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II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.556/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
5A_556/2009

Arrêt du 30 novembre 2009
IIe Cour de droit civil

Composition
Mme et MM. les Juges Hohl, Présidente,
von Werdt et Herrmann.
Greffier: M. Braconi.

Parties
X.________,
représentée par Me Dan Bally, avocat,
recourante,

contre

Y.________,
représenté par Me Jean-Noël Jaton, avocat,
intimé.

Objet
mainlevée d'opposition,

recours contre l'arrêt de la Cour des poursuites
et faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud
du 26 mars 2009.

Faits:

A.
A.a Par acte notarié du 27 juillet 2005, X.________ a promis de vendre à
Y.________ les parcelles nos 1122 et 1141 du cadastre de la commune de
A.________ (VD); cet acte comporte, en particulier, les clauses suivantes:
«7. Prix
Il sera définitivement fixé au jour de l'exécution des présentes et tiendra
compte des paramètres suivants, lesquels sont fermes, définitifs et
suffisamment précis pour [que] le prix puisse être déterminé, soit:

A. Parcelles 1122 et 1141 de la Commune de A.________
(...)

B. Mobilier
Le prix de vente du mobilier, de l'ameublement et de l'équipement fixe et
mobile précités, a été fixé au prix global et forfaitaire de
--- CINQ CENT CINQUANTE-TROIS MILLE FRANCS ---
--- (CHF 553'000.--) ---
Il sera payé conformément aux clauses et conditions de la reconnaissance de
dette séparée, datée de ce jour, bien connue des parties, valant engagement de
paiement au jour de l'exécution des présentes (...).

8. Exécution
L'exécution de la vente définitive et le paiement du solde du prix de vente
interviendront au plus tard le premier septembre deux mille cinq.

Les parties s'entendront entre elles pour se réunir en l'étude du notaire (...)
dans le terme fixé.

12. Décompte "acheteur-vendeur"
Un décompte "acheteur-vendeur" comprenant les comptes d'exploitation des deux
raisons individuelles exploitées par le promettant-vendeur sera établi au
trente et un décembre deux mille cinq. Son solde sera acquitté, d'entente entre
parties, par Y.________; il fait partie du prix de vente. (...)»
La promesse de vente et d'achat a été prorogée à deux reprises: la première
fois par acte notarié du 31 août 2005, la seconde par acte notarié du 10
novembre suivant. L'exécution de la vente définitive et le paiement du solde du
prix de vente ont été reportés au 20 décembre 2005 au plus tard.
A.b Le 27 juillet 2005, les parties ont signé une «reconnaissance de dette»
ainsi libellée:
«Le soussigné,

Y.________, domicilié à B.________, non marié,

ci-après nommé "le débiteur",

reconnaît, par la présente, devoir, à X.________, domiciliée à A.________,

ci-après nommée "la créancière",

la somme de
--- CINQ CENT CINQUANTE-TROIS MILLE FRANCS ---
--- (CHF 553'000.-) ---
en paiement du prix du mobilier, de l'ameublement et de l'équipement fixe et
mobile, garnissant les bâtiments sis sur les parcelles 1122 et 1141 de la
Commune de A.________, propriété de la créancière, résultant des engagements
pris par le débiteur dans un acte de promesse de vente et d'achat, signé le
vingt-sept juillet deux mille cinq sous numéro 4604 des minutes du notaire
(...).

Cette dette est soumise aux conditions suivantes:

1. Remboursement: en différentes mensualités restant à déterminer entre
parties, durant six ans, jusqu'à l'extinction complète de la dette.
2. Amortissement: aucun.
3. Intérêts: aucun.
4. Paiement: les paiements ont lieu au domicile du créancier en Suisse.
5. Garanties: la présente dette sera garantie par la constitution d'une cédule
hypothécaire, grevant collectivement en quatrième rang les parcelles 1122 et
1141 de la Commune de A.________.

