Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 422/2009
Zurück zum Index II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2009
Retour à l'indice II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2009


Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
9C_422/2009

Arrêt du 12 novembre 2009
IIe Cour de droit social

Composition
MM. les Juges U. Meyer, Président,
Kernen et Seiler.
Greffière: Mme Moser-Szeless.

Parties
M.________, représentée par Me Olivier Carrard, avocat,
recourante,

contre

Office cantonal genevois de l'assurance-invalidité, rue de Lyon 97, 1203
Genève,
intimé.

Objet
Assurance-invalidité,

recours contre le jugement du Tribunal cantonal des assurances sociales de la
République et canton de Genève du 19 mars 2009.

Faits:

A.
M.________, ressortissante étrangère née en 1957, est arrivée en Suisse en août
2003 où elle s'est mariée le 18 de ce mois. Une année plus tard, le 6 août
2004, elle a présenté une demande de prestations de l'assurance-invalidité, en
indiquant souffrir de poliomyélite depuis son plus jeune âge; par la suite,
elle a précisé être incapable de travailler en raison d'une chute survenue le 4
novembre 2003. L'Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève
(ci-après: l'office AI) a, parmi d'autres avis médicaux, recueilli celui du
docteur J.________, médecin traitant. Dans un rapport du 11 janvier 2007, ce
médecin a diagnostiqué une déchirure du tendon sus-épineux de l'épaule droite
sur chute depuis le 4 novembre 2003, des séquelles d'une poliomyélite survenue
à l'âge d'un an et demi avec troubles de la statique rachidienne et troubles de
la marche depuis 1958, des troubles dysthymiques depuis 2004, ainsi que,
également depuis 2004, une périarthrite de la hanche gauche et un syndrome
radiculaire L3-L4 D sur discopathie. Il a conclu que ces atteintes justifiaient
une incapacité de travail partielle (quatre heures d'activité par jour) dans
l'activité habituelle (vendeuse dans la confection) comme dans une activité
telle que réceptionniste, téléphoniste ou vendeuse. Par décision du 4 juin
2008, l'office AI a rejeté la demande de l'intéressée, au motif que les
conditions d'assurance n'étaient pas réalisées, puisque l'invalidité était
survenue antérieurement à l'entrée en Suisse.

B.
M.________ a déféré cette décision au Tribunal cantonal des assurances sociales
de la République et canton de Genève, qui l'a déboutée le 19 mars 2009.

C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, M.________ conclut,
sous suite de frais et dépens, à l'annulation du jugement cantonal et à
l'octroi d'une rente entière d'invalidité à partir du 6 février 2005. A titre
subsidiaire, elle demande le renvoi de la cause au Tribunal cantonal genevois
des assurances sociales pour qu'il fasse droit aux conclusions prises en
instance cantonale.

L'office AI conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des
assurances sociales a renoncé à se déterminer.
Considérant en droit:

1.
1.1 Au regard des conclusions du recours (cf. art. 107 al. 1 LTF), le litige
porte sur le droit de M.________ à une rente entière d'invalidité à partir du 6
février 2005. Cette prétention doit être examinée à l'aune des dispositions
légales en vigueur au moment des faits déterminants, soit des normes de la LAI
en vigueur jusqu'au 31 décembre 2007 et non pas des dispositions modifiées au
1er janvier 2008 par la novelle du 6 octobre 2006 (5e révision AI), comme
semble le croire la recourante en invoquant l'art. 29 al. 1 LAI dans sa version
modifiée (cf. ATF 130 V 445 consid. 1.2.1 p. 447).

1.2 En vertu de l'art. 36 al. 1 LAI, ont droit aux rentes ordinaires de
l'assurance-invalidité les assurés qui, lors de la survenance de l'invalidité,
comptent une année entière au moins de cotisations, soit personnellement, soit
par le biais de leur conjoint lorsque celui-ci a versé au moins le double de la
cotisation minimale (art. 29ter al. 2 LAVS en relation avec l'art. 32 al. 1 RAI
et 50 RAVS). Selon l'art. 4 al. 2 LAI, l'invalidité est réputée survenue dès
qu'elle est, par sa nature et sa gravité, propre à ouvrir droit aux prestations
entrant en considération. S'agissant du droit à une rente, la survenance de
l'invalidité se situe au plus tôt à la date dès laquelle l'assuré a présenté,
en moyenne, une incapacité de travail de 40 % au moins pendant une année sans
interruption notable (art. 29 al. 1 let. b LAI, l'éventualité prévue à la let.
a n'étant pas pertinente ici).

1.3 Dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 janvier 2000, l'art. 6 al. 1 LAI
contenait une clause d'assurance: les ressortissants suisses et étrangers ainsi
que les apatrides avaient droit aux prestations conformément aux dispositions
de la LAI, s'ils étaient assurés lors de la survenance de l'invalidité. L'art.
6 al. 1 LAI a été modifié avec effet au 1er janvier 2001 en ce sens que la
clause d'assurance a été supprimée. Selon l'art. 6 al. 2 LAI, le droit aux
prestations des étrangers qui sont originaires d'un pays avec lequel la Suisse
n'a pas conclu de convention de sécurité sociale reste cependant soumis à
l'exigence que l'ayant droit compte, lors de la survenance de l'invalidité, au
moins une année entière de cotisations (ou dix ans de résidence ininterrompue
en Suisse).

