Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2C.1146/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
2C_1146/2012

Arrêt du 21 juin 2013

IIe Cour de droit public

Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Zünd, Président,
Aubry Girardin, Donzallaz, Stadelmann et Kneubühler.
Greffier: M. Chatton.

Participants à la procédure
X.________ AG,
représentée par Me Daniel Peregrina, avocat,
recourante,

contre

Service de la consommation et des affaires vétérinaires du canton de Vaud.

Objet
Police des denrées alimentaires, mesures provisionnelles,

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit
administratif et public, du 18 octobre 2012.

Faits:

A.
Fondée en 1994, X.________ est une entreprise qui fabrique et commercialise des
produits cosmétiques faits à la main et dont le siège se situe au Royaume-Uni.
Elle compte aujourd'hui plus de 600 magasins dans 46 pays.

X.________ AG (ci-après: la Société) est inscrite au registre du commerce du
canton de Zoug depuis le 10 janvier 2002. Elle a notamment pour but
l'importation, la fabrication et la vente des produits cosmétiques de la marque
X.________en Suisse. La Société exploite plusieurs magasins en Suisse, dont
l'un à Lausanne.

B.

B.a. Le 11 janvier 2012, le contrôleur à l'inspection des denrées alimentaires
du Service de la consommation et des affaires vétérinaires du canton de Vaud
(ci-après: le Service cantonal) a prélevé dans le magasin de Lausanne cinq
échantillons des produits suivants :
- article de bain : petit gâteau de marshmallow;
- article de bain : fondant décoré;
- article de bain : gâteau "comme par magie";
- savon : miel en tranche;
- savon : gâteau de canne à sucre.
Le solde de ces produits, disponible au magasin, a été séquestré à titre
préventif (rapport n° RT1709 du 11 janvier 2012). Le 12 janvier 2012, le
Chimiste cantonal adjoint a constaté que ces produits ne respectaient pas les
exigences posées par l'ordonnance fédérale sur les denrées alimentaires. Le
même jour, X.________ AG a fait opposition au séquestre préventif.

B.b. Le 18 janvier 2012, le Service cantonal, par l'intermédiaire du Chimiste
cantonal, a rendu, sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP, une
décision sur opposition dont le dispositif a la teneur suivante :
I. L'opposition à la décision du Service cantonal relativement au rapport n°
RT1709 est rejetée et la décision de séquestre confirmée.
II. Ces produits ne pourront plus être mis dans le commerce et devront être
retournés au fournisseur.
III. L'ensemble des autres produits similaires et qui n'ont pas fait l'objet
d'une évaluation seront prélevés à fins d'examen et il sera statué
ultérieurement sur leur licéité.
IV. (...) un émolument de 490 fr. est perçu pour le réexamen de la décision
entreprise.

B.c. La Société a recouru contre cette décision auprès du Tribunal cantonal
vaudois, qui, par arrêt du 18 octobre 2012, a rejeté le recours et confirmé la
décision du 18 janvier 2012.

Les juges cantonaux ont considéré en substance que les produits cosmétiques en
cause faisaient partie des objets usuels au sens de la législation fédérale sur
les produits alimentaires. Sur la base de cette loi, les organes de contrôle
cantonaux pouvaient séquestrer les marchandises contestées. A l'encontre de
cette mesure provisionnelle, la loi prévoyait la voie de l'opposition auprès du
Chimiste cantonal, de sorte que la décision du 18 janvier 2012 entrait bien
dans la sphère de compétence de celui-ci. Sur le fond, l'arrêt attaqué a
confirmé que les conditions posées par la législation pour ordonner la mesure
provisionnelle en cause étaient réalisées : les produits cosmétiques séquestrés
pouvaient, en raison de leur forme et de leur arôme, être confondus avec des
denrées alimentaires et être mis à la bouche, notamment par des enfants en bas
âge; de plus, ces produits étaient de nature à présenter un risque pour la
sécurité des enfants. La circonstance que ces produits n'avaient jusqu'à
présent fait l'objet d'aucune mesure du genre de celle ordonnée dans le canton
de Vaud n'y changeait rien et était liée au principe selon lequel le contrôle
des denrées alimentaires était avant tout de la responsabilité des cantons. La
décision était en outre conforme au principe du Cassis-de-Dijon, car, selon la
législation sur les entraves techniques au commerce, il peut être dérogé à ce
principe si des intérêts publics prépondérants l'exigent, parmi lesquels
figurent précisément la protection de la santé publique. Enfin, la décision
entreprise était conforme au principe de la proportionnalité, car aucune mesure
provisionnelle autre que le séquestre et le retrait de la vente n'était
envisageable pour atteindre le but recherché.

