Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.566/2009
Zurück zum Index II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 2009
Retour à l'indice II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 2009


Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
5A_566/2009

Arrêt du 29 septembre 2010
IIe Cour de droit civil

Composition
Mme et MM. les Juges Escher, Juge présidant,
L. Meyer et Herrmann.
Greffier: M. Braconi.

Participants à la procédure
X.________, (époux),
représenté par Me Adrian Schneider, avocat,
recourant,

contre

dame X.________, (épouse),
représentée par Me Jacques Micheli, avocat,
intimée.

Objet
mesures protectrices de l'union conjugale,

recours contre l'arrêt du Tribunal d'arrondissement de Lausanne des 28 août
2009/7 janvier 2010.

Faits:

A.
A.a X.________, né en 1956, et dame X.________, née en 1966, se sont mariés le
8 mars 1997 à Soral (GE); une enfant est issue de leur union: Y.________, née
le 6 avril 1997.
A.b L'épouse a sollicité des mesures protectrices de l'union conjugale le 4 mai
2009.

Statuant "par voie préprovisoire" lors de l'audience du 20 juillet 2009, le
Président du Tribunal civil de l'arrondissement de Lausanne a attribué au père
la garde de l'enfant; il a confirmé cette décision par prononcé du 28 juillet
suivant, sous réserve d'un "libre et large" droit de visite de la mère.
A.c La mère a interjeté appel de ce prononcé, concluant notamment à ce que la
garde de l'enfant lui soit confiée; le père a pris le même chef de conclusions
en sa faveur, ajoutant que "le domicile légal de l'enfant Y.________ se situera
auprès [de lui] à Vienne, en Autriche [...]".

En raison du bref laps de temps entre l'audience d'appel et la reprise des
classes, les parties ont accepté que le tribunal se prononce par un simple
dispositif d'abord sur les questions du droit de garde et du droit de visite,
puis sur celle de l'entretien, l'arrêt motivé étant communiqué ultérieurement.

B.
Par dispositif partiel du 28 août 2009, le Tribunal d'arrondissement de
Lausanne a réformé la décision entreprise en ce sens qu'il a attribué à la mère
la garde de l'enfant et accordé au père un libre droit de visite à exercer
d'entente avec la mère, dans la mesure compatible avec son activité
professionnelle et la scolarité de l'enfant, sous réserve de la faculté pour
chacun des parents d'exiger que ce droit soit réglementé plus précisément. Le 3
septembre 2009, le Président du tribunal civil a communiqué au mandataire du
père une «motivation sommaire» qui est censée «tenir lieu de détermination
anticipée à l'intention de l'autorité de recours». La décision motivée a été
finalement notifiée le 7 janvier 2010 aux conseils des parties.

La contribution à l'entretien de la famille a été réglée, quant à elle, dans un
second dispositif du 12 octobre 2009.

C.
Par acte du 4 septembre 2009, le père interjette un recours en matière civile
au Tribunal fédéral à l'encontre de l'arrêt du 28 août 2009 (rendu sous forme
de dispositif); il conclut, en substance, à la confirmation du prononcé de
mesures protectrices du 28 juillet 2009.

L'intimée propose le rejet du recours.

D.
Par ordonnance du 7 septembre 2009, la Présidente de la IIe Cour de droit civil
a octroyé à titre superprovisoire l'effet suspensif au recours.

Par ordonnance du 8 septembre 2009, la Juge présidant la IIe Cour de droit
civil a retiré l'effet suspensif accordé à titre superprovisoire.

Par ordonnance du 18 septembre 2009, la Présidente de la IIe Cour de droit
civil a refusé l'effet suspensif au recours et fait interdiction au recourant,
sous la commination des peines de l'art. 292 CP, de prendre l'enfant sous sa
garde jusqu'à l'arrêt du Tribunal fédéral.

Par ordonnance du 5 octobre 2009, la Juge instructeur de la IIe Cour de droit
civil a déclaré irrecevable la requête du recourant tendant à la désignation
d'un curateur à l'enfant.

E.
Par ordonnance du 9 septembre 2010, le Juge instructeur de la IIe Cour de droit
civil a invité le recourant - qui n'était plus représenté devant le Tribunal
fédéral - à se déterminer quant au maintien du recours et à indiquer une
adresse de notification en Suisse.

Par courrier du 14 septembre 2010, Me Adrian Schneider a informé le Tribunal
fédéral qu'il succédait à Me Pascal Rytz et que le recours était maintenu.

Considérant en droit:

1.
1.1 Bien qu'elle ait été prise en deux "étapes", la décision attaquée ne
constitue pas une décision partielle au sens de l'art. 91 LTF (sur cette
notion: ATF 135 V 141 consid. 1.4.1); les questions tranchées dans les
"dispositifs partiels" des 28 août et 12 octobre 2009 ont fait l'objet d'un
seul arrêt motivé, daté du 7 janvier 2010 (i.e. jour de la notification aux
conseils des parties). L'arrêt attaqué, qui met un terme à la procédure
cantonale, est une décision finale (art. 90 LTF).

