Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2C.543/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
2C_543/2012

Arrêt du 12 novembre 2012
IIe Cour de droit public

Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Zünd, Président,
Aubry Girardin et Donzallaz.
Greffier: M. Vianin.

Participants à la procédure
Administration fiscale cantonale genevoise, rue du Stand 26, 1204 Genève,
recourante,

contre

AX.________,
représenté par Me Lorenzo Paruzzolo, avocat,
intimé.

Objet
Impôts cantonal et communal 2005,

recours contre l'arrêt de la Cour de justice
du canton de Genève, Chambre administrative,
2ème section, du 17 avril 2012.

Faits:

A.
Les époux AX.________ et BX.________ sont domiciliés dans le canton de Genève.
AX.________ (ci-après aussi: l'intimé), né en 1953, exerce la profession de
chauffeur de taxi indépendant à plein temps.
Les époux X.________ ont joint à leur déclaration fiscale pour la période 2005,
établie le 3 août 2006, un compte d'exploitation couvrant la période allant du
1er janvier au 31 décembre 2005. Selon ce document, AX.________ avait réalisé
un chiffre d'affaires de 59'024 fr. et un bénéfice net de 26'112 fr. 35 (soit
59'024 ./. 32'911 fr. 65 de charges).
Par courriers des 17 janvier et 9 février 2007, l'Administration fiscale
cantonale genevoise a invité les époux X.________ à produire les disques
tachygraphiques de l'année 2005, ainsi que "les relevés de caisse et toutes
autres pièces justificatives [...] ayant permis de calculer le chiffre
d'affaires indiqué pour CHF 59'024.-".
A une date indéterminée, AX.________ a remis à l'Administration fiscale
genevoise les disques tachygraphiques de l'année 2005, ainsi que des tableaux
récapitulatifs journaliers pour l'année 2005, précisant les jours et les heures
de travail, les jours de congé, les kilomètres parcourus, ainsi que les
montants encaissés. Les disques indiquaient que le véhicule de AX.________
avait parcouru 58'575 km au 6 janvier 2005 et 100'462 km au 31 décembre 2005,
soit un total de 41'887 km durant l'année 2005 (= 100'462 - 58'575 km). Selon
les tableaux récapitulatifs, l'intéressé avait parcouru en 2005 37'097 km à
titre professionnel et encaissé 59'024 fr., soit une moyenne de 1 fr. 59 par
kilomètre. Il avait par ailleurs été en vacances du 5 au 11 août et du 10 au 23
octobre 2005. Aucun jour de maladie n'était mentionné.