C.
A l'encontre de l'arrêt du 18 octobre 2012, X.________ AG forme un recours en
matière de droit public au Tribunal fédéral. La Société conclut à l'annulation
de l'arrêt attaqué, à la levée de la décision de séquestre du 11 janvier 2012
et à ce qu'il soit dit que les cinq produits concernés peuvent continuer à être
mis dans le commerce, sous suite de dépens.

Le Tribunal cantonal se réfère aux considérants de son arrêt et renonce à
formuler des observations, à l'instar du Chimiste cantonal. X.________ AG
présente des observations volontaires, confirmant sa position et les
conclusions prises dans son mémoire de recours.

Considérant en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office (art. 29 al. 1 LTF) et librement la
recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 138 I 367 consid. 1 p. 369;
136 II 470 consid. 1 p. 472).

1.1. Le litige a pour objet une mesure prise par le Chimiste cantonal vaudois
et prévue à l'art. 30 de la loi fédérale du 9 octobre 1992 sur les denrées
alimentaires et les objets usuels (ci-après: LDAl ou loi sur les denrées
alimentaires; RS 817.0), qui porte sur le séquestre immédiat de cinq
échantillons de produits vendus par la recourante dans son magasin de Lausanne,
assorti de l'interdiction de mettre de tels produits dans le commerce et de
leur renvoi au fournisseur (ch. I et II de la décision du 18 janvier 2012
confirmée dans l'arrêt attaqué). Cette décision, dont la formulation n'est
certes pas dénuée d'une certaine ambiguïté, constitue une mesure provisionnelle
de droit public (cf. Tomas Poledna, Inverkehrbringung von Lebensmitteln und
Lebensmittelkontrolle, in Lebensmittelrecht, 2006, p. 41 ss, 69; Pierre Moor/
Etienne Poltier, Droit administratif, vol. II, 3e éd. 2011, ch. 2.2.6.8 p. 307,
qui citent précisément l'art. 30 LDAl comme exemple de mesure provisionnelle;
Markus Schott, ad art. 98 LTF, in Basler Kommentar BGG, 2e éd., n. 13 p. 1303).

Quant au ch. III de la décision du 18 janvier 2012 confirmée dans l'arrêt
attaqué, qui annonce que d'autres produits similaires n'ayant pas fait l'objet
d'une évaluation seront prélevés et qu'il sera statué ultérieurement à leur
sujet, il n'a aucune portée juridique directe et partant n'est pas propre à
modifier ou à étendre l'objet de la présente procédure. Ce point apparaît comme
l'annonce d'un contrôle plus approfondi de l'ensemble des produits de la
recourante dans le cadre non pas de mesures provisionnelles, mais d'une
procédure au fond, y compris pour ce qui est de l'éventuelle interdiction
définitive de commercialiser les cinq produits dont des échantillons ont été
séquestrés et qui font l'objet de la mesure provisionnelle litigieuse. Du
reste, la recourante ne s'y est pas trompée, dès lors qu'elle n'a pris aucune
conclusion à ce sujet. Enfin, le ch. IV prévoyant un émolument est l'accessoire
de la décision sur mesure provisionnelle et ne modifie donc pas sa nature (cf.
ATF 133 II 104 consid. 9.2.1 p. 112 s.; 111 Ia 154 consid. 4 et 5 p. 157 ss).

1.2. Les mesures provisionnelles sont tantôt des décisions finales au sens de
l'art. 90 LTF, lorsqu'elles sont prises dans une procédure autonome, tantôt des
décisions incidentes lorsqu'elles sont prononcées au cours d'une procédure
conduisant à une décision finale ultérieure (ATF 136 V 131 consid. 1.1.2 p. 134
s.; 134 I 83 consid. 3.1 p. 86 s.; 134 II 349 consid. 1.4 p. 351).

