Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 1C.450/2012
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

[8frIR2ALAGK1]     
{T 0/2}
                   
1C_450/2012

Arrêt du 7 août 2013

Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président, Aemisegger et Eusebio.
Greffière: Mme Sidi-Ali.

Participants à la procédure
A.________, représenté par Me Stéphane Piletta-Zanin, avocat,
recourant,

contre

Les Transports Publics Genevois, route de la Chapelle 1, 1212 Grand-Lancy,
représentés par Me Tobias Zellweger, avocat,
intimés,

Commission fédérale d'estimation du
1er arrondissement, par son président Jean-Marc Strubin, c/o Cour de justice,
case postale 3108, 1211 Genève 3.

Objet
expropriation,

recours contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, Cour I, du 9 juillet
2012.

Faits:

A.
A.________, agriculteur, est propriétaire des parcelles nos 14'033 et 14'034 de
la commune de Meyrin. La parcelle 14'033 comprend une maison de deux étages en
location, qui abrite depuis plusieurs années une carrosserie au rez-de-chaussée
et un appartement au 1er étage, occupé par le carrossier. Jusqu'en septembre
2007, se trouvait également sur cette parcelle une station-service exploitée
par X.________ SA. La parcelle 14'034 est utilisée à des fins exclusivement
agricoles.

B.
Par décision du 17 août 2006, l'Office fédéral des transports (OFT) a approuvé
les plans du deuxième tronçon de la ligne de tramway Cornavin-Meyrin-CERN
(TCMC) entre Les Avanchets et le CERN. Par même décision, il a accordé aux
Transports publics genevois (TPG) le droit d'exproprier A.________ conformément
aux plans d'emprise et au tableau des droits à exproprier, soit de la manière
suivante:

- parcelle 14'033 (1'456 m2) : emprise provisoire de 140 m2 (stockage des
matériaux de construction) et emprise définitive de 905 m2 avec démolition de
la station-service sise sur la parcelle;
- parcelle 14'034 (2'978 m2) : 2'305 m2 d'emprise provisoire (stockage des
matériaux de construction) et 675 m2 d'emprise définitive.
Par décision du 16 novembre 2007, la Commission fédérale d'estimation du 1er
arrondissement (CFE) a autorisé les TPG à exercer leur droit d'expropriation
(provisoire et définitif) de manière anticipée, tout en réservant les droits de
A.________ relatifs au paiement d'une indemnité pour expropriation matérielle
d'une partie de ses parcelles ainsi que pour le dommage résultant des emprises
provisoires prévues.
A ce titre, A.________ a formulé les prétentions suivantes:

- indemnité annuelle de 2'305 fr. en réparation du dommage causé par l'emprise
provisoire exercée sur la parcelle 14'034 (2'305 x 1 fr. le m2);
- indemnité de 916'400 fr. en réparation du dommage causé par l'emprise
définitive sur ses deux parcelles (1'580 x 580 fr. le m2);
- indemnité de 1'350'000 fr. pour la valeur vénale de la station-service
détruite et du magasin attenant;
- indemnité de 754'560 fr. pour les pertes d'exploitation de la
station-service;
- indemnité de 50'000 fr. pour une annexe non cadastrée à la carrosserie sise
sur la parcelle 14'033;

- indemnité "additionnelle" de 1'000'000 fr. pour la dépréciation de la partie
restante de la parcelle 14'033 et de ses installations, les pertes
d'exploitation de la carrosserie et la réparation du dommage causé par
l'emprise provisoire.

C.
Par décision du 19 mars 2010, se fondant notamment sur le rapport du 30 juin
2009 de l'expert qu'elle avait mandaté pour déterminer le montant de
l'indemnité due, la CFE a condamné les TPG à payer à A.________ les montants
suivants:

- 140 fr. par an à compter du 16 novembre 2007 pour l'emprise provisoire de 140
m2 sur la parcelle 14'033;
- 2'305 fr. par an à compter du 16 novembre 2007 pour l'emprise provisoire de
2'305 m2 sur la parcelle 14'034;
- 45'250 fr. en compensation de l'emprise définitive de 905 m2 sur la parcelle
14'033;
- 33'750 fr. en compensation de l'emprise définitive de 675 m2 sur la parcelle
14'034;
- 430'000 fr. pour la démolition de la station-service et du "shop";
- 50'000 fr. à titre de perte d'exploitation de l'atelier de carrosserie.
La CFE a rejeté pour le surplus la demande de A.________ tendant à la
nomination d'un nouvel expert.
Le 9 juillet 2012, statuant sur le recours formé par A.________, le Tribunal
administratif fédéral a confirmé la décision de la CFE. Il a en substance
considéré que le refus d'ordonner une contre-expertise ne violait par le droit
d'être entendu du recourant: l'expert avait répondu à toutes les questions
posées et avait fait preuve de la diligence requise, les quelques imprécisions
du rapport ne justifiant pas la nomination d'un nouvel expert. S'agissant du
montant de l'indemnité, le Tribunal administratif fédéral a constaté que
l'appréciation de la CFE ne violait pas les dispositions de la loi fédérale sur
l'expropriation.

D.
A.________ recourt par acte du 14 septembre 2012 auprès du Tribunal fédéral. Il
conclut à l'annulation de l'arrêt du Tribunal administratif fédéral et au
renvoi du dossier à la Commission fédérale d'estimation du 1er arrondissement,
subsidiairement au Tribunal administratif fédéral, pour nouvelle instruction
sur la base d'une nouvelle expertise. Subsidiairement, le recourant conclut à
la condamnation des TPG au paiement de:

- 1'350'000 fr. "valeur station-service",
- 50'000 fr. "valeur atelier",
- 916'400 fr. "au titre des terrains expropriés" (soit 580 fr. le m2),
- 754'560 fr. "au titre de pertes d'exploitation liées à la station-service",
- 2'305 fr. par an dès le commencement de l'emprise temporaire sur la parcelle
14'034,
- 200'000 fr. "résultant des valeurs résiduelles pertes d'exploitation sur
carrosserie et logement, y compris emprise temporaire sur la parcelle n°
14'033".

E.
La Commission fédérale d'estimation du 1er arrondissement et le Tribunal
administratif fédéral renoncent à se déterminer et se réfèrent à leur décision
respective. Les Transports publics genevois se déterminent et concluent au
rejet du recours. Le recourant a encore déposé des observations sur ces
déterminations. Il persiste dans ses conclusions.

Considérant en droit:

1.
La voie du recours en matière de droit public au sens des art. 82 ss LTF est
ouverte contre une décision du Tribunal administratif fédéral en matière
d'expropriation en vertu de l'art. 87 al. 1 de la loi fédérale du 20 juin 1930
sur l'expropriation (LEx; RS 711). A.________ a pris part à la procédure devant
l'autorité intimée. Il est particulièrement touché par la décision attaquée
rendue par le Tribunal administratif fédéral, qui fixe l'indemnité
d'expropriation de ses parcelles à un montant inférieur à celui auquel il
prétendait. Les autres conditions de recevabilité du recours sont réunies, si
bien qu'il y a lieu d'entrer en matière.

2.
Le recourant produit un bordereau de pièces à l'appui de son recours. L'art. 99
al. 1 LTF prévoyant qu'aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être
présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente, celles-ci
sont irrecevables.

3.
Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il
appartient toutefois au recourant d'exposer succinctement en quoi l'acte
attaqué viole le droit (art. 42 al. 2 LTF). Cela suppose que le mémoire de
recours ne soit pas trop long et s'en tienne à l'essentiel (arrêt 2C_285/2013
du 23 avril 2013 consid. 1; cf. Florence Aubry Girardin, in Commentaire de la
LTF, 2009, n. 27 ad art. 42 LTF). Il n'appartient pas au Tribunal fédéral de
dégager d'une argumentation prolixe et confuse les moyens susceptibles d'être
recevables et pertinents (arrêts 1C_262/2012 du 20 septembre 2012 consid. 4;
1C_369/2009 du 25 février 2010 consid. 5). Or, le recourant présente de façon
répétitive et peu claire des critiques à l'égard principalement de l'expertise
- et non nécessairement à l'égard de l'arrêt attaqué - qui, souvent, ne sont
pas en lien avec l'intitulé des griefs, ce qui confine à l'irrecevabilité
sanctionnant le non-respect de l'art. 42 al. 2 LTF. L'examen du recours se
limitera donc aux griefs expressément désignés, dans la mesure où ils sont, en
une partie ou une autre du mémoire, motivés de façon suffisamment
compréhensible.

