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II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.555/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
5A_555/2009

Arrêt du 30 novembre 2009
IIe Cour de droit civil

Composition
Mme et MM. les Juges Hohl, Présidente,
von Werdt et Herrmann.
Greffier: M. Braconi.

Parties
X.________,
représentée par Me Dan Bally, avocat,
recourante,

contre

Y.________,
représenté par Me Jean-Noël Jaton, avocat,
intimé.

Objet
mainlevée d'opposition,

recours contre l'arrêt de la Cour des poursuites
et faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud
du 26 mars 2009.

Faits:

A.
A.a Par acte notarié du 27 juillet 2005, X.________ a promis de vendre à
X.________ les parcelles n°s 1122 et 1141 du cadastre de la commune de
A.________ (VD); cet acte comporte, en particulier, les clauses suivantes:
«7. Prix
Il sera définitivement fixé au jour de l'exécution des présentes et tiendra
compte des paramètres suivants, lesquels sont fermes, définitifs et
suffisamment précis pour [que] le prix puisse être déterminé, soit:

A. Parcelles 1122 et 1141 de la Commune de A.________
(...)
B. Mobilier
Le prix de vente du mobilier, de l'ameublement et de l'équipement fixe et
mobile précités, a été fixé au prix global et forfaitaire de
--- CINQ CENT CINQUANTE-TROIS MILLE FRANCS ---
--- (CHF 553'000.--) ---
Il sera payé conformément aux clauses et conditions de la reconnaissance de
dette séparée, datée de ce jour, bien connue des parties, valant engagement de
paiement au jour de l'exécution des présentes (...).
8. Exécution
L'exécution de la vente définitive et le paiement du solde du prix de vente
interviendront au plus tard le premier septembre deux mille cinq.
Les parties s'entendront entre elles pour se réunir en l'étude du notaire (...)
dans le terme fixé.
12. Décompte "acheteur-vendeur"
Un décompte "acheteur-vendeur" comprenant les comptes d'exploitation des deux
raisons individuelles exploitées par le promettant-vendeur sera établi au
trente et un décembre deux mille cinq. Son solde sera acquitté, d'entente entre
parties, par Y.________; il fait partie du prix de vente. (...)»
La promesse de vente et d'achat a été prorogée à deux reprises: la première
fois par acte notarié du 31 août 2005, la seconde par acte notarié du 10
novembre suivant. L'exécution de la vente définitive et le paiement du solde du
prix de vente ont été reportés au 20 décembre 2005 au plus tard.
A.b Le 27 juillet 2005, les parties ont signé une «reconnaissance de dette»
ainsi libellée:

«Le soussigné,
Y.________, domicilié à B.________, non marié,

ci-après nommé "le débiteur",
reconnaît, par la présente, devoir, à X.________, domiciliée à A.________,
ci-après nommée "la créancière",
la somme de
--- CINQ CENT CINQUANTE-TROIS MILLE FRANCS ---
--- (CHF 553'000.-) ---
en paiement du prix du mobilier, de l'ameublement et de l'équipement fixe et
mobile, garnissant les bâtiments sis sur les parcelles 1122 et 1141 de la
Commune de A.________, propriété de la créancière, résultant des engagements
pris par le débiteur dans un acte de promesse de vente et d'achat, signé le
vingt-sept juillet deux mille cinq sous numéro 4604 des minutes du notaire
(...).
Cette dette est soumise aux conditions suivantes:
1. Remboursement: en différentes mensualités restant à déterminer entre
parties, durant six ans, jusqu'à l'extinction complète de la dette.
2. Amortissement: aucun.
3. Intérêts: aucun.
4. Paiement: les paiements ont lieu au domicile du créancier en Suisse.
5. Garanties: la présente dette sera garantie par la constitution d'une cédule
hypothécaire, grevant collectivement en quatrième rang les parcelles 1122 et
1141 de la Commune de A.________.
La présente vaut reconnaissance de dette au sens de l'article 82 de la loi sur
la Poursuite pour dettes et faillite. (...)»
A.c Le 2 décembre 2005, X.________ et Y.________ ont conclu un acte de vente,
par lequel ils ont partiellement exécuté la promesse de vente et d'achat, en ce
sens que la première a vendu au second la parcelle n° 1141 du cadastre de la
commune de A.________ pour le prix de 3'247'000 fr., payé essentiellement par
la reprise de la dette hypothécaire. Cet acte prévoit que les parties
maintiennent les clauses et les conditions de la promesse de vente et d'achat
pour ce qui concerne la parcelle n° 1122; il dispose aussi que le mobilier,
l'ameublement et l'équipement fixe et mobile garnissant les parcelles n°s 1122
et 1141 de la commune de A.________ sont repris ce jour-là par Y.________ pour
le prix de 553'000 fr., payé conformément aux clauses et conditions de la
reconnaissance de dette du 27 juillet 2005; enfin, le chiffre I/11 stipule
qu'un décompte «acheteur-vendeur» sera établi par la partie la plus diligente
dans les trente jours qui suivent l'entrée en jouissance et que le solde sera
réglé par la partie débitrice dans les trente jours dès sa présentation.
A.d Le 10 mars 2006, Y.________ a fait parvenir au conseil de X.________ une
lettre intitulée «convention de compensation de créance Y.________ -
X.________» dans laquelle il mentionnait, notamment, avoir procédé à quatre
versements de 7'680 fr. en octobre et novembre 2005 ainsi qu'en janvier et
février 2006, et déclarait compenser le solde avec différentes créances contre
la venderesse. Le même jour, il a en outre adressé à celle-ci une note
d'honoraires de 42'179 fr. 20 pour des travaux de comptabilité.