1.2 En l'espèce, le recourant critique uniquement la réglementation du droit de
garde dans une procédure de mesures protectrices de l'union conjugale (art. 176
al. 3 CC). Son recours est ainsi dirigé à l'encontre d'une décision rendue dans
une affaire civile (art. 72 al. 1 LTF; ATF 133 III 393 consid. 2) de nature non
pécuniaire. Comme l'intéressé se plaint d'arbitraire à cet égard (art. 9 Cst.),
la décision entreprise émane bien de la dernière autorité cantonale (art. 75
al. 1 LTF; arrêts 246/2009 du 22 mars 2010 consid. 1.1; 5A_732/2007 du 4 avril
2008 consid. 1.2 et la jurisprudence citée).

1.3 Selon la jurisprudence, la décision attaquée porte sur des mesures
provisionnelles au sens de l'art. 98 LTF (ATF 133 III 393 consid. 5 et 585
consid. 3.3), en sorte que le recourant ne peut se plaindre que de la violation
de ses droits constitutionnels. Le Tribunal fédéral n'examine un tel grief que
s'il a été dûment invoqué et motivé (art. 106 al. 2 LTF), à savoir exposé de
manière claire et détaillé (ATF 134 I 83 consid. 3.2 et les arrêts cités).
Lorsque, comme en l'occurrence, le recourant se plaint d'arbitraire (art. 9
Cst.), il ne peut se borner à critiquer la décision attaquée comme il le ferait
en instance d'appel, où l'autorité de recours dispose d'une libre cognition; il
ne saurait se contenter d'opposer son opinion à celle de la juridiction
précédente, mais doit démontrer par une argumentation précise que cette
décision se fonde sur une application du droit ou une appréciation des preuves
manifestement insoutenables (ATF 134 II 349 consid. 3 et les arrêts cités; cf.
aussi, en relation avec l'appréciation des preuves: ATF 134 V 53 consid. 4.3);
les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 133 III 589 consid.
2).

1.4 Le recours a été interjeté bien avant la notification de l'expédition
complète (art. 100 al. 1 LTF); dès la communication de l'arrêt motivé, le
recourant avait ainsi la possibilité de compléter la motivation de son mémoire
du 4 septembre 2009, ce qu'il n'a pas fait. Certes, un recours prématuré est
recevable (arrêt 2P.306/2006 du 4 décembre 2006 et la jurisprudence citée),
mais la constitutionnalité de l'arrêt déféré ne sera examinée qu'à la lumière
de l'argumentation figurant dans l'écriture en question (arrêt 1C_351/2009 du
26 novembre 2009).

1.5 Les pièces produites par le nouveau mandataire du recourant (qui concernent
l'inscription de l'enfant au Lycée français de Vienne) sont postérieures à
l'arrêt attaqué; partant, elles sont d'emblée irrecevables (ATF 134 IV 342
consid. 2.1).

2.
La décision motivée ayant été notifiée le 7 janvier 2010, le moyen pris d'une
violation de l'art. 112 LTF n'a plus d'objet.

3.
Après avoir rappelé les principes applicables à l'attribution du droit de garde
(art. 176 al. 3 CC), l'autorité précédente a estimé qu'il n'y avait pas en
l'état d'incapacité parentale avérée, en particulier chez la mère, quand bien
même certains de ses écrits pouvaient apparaître comme déconcertants;
d'ailleurs, si l'intéressée avait de grandes carences en tant que mère, on
comprend mal que le père lui ait laissé la garde de fait de l'enfant dès l'été
2008. En outre, c'est la mère qui s'est occupée de l'enfant de manière suivie
et prépondérante depuis sa naissance, ce qui n'est pas contredit par le fait
qu'elle a inscrit l'enfant dans une crèche pour la sieste et l'après-midi,
alors qu'elle travaillait à mi-temps, puis à l'accueil et au repas de midi dans
une cantine scolaire, ou qu'elle a recouru à des proches pour participer à la
prise en charge de sa fille; au surplus, elle dispose de plus de temps pour
s'occuper personnellement de l'enfant. La stabilité du "cadre socio-affectif et
la continuité de l'action éducative", nécessaires à un développement harmonieux
de la mineure, plaident en faveur de l'attribution de la garde à sa mère, après
une année passée auprès de celle-ci dans un environnement local et social,
notamment scolaire, favorable, qui ne doit pas être modifié sans nécessité.
Certes, l'enfant a exprimé le désir de vivre avec son père à Vienne et d'y
fréquenter le Lycée français. A 12 ans, elle est toutefois influençable et
suggestible, comme en témoignent ses lettres; à cela s'ajoute qu'elle présente
une certaine ambivalence, avec une préférence actuelle pour son père, mais sans
rejet de sa mère, ce qui trahit un important conflit de loyauté. Les raisons de
cette préférence ne sont d'ailleurs pas forcément saines ni pertinentes: elle
en veut à sa mère, qu'elle rend responsable de la séparation; elle voit son
père souffrir de la séparation et souhaite l'aider; le père est plus
"chouette"; les "profs" sont plus "rigolos" à Vienne qu'à Lausanne. Or, il faut
éviter de placer l'enfant en position de décideur, en lui faisant porter le
poids d'un choix qui ne lui appartient pas. Le déménagement de la mère de
Vienne à Lausanne avec sa fille dénote une désunion du couple, c'est-à-dire un
conflit entre les père et mère, mais non la volonté de celle-ci de vouloir
perturber les relations de l'enfant avec celui-là; du reste, le père ne s'est
pas plaint, au cours de l'année scolaire 2008/2009, d'être entravé dans ses
contacts avec l'enfant, au-delà des limitations qui résultent inévitablement de
l'éloignement géographique. En définitive, la plupart des critères utilisables
et déterminants en l'état de l'instruction justifient l'attribution du droit de
garde à la mère.

