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II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 309/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
9C_309/2009

Arrêt du 27 juillet 2009
IIe Cour de droit social

Composition
MM. et Mme les Juges U. Meyer, Président,
Kernen et Pfiffner Rauber.
Greffier: M. Scartazzini.

Parties
Office cantonal de l'assurance-invalidité,
rue de Lyon 97, 1203 Genève,
recourant,

contre

S.________,
intimée.

Objet
Assurance-invalidité,

recours contre le jugement du Tribunal cantonal des assurances sociales de la
République et canton de Genève du 25 février 2009.

Faits:

A.
S.________, née en 1970, a travaillé en dernier lieu à l'agence X.________
comme assistante de vente pendant cinq ans. Enceinte de son premier enfant,
elle a perdu son mari fin mars 2000. Selon un rapport du 21 mai 2000, établi
par le docteur P.________, spécialiste FMH en médecine interne et rhumatologie,
elle souffrait d'une fibromyalgie, d'attaques de panique et d'un état
dépressif. Par demande déposée en août 2000, l'intéressée a requis des
prestations de l'assurance-invalidité, en vue d'obtenir une rente. Dans un
rapport du 20 septembre 2000, le docteur A.________, psychiatre et médecin
traitant de l'assurée, a diagnostiqué un trouble mental dû à une lésion ou une
affection physique (F 06.9) et autres épisodes dépressifs (récurrents; F 32.8),
en estimant que la capacité de travail de sa patiente était nulle depuis
juillet 1999 et pour une durée indéterminée. Le docteur C.________,
médecin-conseil de l'Office cantonal de l'assurance-invalidité (ci-après:
OCAI), a considéré, dans un avis médical du 31 janvier 2001, ce qui suit: « Vu
les circonstances dramatiques vécues par cette assurée, on peut comprendre
qu'actuellement elle ne soit pas en état de reprendre une activité
professionnelle. (...) Voir dans deux ans l'évolution (doit continuer à se
traiter) ».

Par décisions du 18 mai et du 5 octobre 2001, l'OCAI a octroyé à l'assurée une
rente d'invalidité entière (degré d'invalidité de 64 % depuis le 10 septembre
2000 et de 100 % dès le 1er décembre 2000), ainsi qu'une rente complémentaire
pour enfant, à partir du 1er septembre 2000. En mars 2005, il a entamé une
procédure de révision, laquelle a abouti à la mise en oeuvre d'une expertise
psychiatrique effectuée par le docteur V.________, le 19 septembre 2007, et à
la décision de suppression de la rente du 14 mars 2008, avec effet au premier
jour du deuxième mois après la notification du prononcé.

B.
Saisi d'un recours contre cette décision, dans lequel l'assurée concluait au
rétablissement de son droit à la rente, le Tribunal cantonal des assurances
sociales de la République et canton de Genève l'a admis par jugement du 25
février 2009, en annulant le prononcé administratif.

C.
L'OCAI interjette un recours en matière de droit public. Il conclut à
l'annulation du jugement cantonal et à la confirmation de sa décision. A titre
préalable, il requiert que l'effet suspensif soit attribué à son recours.

S.________ conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des
assurances sociales (OFAS) en propose l'admission.

Considérant en droit:

1.
Le recours en matière de droit public (art. 82 ss LTF) peut être formé pour
violation du droit selon l'art. 95 sv. LTF. Le Tribunal fédéral statue en
principe sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al.
1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Cette disposition
lui donne la faculté de rectifier ou compléter d'office l'état de fait de
l'arrêt attaqué dans la mesure où des lacunes ou erreurs dans celui-ci lui
apparaîtraient d'emblée comme manifestes. Quant au recourant, il ne peut
critiquer la constatation des faits importants pour le jugement en cause que si
ceux-ci ont été constatés en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de
manière manifestement inexacte (art. 97 al. 1 LTF), ou lorsque l'appréciation
des preuves est arbitraire (ATF 134 V 53 consid. 4.3 p. 62, 120 Ia 31 consid.
4b p. 40, 118 Ia 28 consid. 1b p. 30).

2.
2.1 Pour maintenir le droit de l'intimée à la rente d'invalidité, la
juridiction cantonale s'est éloignée de l'expertise psychiatrique effectuée par
le docteur V.________ le 19 septembre 2007, en estimant que celle-ci
n'emportait pas l'entière conviction du tribunal. Les premiers juges ont
notamment considéré que, même si tous les critères jurisprudentiels n'étaient
pas réunis en l'occurrence pour reconnaître un caractère invalidant à la
fibromyalgie, en admettant que le critère de comorbidité importante ne serait
pas rempli, ce qui n'était toutefois pas clairement établi en l'absence d'une
expertise psychiatrique entièrement convaincante, il résultait des rapports des
médecins traitants, ainsi que des enquêtes diligentées par le tribunal
(auditions du docteur P.________, de Madame R.________, la soeur de l'intimée,
de Madame I.________, une connaissance de l'assurée, de Madame M.________, une
amie et de la recourante elle-même), que cette maladie se manifestait en
l'espèce avec une intensité particulièrement sévère, au point d'empêcher
l'assurée d'élever son fils, de s'occuper des tâches habituelles et de vivre
seule. Ses affections psychiques devaient en outre être considérées comme étant
indépendantes de la fibromyalgie, et les angoisses, lesquelles se manifestaient
en particulier par des phobies sociales, ne pouvaient être qualifiées de
symptômes d'accompagnement de celle-ci. Partant, la fibromyalgie ne paraissait
pas surmontable par la seule volonté et devait être considérée comme totalement
invalidante, en dépit du jeune âge de la recourante et de la disparition des
attaques de panique.