La présente vaut reconnaissance de dette au sens de l'article 82 de la loi sur
la Poursuite pour dettes et faillite. (...)»
A.c Le 2 décembre 2005, X.________ et Y.________ ont conclu un acte de vente,
par lequel ils ont partiellement exécuté la promesse de vente et d'achat, en ce
sens que la première a vendu au second la parcelle n° 1141 du cadastre de la
commune de A.________ pour le prix de 3'247'000 fr., payé essentiellement par
la reprise de la dette hypothécaire. Cet acte prévoit que les parties
maintiennent les clauses et les conditions de la promesse de vente et d'achat
pour ce qui concerne la parcelle n° 1122; il dispose aussi que le mobilier,
l'ameublement et l'équipement fixe et mobile garnissant les parcelles nos 1122
et 1141 de la commune de A.________ sont repris ce jour-là par Y.________ pour
le prix de 553'000 fr., payé conformément aux clauses et conditions de la
reconnaissance de dette du 27 juillet 2005; enfin, le chiffre I/11 stipule
qu'un décompte «acheteur-vendeur» sera établi par la partie la plus diligente
dans les trente jours qui suivent l'entrée en jouissance et que le solde sera
réglé par la partie débitrice dans les trente jours dès sa présentation.
A.d Le 10 mars 2006, Y.________ a fait parvenir au conseil de X.________ une
lettre intitulée «convention de compensation de créance Y.________ -
X.________» dans laquelle il mentionnait, notamment, avoir procédé à quatre
versements de 7'680 fr. en octobre et novembre 2005 ainsi qu'en janvier et
février 2006, et déclarait compenser le solde avec différentes créances contre
la venderesse.

B.
Le 24 octobre 2007, X.________ a fait notifier à Y.________ un commandement de
payer la somme de 161'280 fr., plus intérêts à 5 % dès le 30 novembre 2006 (n°
xxxx de l'OP de Morges-Aubonne), indiquant comme cause de l'obligation:
«Promesse de vente et d'achat du 27 juillet 2004 (sic) (minute 4'604 du notaire
[...]), reconnaissance de dette du 27 juillet 2005, contrat de vente notarié du
2 décembre 2005 (minute 4'775 du notaire [...]). 21 mensualités impayées de
7'680.-- (de février 2006 à octobre 2007)». Le poursuivi a formé opposition
totale.

Par prononcé du 12 juin 2008, le Juge de paix du district d'Aubonne a refusé la
mainlevée provisoire de l'opposition.

Statuant le 26 mars 2009, la Cour des poursuites et faillites du Tribunal
cantonal vaudois a confirmé cette décision.

C.
La poursuivante forme un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre
cet arrêt; elle conclut à ce que sa requête de mainlevée soit admise et à ce
que l'opposition soit provisoirement levée, subsidiairement à ce que l'arrêt
attaqué soit annulé et la cause renvoyée à la juridiction précédente pour
nouvelle décision dans le sens des considérants. Elle sollicite le bénéfice de
l'assistance judiciaire.

Des observations n'ont pas été requises.

Considérant en droit:

1.
Le présent recours a été interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) à
l'encontre d'une décision qui refuse, en dernière instance cantonale et sur
recours (art. 75 LTF), la mainlevée provisoire de l'opposition (art. 72 al. 2
let. a et art. 90 LTF; ATF 134 III 115 consid. 1.1 p. 117). La valeur
litigieuse minimale de 30'000 fr. est atteinte (art. 74 al. 1 let. b LTF; ATF
133 III 399 consid. 1.3). Enfin, la poursuivante, qui a succombé devant
l'autorité précédente, a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF).

2.
En l'espèce, l'autorité précédente a retenu qu'il n'était pas possible de
déterminer à la lecture de la «reconnaissance de dette» du 27 juillet 2005
quelles mensualités devaient être acquittées; cet acte mentionne uniquement que
le remboursement devait être effectué «en différentes mensualités restant à
déterminer entre parties». Partant, le montant en poursuite «ne paraît pas
chiffré de façon précise dans ce titre ou dans un écrit annexe auquel il se
rapporte».