4.
Le recourant se plaint d'un établissement inexact des faits. Selon lui, la
valeur vénale de la station-service, les pertes liées à l'exploitation et la
diminution de la valeur résiduelle de la parcelle n'auraient pas correctement
été chiffrées.

4.1. Le Tribunal fédéral statue en principe sur la base des faits établis par
l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à
l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 LTF, il ne peut s'en écarter que si les
constatations de ladite autorité ont été établies en violation du droit au sens
de l'art. 95 LTF ou de façon manifestement inexacte (art. 105 al. 2 LTF),
c'est-à-dire arbitraire (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; 137 III 226 consid.
4.2 p. 234; 136 II 304 consid. 2.4 p. 314) et pour autant que la correction du
vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause. Si le recourant entend
se prévaloir de constatations de faits différentes de celles de l'autorité
précédente (cf. art. 97 al. 1 LTF), il doit expliquer de manière circonstanciée
en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient
réalisées. A défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait
divergent de celui retenu dans l'acte attaqué. En particulier, le Tribunal
fédéral n'entre pas en matière sur des critiques de type appellatoire portant
sur l'état de fait ou sur l'appréciation des preuves (ATF 137 II 353 consid.
5.1 p. 356; 136 II 101 consid. 3 p. 104 et les arrêts cités).

4.2. Le recours comporte un état de fait dans lequel le recourant présente sa
propre description des faits. Vu ce qui précède (consid. 4.1), seules sont
examinées les divergences avec les constatations du Tribunal administratif
fédéral que le recourant prend la peine de motiver. A cet égard, la
contestation "par avance" de "tout allégué de fait ou de droit qui ne serait
conforme aux siens propres ou formellement admis par lui" ne satisfait pas aux
exigences de motivation précitées.

4.3. Le recourant considère que l'expertise, et par conséquent l'arrêt attaqué,
omet de prendre en considération l'existence d'un abri anti-atomique au
sous-sol et de citernes, qu'il aurait financés. L'évaluation de la valeur
vénale de la station-service s'en trouverait faussée.
Le Tribunal administratif fédéral a considéré que l'expert judiciaire avait à
bon droit pris en compte les seules installations dont le recourant était
propriétaire, à savoir une marquise métallique, le "shop" et ses aménagements,
à l'exclusion de celles qui avaient été financées par l'entreprise pétrolière
elle-même. En l'espèce, il apparaît que l'abri anti-atomique et les citernes
sont inclus dans les aménagements de la station-service pris en considération
par l'expertise. D'une part le kiosque décrit dans le rapport d'expertise
comprend: "fondations, enveloppe, toiture, serrurerie de façade, chauffage,
ventilation, sanitaires". D'autre part, les documents d'expertise mentionnent
expressément les citernes en sous-sol. Le Tribunal administratif fédéral, qui a
confirmé le bien-fondé des constatations de l'expert, a donc tenu compte de
tous les éléments composant la station-service. S'agissant ensuite de la
répartition de leur financement entre le propriétaire et le
locataire-exploitant, le recourant ne démontre pas en quoi la référence à
l'usage en matière d'exploitation de station-service serait arbitraire. En
dépit de son obligation de collaborer à l'établissement des faits (cf. arrêts
2C_84/2012 du 15 décembre 2012 consid. 3.1 et les réf. ; ATF 133 III 507
consid. 5.4 p. 511), à aucun moment le recourant n'a apporté le moindre élément
probant (facture, contrat de vente ou d'installation, etc.) à l'appui de ses
allégations selon lesquelles il aurait financé des infrastructures dont
l'expert n'aurait pas tenu compte. Le contrat de bail de 1987 ne démontre ni la
source de financement des citernes démontées en 2009, ni leur valeur - pour
autant que ce soient toujours les mêmes, ce que le recourant n'établit pas, ni
même n'allègue - plus de vingt ans après. Au contraire, l'expertise relève que
"la sévérité de la législation en matière de produits pétroliers implique une
mise à jour régulière des installations" et qu'il "ne fait aucun doute que
celle-ci n'y faisait pas exception". En se référant à l'appréciation de
l'expert judiciaire (qui a procédé à une évaluation globale et selon l'usage)
et de la CFE sur ces questions, le Tribunal administratif fédéral n'a pas
établi les faits de façon arbitraire.

