Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 590/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
9C_590/2009

Arrêt du 26 mars 2010
IIe Cour de droit social

Composition
MM. et Mme les Juges Borella, Juge présidant,
Seiler et Pfiffner Rauber.
Greffier: M. Piguet.

Parties
T.________,
représenté par Me Alain Ribordy, avocat,
recourant,

contre

Groupe Mutuel Prévoyance, Rue du Nord 5, 1920 Martigny,
intimée.

Objet
Prévoyance professionnelle,

recours contre le jugement de la Cour des assurances sociales du Tribunal
cantonal du canton de Fribourg du 3 juin 2009.

Faits:

A.
Par jugement du 21 février 2008, la Cour des assurances sociales du Tribunal
cantonal du canton de Fribourg a rejeté la demande de prestations d'invalidité
de la prévoyance professionnelle déposée le 11 juillet 2006 par T.________ à
l'encontre de la fondation Groupe Mutuel Prévoyance. Saisi par l'assuré d'un
recours contre ce jugement, le Tribunal fédéral l'a annulé. Considérant que la
fondation Groupe Mutuel Prévoyance était en principe tenue d'allouer ses
prestations, il a renvoyé la cause à la juridiction cantonale pour qu'elle
examine les autres aspects du droit aux prestations d'invalidité (arrêt 9C_335/
2008 du 30 septembre 2008).

B.
A la suite de cet arrêt, la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal a
repris l'instruction de la cause. Lors de l'échange d'écritures qui s'en est
suivi, T.________ a acquiescé aux propositions formulées par la fondation
Groupe Mutuel Prévoyance quant aux montants des prestations dues et aux
modalités de leur versement. Par jugement du 3 juin 2009, la juridiction
cantonale a pris acte de l'accord intervenu entre les parties, constaté que la
demande était devenue sans objet et rayé la cause du rôle. Elle a alloué à
l'assuré une équitable indemnité de 3'012 fr. 80, TVA comprise, pour l'ensemble
de la procédure cantonale à charge de la fondation Groupe Mutuel Prévoyance.

C.
T.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement.
Il conclut à son annulation et au renvoi de la cause à la Cour des assurances
sociales du Tribunal cantonal pour nouvelle décision, en tant que le jugement
porte sur le montant des dépens alloués pour l'ensemble de la procédure
cantonale. Il demande que lui soient versés 2'000 fr. à titre de dépens pour la
procédure fédérale.
La fondation Groupe Mutuel Prévoyance conclut principalement à l'irrecevabilité
du recours et subsidiairement à son rejet. L'Office fédéral des assurances
sociales a renoncé pour sa part à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
1.1 L'intimée conclut à l'irrecevabilité du recours, faute d'épuisement des
voies de droit cantonal. Selon l'art. 148 al. 1 du Code fribourgeois de
procédure et de juridiction administrative du 23 mai 1991 (CPJA; RSF 150.1), la
fixation du montant des frais de procédure, de l'indemnité de partie ou de
l'indemnité allouée au défenseur désigné doit faire l'objet d'une réclamation
auprès de l'autorité qui a statué, lorsque seule cette partie de la décision
est contestée.

1.2 En matière de prévoyance professionnelle, la procédure de première instance
est gouvernée par le principe de célérité. Ce principe est consacré à l'art. 73
al. 2 LPP qui exige des cantons que la procédure soit simple et rapide; il
constitue l'expression d'un principe général du droit des assurances sociales.
En vertu de ce principe, le Tribunal fédéral des assurances et la Cour des
assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Fribourg ont jugé que le
droit cantonal de procédure ne pouvait prévoir, en matière d'assurances
sociales, plusieurs instances de recours habilitées à connaître des litiges
relatifs aux dépens de la procédure cantonale (ATF 110 V 54 consid. 4b p. 61;
arrêt de la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de
Fribourg du 25 septembre 1992 consid. 3, in RFJ 1993 p. 410). Il s'ensuit que
la voie de la réclamation au sens de l'art. 148 al. 1 CPJA n'est pas ouverte
dans le présent litige. L'exigence de l'épuisement des voies de droit cantonal
est par conséquent respectée.