Les mesures provisionnelles fondées sur l'art. 30 LDAl sont prises par les
autorités cantonales compétentes chargées du contrôle des denrées alimentaires
(art. 40 LDAl; Dominic Pugatsch, Health Claims: die gesundheitsbezogene
Anpreisung von Lebensmitteln in der Schweiz, 2012, n. 965 p. 283 et n. 973 p.
286). Elles peuvent faire, indépendamment d'une autre procédure, l'objet d'une
opposition et d'un recours auprès du Tribunal du canton concerné (cf. art. 52
et 53 LDAl; cf. arrêt 2C_636/2009 du 12 janvier 2010 consid. 3.4.1, RtiD 2010
II 176). Dans le cas d'espèce, la mesure prise l'a été dans le cadre d'une
procédure ayant pour seul objet le séquestre immédiat, assorti d'une
interdiction, du moins jusqu'à droit jugé dans le cadre d'une éventuelle
procédure au fond, de vente et de retour au fournisseur de cinq produits de la
recourante. Les voies de droit utilisées n'ont porté que sur cette mesure. Une
autre procédure, portant sur un contrôle général des produits de la recourante
parallèlement à ces mesures provisionnelles a seulement été annoncée dans la
décision du 18 janvier 2012 (cf. supra consid. 1.1). Par conséquent, force est
de constater que l'arrêt attaqué a été rendu dans le cadre d'une procédure
autonome fondée sur l'art. 30 LDAl; il doit donc être qualifié de décision
finale au sens de l'art. 90 LTF.

1.3. Par ailleurs, déposé à l'encontre d'un arrêt émanant d'une autorité
judiciaire cantonale supérieure de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d et
al. 2 LTF), en application de la législation sur les denrées alimentaires, soit
dans un domaine relevant du droit public (art. 82 let. a LTF) ne tombant sous
aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF, le recours est en principe
recevable (Pugatsch, op. cit., n. 993 p. 291). Il a par ailleurs été interjeté
en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites (art. 42
LTF), par la destinataire de la décision attaquée, qui remplit les conditions
de l'art. 89 al. 1 LTF (cf. arrêt 2C_590/2008 du 27 janvier 2009 consid. 1.1).
Il convient donc d'entrer en matière.

2.

2.1. Dans le cas d'un recours dirigé contre une décision portant sur une mesure
provisionnelle, l'art. 98 LTF limite les griefs à la violation des droits
constitutionnels (ATF 137 III 475 consid. 2 p. 477; 134 I 83 consid. 3.2 p.
88). La ratio legis de cette règle consiste notamment à éviter que la plus
haute instance du pays ne doive se prononcer, au stade de mesures
provisionnelles, sur la même question qu'elle pourrait avoir à examiner dans un
recours subséquent dirigé contre la décision sur le fond (cf. Message du
Conseil fédéral concernant la révision totale de l'organisation judiciaire
fédérale, du 28 février 2001, in FF 2001 4000, ch. 4.1.4.2 p. 4134).

2.2. Le Tribunal fédéral n'examine pas d'office s'il y a eu violation d'un
droit constitutionnel, mais ne peut analyser que les griefs dûment invoqués et
motivés (art. 106 al. 2 LTF), à savoir exposés de manière claire et détaillée (
ATF 134 I 83 consid. 3.2 p. 88 et les arrêts cités).

Il en découle que le Tribunal fédéral ne se prononcera sur le bien-fondé de la
mesure provisionnelle en cause qu'avec retenue, dès lors que l'art. 98 LTF lui
impose de revoir l'application du droit, même fédéral, seulement sous l'angle
restreint de l'arbitraire (cf. arrêt 1C_437/2010 du 20 juillet 2011 consid. 3.1
et 3.2) ou d'un autre droit constitutionnel et dans la mesure où la recourante
a soulevé un tel grief d'une manière conforme à l'art. 106 al. 2 LTF.

3.
La recourante commence par se plaindre d'arbitraire dans la constatation des
faits.

3.1. Il n'y a arbitraire dans l'établissement des faits ou l'appréciation des
preuves que si le juge n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un
moyen de preuve, s'il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'un moyen
important propre à modifier la décision attaquée ou encore si, sur la base des
éléments recueillis, il a fait des déductions insoutenables (cf. ATF 136 III
552 consid. 4.2 p. 560). Il ne suffit pas que la motivation de la décision
critiquée soit insoutenable; encore faut-il que celle-ci se révèle arbitraire
dans son résultat (ATF 138 I 305 consid. 4.3 p. 319).

3.2. La recourante reproche en premier lieu à l'arrêt attaqué de n'avoir pas
tenu compte, dans sa partie en fait, des pièces qu'elle avait produites,
incluant des avis d'experts et/ou de professionnels de la branche pour évaluer
concrètement les risques liés à ses produits, les juges cantonaux s'étant
limités à des statistiques globales et à des risques abstraits.