4.4. Selon le recourant, le Tribunal administratif fédéral a à tort méconnu
l'existence d'un atelier non cadastré "situé entre la maison et le kiosque".
L'arrêt attaqué retient que le rapport d'expertise "omet de mentionner
l'existence d'une annexe à la carrosserie, pourtant cadastrée", ce qui serait
sans incidence dès lors que cet élément n'était pertinent que dans l'hypothèse
non réalisée d'une expropriation totale. Il ne s'agit pas de l'atelier non
cadastré dont le recourant se prévaut devant le Tribunal fédéral. De toute
évidence, le Tribunal administratif n'a pas expressément examiné cette
question, s'en tenant aux constatations de la CFE, respectivement de l'expert
judiciaire, sur ce point. L'expertise indique que la parcelle 14'033 est
occupée par la station-service, le kiosque, "un atelier (adossé à la maison
transformée en carrosserie) d'une surface totale de 69 m2" et "un atelier non
cadastré qui ne fait pas l'objet de cette évaluation". A la lecture des plans
de l'expertise, il apparaît que cet atelier n'est pas voué à la démolition et
le recourant ne démontre pas le contraire. Dans ces circonstances, l'estimation
de sa valeur vénale était sans incidence sur le calcul de l'indemnité, raison
pour laquelle ce bâtiment n'a pas été pris en considération dans l'évaluation
de la valeur de la station-service. Dans la même mesure, l'établissement de ce
fait n'est pas de nature à influer sur le sort de la présent cause. Il n'y a
pas lieu de modifier l'état de fait à cet égard.

4.5. Le recourant prétend que les pertes d'exploitation de la station-service
n'ont pas été établies. Or, comme il le relève lui-même ("la valeur de
rendement prise en compte ne l'a été que et exclusivement dans la formule
classique de calcul pour la détermination de la valeur vénale de la
station-service et du shop", acte de recours, p. 7), et comme l'a constaté le
Tribunal administratif fédéral, l'expert a intégré cette valeur de rendement à
l'estimation de la valeur vénale (pondération entre la valeur intrinsèque et la
valeur de rendement). Cette valeur de rendement valant détermination des
"pertes d'exploitation", l'état de fait n'est pas lacunaire sur ce point. Pour
le reste, savoir si cette manière de faire est critiquable est une question de
droit qui sera examinée ci-dessous.

4.6. Le recourant se plaint enfin de l'absence de prise en considération de la
diminution de la valeur résiduelle de son bien-fonds. Ce faisant, il s'en prend
en réalité à l'appréciation du Tribunal administratif fédéral selon laquelle
les parties non expropriées de ses parcelles n'ont pas subi de perte de valeur
(consid. 4.4 de l'arrêt attaqué), question qui relève également du droit.

5.
Le recourant fait valoir la violation de son droit d'être entendu, au motif que
le Tribunal administratif fédéral a refusé d'ordonner une nouvelle expertise.
Il revient sur une prétendue confusion de l'expert et du Tribunal administratif
fédéral entre la valeur vénale de la station-service et les pertes
d'exploitation de cette station service, dont il déduit que ces questions
n'auraient pas pleinement été examinées.

5.1. Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu
comprend en particulier le droit pour le justiciable de s'expliquer avant
qu'une décision ne soit prise à son détriment, celui de fournir des preuves
quant aux faits de nature à influer sur le sort de la décision, celui d'avoir
accès au dossier, celui de participer à l'administration des preuves, d'en
prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 135 I 279 consid.
2.3 p. 282; 132 V 368 consid. 3.1 p. 370 et les réf.). Cette garantie
constitutionnelle n'empêche pas l'autorité de mettre un terme à l'instruction
lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que,
procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves
qui lui sont encore proposées, elle a la certitude qu'elles ne pourraient
l'amener à modifier son opinion (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 p. 376; 136 I
229 consid. 5.3 p. 236; 131 I 153 consid. 3 p. 157).

