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II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 317/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
9C_317/2009

Arrêt du 19 avril 2010
IIe Cour de droit social

Composition
MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffière: Mme Moser-Szeless.

Participants à la procédure
Caisse cantonale genevoise de compensation, route de Chêne 54, 1208 Genève,
recourante,

contre

F.________,
intimée,

Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève, rue de Lyon 97, 1203
Genève.

Objet
Assurance-vieillesse et survivants,

recours contre le jugement du Tribunal cantonal des assurances sociales de la
République et canton de Genève du 27 février 2009.

Faits:

A.
F.________, née en 1942, est atteinte d'une sclérose en plaques depuis 1989.
L'Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après: l'office AI)
lui a reconnu le droit à une demi-rente d'invalidité à partir du 1er juillet
1992, puis à une rente entière dès le 1er juillet 1993 et lui a accordé divers
moyens auxiliaires (scooter électrique [décision du 14 décembre 2001];
déambulateur [décision du 24 août 2004]; fauteuil roulant manuel, nouveaux
scooter électrique et déambulateur, décisions du 4 mai 2006).

Depuis le 1er août 2006, F.________ est au bénéfice d'une rente de
l'assurance-vieillesse et survivants. Par courrier daté du 30 juin 2008, elle a
requis la prise en charge d'un aménagement de sa baignoire, en se référant à un
avis de son médecin traitant selon lequel son état de santé nécessitait une
telle mesure en raison de l'infirmité des membres inférieurs consécutive à sa
maladie (rapport du docteur S.________ du 27 juin 2008). Par décision du 7
juillet 2008, confirmée sur opposition le 9 septembre suivant, la Caisse
cantonale genevoise de compensation (ci-après: la caisse) a rejeté la demande,
au motif que la transformation envisagée ne figurait pas parmi les moyens
auxiliaires auxquels l'assurée pouvait prétendre.

B.
Statuant le 27 février 2009 sur le recours formé par F.________, le Tribunal
cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève l'a
admis; il a annulé les décisions des 7 juillet et 9 septembre 2008 et renvoyé
la cause à la caisse pour nouvelle décision au sens des considérants.

C.
La caisse interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement,
dont elle requiert l'annulation. Invités à se déterminer, F.________ conclut au
rejet du recours, tandis que l'office AI en propose l'admission et l'Office
fédéral des assurances sociales renonce à s'exprimer.

Considérant en droit:

1.
Le dispositif du jugement entrepris a pour objet l'annulation de la décision
sur opposition litigieuse et le renvoi du dossier à la caisse pour nouvelle
décision au sens des considérants. Dès lors qu'il renvoie le dossier à
l'administration pour qu'elle mette en oeuvre une procédure d'instruction et se
prononce à nouveau, le jugement entrepris doit être qualifié de décision
incidente qui peut être attaquée aux conditions de l'art. 93 LTF.

Dans les considérants auquel renvoie le dispositif de l'arrêt attaqué, la
juridiction cantonale a admis dans son principe le droit de l'intimée aux
moyens auxiliaires requis. Il s'agit dès lors d'un arrêt de renvoi qui ne
laisse plus de latitude de jugement à l'administration sur l'un des aspects du
droit litigieux à des prestations d'assurance. Aussi, la caisse serait-elle
tenue de rendre une décision qui, selon elle, est contraire au droit fédéral.
En cela, elle subit un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a
LTF (cf. ATF 134 III 188 consid. 2.1 p. 190; 133 V 477 consid. 5.2.1 p. 483 et
les arrêts cités). Il convient dès lors d'entrer en matière sur le recours.

