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II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.430/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
5A_430/2009

Arrêt du 2 novembre 2009
IIe Cour de droit civil

Composition
Mmes et M. les Juges Hohl, Présidente,
Marazzi et Jacquemoud-Rossari.
Greffière: Mme Mairot.

Parties
X.________,
représenté par Me Laurent Marconi, avocat,
recourant,

contre

Président de la Cour de justice du canton de Genève,

Objet
contestation de l'émolument (restitution de cédules hypothécaires),

recours contre l'ordonnance du Président de la Cour de justice du canton de
Genève du 9 juin 2009.

Faits:

A.
Le 19 mars 2008, A.________ a déposé une action en revendication tendant à la
validation de l'ordonnance rendue par le Tribunal de première instance de
Genève le 1er février 2008, qui autorisait la saisie provisionnelle, en mains
de X.________, de trois cédules hypothécaires au porteur grevant ses immeubles
à hauteur de 150'000 fr., 970'000 fr. et 239'000 fr., et en ordonnait
l'enlèvement.

Dans cette procédure, A.________ a notamment conclu à la condamnation de
X.________ à lui restituer lesdites cédules moyennant paiement de la somme de
1'388'438 fr.50, lui-même s'engageant, une fois les cédules en sa possession, à
respecter à l'endroit de B.________ les clauses de la convention de prêt
conclue le 29 mars 2007 entre celui-ci et X.________, dont il reprenait la
créance avec effet dès le 1er décembre 2007.

Par jugement du 26 mars 2009, le Tribunal de première instance a accordé à
A.________ le plein de ses conclusions.

B.
X.________ a appelé de ce jugement. Par courrier du 20 mai 2009, le greffe de
la Cour de justice du canton de Genève lui a imparti un délai de 30 jours pour
verser la somme de 23'000 fr. à titre d'émolument, en application de l'art. 11
du Règlement du 9 avril 1997 fixant le tarif des greffes en matière civile
(RTGMC; RSG E 3 05.10).

Par lettre du 25 mai 2009, X.________ a contesté cette taxation, au motif que
l'action intentée par A.________ était une action en dégrèvement hypothécaire
au sens de l'art. 827 CC, d'une valeur litigieuse indéterminée, et non une
action en revendication, de sorte que l'émolument aurait dû s'élever à 800 fr.
au lieu de 23'000 fr.

Par ordonnance du 9 juin 2009, le Président de la Cour de justice a rejeté la
contestation du 25 mai 2009, prolongé au 6 juillet 2009 le délai imparti à
X.________ pour s'acquitter de la somme de 23'000 fr., sous peine
d'irrecevabilité de l'appel, et condamné celui-ci à verser à l'État de Genève
un émolument de décision de 300 fr.

C.
Contre cette ordonnance, X.________ exerce dans une même écriture un recours en
matière civile et, dans l'hypothèse où celui-ci devrait être déclaré
irrecevable, un recours constitutionnel subsidiaire. Il conclut, dans les deux
cas, à l'annulation de l'acte entrepris ainsi qu'à ce qu'il soit dit et
constaté que la valeur litigieuse de la présente cause est indéterminée au sens
de l'art. 11 al. 1 let. a RTGMC. Subsidiairement, il demande le renvoi de la
cause au Président de la Cour de justice pour qu'il statue à nouveau.

L'autorité cantonale s'en rapporte quant à l'octroi de l'effet suspensif et se
réfère aux considérants de sa décision quant au fond.

D.
Par ordonnance du 15 juillet 2009, la présidente de la cour de céans a admis la
requête d'effet suspensif.

Considérant en droit:

1.
1.1 L'ordonnance attaquée est une décision incidente prise en dernière instance
cantonale (art. 75 al. 1 LTF; art. 4 al. 2 RTGMC). En tant que décision
incidente n'entrant pas dans les prévisions de l'art. 92 LTF, elle ne peut
toutefois faire l'objet d'un recours au Tribunal fédéral que si elle remplit
l'une ou l'autre des conditions posées à l'art. 93 al. 1 LTF, soit notamment si
elle est susceptible de causer un dommage irréparable (let. a). Selon la
jurisprudence, la décision incidente exigeant d'une partie la fourniture de
sûretés en garantie des dépens ou une avance de frais en garantie du paiement
des émoluments de justice présumés, sous peine d'irrecevabilité de son recours,
est susceptible de causer un préjudice irréparable (arrêts 4A_270/2009 du 14
juillet 2009, consid. 1.1; 5A_55/2008 du 22 avril 2008, consid. 1 et les arrêts
cités).