3.2.1. Les juges n'ont pas l'obligation de mentionner les éléments pertinents
ou d'apprécier les preuves dans la partie en fait de leur décision, mais
peuvent aussi développer ceux-ci dans la partie en droit. Par conséquent, ce
n'est pas parce que les faits de l'arrêt attaqué se réduisent à la présentation
des actes procéduraux qu'il y aurait déjà arbitraire (cf. arrêts 2C_649/2012 du
23 octobre 2012 consid. 5.1, SJ 2013 I 199; 2C_499/2011 du 9 juillet 2012
consid. 2.2). Encore faudrait-il que la décision, prise dans son ensemble, ait
occulté sans raison sérieuse un élément de preuve pertinent.

3.2.2. L'arrêt attaqué n'omet pas les rapports et pièces produits par la
recourante, mais relativise leur portée s'agissant de démontrer que les objets
séquestrés ne présenteraient aucun risque concret d'étouffement voire
d'empoisonnement en cas d'ingestion, en particulier pour les enfants.
S'agissant du rapport du Dr. A.________ d'avril 2012, le Tribunal cantonal,
après avoir souligné que ce médecin exerce au lieu où se trouve le siège de la
société-mère de la recourante, admet que celui-ci ne fait état d'aucun cas
rapporté d'étouffement ou de suffocation par l'ingestion de produits
cosmétiques, mais qu'il reconnaît que de tels produits, même lorsqu'ils sont
utilisés de façon normale, peuvent se casser en petits morceaux et entrer dans
le groupe des substances dangereuses. Quant à la note du 1er mars 2012 de
B.________ et du Dr. C.________, les juges ont indiqué que celle-ci critiquait
abondamment la décision attaquée l'estimant disproportionnée. Ils ont toutefois
relativisé la portée de cette note, car ces deux experts avaient également
exprimé leur fierté d'être associés à la recourante, de sorte qu'ils
paraissaient très proches du groupe X.________. Au sujet des attestations
relatives à la conformité des produits en cause aux normes de l'Union
européenne produites, les juges ont souligné qu'elles étaient établies sur du
papier à lettres de X.________. Du reste, ces deux experts n'excluaient pas un
risque, certes minime, d'étouffement ou d'empoisonnement ensuite de l'ingestion
de ces produits.

On ne voit pas qu'une telle position traduise une appréciation insoutenable des
pièces produites par la recourante. S'agissant d'experts présentant des liens
avec la Société et d'attestations de conformité émanant de la Société
elle-même, on ne saurait à l'évidence considérer comme arbitraire la retenue
dont a fait preuve le Tribunal cantonal. Le fait que, dans le système
anglo-saxon, les rapports et expertises émanant d'une partie jouissent
d'ordinaire d'une crédibilité supérieure à ce qui est le cas dans les systèmes
de droit continental n'y change rien. En vertu du système d'auto-contrôle qui
prévaut dans l'Union européenne, comme en Suisse du reste (cf. PUGATSCH, op.
cit., n. 970 p. 285), la Société doit fournir elle-même des attestations de
conformité. Partant, celles-ci ne sauraient lier obligatoirement les autorités
de surveillance, sous peine de vider les contrôles étatiques de leur sens. Au
demeurant, les documents précités n'excluent pas tout risque lié à l'ingestion
des produits séquestrés, de sorte que, contrairement à ce que soutient la
recourante, ils ne suffisent pas à démonter l'absence de danger pour la santé.

3.3. Selon la recourante, les juges cantonaux ont omis de prendre en compte que
le Service de la consommation et des affaires vétérinaires cantonal avait
indiqué que la composition des produits était conforme aux dispositions légales
et que ceux-ci ne contenaient aucun toxique. Ce faisant, la recourante perd de
vue que la conformité des produits séquestrés aux exigences en matière de
composants chimiques n'est pas contestée et que ce n'est pas parce qu'un savon
ne contient pas de composants interdits que son ingestion n'entraîne aucun
risque d'étouffement ou d'irritation de la muqueuse gastro-intestinale, en
particulier chez des enfants, comme l'a indiqué le Dr. D.________ consulté par
l'autorité intimée.