2.2 L'office recourant conteste ce point de vue et reproche au tribunal
cantonal d'avoir violé le droit fédéral. Il estime que les premiers juges ont
apprécié arbitrairement les preuves, en écartant à tort le rapport d'expertise
du docteur V.________ en faveur des déclarations de l'assurée et de ses
proches. En particulier, il fait valoir que, même si le diagnostic d'état
dépressif de gravité moyenne posé par le docteur A.________ devait être retenu,
cet élément ne serait pas susceptible de constituer une comorbidité
psychiatrique grave, ceci d'autant moins que ce même médecin traitant avait
attesté que l'assurée ne souffrait plus d'attaques de panique et que son état
psychique s'était amélioré. Le recourant conteste notamment l'opinion de la
juridiction cantonale selon laquelle la présence d'une comorbidité
psychiatrique ne saurait être niée, en rappelant que la jurisprudence constante
n'exige pas seulement une comorbidité psychiatrique pour reconnaître une
fibromyalgie invalidante, mais encore que cette comorbidité soit d'une gravité,
d'une acuité et d'une durée importantes. Il relève en outre qu'il est manifeste
que les critères cumulatifs requis pour admettre le caractère invalidant d'une
fibromyalgie ne sont pas tous réalisés dans le cas d'espèce, ce qui avait
d'ailleurs été expressément reconnu par l'autorité judiciaire cantonale.

2.3 Les arguments de l'office recourant sont fondés. En effet, la juridiction
cantonale s'est écartée de manière insoutenable de la pratique constante en
matière de fibromyalgie, pour considérer que cette affection serait en
elle-même invalidante, sans tenir compte des critères exigés par la
jurisprudence pour admettre ce caractère (ATF 132 V 65). En s'écartant de
l'expertise du docteur V.________ du 19 septembre 2007, qui démontrait
clairement et d'une manière absolument convaincante une amélioration depuis la
situation existentiellement difficile en 2000, les premiers juges ont procédé à
une appréciation arbitraire des preuves. En particulier, ils n'ont pas pris en
considération les constatations médicales objectives contenues dans le rapport
d'expertise, mais se sont fondés essentiellement sur les déclarations du
médecin traitant, de l'assurée et de ses proches, sans motiver leur jugement en
expliquant les raisons pour lesquelles les conclusions du docteur V.________,
qui s'était pourtant exprimé en tant qu'expert administratif (cf. ATF 122 V 157
consid. 1c p. 160 ss et 133 V 446 consid. 7 p. 447 ss), devraient être mises en
doute. D'autre part, l'OFAS a relevé à juste titre, dans sa détermination du 2
juin 2009, que l'OCAI avait, en 2001, privilégié à l'extrême le fait que
l'assurée, durement et soudainement frappée par le sort, venait de perdre son
mari, qu'elle était enceinte et que ces faits ne pouvaient rester sans
conséquences sur l'état de santé psychique d'une personne alléguant souffrir de
fibromyalgie. Selon l'OFAS, en aucun cas la décision initiale avait été prise
sur la base d'un seul diagnostic qui aurait été une fibromyalgie à ce point
grave que l'on ne pût à jamais renoncer à exiger de la personne assurée née en
1970 qu'elle fasse des efforts pour surmonter ses douleurs.

Compte tenu de ces circonstances, les conditions requises pour procéder à la
révision de la rente de l'assurée (art. 17 LPGA) étaient réunies, le jugement
attaqué, constitutif d'une violation du droit fédéral et d'une appréciation
arbitraire des preuves, devant dès lors être annulé.

3.
Vu l'issue du litige, la requête d'effet suspensif n'a plus d'objet. Les frais
judiciaires doivent être supportés par l'intimée qui succombe (art. 66 al. 1
LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis, le jugement du Tribunal cantonal des assurances sociales
de la République et canton de Genève, du 25 février 2009, étant annulé.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de l'intimée.

3.
La cause est renvoyée à la juridiction cantonale pour nouvelle décision sur les
frais de la procédure antérieure.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et canton de Genève et à l'Office fédéral
des assurances sociales.

Lucerne, le 27 juillet 2009
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Meyer Scartazzini