La voie de recours à emprunter pour déférer une décision incidente au Tribunal
fédéral est déterminée par celle qui sera ouverte, le cas échéant, contre la
décision prise ultérieurement sur le fond (arrêt 5A_55/2008 précité).
L'ordonnance attaquée a été rendue en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) dans
une affaire pécuniaire dont la valeur litigieuse peut rester ouverte, dès lors
que le Tribunal fédéral examine les griefs soulevés par le recourant (violation
de l'art. 29 al. 2 Cst. et application arbitraire [art. 9 Cst.] du droit
cantonal) avec le même pouvoir d'examen dans le recours en matière civile et
dans le recours constitutionnel subsidiaire, tous deux interjetés dans un même
acte par le recourant.

Exercé par une personne qui a qualité pour le former (art. 76 al. 1 LTF), le
recours a été déposé dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42
al. 1 LTF) prévus par la loi. Il y a lieu, par conséquent, d'entrer en matière.

1.2 Le Tribunal fédéral ne sanctionne la violation de droits fondamentaux ainsi
que celle de dispositions de droit cantonal - et intercantonal - que si ce
moyen est invoqué et motivé par le recours (art. 106 al. 2 LTF), les exigences
de motivation correspondant à celles de l'ancien art. 90 al. 1 let. b OJ (ATF
133 II 249 consid. 1.4.2 p. 254). Le justiciable qui se plaint d'arbitraire ne
peut, dès lors, se borner à critiquer la décision attaquée comme il le ferait
dans une procédure d'appel, où l'autorité supérieure jouit d'une libre
cognition; il ne saurait, en particulier, se contenter d'opposer sa thèse à
celle de la juridiction cantonale, mais doit démontrer, par une argumentation
précise, que cette décision repose sur une application de la loi manifestement
insoutenable; les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 134
II 244 consid. 2.1 et 2.2 p. 245 s.; 134 V 53 consid. 3.3 p. 60; 130 I 258
consid. 1.3 p. 261/262; 107 Ia 186/187 et les références citées).

2.
Le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu garanti par
l'art. 29 al. 2 Cst., plus précisément de son droit d'obtenir une décision
motivée.

Vu la nature formelle du droit d'être entendu, dont la violation entraîne
l'annulation de la décision attaquée indépendamment des chances de succès du
recours sur le fond (ATF 127 V 431 consid. 3d/aa p. 437), il convient
d'examiner en priorité (ATF 124 I 49 consid. 1 p. 50) et avec une libre
cognition (ATF 121 I 54 consid. 2a p. 57) le moyen relatif à ce droit.

2.1 La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu consacré par l'art. 29
al. 2 Cst. l'obligation pour le juge de motiver ses décisions. Il suffit
cependant qu'il mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et
sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se
rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause.
L'autorité n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens
de preuve et griefs invoqués par les parties, mais elle peut au contraire se
limiter à ceux qui, sans arbitraire, lui paraissent pertinents (ATF 134 I 83
consid. 4.1 p. 88). Savoir si la motivation présentée est convaincante est une
question distincte de celle du droit à une décision motivée. Dès lors que l'on
peut discerner les motifs qui ont guidé la décision du juge, le droit à une
décision motivée est respecté, même si la motivation est erronée (arrêt 4A_474/
2008 du 13 février 2009, consid. 2.1; cf. ATF 126 I 97 consid. 2c p. 103).