Le 3 mai 2007, le mandataire de X.________ a envoyé à Y.________ un courrier
auquel était joint un décompte de la fiduciaire C.________ SA, lequel révèle un
solde de 168'459 fr. 30 en faveur de celui-là. Par lettres des 14 novembre et 7
décembre 2007, il a mis Y.________ en demeure de remettre la cédule
hypothécaire prévue par la reconnaissance de dette du 27 juillet 2005.

B.
Le 14 mai 2008, X.________ a fait notifier à Y.________ une poursuite (n° xxxx
de l'OP de Morges-Aubonne) tendant à la fourniture de sûretés à hauteur de
553'000 fr., sans intérêts, indiquant comme cause de l'obligation:
«Reconnaissance de dette du 27 juillet 2005, obligation de constituer des
sûretés selon le chiffre 5, page 2». Le poursuivi a formé opposition totale.

Par prononcé du 11 juillet 2008, le Juge de paix du district d'Aubonne a
provisoirement levé l'opposition à concurrence de 278'995 fr. 55, sans
intérêts.

Statuant le 26 mars 2009, la Cour des poursuites et faillites du Tribunal
cantonal vaudois a accueilli le recours principal du poursuivi, rejeté le
recours joint de la poursuivante et réformé le prononcé entrepris en ce sens
que l'opposition est maintenue.

C.
La poursuivante forme un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre
cet arrêt; elle conclut à ce que sa requête de mainlevée soit admise et à ce
que l'opposition soit provisoirement levée à concurrence de 447'454 fr. 65,
subsidiairement à ce que l'arrêt attaqué soit annulé et la cause renvoyée à la
juridiction précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
Elle sollicite le bénéfice de l'assistance judiciaire.
Des observations n'ont pas été requises.

Considérant en droit:

1.
Le présent recours a été interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) à
l'encontre d'une décision qui refuse, en dernière instance cantonale et sur
recours (art. 75 LTF), la mainlevée provisoire de l'opposition (art. 72 al. 2
let. a et art. 90 LTF; ATF 134 III 115 consid. 1.1 p. 117). La valeur
litigieuse minimale de 30'000 fr. est atteinte (art. 74 al. 1 let. b LTF; ATF
133 III 399 consid. 1.3). Enfin, la poursuivante, qui a succombé devant
l'autorité précédente, a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF).

2.
En l'espèce, l'autorité précédente a retenu que le poursuivi s'était bien
engagé à constituer une cédule hypothécaire en garantie de la dette qu'il avait
reconnue dans l'acte du 27 juillet 2005, mais une telle obligation n'était pas
chiffrée précisément; or, «on peut imaginer la remise d'une cédule du même
montant que la dette garantie, mais aussi d'un montant supérieur ou inférieur».
Il s'ensuit que la mainlevée provisoire ne pouvait être prononcée pour ce motif
déjà.
En outre, l'autorité précédente a admis que l'obligation de constituer la
garantie reconnue dans le titre (gage immobilier collectif) était
nécessairement subordonnée à la condition du transfert de la propriété des
parcelles au poursuivi, ou au poursuivi et à un codébiteur solidaire, à défaut
de quoi il est juridiquement impossible de constituer le gage; or, seule la
parcelle n° 1141 a été finalement transférée au poursuivi, la parcelle n° 1122
étant apparemment demeurée en main de la poursuivante. Il s'agit d'un motif
suffisant pour refuser la mainlevée, «la preuve de la réalisation d'une
condition à laquelle est soumise l'obligation reconnue dans le titre de
constituer le gage à titre de sûreté n'étant pas réalisée». On peut aussi
considérer que, en limitant l'exécution de la promesse de vente à une seule
parcelle, ce qui exclut le gage collectif, les parties ont, au moins
provisoirement, renoncé de manière implicite à cette garantie. A supposer
qu'elles n'y aient pas totalement renoncé, il n'est pas possible, après la
passation de la vente, de déterminer la valeur du gage qui devrait grever la
parcelle n° 1141, de sorte que le montant de la sûreté à constituer ne peut pas
être déterminé. Ce motif justifie aussi le maintien de l'opposition.