5.2. Ainsi qu'on l'a vu (consid. 4.3), la valeur vénale est une pondération
entre la valeur intrinsèque du bâtiment (c'est-à-dire la valeur à neuf du
bâtiment avec tous ses accessoires, diminuée de la dépréciation due son âge) et
sa valeur de rendement (c'est-à-dire la valeur du bâtiment au vu du revenu
locatif qu'il procure). La valeur de rendement tient précisément compte des
revenus (à savoir les loyers) générés par l'exploitation par une entreprise
tierce de la station-service. L'expertise à laquelle se réfère le Tribunal
administratif fédéral a donc pris en considération ce que le recourant intitule
"pertes d'exploitations" et il n'y a pas violation de son droit d'être entendu
à cet égard. Autrement dit, et pour mettre un terme à la confusion du recourant
sur ce point, selon sa manière de présenter le dommage, respectivement
l'indemnité requise, il lui a été accordé 375'800 fr. (valeur intrinsèque selon
l'expertise à laquelle le Tribunal administratif se réfère) "au titre de la
valeur de la station service, shop +1 bâtiment non cadastré" et 54'200 fr.
"pour pertes de gains en lien avec l'exploitation de la station service", soit
430'000 fr. au total.
Au demeurant, contrairement à ce que le recourant affirme en p. 16 de son
recours, il n'y a pas de contradiction dans l'arrêt attaqué sur ce que comprend
le montant de 430'000 fr. relatif à la station-service. Ce montant inclut le
rendement de la station-service, mais non la valeur du terrain qui supporte la
station service, ce qu'explique clairement le Tribunal administratif fédéral
lorsqu'il précise que "cette somme ne concernait dès lors  que l'estimation de
la station service". En résumé, le Tribunal administratif fédéral n'avait ainsi
pas à ordonner une nouvelle expertise pour définir la valeur des pertes
d'exploitation de la station-service puisque cela ressortait de l'expertise sur
laquelle la CFE s'était appuyée.

5.3. Dans un grief qu'il met en lien avec la violation de son droit d'être
entendu, le recourant se plaint de la partialité de l'expert mandaté par la
Commission fédérale d'estimation. Le Tribunal administratif fédéral a examiné
avec soin cette question (discutée sur plus de quatre pages), exposant pour
quelles raisons chacune des critiques formulée par le recourant à l'égard de
l'expertise ne remettait pas en cause l'appréciation de la CFE et la mesure
dans laquelle celle-ci s'était appuyée sur les conclusions de l'expertise. Le
droit d'être entendu du recourant n'a ainsi pas été violé.

6.
Le recourant se plaint d'une violation des règles en matière d'administration
des preuves découlant de l'art. 12 PA, à teneur duquel l'autorité constate les
faits d'office et procède s'il y a lieu à l'administration de preuves par les
moyens évoqués dans cette disposition. Ce grief se confond d'une part avec
celui de la constatation incomplète des faits (ci-dessus, consid. 4) en tant
qu'il concerne la question de savoir quels éléments de la station-service ont
été financés par le recourant, et d'autre part avec celui de la violation de
son droit d'être entendu (ci-dessus, consid. 5), en tant qu'il concerne le
refus du Tribunal administratif fédéral d'ordonner une nouvelle expertise. Il
n'a ainsi pas à être examiné plus avant.

7.
Selon le recourant, l'arrêt attaqué viole les art. 16 et 19 LEx. L'indemnité
qui lui a été accordée ne serait pas "pleine et entière" au sens de la loi dès
lors qu'elle ne comprendrait pas les pertes d'exploitation en lien avec la
station-service et le magasin attenant ni la dépréciation du solde de la
parcelle non expropriée.
L'indemnité pleine et entière due en cas d'expropriation (art. 16 LEx) comprend
la pleine valeur vénale du droit exproprié (art. 19 let. a LEx), le montant
correspondant à la moins-value de la partie restante (art. 19 let. b LEx) et la
contre-valeur de tous autres préjudices subis par l'exproprié, en tant qu'ils
peuvent être prévus, dans le cours normal des choses, comme une conséquence de
l'expropriation (art. 19 let. c LEx).