La cour cantonale a considéré que la mainlevée provisoire devait être refusée
pour un second motif. Dans sa lettre du 10 mars 2006, le poursuivi a opposé à
la prétention de la poursuivante le solde du décompte «acheteur-vendeur», prévu
dans l'acte de vente du 2 décembre 2005, établi par une fiduciaire, qui révèle
un montant de 168'459 fr. 30 en sa faveur; l'intéressé a ainsi rendu
vraisemblable que sa dette est éteinte par compensation.

2.1 Selon la jurisprudence, constitue une reconnaissance de dette, au sens de
l'art. 82 al. 1 LP, l'acte authentique ou sous seing privé signé de la main du
poursuivi - ou de son représentant -, d'où découle sa volonté de payer au
poursuivant, sans réserve ni condition, une somme d'argent déterminée, ou
aisément déterminable, et échue (ATF 130 III 87 consid. 3.1 p. 88); elle peut
résulter du rapprochement de plusieurs pièces, autant que les éléments
nécessaires en résultent (ATF 132 III 480 consid. 4.1 p. 481).
2.2
2.2.1 D'emblée, il faut souligner que la recourante se prévaut à tort de la
lettre de l'intimé du 10 mars 2006, laquelle constituerait «clairement une
reconnaissance de dette per se». D'une part, il ne résulte pas des faits
constatés dans la décision entreprise que l'intéressée aurait aussi invoqué ce
document à l'appui de sa requête de mainlevée, ni qu'elle aurait soulevé ce
moyen devant l'autorité précédente; le grief s'avère donc irrecevable, faute
d'épuisement des instances cantonales (art. 75 al. 1 LTF; ATF 134 III 524
consid. 1.3 p. 527 et les références). D'autre part, il ressort de l'arrêt
attaqué que, dans la lettre en question, l'intimé a effectivement reconnu avoir
payé quatre mensualités, mais a déclaré «compenser le solde avec différentes
créances contre la poursuivante»; dès lors, il ne s'agit pas d'une
reconnaissance de dette «sans réserve ni condition», au sens défini ci-dessus
(cf. notamment: Panchaud/Caprez, La mainlevée d'opposition, 2e éd., § 16 nos 9
et 11; STAEHELIN, in: Basler Kommentar, SchKG I, 1998, n° 38 ad art. 82 LP et
les citations).
2.2.2 Ce point étant précisé, l'avis de la cour cantonale ne saurait être
partagé. Reproduite dans toute sa teneur, la clause litigieuse prévoit que le
remboursement de la somme reconnue (553'000 fr.) doit s'effectuer «en
différentes mensualités restant à déterminer, durant six ans, jusqu'à
l'extinction complète de la dette». Cette dette ne produisant pas d'intérêts
(cf. ch. 3 de la reconnaissance de dette du 27 juillet 2005), le montant des
amortissements mensuels peut être fixé au moyen d'une simple opération
arithmétique (553'000 fr. : 72 mois = 7'680 fr. 55); la somme (arrondie)
obtenue correspond bien à chacun des versements que l'intimé a effectués et que
documentent les pièces produites par la recourante dans sa requête de
mainlevée. Le montant de la prétention déduite en poursuite apparaît ainsi
aisément déterminable (cf. ATF 114 III 71 consid. 2 p. 73 et la jurisprudence
citée).

2.3 En présence d'une reconnaissance de dette, le juge prononce la mainlevée
provisoire, à moins que le débiteur ne rende immédiatement vraisemblable sa
libération (art. 82 al. 2 LP). La loi n'exige donc pas la preuve stricte du
moyen libératoire (cf. déjà: ATF 96 I 4 consid. 2 p. 8 et la doctrine citée) -
en l'occurrence la compensation -, ni même des moyens de preuve déterminés
(STAEHELIN, ibidem, n° 93, au sujet de la compensation avec une créance en
dommages-intérêts); en particulier, elle n'impose pas de parallélisme des
formes entre les pièces produites par le poursuivant et celles sur lesquelles
le poursuivi fonde son moyen tiré de la compensation (arrêt P 299/1984 du 12
juillet 1984 consid. 2, in: Rep. 1985 p. 34). Le juge de la mainlevée jouit
d'un large pouvoir d'appréciation (Stücheli, Die Rechtsöffnung, thèse Zurich
2000, p. 350 et la doctrine citée), dont le Tribunal fédéral ne revoit
l'exercice qu'avec retenue (parmi plusieurs: ATF 135 III 259 consid. 2.5 p.
264).

