Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.551/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
5A_551/2009

Arrêt du 26 février 2010
IIe Cour de droit civil

Composition
Mme et MM. les Juges Hohl, Présidente,
L. Meyer et Marazzi.
Greffière: Mme Rey-Mermet.

Parties
1. A.X.________,
2. B.X.________,
tous deux représentés par Me Cédric Aguet, avocat,
recourants,

contre

1. Y.________ SA,
représentée par Me Carlo Lombardini, avocat,
2. L.________,
représenté par Me Dominique Lévy, avocat,
intimés.

Objet
reddition de comptes (succession),

recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de
Genève du 19 juin 2009.

Faits:

A.
C.X.________, ressortissant italien domicilié à Rome, est décédé à Miami le 14
novembre 1984, en laissant pour héritiers légaux sa veuve D.________ et ses
enfants A.________ et B.X.________.

Le patrimoine de C.X.________ était détenu et géré en partie par des sociétés «
de domicile ».

B.
Plusieurs années après ce décès, les hoirs X.________ ont commencé à soupçonner
le détournement des fonds successoraux qui avaient transité après le décès de
leur père par les comptes de différentes sociétés, dont V.________, S.________
et G.________, ouverts auprès de plusieurs établissements bancaires, dont
Y.________ SA. Ils ont ainsi ouvert plusieurs procédures en reddition de
comptes.

C.
En particulier, le 24 novembre 2006, A.________ et B.X.________ ont ouvert
contre Y.________ SA d'une part, et L.________ d'autre part, une action en
reddition de comptes concernant les avoirs provenant de la succession devant le
Tribunal de première instance du canton de Genève. Leurs conclusions tendaient
à obtenir les éléments suivants :
"a) l'ensemble des documents et informations concernant les sociétés
S.________, G.________, V.________ (spécialement le compte n° xxx), ou toute
autre entité, notamment les trusts, ainsi que les comptes dont tant feu
C.X.________ que A.X.________ et/ou B.X.________ étaient ou sont titulaires ou
ayants droit ou bénéficiaires économiques,

b) l'état de leurs biens au jour du décès de feu C.X.________,

c) les mouvements enregistrés sur l'ensemble de ces comptes, y compris les
documents d'ouverture et de clôture éventuels,

d) la destination des fonds concernés, ainsi que l'identité des personnes
physiques ou morales ayant bénéficié de transferts en provenance des comptes et
sociétés précités durant dite période,
e) tous documents relatifs à la vente des actions familiales avec Z.________ et
autres institutions bancaires au Luxembourg, de même que tous documents
relatifs au paiement des taxes de succession à Rome pour le compte des trois
héritiers et/ou encore tous documents relatifs au remboursement de l'héritier
testamentaire."

Les défendeurs ont conclu au rejet de la demande.

Par jugement du 28 février 2008, le Tribunal a débouté A.________ et
B.X.________ de toutes leurs conclusions.

La Cour de justice du canton de Genève a rejeté, le 19 juin 2009, l'appel formé
par A.________ et B.X.________.

D.
Contre ce jugement, A.________ et B.X.________ ont, le 24 août 2009, formé un
recours en matière civile au Tribunal fédéral. Ils concluent à l'annulation de
l'arrêt cantonal et à l'admission de leur action en reddition de comptes, en
reprenant les conclusions formulées en première instance.

Considérant en droit:

1.
Le recours est dirigé contre une décision rendue en matière civile (art. 72 al.
1 LTF). Celle-ci porte en outre sur un droit de nature pécuniaire, les
renseignements demandés étant susceptibles de fournir le fondement d'une
contestation civile de nature pécuniaire (ATF 126 III 445 consid. 3b et les
références citées; arrêt 4A_413/2007 du 10 décembre 2007 consid. 1.2).
Conformément à la jurisprudence, les recourants sont dispensés de chiffrer
exactement la valeur litigieuse d'une demande de renseignements (ATF 127 III
396 consid. 1b/cc p. 398 et les références; arrêt 5C.157/2003 du 22 janvier
2004 consid. 3.2 publié in : SJ 2004 I 477 p. 479). En l'espèce, il ressort du
dossier que les montants recherchés représentent des valeurs très importantes,
de sorte qu'il y a lieu d'admettre que la valeur de 30'000 fr. est largement
atteinte (art. 51 al. 2 et 74 al. 1 let. b LTF). Le présent recours a par
ailleurs été formé dans le délai prévu par l'art. 100 al. 1 LTF, contre une
décision finale (art. 90 LTF) rendue en dernière instance cantonale (art. 75
al. 1 LTF).

2.
Les recourants contestent les faits retenus par l'autorité cantonale.

2.1 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des
faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en
écarter que si les constatations de l'autorité cantonale ont été établies de
façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire au
sens de l'art. 9 Cst. (ATF 135 III 397 consid. 1.5; 134 V 53 consid. 4.3) - ou
en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le
recourant qui entend s'écarter des constatations de l'autorité précédente doit
expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception
prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de quoi il n'est pas
possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui contenu dans la
décision attaquée (cf. ATF 130 III 138 consid. 1.4). Il ne peut de toute
manière demander une correction de l'état de fait que si celle-ci est
susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF), ce qu'il
appartient au recourant de démontrer (ATF 134 V 53 consid. 3.4). Aucun fait
nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la
décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF).