3.4. La recourante se plaint d'une inexactitude manifeste, dès lors que le
Tribunal cantonal a retenu que les produits séquestrés " ont été dotés d'arômes
et de saveurs de denrées alimentaires entrant dans la composition de pièces
sucrées ". La Société affirme que les produits en cause n'ont absolument pas un
goût de denrées alimentaires, mais de cosmétiques parfumés. Elle admet
toutefois que, même si l'odeur de savon reste présente, ses produits ont
certains arômes qui peuvent rappeler les produits frais utilisés (citron,
framboise, miel, chocolat). Dès lors que le Tribunal cantonal parle d'arômes et
de saveurs, mais n'affirme pas que l'odeur du savon ne serait pas aussi
présente, sa position ne paraît pas manifestement inexacte. Au demeurant, cet
élément n'est pas propre à modifier la décision dans son résultat. En effet,
l'arrêt attaqué a mentionné les arômes lorsqu'il a examiné si les produits de
la recourante contrevenaient à l'art. 30 al. 2 de l'ordonnance fédérale du 23
novembre 2005 sur les denrées alimentaires et les objets usuels (ci-après:
ODAlOUs; RS 817.02). Or, cette disposition interdit des objets dont, entre
autres conditions, on peut s'attendre, en raison de leur forme, de leur
odeur ou de leur aspect, qu'ils puissent être confondus avec des denrées
alimentaires (cf. art. 30 al. 2, 1ère partie ODAlOUs). Les caractéristiques
précitées sont donc alternatives. Il se trouve que, selon les faits retenus,
que la recourante ne conteste pas sur ce point, celle-ci " a donné aux articles
séquestrés l'apparence sans équivoque aucune d'une denrée alimentaire ", ce qui
suffit à remplir la première condition posée à l'art. 30 al. 2 ODAlOUs, sans
qu'il soit au surplus nécessaire que ces produits aient aussi l'odeur des
aliments imités.

3.5. La recourante soutient aussi qu'il a arbitrairement été retenu que ses
produits présentaient un risque d'ingestion par un enfant, alors qu'ils sont
bien trop grands pour être avalés tels quels et qu'ils ont une saveur
"écoeurante" totalement éloignée d'un aliment. Le Tribunal cantonal aurait, de
manière insoutenable, omis de tenir compte de ces deux caractéristiques,
lorsqu'il a évalué le danger que des enfants mettent à la bouche et avalent les
cinq produits séquestrés.

Il n'est pas contesté que les cinq produits en cause ont l'apparence d'aliments
appréciés par les enfants (petits gâteaux; fondant décoré; miel en tranche).
Même si leur saveur est éloignée des aliments imités, il n'est pas insoutenable
d'admettre qu'un enfant puisse être tenté par la seule forme du produit et en
avale un morceau quel que soit son goût, étant notoire qu'un savon est friable.
Certes, ce risque est intrinsèque à tout produit cosmétique. Cependant, ceux-ci
n'ont habituellement pas l'apparence de produits alimentaires, qui plus est de
sucreries. En retenant que l'apparence des produits pouvait présenter en
elle-même un danger d'ingestion par des enfants, il n'apparaît pas que les
juges cantonaux aient fait preuve d'arbitraire. Partant, on ne voit pas que les
éléments mis en évidence par la recourante étaient propres à exclure tout
risque d'ingestion et que les juges les auraient arbitrairement occultés.

3.6. Quant à savoir si les risques constatés dans l'arrêt attaqué sont ou non
suffisamment concrets pour justifier une mesure de séquestre, il s'agit d'une
question qui ne relève pas de l'appréciation des preuves, mais de la
proportionnalité de la mesure et sera examinée dans ce contexte (cf. infra
consid. 5.5.3).

3.7. Les critiques concernant l'arbitraire dans l'établissement des faits et
l'appréciation des preuves sont ainsi sans fondement. Dans la suite de son
raisonnement, la Cour de céans se fondera donc sur les constatations de l'arrêt
attaqué (art. 105 al. 1 LTF; cf. arrêt 5A_259/2010 du 26 avril 2012 consid. 4).

4.
La recourante se plaint d'une mauvaise application de la législation fédérale
sur les denrées alimentaires et, plus précisément de l'art. 30 ODAIOUs. Elle
soutient en substance que cette disposition correspond à la règle prescrite à
l'art. 1er al. 2 de la Directive 87/357/CEE du Conseil du 25 juin 1987
concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives aux
produits qui, n'ayant pas l'apparence de ce qu'ils sont, compromettent la santé
ou la sécurité des consommateurs (JO L 192 du 11 juillet 1987 p. 49 ss) et
doit, conformément au principe du Cassis-de-Dijon, être interprétée de la même
manière et non de façon plus restrictive. Ainsi, l'art. 30 al. 2 ODAIOUs
suppose l'existence d'un danger concret et suffisamment important qui doit être
évalué par rapport à un usage conforme et habituellement présumé du produit. En
exigeant un risque zéro ou presque sur la base d'une analyse abstraite, la Cour
cantonale aurait ainsi violé le droit fédéral.