En l'espèce, la créance compensante, chiffrée avec précision, ressort d'un
décompte réservé par l'acte de vente du 2 décembre 2005 et établi par une
fiduciaire dont l'impartialité et les compétences professionnelles ne sont pas
contestées. La recourante ne critique, d'une façon motivée, ni la quotité ni
l'exigibilité de cette prétention; en outre, elle ne réfute pas les motifs de
la juridiction cantonale quant à son existence (art. 42 al. 2 LTF; cf. sur
cette exigence: ATF 134 II 244 consid. 2.1 p. 245/246; MERZ, in: Basler
Kommentar, BGG, n° 53 ad art. 42 LTF, avec d'autres citations), mais se livre à
des développements touffus et difficilement intelligibles, dont l'examen
déborde largement la cognition restreinte du juge de la mainlevée (art. 25 ch.
2 let. a LP; cf. à ce propos: GILLIÉRON, Commentaire de la loi fédérale sur la
poursuite pour dettes et la faillite, vol. I, 1999, n° 23 ad art. 25 LP).
L'intéressée parle du reste elle-même de «contradiction apparente» et de la
nécessité d'opérer une «lecture simultanée de plusieurs actes successifs», pour
en conclure que, à la rigueur des textes, il existerait «deux clauses prévoyant
un décompte acheteur-vendeur». Quoi qu'il en soit, son argumentation est loin
de démontrer en quoi l'autorité cantonale, en admettant le moyen tiré de la
compensation, aurait outrepassé la latitude que lui accorde la loi.

Autant qu'on la comprend, la recourante paraît aussi remettre en cause le
«droit», la «possibilité», ou encore la «faculté», pour l'intimé d'invoquer la
compensation, car les parties auraient entendu lui «assurer un revenu régulier,
indépendamment des autres dispositions prises sur le plan de la cession
immobilière». A supposer qu'elle veuille se prévaloir d'une renonciation à la
compensation (art. 126 CO; cf. à ce sujet: arrêt 4C.477/1994 du 23 juin 1995
consid. 5; ATF 130 III 312 consid. 5.2 in fine; 83 II 395 consid. 1 p. 398; 72
II 25 consid. 2 p. 28 et les citations mentionnées dans ces arrêts), ce moyen
serait vain, faute de constatations qui permettraient d'établir la volonté des
parties. Contrairement à l'opinion de la recourante, une pareille renonciation
ne découle ni de la clause prévoyant que «les paiements ont lieu au domicile du
créancier en Suisse» (ch. 4 de la reconnaissance de dette du 27 juillet 2005),
ni du fait que l'intimé s'est acquitté de plusieurs acomptes avant d'objecter
la compensation.

Enfin, la clause aux termes de laquelle la reconnaissance de dette du 27
juillet 2005 «vaut reconnaissance de dette au sens de l'article 82 de la loi
sur la Poursuite pour dettes et faillite» n'est d'aucun secours; les juges
cantonaux n'ont pas nié l'existence d'un tel titre, mais ont retenu que
l'intimé avait rendu plausible un moyen infirmant l'engagement qui y était
souscrit.

3.
Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est
recevable. Comme les conclusions de la recourante étaient dépourvues de chances
de succès, sa requête d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1
LTF), ce qui implique sa condamnation aux frais de justice (art. 66 al. 1 LTF).
Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens à l'intimé, qui n'a pas été invité à
répondre.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
La requête d'assistance judiciaire de la recourante est rejetée.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour des poursuites et
faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 30 novembre 2009
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: Le Greffier:

Hohl Braconi