B.
Le 10 mai 2007, l'Administration fiscale genevoise a adressé aux époux
X.________ un bordereau de taxation pour les impôts cantonal et communal de la
période 2005 s'élevant à 10'573 fr. Elle avait procédé à une reprise de 31'400
fr. sur le bénéfice net déclaré par AX.________ et arrêté celui-ci à 57'512 fr.
(soit 26'112 fr. 35 + 31'400 fr.). Les relevés de AX.________ indiquant des
recettes inférieures à celles ressortant de l'analyse des disques et du
rendement kilométrique moyen de 2 fr. 40 calculé pour Genève, l'Administration
fiscale genevoise avait procédé à une estimation. Elle avait retenu que le
prénommé avait parcouru au total 41'887 km en 2005, dont 5'200 km à titre
privé, soit 36'687 km à titre professionnel. Elle avait appliqué le rendement
moyen de 2 fr. 40 par km, qui tenait compte du lieu, des tarifs en vigueur, de
l'activité de jour et de nuit, de l'affiliation, ou non, à une centrale, de la
taxe de base, ainsi que des temps d'attente et des parcours à vide. Elle avait
pris en considération "un kilométrage à vide de 45 %".
Les époux X.________ ont formé une réclamation à l'encontre de ce prononcé. Ils
ont contesté la taxation par estimation dans son principe, en faisant valoir
notamment que la comptabilité produite était irréprochable.
Par décision du 26 novembre 2007, l'Administration fiscale genevoise a rejeté
la réclamation.
A l'encontre de ce prononcé, les époux X.________ ont recouru à la Commission
cantonale de recours en matière administrative (ci-après: la Commission de
recours) - dont les compétences ont été reprises entre-temps par le Tribunal
administratif de première instance du canton de Genève. Par décision du 7
décembre 2009, cette autorité a admis le recours et renvoyé le dossier à
l'Administration fiscale genevoise pour nouvelle taxation dans le sens des
considérants. Elle a considéré que l'écart entre le rendement kilométrique
moyen de 2 fr. 40 et celui de 1 fr. 59 ressortant des tableaux récapitulatifs
journaliers de AX.________ pouvait s'expliquer par les trajets facturés
forfaitairement et les courses "à vide". Ce dernier rendement n'apparaissant
pas insolite, les tableaux en question avaient une valeur probante et pouvaient
servir de base à la taxation. Partant, il n'y avait pas lieu de procéder à une
taxation par estimation.
L'Administration fiscale genevoise a déféré cette décision au Tribunal
administratif - devenu entre-temps la Chambre administrative de la Cour de
justice du canton de Genève (ci-après: la Cour de justice).
Le 15 mars 2010, une audience de comparution personnelle s'est tenue.
Le 21 avril 2010, l'Administration fédérale des contributions, Division
principale de la taxe sur la valeur ajoutée, a transmis un document établi "à
l'intention exclusive du Tribunal administratif", intitulé "coefficients
d'expérience taxis, Genève", qui recensait, pour la période allant de 1996 à
2001, les données relatives à 86 chauffeurs de taxi public employés par six
entreprises sises à Genève et affiliées à une centrale d'appel. Le tableau
mentionnait le nombre de mois de travail saisi par le chauffeur, le total des
jours travaillés, les kilomètres parcourus à titre professionnel durant la
période indiquée, la recette totale, ainsi que le rendement moyen par
kilomètre. Ce dernier variait entre 1 fr. 21 et 3 fr. 32. Le rendement moyen
était de 2 fr. 36 et avait été arrondi vers le haut à 2 fr. 40 pour tenir
compte des pourboires qui faisaient partie du chiffre d'affaires des chauffeurs
indépendants.
Le 11 avril 2011, AX.________ a produit un avis de taxation anonymisé
concernant l'impôt fédéral direct d'un chauffeur de taxi travaillant à Genève.
En l'absence de pièces justificatives, l'Administration fiscale genevoise avait
procédé à une taxation par estimation. Ce faisant, elle avait appliqué un
rendement kilométrique moyen de 2 fr. au lieu de 2 fr. 40 comme en l'espèce.
AX.________ s'est plaint d'inégalité.
Par arrêt du 17 avril 2012, la Cour de justice a rejeté le recours. Les juges
cantonaux ont confirmé le point de vue de la Commission de recours selon lequel
il n'y avait pas lieu de procéder à une taxation d'office du bénéfice de
AX.________. Celui-ci avait en effet suffisamment collaboré à l'établissement
des faits en produisant son compte d'exploitation, les disques tachygraphiques
et les relevés journaliers nécessaires à l'examen de sa déclaration d'impôt. On
ne pouvait lui reprocher de n'avoir pas transmis les justificatifs (quittances)
relatifs à chacune des courses effectuées, car l'obligation de remettre aux
clients une quittance et d'en conserver une copie avait été introduite
seulement par la loi genevoise du 21 janvier 2005 sur les taxis et limousines
(LTaxis; RS/GE H 1 30) et son règlement d'exécution du 4 mai 2005 (RTaxis; RS/
GE H 1 30.01), qui étaient tous deux entrés en vigueur seulement le 15 mai
2005; il fallait en outre tenir compte d'une période d'adaptation, car il était
"notoire à Genève que tous les clients ne souhaitent pas recevoir une
quittance, certains la refusant même d'emblée". En outre, le rendement
kilométrique moyen de AX.________ de 1 fr. 59 se trouvait dans la fourchette
calculée par l'Administration fédérale des contributions et n'avait ainsi rien
d'insolite. Dans ces conditions, il n'y avait pas lieu de s'écarter des
documents fournis par AX.________ pour déterminer son bénéfice. Il y avait
d'autant moins de raisons d'appliquer le rendement moyen de 2 fr. 40 que
l'Administration fiscale genevoise ne s'en tenait pas systématiquement à
celui-ci, comme le montrait l'avis de taxation anonymisé concernant un autre
chauffeur de taxi, où elle avait retenu un rendement moyen de 2 fr. par km.