2.
Selon les constatations de la juridiction cantonale, qui lient le Tribunal
fédéral (art. 105 al. 1 LTF), l'intimée avait déjà atteint l'âge donnant droit
à une rente AVS (art. 21 al. 1 let. b LAVS) au moment du dépôt de sa demande de
prestation, le 30 juin 2008. La prise en charge de l'aménagement requis de la
baignoire par l'assurance-invalidité n'entre dès lors pas en ligne de compte
(art. 10 al. 3 LAI dans sa version en vigueur à partir du 1er janvier 2008; cf.
art. 10 al. 1 aLAI) et doit être examinée au regard des seules dispositions du
droit de l'AVS relatives aux moyens auxiliaires. Dans ce cadre, il n'est pas
contesté que le type de prestation en cause n'est pas mentionné dans la liste
des moyens auxiliaires accordés par l'AVS en vertu de l'art. 2 de l'Ordonnance
concernant la remise de moyens auxiliaires par l'assurance-vieillesse du 28
août 1978 (OMAV; RS 831.135.1) et de l'annexe à l'OMAV, en relation avec l'art.
43ter LAVS (dispositions dont la teneur a été correctement exposée dans le
jugement entrepris auquel on peut renvoyer). Est dès lors seul litigieux le
point de savoir si l'intimée pourrait prétendre à la prestation requise en
application de l'art. 4 OMAV, lequel règle le droit aux prestations lorsque les
moyens auxiliaires ont déjà été accordés par l'assurance-invalidité.

3.
3.1 Aux termes de l'art. 4 OMAV, les bénéficiaires d'une rente de vieillesse
domiciliés en Suisse qui bénéficient de moyens auxiliaires ou de contributions
aux frais au sens des art. 21 et 21bis LAI au moment où ils peuvent prétendre
une rente AVS, continuent d'avoir droit à ces prestations dans la même mesure,
tant que les conditions qui présidaient à leur octroi sont remplies et autant
que la présente ordonnance n'en dispose pas autrement. Pour le reste, les
dispositions de l'assurance-invalidité sont applicables par analogie.

3.2 Interprétant l'art. 4 OMAV au regard de son but et de l'ATF 106 V 10 (infra
consid. 4.3), la juridiction cantonale a considéré en substance que cette
disposition assurait la remise de moyens auxiliaires correspondant à l'état de
santé de l'assuré, à tout le moins quand l'invalidité constatée avant l'âge de
la retraite était due à une affection qui se caractérisait par un accroissement
progressif du handicap éprouvé, indépendamment des facteurs de vieillissement.
Retenant que les droits de l'assurée devaient être examinés de la même manière
avant et après l'âge de la retraite, elle a admis que l'intimée, qui était
atteinte d'une maladie neurologique dont l'évolution inexorable était
indépendante de l'âge, avait droit aux moyens auxiliaires requis.

4.
4.1 Dans un arrêt H 230/01 du 10 janvier 2003 (confirmé par un arrêt H 247/04
du 29 septembre 2005), le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de se prononcer
sur la portée de l'art. 4 OMAV. D'après le sens littéral de l'art. 4 OMAV dans
les trois langues officielles, il faut retenir que l'AVS doit prendre en charge
seulement ceux des moyens auxiliaires auxquels les personnes assurées avaient
eu droit dans le cadre de l'AI et qui ne figurent pas sur la liste des moyens
auxiliaires de l'AVS. Cette interprétation est conforme à la ratio legis de
l'art. 4 OMAV qui a pour but de garantir aux assurés la même étendue de
prestations d'assurance au-delà de l'âge de la retraite que celle dont ils
avaient bénéficié antérieurement. La protection de la situation acquise s'étend
donc aux moyens auxiliaires qui ont effectivement été remis aux assurés dans la
limite temporelle prévue à l'art. 10 al. 1 aLAI (art. 10 al. 3 LAI depuis le
1er janvier 2008), même si, exceptionnellement, il a été admis qu'une personne
assurée ayant bénéficié d'un appareil monaural en application de la LAI peut
encore prétendre la remise d'un appareillage binaural une fois atteint l'âge de
la retraite (voir arrêt H 253/83 du 12 mars 1984 [RCC 1984 p. 238]).