2.2 En l'espèce, les recourants commencent par soutenir (p. 4 du recours) que
l'autorité cantonale a omis des faits essentiels sur trois points (contenu des
contrats de mandat du 12 mai 1986; envoi à E.________ SA d'un double de la
correspondance bancaire concernant le compte n° xxx de la société V.________;
déclarations de L.________ lors de son audition du 19 décembre 2005), sans plus
ample explication. Sous le titre de "violation du droit fédéral" (p. 14 ss du
recours), ils se plaignent ensuite d'appréciations arbitraires des preuves [par
ex. intention des recourants de rechercher des informations sur des comptes
ouverts post-mortem, engagement de Y.________ SA lors de la séance du 7
décembre 2004]. Ils n'exposent toutefois pas de façon circonstanciée en quoi
ces points de fait auraient été retenus ou écartés de manière insoutenable par
la cour cantonale. Dans leur grief le plus détaillé, ils soutiennent que
l'omission, par l'autorité précédente, de considérer les déclarations tenues
par L.________ le 19 décembre 2005 est arbitraire, car elles permettent de
démontrer l'absence de bonne foi de l'intéressé. Une telle explication ne
satisfait nullement aux exigences de motivation exposées ci-dessus. Il n'y a
donc pas lieu de s'écarter sur ces points de l'arrêt cantonal (art. 105 al. 1
LTF).

3.
La cour cantonale a considéré en premier lieu que les recourants ne pouvaient
pas succéder dans un éventuel droit contractuel du défunt aux renseignements
vis-à-vis des intimés, faute précisément de relation de mandat entre les
intimés et le défunt. Examinant ensuite si les recourants pouvaient se
prévaloir d'un droit à l'information de nature successorale, l'autorité
précédente a constaté que les renseignements demandés avaient pour but de faire
la lumière sur des prétendus détournements de fonds qui auraient eu lieu après
le décès de leur père, alors que les recourants étaient entrés en possession
des biens et les avaient confiés à différents mandataires. Dans ces conditions,
elle a jugé que leur action ne relevait pas du droit des successions, mais de
la responsabilité contractuelle de leurs propres mandataires. Il leur
appartenait ainsi d'agir directement en reddition de comptes contre ces
mandataires (qui ne sont pas les défendeurs dans la présente procédure) en
exigeant la production des pièces en mains de tiers (art. 963 CO). A titre
subsidiaire, les juges cantonaux ont relevé que, à supposer que le litige
relève du droit successoral, le droit aux renseignements, qui serait déterminé
en l'occurrence par le droit successoral italien, ne pourrait de toute façon
pas concerner des faits postérieurs au décès et initiés au moins en partie par
les recourants, respectivement par leurs mandataires.

L'arrêt déféré repose ainsi sur une double motivation. Les recourants devaient
donc non seulement attaquer valablement la motivation relative à la
qualification du litige comme relevant de la responsabilité contractuelle des
mandataires, mais aussi la motivation subsidiaire relative à la portée du droit
aux renseignements des héritiers concernant les faits postérieurs au décès (sur
les exigences de motivation du recours : ATF 133 IV 119 consid. 6.3). Or, comme
l'a relevé la cour cantonale, la portée du droit aux renseignements des
héritiers se détermine en l'occurrence selon le droit italien. En effet, le
défunt était un citoyen italien et avait son dernier domicile à Rome. Sa
succession est ainsi régie par le droit italien (art. 91 al. 1 LDIP) qui
détermine aussi les mesures qui peuvent être ordonnées et à quelles conditions
(art. 92 al. 1 LDIP), ce qui comprend notamment le droit aux renseignements des
héritiers (ATF 133 III 664 consid. 3 non publié et la réf. citée). Les
recourants ne soulèvent toutefois aucun grief d'application arbitraire du droit
étranger (sur le pouvoir d'examen du TF à l'égard du droit étranger dans les
affaires pécuniaires : ATF 133 III 446 consid. 3.1). Leurs reproches de
violation du droit fédéral (recours p. 17-18) laissent donc intacte la
motivation subsidiaire, qui permet à elle seule de maintenir l'arrêt attaqué
(ATF 133 III 221 consid. 7; 132 I 13 consid. 6 et les arrêts cités). Dans ces
circonstances, il est superflu d'entrer en matière sur les griefs relatifs à la
première motivation, soit de rechercher si la cour cantonale a qualifié à tort
le litige comme relevant de la responsabilité contractuelle des mandataires.

4.
Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure de sa
recevabilité, aux frais de ses auteurs (art. 66 al. 1 LTF). Les intimés n'ayant
pas été invités à répondre au recours, il n'y a pas lieu de leur allouer des
dépens.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis à la charge des
recourants.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour
de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 26 février 2010
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: La Greffière:

Hohl Rey-Mermet