C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, l'Administration
fiscale genevoise demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 17 avril
2012 et de rétablir sa décision du 26 novembre 2007.
L'autorité précédente s'en remet à justice quant à la recevabilité du recours
et persiste au surplus dans les considérants et le dispositif de son arrêt.
L'Administration fédérale des contributions, Division principale de l'impôt
fédéral direct, de l'impôt anticipé, des droits de timbre, propose d'admettre
le recours. L'intimé s'en rapporte à justice quant à la recevabilité de ce
dernier et conclut à son rejet sur le fond, sous suite de dépens.

Considérant en droit:

1.
1.1 L'arrêt attaqué s'est substitué au prononcé du 7 décembre 2009 par lequel
la Commission de recours, estimant qu'il n'y avait pas lieu de procéder à une
estimation du bénéfice imposable, a admis le recours et renvoyé le dossier à la
recourante pour nouvelle taxation dans le sens des considérants. Il ne s'agit
ainsi pas d'une décision finale au sens de l'art. 90 LTF, ni d'une décision
considérée comme finale, comme cela est le cas lorsque l'autorité à laquelle la
cause est renvoyée ne dispose d'aucune marge de manoeuvre, le renvoi ne servant
qu'à calculer l'impôt dont les modalités ont été arrêtées par l'instance
supérieure (cf. ATF 138 I 143 consid. 1.2 p. 148; 134 II 124 consid. 1.3 p.
127). Le jugement entrepris constitue plutôt une décision incidente (de renvoi)
notifiée séparément, qui peut faire l'objet d'un recours au Tribunal fédéral si
elle est de nature à causer un préjudice irréparable (art. 93 al. 1 let. a
LTF). Selon la jurisprudence, cette condition est réalisée notamment lorsque
l'administration est tenue par une décision de renvoi de rendre un prononcé -
selon elle - contraire au droit, dès lors que celle-ci ne pourra plus par la
suite contester sa propre décision (ATF 134 II 124 consid. 1.3 p. 128; 133 II
409 consid. 1.2 p. 412). Tel est le cas en l'espèce, de sorte que l'arrêt
attaqué peut faire séparément l'objet d'un recours au Tribunal fédéral.

1.2 Le jugement entrepris concerne le revenu imposable au titre des impôts
cantonal et communal de la période fiscale 2005. Comme ce domaine relève du
droit public et qu'aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'est
réalisée, la voie du recours en matière de droit public est ouverte sur la base
de l'art. 82 let. a LTF. L'imposition du revenu étant une matière harmonisée au
titre 2 (art. 7 ss) et la procédure de taxation au titre 5 (art. 39 ss) de la
loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'harmonisation des impôts directs des
cantons et des communes (LHID; RS 642.14), la voie du recours en matière de
droit public est aussi réservée par l'art. 73 al. 1 LHID (cf. ATF 134 II 186
ss).

1.3 Au surplus, le recours a été déposé en temps utile (cf. art. 100 al. 1 LTF)
à l'encontre d'une décision rendue par un tribunal supérieur statuant en
dernière instance cantonale (cf. art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF).
L'Administration fiscale genevoise est habilitée à recourir en vertu de l'art.
89 al. 2 let. d LTF en relation avec l'art. 73 al. 2 LHID. Il convient donc en
principe d'entrer en matière sur son recours, sous réserve de ce qui suit.