Par cette argumentation, la recourante perd de vue qu'en matière de mesures
provisionnelles, le Tribunal fédéral ne peut, en vertu des articles 98 et 106
al. 2 LTF, procéder à un libre examen du droit fédéral, mais seulement sous
l'angle de l'arbitraire ou de la violation d'un autre droit constitutionnel, ce
qu'il appartient à la partie recourante de démonter (cf. supra consid. 2). Le
mémoire de recours ne mentionneexpressément aucun droit de cette nature en
relation avec le grief concernant la mauvaise application du droit fédéral.
Cela ne saurait porter préjudice à la recourante s'il ressort par ailleurs
clairement de son écriture qu'elle entend, en substance, se plaindre d'une
violation de ses droits constitutionnels en relation avec la violation du droit
fédéral (arrêt 5A_289/2011 du 14 juillet 2011 consid. 2.2 et les références
citées). Dans son argumentation relative au droit fédéral, la recourante ne
fait qu'opposer à l'interprétation donnée de l'art. 30 ODAlOUs par le Tribunal
cantonal sa propre interprétation, plus restrictive, dont elle affirme qu'elle
serait dictée par le droit de l'Union européenne. Elle ne soutient ni a
fortiori n'expose, même implicitement, que la portée plus large donnée à cette
règle dans l'arrêt attaqué serait arbitraire ou contraire à un autre droit
constitutionnel. Partant, le grief relatif à la mauvaise application du droit
fédéral est irrecevable.

5.
En dernier lieu, la recourante se plaint d'une violation du principe de la
proportionnalité.

5.1. Dès lors qu'elle invoque ce principe, non pas isolément, ce qui ne serait
pas admissible (ATF 136 I 241 consid. 3.1 p. 251), mais en lien avec une
restriction à sa liberté économique, le grief est recevable sous l'angle de
l'art. 98 LTF (cf. arrêt 9C_881/2012 du 27 décembre 2012 consid. 3 a
contrario).

5.2. L'arrêt attaqué, qui confirme la mesure prise par le Chimiste cantonal, à
savoir le séquestre de cinq produits de la recourante, assorti de leur
interdiction de mise dans le commerce et leur renvoi au fournisseur, porte
atteinte à la liberté économique de la recourante (art. 27 Cst.), même si cette
atteinte n'est pas considérable, puisque la recourante n'est nullement empêchée
d'exercer son activité, seuls cinq de ses produits et le magasin de Lausanne
étant concernés par la mesure provisionnelle litigieuse. Il n'en demeure pas
moins que, pour être admissible, la mesure doit reposer sur une base légale,
être justifiée par un intérêt public et être proportionnée au but visé (cf.
art. 36 Cst.). Seule la proportionnalité est contestée par la recourante. Pour
évaluer celle-ci, il est toutefois nécessaire au préalable d'exposer les
dispositions légales sur lesquelles la mesure litigieuse se fonde et l'intérêt
public poursuivi.

5.3. Les produits séquestrés, en tant que produits de soins corporels et
cosmétiques, font partie des objets usuels visés par la législation sur les
produits alimentaires (cf. art. 5 let. b LDAl; arrêts 2C_590/2008 du 27 janvier
2009 consid. 2.1, sic! 5/2009 p. 365; 2A.593/2005 du 6 septembre 2006 consid.
3.1 et 3.3, sic! 3/2007 p. 222). La mesure litigieuse repose sur l'art 30 LDAI,
qui prévoit que, lorsque la protection des consommateurs le commande, les
organes de contrôle séquestrent les marchandises contestées. Selon l'alinéa 2
de cette disposition, ils peuvent aussi séquestrer la marchandise en cas de
suspicion fondée. L'art. 14 al. 1 LDAl dispose que, lors de leur emploi
conforme à leur destination ou habituellement présumé, les objets usuels ne
doivent pas mettre la santé en danger. L'art. 30 al. 2 ODAlOUs précise que sont
interdits les objets dont on peut s'attendre, en raison de leur forme, de leur
odeur ou de leur aspect, qu'ils puissent être confondus avec des denrées
alimentaires et être mis à la bouche, notamment par des enfants, et qu'ils
puissent dès lors présenter un danger pour la santé humaine.