2.
2.1 L'issue du litige dépend du point de savoir si et, le cas échéant, à partir
de quand les atteintes à la santé de la recourante ont entraîné une incapacité
de travail (au sens de l'art. 6 LPGA) dans une mesure de 40 % au moins pendant
une année sans interruption notable. Une fois déterminée la date de la
survenance d'une éventuelle invalidité, il convient encore d'examiner si la
condition de la durée de cotisations d'une année était alors réalisée. Il
s'agit là de questions de fait qui sont soumises au pouvoir d'examen limité du
Tribunal fédéral (cf. ATF 132 V 393 consid. 3.2 p. 397). Selon l'art. 105 al. 1
LTF, le tribunal statue sur la base des faits établis par l'autorité
précédente. Le recourant ne peut critiquer les constatations de faits que si
ceux-ci ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du
droit au sens de l'art. 95 LTF. La violation peut consister en un état de faits
incomplet, car l'autorité précédente viole le droit matériel en n'établissant
pas tous les faits pertinents pour l'application de celui-ci (ATF 134 V 53
consid. 4.3 p. 62 et les références).

2.2 La juridiction cantonale a d'abord constaté que "la poliomyélite et ses
séquelles remontent à une période située bien avant [l']arrivée en Suisse".
Elle a ensuite considéré que comme les suites de l'accident du 4 novembre 2003,
"si tant est qu'elles justifient une invalidité d'au moins 40 pour cent",
étaient survenues en tout cas avant le 17 août 2004, elles ne pouvaient entrer
en ligne de compte puisque lors de la survenance du cas d'assurance, l'époux de
la recourante ne pouvait pas avoir cotisé une année depuis la date du mariage.
Quant aux autres syndromes apparus en 2005, ils n'étaient pas pertinents, selon
les premiers juges, parce qu'il n'y avait pas eu d'interruption notable de
l'incapacité de gain avant leur apparition.

2.3 A la lecture de ces considérations, il apparaît que le jugement entrepris
ne comprend aucune constatation de fait pertinente sur les points déterminants
du litige. En premier lieu, la constatation selon laquelle la poliomyélite dont
est atteinte la recourante et ses séquelles remontent à une période antérieure
à son arrivée en Suisse ne dit rien encore sur le point de savoir si et, le cas
échéant, quand cette atteinte aurait entraîné une incapacité de travail
déterminante du point de vue du droit à la rente et, partant, quand serait
survenue l'invalidité liée à la pathologie mentionnée. A cet égard, il ressort
(par exemple) du rapport du Service médical régional AI du 10 décembre 2007 que
la recourante avait travaillé à plein temps en France jusqu'à son licenciement
pour des motifs économiques en 2001. En second lieu, sans faire de constatation
relative à la date à laquelle correspondait "la survenance du cas d'assurance"
évoquée en relation avec l'événement du 4 novembre 2003, l'autorité cantonale
de première instance a écarté de son examen les suites de l'accident au motif
qu'elles seraient de toute façon survenues avant le 17 août 2004. Ce faisant,
elle ne s'en est pas tenue à la définition de la survenance de l'invalidité au
sens rappelé ci-avant (consid. 1.2 supra). A supposer en effet que la chute du
4 novembre 2003 ait entraîné une incapacité de travail de 40 % en moyenne, la
survenance de l'invalidité se situerait, conformément à l'art. 29 al. 1 let. b
LAI, une année plus tard, soit le 4 novembre 2004. A ce moment-là, compte tenu
de la date de mariage de la recourante (le 18 août 2003), son époux - qui,
selon les constatations des premiers juges avait versé des cotisations AVS/AI
supérieures au double de la cotisation minimale notamment du mois d'août 2002
au mois de décembre 2004 - avait cotisé pendant plus d'une année.

Par conséquent, le raisonnement de la juridiction cantonale consistant à
écarter la prétention de la recourante au motif qu'elle ne pouvait se prévaloir
du versement de cotisations par son époux durant une année au moment de la
survenance de l'invalidité est erroné. De même, ses considérations liées à
l'absence d'interruption notable de l'incapacité de gain en rapport avec les
syndromes apparus en 2005 ne peuvent pas non plus être suivies, à défaut, déjà,
de reposer sur des constatations suffisantes quant à l'existence d'une
incapacité de gain, de l'étendue de celle-ci et de la date de sa survenance.

2.4 Au vu de ce qui précède, il apparaît que c'est sur la base d'un état de
fait incomplet que la juridiction cantonale a nié le droit de la recourante à
une rente d'invalidité à partir du 6 février 2005. Il convient donc d'annuler
le jugement attaqué et de renvoyer la cause à la juridiction cantonale pour
qu'elle établisse les faits d'une manière conforme au droit, puis rende une
nouvelle décision.

3.
Compte tenu de l'issue du litige, les frais judiciaires seront supportés par
l'intimé, qui succombe. La recourante a par ailleurs droit à une indemnité de
dépens à la charge de l'administration (art. 68 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis et le jugement du Tribunal cantonal des assurances de la
République et canton de Genève du 19 mars 2009 est annulé, la cause lui étant
renvoyée pour nouveau jugement au sens des motifs.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de l'intimé.

3.
L'intimé versera à la recourante une indemnité de 2800 fr. à titre de dépens
pour la procédure fédérale.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et canton de Genève et à l'Office fédéral
des assurances sociales.

Lucerne, le 12 novembre 2009
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Meyer Moser-Szeless