière de droit du
bail à loyer (art. 51 al. 1 let. a et 74 al. 1 let. a LTF); le mémoire de
recours a été introduit en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et il satisfait aux
exigences légales (art. 42 al. 1 à 3 LTF).
Le recours est ouvert pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF). Le
Tribunal fédéral applique ce droit d'office, hormis les droits fondamentaux
(art. 106 LTF). Il n'est pas lié par l'argumentation des parties et il apprécie
librement la portée juridique des faits; il s'en tient cependant, d'ordinaire,
aux questions juridiques que la partie recourante soulève dans la motivation du
recours (art. 42 al. 2 LTF; ATF 135 III 397 consid. 1.4 p. 400; 133 II 249
consid. 1.4.1 p. 254), et il ne se prononce sur la violation de droits
fondamentaux que s'il se trouve saisi d'un grief invoqué et motivé de façon
détaillée (art. 106 al. 2 LTF; ATF 134 I 83 consid. 3.2 p. 88; 134 II 244
consid. 2.2 p. 246; 133 II 249 consid. 1.4.2).
Le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement juridique sur la base des
faits constatés dans la décision attaquée (art. 105 al. 1 LTF); les allégations
de fait et les moyens de preuve nouveaux sont en principe irrecevables (art. 99
al. 1 LTF). Le tribunal peut compléter ou rectifier même d'office les
constatations de fait qui se révèlent manifestement inexactes, c'est-à-dire
arbitraires aux termes de l'art. 9 Cst. (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; 133
II 249 consid. 1.1.2 p. 252), ou établies en violation du droit (art. 105 al. 2
LTF). La partie recourante est autorisée à attaquer des constatations de fait
ainsi irrégulières si la correction du vice est susceptible d'influer sur le
sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Il lui incombe alors d'indiquer de façon
précise en quoi les constatations critiquées sont contraires au droit ou
entachées d'une erreur indiscutable; à défaut, le grief est irrecevable (ATF
133 II 249 consid. 1.4.3 p. 254; voir aussi ATF 136 II 489 consid. 2.8 p. 494;
130 I 258 consid. 1.3 p. 261/262).

2.
Le succès de toute action soumise au droit civil fédéral suppose que les
parties au procès aient respectivement, sur chacune des prétentions en cause,
qualité pour agir et pour défendre au regard de ce droit; il s'agit de points
décisifs que le juge doit élucider d'office (ATF 136 III 365 consid. 2.1 p.
367; 126 III 59 consid. 1a p. 63; 125 III 82 consid. 1a p. 83). Dans l'action
intentée par le bailleur sur la base du contrat de bail à loyer, la qualité
pour défendre appartient au locataire obligé selon l'art. 253 CO. En cas de
bail commun conclu par plusieurs locataires pour l'usage de la même chose
louée, la qualité pour défendre appartient à chacun d'eux et tous sont en
principe débiteurs du loyer et des dommages-intérêts à acquitter, le cas
échéant, par suite d'une restitution tardive de la chose (cf. arrêt 4C.103/2006
du 3 juillet 2006, consid. 4, SJ 2007 I 1; David Lachat, Le bail à loyer, 2008,
n° 6.5 p. 637). Dans la présente affaire, B.________ conteste être partie au
contrat conclu par la demanderesse le 10 janvier 2000; pour le surplus, il ne
met pas en doute que cette partie-ci puisse effectivement prétendre à des
dommages-intérêts pour restitution tardive.

3.
B.________ n'a pas personnellement signé le contrat. Il n'est donc obligé, le
cas échéant, qu'à raison de la signature de A.________, par l'effet d'un
pouvoir de représentation. A.________ déclarait contracter pour lui-même et
aussi au nom de ses associés.
La Cour de justice retient qu'il existait, lors de la conclusion du contrat de
bail à loyer, un contrat de société simple entre A.________ et ses associés, y
compris B.________, et que A.________ était présumé les représenter, envers la
demanderesse, conformément à l'art. 543 al. 3 CO. L'existence du contrat de
société simple, lequel avait pour objet l'exercice d'une activité
professionnelle dans des locaux communs, est déduite des lettres signées par
B.________ sur le papier à en-tête «A.________ - B.________ & Associés », ainsi
que du procès qui a été entrepris dès la résiliation du contrat de bail à loyer
au nom des six associés, avec B.________ parmi eux.
A l'appui du recours en matière civile, B.________ conteste s'être jamais
associé à A.________ et il affirme n'avoir jamais exercé aucune activité dans
les locaux de la rue des .... Il allègue longuement de nombreux faits,
concernant sa propre activité d'avocat à Genève et la nature des relations
professionnelles qui ont réellement existé entre lui et A.________; ces faits
ne sont toutefois pas constatés dans la décision attaquée et l'art. 105 al. 1
LTF n'habilite donc pas le Tribunal fédéral à les prendre en considération.
B.________ conteste avoir été impliqué dans le procès concernant les locaux de
la rue des ...; en revanche, il ne conteste pas avoir signé deux lettres
établies sur le papier à en-tête «A.________ - B.________ & Associés » et il ne
s'explique guère à ce sujet.