2.2 Le recourant fait grief au juge cantonal d'avoir totalement éludé son moyen
consistant à dire qu'il convenait, pour calculer la valeur litigieuse, de
déduire de la valeur des titres revendiqués par le demandeur le montant que
celui-ci reconnaissait devoir au défendeur, ce qui, en application de l'art. 11
al. 1 RTGMC, ne justifiait pas une taxation d'émolument supérieure à 800 fr.

L'ordonnance attaquée retient qu'il n'est pas contesté que la valeur incorporée
dans les cédules hypothécaires au porteur s'élève au total à 1'359'000 fr. et
que le demandeur propose de verser la somme de 1'388'438 fr.50 en échange de la
restitution desdites cédules. Selon le juge cantonal, ces montants - similaires
- représentent la valeur litigieuse de l'action. Dès lors que les motifs de la
décision attaquée permettent de comprendre les éléments sur lesquels le juge
cantonal s'est fondé et le raisonnement qu'il a tenu, il ne saurait être
question de violation du droit d'être entendu, quand bien même la motivation
serait-elle erronée. Certes, une décision qui n'est pas dépourvue de motifs ne
peut, néanmoins, pas être considérée comme suffisamment motivée si le
justiciable n'y trouve pas les raisons pour lesquelles il n'a pas été tenu
compte d'arguments pertinents (arrêt 5P.246/1991 du 24 février 1992, consid.
2a, publié in SJ 1992 p. 398; ATF 101 Ia 545 consid. 4d in fine p. 552). En
l'occurrence toutefois, le juge cantonal a considéré qu'il n'y avait pas lieu
de s'écarter de la jurisprudence du Tribunal fédéral, qui considère que la
valeur litigieuse d'une action en revendication est égale à la valeur des
objets revendiqués. Ce faisant, il a implicitement rejeté l'opinion du
recourant selon laquelle le montant que le demandeur admet lui devoir doit
venir en soustraction de la valeur des cédules. Au demeurant, il ressort de
l'argumentation du recours que le défendeur a saisi la portée de l'ordonnance
déférée et a pu l'attaquer en toute connaissance de cause (ATF 114 Ia 223
consid. 2d p. 242). Le grief apparaît ainsi mal fondé.

3.
Le recourant reproche en outre à l'autorité cantonale d'avoir rendu une
décision insoutenable en méconnaissant le principe énoncé en droit cantonal -
et reprenant du reste la solution applicable en droit fédéral - selon lequel le
montant qu'un demandeur admet devoir à sa partie adverse doit venir en
soustraction de la valeur litigieuse.

Par ce grief, purement appellatoire, le recourant se contente d'opposer son
opinion à celle de l'autorité cantonale, sans tenter de démontrer que le
principe auquel il se réfère trouverait à s'appliquer dans le cas particulier.
Les références qu'il cite à l'appui de sa critique concernent en effet des cas
différents de la présente espèce, puisque les causes qu'il évoque ont trait à
des actions en exécution d'un contrat bilatéral dans lesquelles le demandeur
opère compensation avec sa propre prestation et ne réclame que la différence au
défendeur. Au reste, le recourant se contredit en tentant de démontrer,
citations à l'appui, que la contestation porte sur une valeur litigieuse
déterminable, mais nulle, tout en concluant formellement à ce qu'il soit dit et
constaté que ladite valeur litigieuse est indéterminée au sens de l'art. 11 al.
1 let. a RTGMC. Dès lors, il ne démontre pas que l'autorité cantonale serait
tombée dans l'arbitraire (sur cette notion, voir ATF 134 I 263 consid. 3.1 p.
266) en estimant que la valeur litigieuse équivalait à celle des cédules
revendiquées. Autant qu'il est suffisamment motivé, le moyen se révèle dès lors
infondé.

4.
En conclusion, le recours apparaît entièrement mal fondé et doit par conséquent
être rejeté dans la mesure où il est recevable, aux frais de son auteur (art.
66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 68 al. 3 LTF). Vu
que l'effet suspensif a été accordé au présent recours, il appartiendra à
l'autorité cantonale de fixer un nouveau délai au recourant pour effectuer
l'avance des frais d'appel.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant et au Président de
la Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 2 novembre 2009

Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: La Greffière:

Hohl Mairot