5.4. S'agissant du but d'intérêt public poursuivi, il est défini de manière
générale à l'art. 1 let. 1 LDAl, selon lequel la législation sur les denrées
alimentaires a pour but de protéger les consommateurs contre les denrées
alimentaires et les objets usuels pouvant les mettre en danger. L'art 30 al. 1
LDAl le rappelle en indiquant que, lorsque la protection des consommateurs le
commande, les organes de contrôle séquestrent les marchandises contestées.
L'art. 30 al. 2 ODAlOUs vise plus particulièrement la protection des enfants.

5.5. Encore faut-il, pour justifier l'atteinte à la liberté économique, que la
mesure soit proportionnée au but de protection de la santé précité.

5.5.1. Le principe de la proportionnalité exige que le séquestre soit apte à
parvenir au but visé (règle de l'aptitude) et que celui-ci ne puisse être
atteint par une mesure moins incisive (règle de la nécessité); en outre, il
interdit toute limitation allant au-delà du but visé et il exige un rapport
raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis
(principe de la proportionnalité au sens étroit: ATF 136 IV 97 consid. 5.2.2 p.
104; 132 I 49 consid. 7.2 p. 62 et les arrêts cités; arrêt 1B_127/2013 du 1er
mai 2013 consid. 3.1).

5.5.2. En l'espèce, selon les faits figurant dans l'arrêt attaqué, qui lient le
Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF; cf. supra consid. 3.7), les objets
séquestrés, en tant qu'ils consistent en des produits cosmétiques ayant
l'apparence de produits alimentaires (gâteaux et sucreries) présentent un
risque pour la santé des enfants qui, s'il n'est pas particulièrement patent,
n'est pas négligeable pour autant et ne saurait en tout cas être nié (arrêt
attaqué, p. 7 in fine).

5.5.3. Sur la base de ces constatations, la mesure consistant à immédiatement
séquestrer ces produits, dire qu'ils ne pourront plus être mis dans le commerce
et devront être retournés au fournisseur est apte à protéger les consommateurs
et plus particulièrement les enfants. Elle permet donc bien de parvenir à
l'objectif d'intérêt public poursuivi par la loi.

Les personnes les plus exposées étant les enfants, on ne voit pas qu'une mesure
moins incisive soit propre à les protéger aussi efficacement. La proposition de
la recourante visant à assortir les produits d'un avertissement pour les
acheteurs, selon lequel l'usage de ces produits ne convient pas aux enfants
en-dessous de l'âge de 5 ans sans surveillance parentale (cf. recours, p. 25),
ne peut être suivie. En effet, de par leur nature, ces produits doivent être
déballés et posés à disposition des utilisateurs, de sorte que la mise en garde
proposée par la recourante ne paraît pas propre à supprimer le risque, qui ne
se limite du reste pas aux enfants de moins de 5 ans. Il ne faut pas perdre de
vue que l'art. 30 LDAl exprime le principe de précaution ("Vorsorgeprinzip";
 EVELYN KIRCHSTEIGER-MEIER, Schweizer Lebensmittel-recht im Umbruch, in
Sicherheit und Recht, 1/2012, p. 32 ss, 38; URS KLEMM/DIRK TRÜTEN,
Regelungsrahmen im Schweizer Lebensmittelrecht, in Lebensmittelrecht
EU-Schweiz, 2e éd., 2012, p. 136 ss, 142). Cette disposition a pour but
d'empêcher que le risque ne se réalise. Partant, on ne voit pas que des mesures
moins incisives, qui ne sont pas aptes à assurer le même niveau de prévention,
doivent être envisagées en remplacement du séquestre et du retrait du marché
des cinq produits en cause.
Enfin, il convient de souligner que le but de la recourante est de faire le
commerce et de vendre des produits cosmétiques de marque X.________ en Suisse.
Comme déjà indiqué, celle-ci ne se voit pas interdire ou empêchée d'exercer son
activité économique, dès lors que seuls cinq articles de sa gamme sont visés
par la mesure pour son magasin de Lausanne. En outre, ces articles ne
correspondent pas à la forme sous laquelle des produits cosmétiques sont
traditionnellement vendus, puisqu'ils ont l'aspect de gâteaux et sucreries. Or,
en présentant de tels produits sous une apparence d'aliments particulièrement
prisés par les enfants, il est indéniable qu'il existe un risque accru
d'ingestion, dont le caractère dangereux ressort des constatations cantonales.
Contrairement à ce que soutient la recourante, ce risque pouvait être évalué
non pas en fonction des seuls produits X.________ (ce qui en pratique paraît
difficilement réalisable), mais sur la base des statistiques suisses liées à
l'ingestion de produits cosmétiques, en particulier par des enfants. Le fait
que ce risque ne soit pas extrêmement élevé reste néanmoins dans une proportion
raisonnable avec l'atteinte à la liberté économique de la recourante, qui est
elle aussi faible, puisqu'elle continue à pouvoir, en l'état, vendre tous les
autres produits cosmétiques de sa gamme.