4.
Savoir si B.________ s'est lié à A.________ par un contrat de société simple,
et dans l'affirmative dès quel moment, est une question de droit que le
Tribunal fédéral examine librement, sur la base des faits constatés.
La Cour de justice n'a pas constaté de manifestations de volonté expresses,
réciproques et concordantes entre A.________ et B.________, ayant pour objet de
faire naître un contrat de société simple conformément à l'art. 1er CO.
L'utilisation d'un papier à en-tête «A.________ - B.________ & Associés », au
su de B.________ et même par celui-ci, permet cependant d'inférer qu'un pareil
contrat avait été conclu au moins tacitement, donc valablement au regard de
l'art. 1er al. 2 CO, et que B.________ le savait et l'acceptait.
En revanche, la conduite d'un procès au nom des six associés, avec parmi eux
B.________, ne permet pas d'imputer à celui-ci, avec une certitude suffisante,
l'acceptation d'un rapport de société avec A.________. Il n'est pas constaté
que l'avocat accomplissant les actes du procès ait jamais déposé une
procuration souscrite aussi par B.________, et d'ordinaire, les avocats
n'étaient pas astreints à remettre des procurations de leurs clients devant les
tribunaux genevois. Devant le Tribunal fédéral, A.________ a prétendu
représenter B.________ alors qu'il n'y était pas autorisé, ce qui accentue
encore l'équivoque.
L'utilisation d'un papier à en-tête «A.________ - B.________ & Associés », à
l'automne de 2000, ne permet pas de retenir que le rapport de société simple,
entre A.________ et B.________, ait débuté déjà avant le 10 janvier 2000, jour
de la conclusion du contrat de bail à loyer. Or, ce point est décisif pour
l'issue de la contestation: au regard de l'art. 543 al. 3 CO, A.________ ne
pouvait représenter que les personnes avec qui il se trouvait en société à
cette date. A supposer que B.________ ne se soit associé que plus tard, la
relation contractuelle nouée avec la demanderesse le 10 janvier 2000 n'en a pas
été modifiée et ce nouvel associé n'est pas devenu partie au contrat de bail à
loyer. D'une manière générale, lorsque le locataire autorise un tiers à
partager les locaux loués, ce dernier n'entre pas de plein droit dans une
relation contractuelle avec le bailleur (Laura Jacquemoud-Rossari, Jouissance
et titularité du bail ou quelques questions choisies en rapport avec le bail
commun, CdB 1999 p. 98; Richard Permann, Der gemeinsame Mietvertrag [...], mp
1997 p. 192). Enfin, les deux lettres du 24 octobre et du 16 novembre 2000,
signées par B.________, ne portaient pas sur l'éventuelle adhésion d'un nouvel
associé au contrat de bail à loyer.
Les constatations de la décision attaquée ne suffisent donc pas à établir la
qualité pour défendre de B.________. Il est nécessaire que la juridiction
cantonale détermine si les preuves disponibles, déjà administrées ou encore
offertes, telles les documents auxquels la demanderesse fait allusion dans sa
réponse au recours, permettent de conclure à un commencement du rapport de
société simple déjà avant le 10 janvier 2000. A cette fin, la cause doit être
renvoyée à la Cour de justice conformément aux conclusions subsidiaires prises
devant le Tribunal fédéral.

5.
A titre de partie qui succombe, la demanderesse et intimée doit acquitter
l'émolument à percevoir par le Tribunal fédéral. Le recourant procède
personnellement et il ne lui est donc pas alloué de dépens.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est partiellement admis, l'arrêt de la Cour de justice est annulé et
la cause est renvoyée à cette autorité pour nouvelle décision.

2.
La demanderesse acquittera un émolument judiciaire de 2'000 francs.

3.
Il n'est pas alloué de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton
de Genève.

Lausanne, le 10 juillet 2012

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La présidente: Klett

Le greffier: Thélin