2.1 Aux termes de l'art. 38 al. 1 LP, l'exécution forcée ayant pour objet des
sûretés à fournir s'opère par la poursuite pour dettes. La procédure est la
même que pour la poursuite tendant au paiement d'une somme d'argent, sauf que
la continuation de la poursuite a exclusivement lieu par voie de saisie (art.
43 ch. 3 LP) et que les espèces obtenues par la réalisation des biens saisis ne
peuvent être distribuées au poursuivant, mais doivent être consignées (cf. art.
9 et 24 LP), de telle façon qu'elles se trouvent à la disposition du
poursuivant si celui-ci établit au fond son droit à la créance en garantie de
laquelle les sûretés ont été fournies (ATF 129 III 193 consid. 2.2 p. 194; 110
III 1 consid. 2b p. 3, avec les citations). La poursuite en prestation de
sûretés ne constitue donc pas un mode spécial de poursuite, mais une poursuite
ordinaire qui a un but spécial, à savoir d'assurer l'exécution d'une prestation
du poursuivi qui n'est pas destinée à satisfaire directement le poursuivant,
mais à garantir l'exécution d'une obligation contractée à son profit (ATF 129
III 193 consid. 2.1 p. 194 et les références). La poursuite en prestation de
sûretés n'est pas restreinte aux seules sûretés pécuniaires et peut dès lors
s'appliquer - comme dans le cas présent - à la prestation d'une sûreté réelle
(ATF 129 III 193 consid. 3.4 p. 196).

2.2 Comme l'a rappelé la juridiction précédente, la mainlevée provisoire ne
peut être accordée que si l'étendue des sûretés à fournir ressort du titre
invoqué comme reconnaissance de dette (SJ 1932 p. 216 ss, 219; BlSchK 34/1970
p. 149 n° 38; Jaeger/Daeniker, Schuldbetreibungs- und Konkurs-Praxis der Jahre
1911-1945, vol. I, 1947, n° 3 ad art. 38 LP; Panchaud/Caprez, La mainlevée
d'opposition, 1939, § 15 litt. n). Cette condition n'est pas remplie en
l'occurrence. Elle s'imposait d'autant plus ici que la garantie concernait les
parcelles nos 1122 et 1141, alors que seule cette dernière a été finalement
transférée à l'intimé, la valeur de ces immeubles étant de surcroît inconnue.

Quoi qu'en dise la recourante, la sûreté promise en l'espèce n'était ni «toute
générale», ni même «indéterminée»; bien au contraire, l'intimé s'était engagé à
constituer une sûreté réelle, sous forme d'une cédule hypothécaire (art. 842 ss
CC). C'est également en vain qu'elle soutient que, en s'obligeant à garantir
une créance de 553'000 fr., l'intimé s'est engagé pour le moins à hauteur de
cette somme. Un tel raisonnement méconnaît d'emblée que la cédule hypothécaire
doit énoncer la somme garantie (art. 53 al. 2 let. d ORF), indication qui est
nécessaire (voir parmi plusieurs: KAMERZIN, Le contrat constitutif de cédule
hypothécaire, thèse Fribourg 2003, n° 29 et les citations). En outre,
l'exigence relative à la fixation de l'étendue des sûretés n'aurait aucune
portée, tant il est vrai que le montant de celles-ci serait alors toujours
déterminable par référence à la quotité de la créance à garantir.

Quoi qu'il en soit, le dernier argument de la recourante contient l'aveu
implicite que la cédule n'a pas encore été constituée. D'ailleurs, le titre
invoqué par la recourante ne comporte que l'obligation de l'intimé de
constituer une sûreté réelle immobilière, laquelle n'existait donc pas à
l'époque de la souscription de la reconnaissance de dette; il ne ressort pas
davantage des constatations de l'autorité précédente que le droit de gage
aurait été constitué depuis lors (art. 105 al. 1 LTF). Dans ces circonstances,
la recourante devait préalablement procéder par la voie judiciaire en émission
du titre de gage (cf. GILLIÉRON, Commentaire de la loi fédérale sur la
poursuite pour dettes et la faillite, vol. I, 1999, n° 36 ad art. 38 LP).

2.3 Le refus de la mainlevée provisoire pour ce premier motif n'étant pas
contraire au droit fédéral, il est superflu de connaître des critiques de la
recourante à l'encontre des motifs supplémentaires de l'autorité précédente
(cf. supra, consid. 2, in principio; ATF 133 III 221 consid. 7 p. 228; 130 III
321 consid. 6 p. 328).

3.
Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté. Comme les conclusions de la
recourante étaient dépourvues de chances de succès, sa requête d'assistance
judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF), ce qui implique sa
condamnation aux frais de justice (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu
d'allouer de dépens à l'intimé, qui n'a pas été invité à répondre.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
La requête d'assistance judiciaire de la recourante est rejetée.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour des poursuites et
faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 30 novembre 2009
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: Le Greffier:

Hohl Braconi