2.
2.1 Selon l'art. 42 al. 1 LTF, les mémoires doivent indiquer les conclusions
des parties. Le recours en matière de droit public des art. 82 ss LTF étant une
voie de réforme (art. 107 al. 2 LTF), la partie recourante ne peut en principe
pas se borner à demander l'annulation de la décision attaquée et le renvoi de
la cause à l'instance cantonale; elle doit également, sous peine
d'irrecevabilité, prendre des conclusions sur le fond du litige (cf. ATF 133 II
409 consid. 1.4 p. 414). Les conclusions portant sur une somme d'argent doivent
être chiffrées; si, d'après les conclusions présentées, le Tribunal fédéral est
requis de fixer lui-même le montant réclamé - respectivement à payer -, le
recours est irrecevable; des conclusions non chiffrées ne suffisent que si la
somme déterminante est d'emblée reconnaissable au regard de la motivation du
recours ou de la décision attaquée (cf. ATF 134 III 235 consid. 2 p. 236). Il
n'est fait exception à l'obligation de prendre des conclusions sur le fond que
lorsque le Tribunal fédéral, en cas d'admission du recours, ne serait pas en
situation de statuer lui-même à ce sujet et ne pourrait que renvoyer la cause à
l'autorité cantonale (question laissée ouverte dans l'ATF 134 III 379 consid.
1.3 p. 383).

2.2 Le recourant conclut formellement, dans un litige portant sur la quotité
des dépens de la procédure cantonale, au renvoi de la cause à la juridiction
cantonale pour qu'elle statue à nouveau. Une telle conclusion n'est en principe
pas recevable. Dans la mesure toutefois où la question litigieuse ressortit
exclusivement au droit cantonal de procédure (cf. infra consid. 3.1), le
Tribunal fédéral - qui ne peut examiner la question que sous l'angle de
l'arbitraire - n'est en principe pas habilité à statuer lui-même sur le fond.
La conclusion en renvoi formulée par le recourant est donc suffisante pour
entrer en matière sur le recours.

3.
3.1 Contrairement aux autres branches des assurances sociales, la législation
en matière de prévoyance professionnelle ne contient aucune disposition
relative à la fixation des dépens pour la procédure devant le tribunal cantonal
désigné pour connaître des litiges en matière de prévoyance professionnelle
(cf. art. 73 al. 2 LPP). En particulier, l'art. 61 let. g LPGA n'est pas
applicable par analogie, la LPGA ne trouvant pas application dans le domaine de
la prévoyance professionnelle (art. 2 LPGA; cf. ULRICH MEYER-BLASER, Allgemeine
Rechtsgrundsätze und ATSG, in Sozialversicherungsrechtstagung 2002, p. 143). Il
appartient par conséquent au droit cantonal de procédure de déterminer si et à
quelles conditions il existe un droit à une indemnité de dépens (arrêt B 15/05
du 29 mars 2006 consid. 9.1 et 11.1.1, in SVR 2006 BVG n° 26 p. 98).

3.2 Sauf dans les cas cités expressément à l'art. 95 LTF, le recours en matière
de droit public ne peut pas être formé pour violation du droit cantonal en tant
que tel. Par contre, il est possible de faire valoir que la mauvaise
application du droit cantonal constitue une violation du droit fédéral, en
particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 133 III 462
consid. 2.3 p. 466).

3.3 Une décision est arbitraire, au sens de l'art. 9 Cst., lorsqu'elle est
manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe
juridique clair et indiscuté, ou heurte de manière choquante le sentiment de la
justice et de l'équité; il ne suffit pas qu'une autre solution paraisse
concevable, voire préférable; pour que cette décision soit annulée, encore
faut-il qu'elle se révèle arbitraire non seulement dans ses motifs, mais aussi
dans son résultat, ce qu'il appartient à la partie recourante de démontrer (ATF
134 I 263 consid. 3.1 p. 265). En matière d'indemnité de dépens, l'arbitraire
peut se présenter sous deux formes; d'une part, lorsqu'il y a violation grave
et claire des prescriptions cantonales déterminantes pour la fixation de
l'indemnité; d'autre part, lorsqu'il y a exercice insoutenable du pouvoir
d'appréciation consenti par le droit fédéral et cantonal. Il y a abus de ce
pouvoir lorsque l'autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir qui lui
est confié, se laisse guider par des considérations non objectives, étrangères
au but des prescriptions applicables ou lorsqu'elle viole des principes
généraux du droit. Dans ce contexte, l'interdiction de l'arbitraire implique
que la rémunération de l'avocat demeure dans un rapport raisonnable avec
l'activité effectivement fournie et objectivement nécessaire à
l'accomplissement du mandat, et ne contredise pas d'une manière grossière le
sentiment de la justice (ATF 93 I 116 consid. 5).