7.1. L'indemnité due pour l'expropriation d'un bien-fonds se détermine en
principe selon sa valeur vénale, soit d'après la valeur que celui-ci représente
pour un amateur quelconque en fonction de son utilisation actuelle ou d'une
meilleure utilisation possible. On accorde ainsi à l'exproprié la somme qu'il
pourrait obtenir d'un acquéreur à qui il vendrait son immeuble. Si l'intérêt
financier de l'exproprié au maintien de l'utilisation actuelle de son
bien-fonds est supérieur à la valeur vénale, il faut alors indemniser
l'exproprié pour le dommage subjectif qu'il subit du fait que l'utilisation
actuelle de son immeuble ou celle qu'il envisageait d'en faire est rendue
impossible ou qu'elle est restreinte. Si donc, pour le calcul de la valeur
vénale et pour la détermination du dommage subjectif, on se fonde sur deux
hypothèses qui s'excluent en principe - d'une part, vente de l'immeuble,
d'autre part, maintien de son utilisation par le propriétaire -, il ne faut pas
que les éléments de la valeur objective et ceux du dommage subjectif soient
mélangés et qu'ainsi des dommages soient indemnisés à double. Mais cela ne veut
pas dire que l'on ne puisse pas, pour la détermination de l'indemnité
d'expropriation, se fonder au besoin sur des hypothèses plus affinées qui
prennent en compte aussi bien la vente que le maintien de l'entreprise (ATF 113
Ib 39 consid. 2a p. 41 s.; arrêt 1E.16/1998 du 6 décembre 1999, consid. 2a/aa).
Lorsqu'une entreprise est expropriée et ne peut être déplacée, la jurisprudence
admet qu'une indemnité pour la perte de revenu ou de gain doit être versée pour
une période transitoire, en sus de celle accordée pour la valeur vénale, qui ne
comprend que la perte des moyens de production. Il s'agit de dédommager
l'exproprié dont la capacité de travail et l'esprit d'entreprise demeurent
intacts mais qui doit néanmoins transférer son activité en raison de
l'expropriation (arrêt 1E.16/1998 du 6 décembre 1999, consid. 2c). Cela
implique toutefois que l'exproprié soit lui-même l'exploitant, puisqu'il s'agit
de prendre en considération la période de battement pendant laquelle il lui
faut retrouver un lieu d'exploitation et redémarrer son activité jusqu'à
atteindre un rendement équivalent à celui qu'il connaissait avant
l'expropriation.
Tel n'est pas le cas en l'espèce, le recourant n'étant que le bailleur de la
station-service. Les seuls revenus qu'il tirait de l'exploitation de celle-ci
sont des revenus locatifs, dont un intéressement au chiffre d'affaires.
L'indemnité qui lui est accordée selon la valeur vénale de la station-service
inclut déjà cette valeur de rendement qu'il qualifie de "perte d'exploitation".
Ajouter une indemnité supplémentaire reviendrait à le dédommager deux fois pour
la cessation d'activité de la station-service.

7.2. Selon l'art. 22 LEx, en cas d'expropriation partielle, il n'est pas
accordé d'indemnité de dépréciation pour la partie restante, lorsque la
dépréciation se trouve compensée par des avantages particuliers résultant de
l'entreprise de l'expropriant (al. 1); par contre, il est tenu compte du
dommage résultant de la perte ou de la diminution d'avantages influant sur la
valeur vénale et que la partie restante aurait, selon toute vraisemblance,
conservés s'il n'y avait pas eu d'expropriation (al. 2). Pour être prise en
considération au sens de cette disposition, une diminution de la valeur doit
être en rapport de causalité adéquate avec l'expropriation formelle. Si la
moins-value est une conséquence de la seule réalisation de l'ouvrage de
l'expropriant, et non pas de la perte du droit de propriété sur la surface de
l'emprise, ce lien de causalité fait défaut. En d'autres termes, cela signifie
que pareille conséquence se serait aussi produite si l'ouvrage avait été
réalisé quelques mètres plus loin, sans que le terrain de l'exproprié fût
touché (arrêts 1E.6/2002 du 6 mars 2003 consid. 4; E.12/1996 du 15 août 1997
consid. 2b/bb; cf. également ATF 114 Ib 321 consid. 3 p. 324). Une indemnité
pour le dérangement causé par l'ouvrage ne se justifie alors que s'il est
excessif et que le voisin n'est pas contraint de le tolérer en vertu de l'art.
684 CC; et il faut donc que les trois conditions issues de la jurisprudence
(spécialité, imprévisibilité et gravité) soient cumulativement remplies (ATF
131 II 458 consid. 4 p. 464).
En l'espèce, la perte de terrain elle-même est compensée, outre par l'indemnité
pour sa valeur vénale, par l'octroi d'un montant "à titre de perte
d'exploitation de l'atelier de carrosserie situé dans la maison". Le recourant
se plaint en plus des éventuelles nuisances supplémentaires causées par la
nouvelle ligne de tram. Or, ce dommage n'est pas directement en rapport de
causalité adéquate avec l'expropriation, puisqu'il serait également survenu si
la ligne avait été construite en limite de propriété de ses parcelles dans leur
configuration initiale. Au demeurant, il ne démontre pas en quoi un arrêt de
tram causerait plus de nuisances que la station-service exploitée jusqu'alors.
Pour le reste, le recourant ne fait pas valoir que le dommage remplirait les
conditions d'une expropriation des droits de voisinage.