4.2 Au regard de cette jurisprudence, l'interprétation de l'art. 4 OMAV à
laquelle a procédé la juridiction cantonale est par trop extensive et dépasse
le sens littéral et juridique de la norme. La lettre de l'art. 4 OMAV, en
particulier les termes "... bénéficient ..." ("... erhalten haben ..."; ...
assegnatari ...") et "... continuent d'avoir droit à ces prestations dans la
même mesure ..." ("... diese Leistungen in Art und Umfang ..."; "... continuano
ad averne diritto nella medesia misura ..."), signifie que l'AVS est tenue de
fournir seulement les moyens auxiliaires que l'assurance-invalidité avait déjà
accordés auparavant et qui ne sont pas mentionnés dans la liste des moyens
auxiliaires de l'AVS (arrêt H 230/01 du 10 janvier 2003 consid. 2.1 et 2.2 [SVR
2003 AHV n° 12 p. 31]).

Le but de la disposition n'est pas de conférer un droit pour la fourniture d'un
moyen auxiliaire s'adaptant à l'évolution de l'atteinte à la santé, mais
uniquement de maintenir le droit acquis précédemment, soit avant l'âge de la
retraite (arrêts H 247/04 du 29 septembre 2005 consid. 4.3 et H 176/05 du 30
janvier 2006). Aussi, l'interprétation des premiers juges, qui revient à
accorder à l'assurée un nouveau moyen auxiliaire, dont elle n'avait pas
bénéficié sous le régime de l'assurance-invalidité, étend la garantie des
droits acquis de manière contraire au sens et au but de l'art. 4 OMAV. A cet
égard, en tant que la juridiction cantonale a retenu que l'assurée avait obtenu
de l'assurance-invalidité la pose de deux poignées et d'une planche pour la
baignoire, ces constatations - dont elle ne tire au demeurant aucune
conséquence juridique - sont manifestement inexactes au sens de l'art. 97 al. 1
LTF. Comme le fait valoir à juste titre la recourante, elles ne reposent en
effet sur aucune pièce au dossier dont il ressortirait que l'office AI aurait
accordé de telles mesures à l'intimée. Lors de son audition en instance
cantonale, l'assurée a certes indiqué avoir obtenu deux poignées et une planche
pour sa baignoire, mais a cependant précisé ne plus se souvenir si elle en
avait bénéficié de la part de l'assurance-invalidité ou de l'assurance-maladie
(procès-verbal de comparution personnelle du 2 décembre 2008). Par ailleurs,
les décisions par lesquelles l'office AI a alloué à l'assurée des moyens
auxiliaires ne portaient pas sur des mesures d'"aménagements de la demeure de
l'assuré nécessités par l'invalidité" au sens du ch. 14.04 de la Liste des
moyens auxiliaires, annexée à l'Ordonnance concernant la remise de moyens
auxiliaires par l'assurance-invalidité du 29 novembre 1976 (OMAI; RS
831.232.51), dont aurait pu faire partie l'adaptation de la salle de bain/
baignoire requise en l'espèce.

4.3 Pour le reste, les considérations de la juridiction cantonale sur l'art. 6
OMAV et les raisons pour lesquelles son interprétation de l'art. 4 OMAV ne
constituerait pas "un écart" à la jurisprudence du Tribunal fédéral ne peuvent
être suivies. Le renvoi que fait l'art. 6 OMAV à la procédure d'instruction de
l'assurance-invalidité (art. 65 à 79bis RAI) applicable par analogie a pour but
d'assurer que la demande tendant à l'octroi d'un moyen auxiliaire de la LAVS
soit examinée dans une procédure d'instruction identique à celle qui est
applicable pour déterminer le droit à des prestations de
l'assurance-invalidité. Sous l'angle de l'art. 4 OMAV, il s'agit ainsi de
vérifier si les conditions présidant à l'octroi du moyen auxiliaire par
l'assurance-invalidité continuent à être remplies, notamment quant au besoin de
la mesure en question, afin de permettre le renouvellement ou le remplacement
par l'AVS du moyen auxiliaire acquis précédemment. Ce renvoi à la procédure de
l'assurance-invalidité ne peut en revanche conduire à étendre les droits de
l'assuré à des moyens auxiliaires hors du cadre prévu par l'OMAV.