4.
4.1 Le recourant reproche à la juridiction cantonale d'avoir fait preuve
d'arbitraire dans l'application du droit cantonal en n'appliquant pas les
dispositions prévues par celui-ci en matière de fixation des dépens.

4.2 En droit fribourgeois, les contestations en matière de prévoyance
professionnelle doivent être réglées par la voie de l'action de droit
administratif au sens des art. 121 ss CPJA (cf. art. 3a de l'Arrêté du 3
octobre 1983 concernant la mise en vigueur et l'introduction de la loi fédérale
du 25 juin 1982 sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et
invalidité [RSF 841.4.12]; Jaïco Carranza/Micotti, Code de procédure et de
juridiction administrative fribourgeois annoté, n° 121.10 ad art. 121 CPJA). En
vertu de l'art. 137 al. 1 CPJA, en cas de recours, de révision ou
d'interprétation devant une autorité statuant en dernière instance cantonale et
en cas d'action, l'autorité de la juridiction administrative alloue, sur
requête, à la partie qui obtient gain de cause une indemnité pour les frais
nécessaires qu'elle a engagés pour la défense de ses intérêts. D'après les
dispositions du Tarif des frais de procédure et des indemnités en matière de
juridiction administrative du 17 décembre 1991 (RSF 150.12), les honoraires
alloués pour la représentation ou l'assistance de la partie sont fixés entre
200 et 5'000 fr. Dans les affaires d'une ampleur ou d'une complexité
particulière, le maximum s'élève à 20'000 fr. (art. 8 al. 1). Le montant des
honoraires est fixé compte tenu du temps et du travail requis, de l'importance
de l'affaire ainsi que, dans les affaires de nature pécuniaire, de la valeur
litigieuse en cause (art. 11 al. 2). En cas d'action, les honoraires sont fixés
conformément aux art. 4 et 5 du Tarif des honoraires et débours d'avocat dus à
titre de dépens en matière civile du 28 juin 1988 (RSF 137.21), soit sur la
base d'un tarif horaire de 230 fr., majoré d'un pourcentage variable en
fonction de la valeur litigieuse (art. 8 al. 2). Sous réserve des exceptions
évoquées, les débours nécessaires à la conduite de l'affaire sont quant à eux
remboursés au prix coûtant (art. 9; voir également Josef Hayoz, Das
Klageverfahren vor dem Verwaltungsgericht des Kantons Freiburg, RFJ 1996 p.
323).

4.3 La Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal a considéré que le
recours à la valeur litigieuse pour fixer le montant des dépens alloués, telle
qu'elle est utilisée en procédure civile, ne pouvait être transposé en droit
des assurances sociales. Selon la jurisprudence fédérale, les honoraires
d'avocat doivent être fixés en fonction de l'importance et de la difficulté du
litige ainsi que d'après le travail et le temps que l'avocat a dû y consacrer.
Pour apprécier l'importance de la cause, la valeur litigieuse, telle qu'elle se
détermine selon le droit de la procédure civile, n'est pas décisive. Il
convient en effet de tenir compte du fait que le procès en matière d'assurances
sociales est gouverné par la maxime inquisitoire, ce qui, dans de nombreux cas,
est de nature à faciliter la tâche de l'avocat. Dès lors, il se justifiait de
s'écarter de la liste de frais présentée par le mandataire du recourant et,
compte tenu des seules opérations strictement nécessaires ainsi que de
l'importance et de la difficulté de l'affaire, de fixer équitablement
l'indemnité à 2'800 fr., plus 212 fr. 80 au titre de la TVA, soit un montant
total de 3'012 fr. 80.