3.1 D'emblée, il convient d'écarter les allégations du recourant qui ne
trouvent aucun appui dans la décision attaquée - notamment celles qui
concernent les circonstances dans lesquelles l'enfant s'est installée à
Lausanne (p. 9) et le "cadre de vie" de la mère (p. 11) - sans qu'il soit
démontré, conformément aux exigences légales (art. 106 al. 2 LTF), en quoi ces
compléments seraient admissibles (ATF 133 III 393 consid. 7.1 et les
citations).

Pour le surplus, le moyen apparaît largement appellatoire. Le recourant insiste
essentiellement sur le désir - exprimé à plusieurs reprises - de sa fille de
vivre auprès de lui. L'autorité précédente ne l'a toutefois pas méconnu, mais a
estimé qu'il ne pouvait dicter à lui seul l'attribution du droit de garde au
père. Or, l'intéressé, qui n'a pas complété son acte de recours alors qu'il en
avait la possibilité (cf. supra, consid. 1.4), ne réfute aucunement les
arguments de l'autorité précédente et, dès lors, ne démontre pas en quoi ils
seraient arbitraires.
3.2
3.2.1 Le recourant reproche aussi à la juridiction précédente de n'avoir pas
entendu l'enfant.

Selon l'art. 144 al. 2 CC, le juge ou un tiers nommé à cet effet entend les
enfants personnellement, de manière appropriée, pour autant que leur âge ou
d'autres motifs importants ne s'opposent à l'audition. Cette norme s'applique à
toutes les procédures judiciaires portant sur le sort des enfants, donc
également à la procédure de mesures protectrices de l'union conjugale (ATF 131
III 553 consid. 1.1).

Comme l'admet expressément le recourant, l'enfant a été entendue par le premier
juge et par un assistant social du Service de protection de la jeunesse (SPJ).
La juridiction précédente disposait, de surcroît, des témoignages recueillis à
l'audience (arrêt attaqué, p. 38 ss). Dans ces circonstances, une audition
supplémentaire - que le recourant n'avait d'ailleurs pas requise (arrêt
attaqué, p. 33) - par les magistrats d'appel ne s'imposait pas (arrêt 5P.507/
2006 du 5 avril 2007 consid. 4.4 et la jurisprudence citée). La décision
attaquée n'est donc pas arbitraire sur ce point.
3.2.2 Partant de la prémisse - non constatée dans l'arrêt déféré - que la mère
«souffre d'une grave instabilité psychologique», le recourant estime que les
magistrats précédents auraient dû inviter le Service de protection de la
jeunesse à procéder à une «évaluation familiale».

Les mesures protectrices de l'union conjugale sont ordonnées à l'issue d'une
instruction sommaire (cf. art. 271 let. a CPC en vigueur dès le 1er janvier
2011 [RO 2010 1739, 1802]), laquelle implique un examen des faits sous l'angle
de la vraisemblance et une limitation des moyens de preuve (ATF 127 III 474
consid. 2b/bb et les références). L'autorité précédente, qui a appliqué ces
principes en renonçant à ordonner une expertise visant à évaluer "la présence
d'une pathologie psychiatrique chez le père ou la mère", n'est dès lors pas
tombée dans l'arbitraire, à plus forte raison vu le "laps de temps très bref
entre l'audience d'appel et la reprise des classes".

4.
En conclusion, le recours doit être rejeté dans la (faible) mesure de sa
recevabilité, avec suite de frais et dépens à la charge du recourant qui
succombe (art. 66 al. 1 et art. 68 al. 1 et 2 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Une indemnité de 2'500 fr., à verser à l'intimée à titre de dépens, est mise à
la charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal civil de
l'arrondissement de Lausanne.

Lausanne, le 29 septembre 2010
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Juge présidant: Le Greffier:

Escher Braconi