Il convient également de souligner, sous l'angle de la proportionnalité, que la
mesure prise ne constitue pas une entrave technique au commerce au sens de la
loi fédérale du 6 octobre 1995 sur les entraves techniques au commerce (LETC;
RS 946.51). Pour qu'il y ait entrave technique au commerce au sens de l'art. 3
let. a de ladite loi, il faut en effet que les entraves aux échanges
internationaux de produits résultent: 1. de la divergence des prescriptions ou
des normes techniques, 2. de l'application divergente de telles prescriptions
ou de telles normes (...). Les cinq produits de la recourante ont été
séquestrés au motif qu'ils remplissaient les conditions justifiant une
interdiction au sens de l'art. 30 al. 2 ODAlOUs. Cette disposition (cf. contenu
reproduit in consid. 5.3 in fine) n'est toutefois pas une mesure de sécurité
propre à la Suisse. Elle trouve son équivalent dans la Directive 87/357/CEE
précitée. Cette directive tend à interdire les produits qui, tout en n'étant
pas des denrées alimentaires, ont une forme, une odeur, une couleur, un aspect,
un conditionnement, un étiquetage, un volume ou une taille tels qu'il est
prévisible que les consommateurs, en particulier les enfants, les confondent
avec des produits alimentaires et, de ce fait, les portent à la bouche, les
sucent ou les ingèrent, alors que cette action peut comporter des risques tels
que l'étouffement, l'intoxication, la perforation ou l'obstruction du tube
digestif (cf. art. 1 ch. 2 et art. 2 de ladite directive). En outre, rien
n'indique que cette interdiction soit appliquée de manière différente en Europe
que par les autorités de surveillance cantonales. Au contraire, il ressort de
la liste produite par la recourante, évoquée dans l'arrêt attaqué,que certains
objets usuels, en particulier des savons, se rapprochant de denrées
alimentaires, ont également fait l'objet de mesures visant à limiter leur mise
sur le marché au sein de l'Union européenne. La question de savoir si les cinq
produits contestés sont aussi ressemblants que les produits interdits dans
l'Union européenne relève de l'appréciation laissée aux autorités pour
déterminer si un produit remplit ou non les conditions fixées. Ce pouvoir
d'appréciation ne traduit pas une application divergente entre la Suisse et
l'Union européenne. En outre, ce n'est pas parce que la fabrication et le
commerce des cinq produits en cause n'ont pas fait l'objet de mesures de
sécurité dans d'autres pays qu'il y aurait de ce seul fait application
divergente, comme le laisse entendre la recourante. En Suisse comme en Europe,
prévaut le système de l'auto-contrôle (cf. art. 23 LDAl; arrêt 2A.593/2005 du 6
septembre 2006 consid. 2.4, sic! 3/2007 p. 222), de sorte que le fait que les
cinq produits visés soient à la libre disposition des consommateurs dans
l'Union européenne ne signifie pas automatiquement que ceux-ci sont considérés
comme conformes aux exigences européennes (cf. arrêt 2C_590/2008 du 27 janvier
2009 consid. 3.3, sic! 5/2009 p. 365). Rien ne permet donc d'affirmer que la
mesure en cause serait une entrave technique au commerce.

Compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, le grief concernant la
proportionnalité en relation avec l'art. 27 Cst. s'avère ainsi infondé.

6.
Le recours doit donc être rejeté, dans la mesure où il est recevable.

Les frais seront mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 66 al. 1
LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 68 al. 3 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, au Service de
la consommation et des affaires vétérinaires/Chimiste cantonal, ainsi
qu'au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et
public.

Lausanne, le 21 juin 2013

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Zünd

Le Greffier: Chatton

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