1.4 Le Tribunal fédéral fonde son examen sur les faits constatés par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF), à moins que ces faits n'aient été établis de
façon manifestement inexacte - c'est-à-dire arbitrairement au sens de l'art. 9
Cst. (ATF 134 V 53 consid. 4.3 p. 62; 133 III 393 consid. 7.1 p. 398) - ou en
violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). D'une manière
générale, la correction du vice doit en outre être susceptible d'influer sur le
sort de la cause (art. 97 al. 1 in fine LTF). Le recourant doit expliquer de
manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées, faute de quoi
il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait divergeant de celui qui
est contenu dans l'acte attaqué. En particulier, le recourant ne saurait se
contenter d'opposer sa propre version à celle retenue par l'autorité précédente
(cf. ATF 135 III 397 consid 1.4 p. 400).
En l'occurrence, la recourante se prévaut de faits qui, pour certains, ne
ressortent pas de la décision attaquée. Comme elle n'expose pas en quoi les
conditions rappelées ci-dessus seraient réunies, les faits en question ne
peuvent pas être pris en considération, le Tribunal de céans étant fondé à
vérifier l'application du droit sur la seule base de ceux qui ressortent de
l'arrêt du 17 avril 2012.

2.
2.1 Selon l'art. 7 al. 1 LHID, l'impôt sur le revenu a pour objet tous les
revenus du contribuable, en particulier le produit d'une activité lucrative
indépendante. Il en allait de même en vertu de l'art. 3 al. 1 de la loi
genevoise sur l'imposition des personnes physiques - Impôt sur le revenu
(revenu imposable), du 22 septembre 2000 (LIPP-IV; en vigueur jusqu'au 31
décembre 2009), encore applicable en l'espèce.

2.2 Aux termes de l'art. 42 LHID, le contribuable doit faire tout ce qui est
nécessaire pour assurer une taxation complète et exacte (al. 1). Les personnes
physiques qui ont un revenu provenant d'une activité lucrative indépendante
doivent joindre à leur déclaration, à chaque période fiscale, en l'absence
d'une comptabilité tenue selon l'usage commercial, l'état de leurs actifs et
passifs, de leurs recettes et dépenses ainsi que de leurs prélèvements et
apports privés (al. 3 1ère phrase).
Les exigences auxquelles doivent satisfaire ces états dépendent des
circonstances du cas d'espèce, en particulier du type d'activité et de
l'ampleur de cette dernière. Dans tous les cas, ils doivent être propres à
garantir une saisie complète et fiable du revenu et de la fortune liés à
l'activité lucrative indépendante et pouvoir être contrôlés dans des conditions
raisonnables par les autorités fiscales (cf., en relation avec l'art. 125 al. 2
de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct [LIFD; RS
642.11], dont la teneur est en substance identique à celle de l'art. 42 al. 3
1ère phrase LHID, arrêt 2A.300/2006 du 27 février 2007 consid. 3.4, in RF 62/
2007 p. 369).
Dans un arrêt du 4 juin 2012 concernant la taxation d'office d'une entreprise
de taxi exploitée en raison individuelle, le Tribunal fédéral a relevé
l'importance de la tenue en bonne et due forme d'un livre de caisse en
particulier pour les petites entreprises. L'arrêt, rendu en matière de taxe sur
la valeur ajoutée, précise que cette exigence vaut pour l'ensemble des impôts,
dont l'impôt cantonal harmonisé (affaire 2C_835/2011 consid. 2.2.2, in RF 67/
2012 p. 709).
La comptabilité de caisse des contribuables qui ne sont pas astreints à avoir
des livres en vertu de l'art. 957 CO ne doit certes pas satisfaire aux
exigences d'un livre de caisse tenu en la forme commerciale. Il est toutefois
insuffisant d'établir seulement des relevés du total des recettes journalières
(Richner/Frei/Kaufmann/Meuter, Handkommentar zum DBG, 2ème éd., 2009, no 19 ad
art. 125 LIFD; cf. aussi en matière de taxe sur la valeur ajoutée arrêts 2A.297
/2005 du 3 février 2006 consid. 3.2 et 2A.253/2005 de la même date consid. 3.2,
in RF 61/2006 p. 556, RDAF 2007 II p. 318).
En droit cantonal, l'art. 29 al. 2 de la loi genevoise de procédure fiscale du
4 octobre 2001 (LPFisc; RS/GE D 3 17) a le même contenu que l'art. 42 al. 3
LHID. Sous le titre "Collaboration ultérieure du contribuable", l'art. 31 al. 1
LPFisc reprend la teneur de l'art. 42 al. 1 LHID.