4.4 Comme relevé plus haut (cf. supra consid. 3.1), il appartient en premier
lieu au droit cantonal de procédure de déterminer les principes applicables à
la fixation des dépens pour la procédure devant la juridiction cantonale
désignée pour connaître des litiges en matière de prévoyance professionnelle.
Contrairement à ce qu'affirme la Cour des assurances sociales du Tribunal
cantonal, il n'existe pas de principes généraux relevant du droit des
assurances sociales qui permettraient, en matière de prévoyance
professionnelle, de s'écarter des dispositions topiques du droit cantonal
applicables au cas d'espèce. En cas de disproportion manifeste entre les dépens
dus selon les art. 4 et 5 du Tarif des honoraires et débours d'avocat dus à
titre de dépens en matière civile et le travail effectif fourni par l'avocat,
la juridiction cantonale a toutefois la possibilité, dans le cadre du large
pouvoir d'appréciation dont elle dispose, d'opérer une réduction du montant des
dépens pour que celui-ci soit plus en rapport avec les prestations de l'avocat
(pour un cas d'application, arrêt 2D_12/2009 du 18 juin 2009 consid. 5.5). Dans
ce contexte, elle peut alors s'inspirer de critères tels que l'importance et la
complexité de la cause, l'ampleur du travail fourni ou le temps que l'avocat a
consacré à l'affaire. Cela étant, en fixant dans le cas d'espèce en équité le
montant de l'indemnité de dépens due au recourant, la juridiction cantonale a
ignoré le droit cantonal applicable et, partant, fait preuve d'arbitraire.

4.5 La solution retenue par la juridiction cantonale aboutit également à un
résultat choquant. Comme le relève à juste titre le recourant, la motivation du
jugement entrepris ne permet pas de connaître le tarif horaire appliqué ni le
temps admis comme nécessaire à la conduite du procès. Or, que l'on se réfère à
la première note de frais produite, laquelle mentionnait 22 heures 30 de
travail effectué, ou à la seconde note, laquelle mentionnait 40 heures 15 de
travail effectué, les tarifs horaires qui en résultent, soit 134 fr. et 75 fr.,
sont de loin inférieurs au tarif de base de 230 fr. prévu dans le Tarif des
honoraires et débours d'avocat dus à titre de dépens en matière civile ou au
tarif horaire que le Tribunal fédéral a posé comme règle de base pour les
indemnités allouées au titre de l'assistance judiciaire (180 fr.; ATF 132 I 201
consid. 8 p. 213; voir également ATF 131 V 153 consid. 7 p. 159 et les
références; cf. art. 1 al. 2 du Tarif concernant les indemnités allouées aux
défenseurs en matière d'assistance judiciaire au civil et au pénal et d'aide
aux victimes d'infractions du 14 juin 2000 [RSF 136.12]).

4.6 Le jugement attaqué est également arbitraire, dans la mesure où il ne tient
pas compte dans le calcul de l'indemnité de partie des débours nécessaires à la
conduite de l'affaire (art. 9 du Tarif des frais de procédure et des indemnités
en matière de juridiction administrative).

5.
5.1 Pour l'ensemble de ces motifs, le chiffre 3 du dispositif du jugement
attaqué doit être annulé et le dossier renvoyé à la juridiction cantonale pour
nouvelle décision sur les dépens en procédure cantonale.

5.2 Il n'y a pas lieu de percevoir de frais judiciaires (art. 66 al. 4 LTF). Le
recourant, qui obtient gain de cause, a droit à une indemnité de dépens à la
charge de l'intimée (art. 68 al. 1 et 2 ainsi qu'art. 107 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis et le chiffre 3 du dispositif du jugement de la Cour des
assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Fribourg du 3 juin 2009
est annulé, la cause étant renvoyée à l'autorité judiciaire de première
instance pour qu'elle statue à nouveau en procédant conformément aux
considérants.

2.
L'intimée versera au recourant la somme de 2'000 fr. à titre de dépens pour la
dernière instance.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour des assurances sociales
du Tribunal cantonal du canton de Fribourg et à l'Office fédéral des assurances
sociales.

Lucerne, le 26 mars 2010
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Juge présidant: Le Greffier:

Borella Piguet