8.
Dans un dernier grief, le recourant fait valoir que l'arrêt attaqué est entaché
d'arbitraire pour plusieurs motifs. Trois de ces motifs (une éventuelle
diminution de la valeur de la parcelle conservée par le recourant, les "pertes
d'exploitations liées à la station-service" et la prétendue absence de prise en
considération de certains éléments de la station-service dans le calcul de sa
valeur vénale) ont déjà fait l'objet d'un examen, à l'issue duquel il apparaît
que l'arrêt attaqué est conforme au droit applicable sur ces questions; quant
au résultat lui-même, il ne se révèle pas choquant. Le dernier motif pour
lequel le recourant se plaint d'arbitraire est la prise en compte d'un taux de
vétusté de 19,6 % dans la détermination de la valeur vénale de la
station-service, en lieu et place des 10 % évoqués lors d'une première
évaluation. Cette manière de faire ne serait pas acceptable, dès lors que
l'expert mandaté par la CFE, à l'inverse du premier "expert", n'aurait pas vu
de ses propres yeux la station-service, déjà détruite lors de l'exécution de
son mandat.

8.1. Selon la jurisprudence, une décision est arbitraire lorsqu'elle est
manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe
juridique clair et indiscuté, ou heurte de manière choquante le sentiment de la
justice et de l'équité; il ne suffit pas qu'une autre solution paraisse
concevable, voire préférable, pour que cette décision soit annulée, encore
faut-il qu'elle se révèle arbitraire non seulement dans ses motifs, mais aussi
dans son résultat (ATF 138 III 378 consid. 6.1 p. 380; 137 I 1 consid. 2.4; 136
I 316 consid. 2.2.2 et les réf. citées).

8.2. Le Tribunal administratif fédéral a constaté que le taux de vétusté de
19,6 % était "soutenable" au vu du bon état des installations et de l'âge de la
construction (1987). Cette motivation est certes sommaire, mais cette
appréciation n'apparaît pas pour autant arbitraire. Il est au contraire
parfaitement pertinent de tenir compte de l'état du bâtiment et de son âge
(apprécié notamment par rapport à sa durée de vie). De ce point de vue, un taux
de vétusté de 19,6 % apparaît même particulièrement favorable par rapport aux
tabelles relatives à l'estimation des immeubles (cf. SVKG Schweizerische
Vereinigung kantonaler Grundstückbewertungsexperten, SEK/SVIT
Schätzungsexperten-Kammer, Das Schweizerische Schätzerhandbuch: Bewertung von
Immobilien, 2005, p. 250; cf. aussi Francesco Canonica, Schätzerlehrgang,
Grundwissen, Schweiz. Immobilienschätzer-Verband, éd. 2000, p. 153). Le
recourant fait valoir pour seul argument qu'une première évaluation effectuée
lors des premiers pourparlers retenait un taux bien inférieur, sans toutefois
exposer quels critères objectifs devraient conduire à préférer ce taux à celui
de l'expertise judiciaire. Dans ces conditions, sa critique est purement
appellatoire et il n'y a aucun motif de s'écarter de l'appréciation du Tribunal
administratif fédéral, qui n'est pas entachée d'arbitraire.

9.
Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté, aux frais du
recourant, qui succombe (art. 116 al. 3 LEx et 66 al. 1 LTF). Il n'est pas
alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 10'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties, à la Commission
fédérale d'estimation du 1er arrondissement et au Tribunal administratif
fédéral, Cour I.

Lausanne, le 7 août 2013
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Fonjallaz

La Greffière: Sidi-Ali

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