2.3 Selon l'art. 46 LHID, l'autorité de taxation contrôle la déclaration
d'impôt et procède aux investigations nécessaires (al. 1). Elle effectue la
taxation d'office sur la base d'une appréciation consciencieuse si, malgré
sommation, le contribuable n'a pas satisfait à ses obligations de procédure ou
si les éléments imposables ne peuvent être déterminés avec toute la précision
voulue faute de données suffisantes (al. 3).
L'art. 36 al. 1 LPFisc est analogue à l'art. 46 al. 1 LHID. S'agissant de la
taxation d'office, l'art. 37 al. 1 1ère phrase LPFisc est en substance
identique à l'art. 46 al. 3 LHID. L'art. 37 al. 1 2ème phrase LPFisc précise
que l'autorité fiscale se fonde sur tous les indices concluants dont elle a
connaissance et peut prendre en considération notamment les coefficients
expérimentaux.

3.
3.1 Le litige porte sur la question de savoir si c'est à bon droit que
l'autorité précédente a estimé qu'il n'y avait pas lieu de procéder à une
taxation d'office du bénéfice de l'intimé. Le Tribunal fédéral examine ce point
librement (cf. arrêt 2A.113/2005 du 16 septembre 2005 consid. 3.2 non pub. in
ATF 131 II 548, mais in RDAF 2006 II p. 1, StE 2005 B 96.22 no 3).