Par ailleurs, en ce qui concerne la jurisprudence rappelée ci-avant (consid.
3.3 et 3.4 supra), il en découle clairement, quoi qu'en dise la juridiction
cantonale, que l'aggravation de l'état de santé de l'assuré - qu'elle soit ou
non directement due à l'évolution négative de l'atteinte à la santé à l'origine
de l'invalidité en tant que telle ou à des facteurs liés au vieillissement - ne
constitue pas un motif pour ouvrir à l'assuré le droit à un nouveau moyen
auxiliaire adapté à ce changement qui ne serait pas prévu par l'annexe à
l'OMAV, en vertu de l'art. 4 OMAV. Ainsi, il ressort des arrêts H 230/01 du 10
janvier 2003 consid. 2 (SVR 2003 AHV n° 12 p. 31) et H 247/04 du 29 septembre
2005 consid. 4.3 que la garantie de la situation acquise prévue par la
disposition d'exécution ne confère aucun droit à la fourniture d'un moyen
auxiliaire s'adaptant à l'évolution de l'atteinte à la santé. De même, dans
l'arrêt subséquent H 176/05 du 20 janvier 2006 consid. 3.1, le Tribunal fédéral
a expressément retenu qu'admettre que la garantie des droits acquis comprenne
des prestations dont l'assuré n'aurait besoin qu'en raison d'une péjoration de
son état de santé, une fois atteint l'âge de la retraite, outrepasserait le
sens de l'art. 4 OMAV. Que les arrêts mentionnés n'aient pas été publiés au
Recueil officiel comme le relève l'autorité judiciaire de première instance ne
change rien à leur pertinence.

Enfin, comme le soutient à juste titre la recourante, l'ATF 106 V 10 sur lequel
s'est fondée la juridiction cantonale pour retenir que les moyens auxiliaires
remis en vertu de la garantie des droits acquis devaient être adaptés à l'état
de santé de leur bénéficiaire et aux progrès techniques n'apporte aucun élément
en faveur de ses considérations. Dans cet arrêt rendu avant l'entrée en vigueur
de la norme en cause (qui a remplacé l'art. 21ter aLAI en vigueur jusqu'au 31
décembre 1978), le Tribunal fédéral a jugé que lors du remplacement d'un moyen
auxiliaire accordé avant la survenance de l'âge ouvrant le droit à une rente de
vieillesse, le modèle de remplacement (du même type que le moyen auxiliaire
initial) devait être adapté à l'état de santé actuel de l'intéressé ou même
correspondre à l'évolution de la technique éventuellement intervenue
entre-temps et pouvait donc être plus perfectionné que l'objet qu'il
remplaçait. Cette jurisprudence ne saurait s'appliquer en l'espèce, puisqu'il
ne s'agit pas en l'occurrence de se prononcer sur le remplacement d'un moyen
auxiliaire octroyé par l'assurance-invalidité par un modèle plus adapté à
l'évolution de l'état de santé de l'assurée, mais sur son droit à un nouveau
moyen auxiliaire, dont elle n'avait pas bénéficié sous le régime de la LAI.

5.
Il résulte de ce qui précède que le droit de l'intimée à la prestation
sollicitée ne saurait être reconnu en vertu de l'art. 4 OMAV. Le jugement
entrepris doit par conséquent être annulé. Partant, le recours se révèle bien
fondé.

6.
Vu l'issue de la procédure, l'intimée doit en supporter les frais (art. 66 al.
1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis et la décision du Tribunal cantonal des assurances
sociales de la République et canton de Genève du 27 février 2009 est annulée.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de l'intimée.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et canton de Genève et à l'Office fédéral
des assurances sociales.

Lucerne, le 19 avril 2010
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Meyer Moser-Szeless