3.2 Les tableaux récapitulatifs que l'intimé a produits à l'appui de son compte
d'exploitation pour l'exercice 2005 indiquent les kilomètres parcourus et les
montants encaissés chaque jour. S'agissant des trajets effectués, ils indiquent
au total 37'097 km, alors que l'analyse des disques tachygraphiques donne
41'887 km, soit 4'790 km ou 12,9 % de plus. A cet égard, l'intimé a fait valoir
qu'il avait effectué beaucoup de trajets privés, en ajoutant qu'il n'avait pas
systématiquement mis le tachygraphe en mode "pause" lors de tels parcours. La
différence de 4'790 km est d'ailleurs inférieure au kilométrage privé admis
forfaitairement par la recourante (soit 5'200 km). En ce qui concerne le
kilométrage, les tableaux en question n'apparaissent ainsi pas dénués de valeur
probante lorsqu'on les compare avec les disques tachygraphiques.
S'agissant du rendement kilométrique, la moyenne ressortant des tableaux de
l'intimé (1 fr. 59) est largement inférieure - d'environ 33% - à celle (2 fr.
40) issue des données d'expérience collectées par l'Administration fédérale des
contributions, Division principale de la taxe sur la valeur ajoutée, dont le
Tribunal fédéral a récemment encore rappelé la pertinence en matière d'impôts
directs (arrêt 2C_32/2012 + 2C_33/2012 du 22 juin 2012 consid. 2.3). Dans un
tel cas, il appartient à l'exploitant de l'entreprise de taxi d'expliquer les
raisons d'un tel écart (cf. arrêt 2A.109/2005 du 10 mars 2006 consid. 3, in RF
61/2006 p. 558). Le fait que la moyenne de l'entreprise en question se trouve
encore "dans la fourchette" (allant en l'occurrence de 1 fr. 21 à 3 fr. 32 par
km) des données d'expérience de l'Administration fédérale des contributions ne
le met pas dans tous les cas à l'abri d'une taxation d'office. Ainsi, dans le
cas particulier, force est d'admettre, avec la recourante, que l'intimé n'est
pas parvenu à expliquer de manière plausible et preuves à l'appui cet écart
important par rapport à la moyenne. Sa justification tirée des courses à prix
forfaitaire n'est en effet étayée que par une seule facture. Il a par ailleurs
affirmé - sans fournir ni offrir davantage de preuves - qu'il effectuait 45 à
50% des trajets "à vide", sans rémunération, mais il ressort de la décision
attaquée que le rendement moyen de 2 fr. 40 par km tient précisément compte
d'un "kilométrage à vide de 45%". Ce second motif ne saurait par conséquent non
plus expliquer l'écart par rapport à la moyenne. Dans ces conditions, la valeur
probante des tableaux récapitulatifs ne peut être admise.
A cela s'ajoute qu'il ne ressort pas de la décision attaquée que l'intimé
aurait disposé, en guise de comptabilité de caisse, d'autres documents que les
tableaux récapitulatifs journaliers qui viennent d'être évoqués. Il n'est en
particulier pas question d'un livre de caisse tenu en bonne et due forme. Or,
s'il est nécessaire que les exploitants d'entreprises de taxis établissent des
rapports journaliers des courses effectuées, lesquels peuvent être mis en
relation avec les disques tachygraphiques (cf. arrêts 2C_429/2009 du 9 novembre
2009 consid. 4.2; 2A.569/2006 du 28 février 2007 consid. 4.2, in RF 62/2007 p.
591), cela ne les dispense pas de tenir un livre de caisse - conformément à la
jurisprudence et à la doctrine citées plus haut (consid. 2.2) - sur lequel les
relevés journaliers doivent pouvoir s'appuyer.
Dans ces conditions, l'art. 46 al. 2 LHID et l'art. 37 al. 1 1ère phrase LPFisc
imposent de procéder à une taxation d'office, les éléments imposables ne
pouvant être déterminés avec la précision voulue, faute de données probantes
suffisantes. Le recours est bien fondé.
Au demeurant, si l'intimé a contesté la justification de la taxation d'office
dans son principe, il ne s'en est pas pris aux modalités de celle-ci, ce qu'il
aurait dû faire en s'efforçant d'en démontrer le caractère manifestement
inexact (cf. art. 48 al. 2 LHID). Compte tenu également de ce qui a été dit
précédemment au sujet de la prise en considération des données d'expérience,
rien ne s'oppose dès lors à ce que la décision sur réclamation du 26 novembre
2007 soit confirmée.

4.
Vu ce qui précède, le recours doit être admis. L'arrêt de la Cour de justice du
17 avril 2012 est annulé et la décision sur réclamation de l'Administration
fiscale genevoise du 26 novembre 2007 est confirmée.
Succombant, l'intimé doit supporter des frais judiciaires (cf. art. 66 al. 1
LTF). Il n'est pas alloué de dépens (cf. art. 68 al. 3 LTF).
Le Tribunal fédéral ne fera pas usage de la faculté prévue à l'art. 67 LTF et
renverra la cause à l'autorité précédente pour qu'elle statue sur les frais et
les dépens de la procédure suivie devant elle.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis. L'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève du 17
avril 2012 est annulé et la décision sur réclamation de l'Administration
fiscale cantonale genevoise du 26 novembre 2007 est confirmée.

2.
La cause est renvoyée à la Cour de justice du canton de Genève pour nouvelle
décision sur les frais et dépens de la procédure antérieure.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de l'intimé.

4.
Le présent arrêt est communiqué à l'Administration fiscale cantonale genevoise,
au mandataire de l'intimé, à la Cour de justice du canton de Genève, Chambre
administrative, 2ème section, et à l'Administration fédérale des contributions,
Division principale de l'impôt fédéral direct, de l'impôt anticipé, des droits
de timbre.

Lausanne, le 12 novembre 2012

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Zünd

Le Greffier: Vianin