Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.404/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
5A_404/2009

Arrêt du 5 novembre 2009
IIe Cour de droit civil

Composition
Mmes et MM. les Juges Hohl, Présidente, Escher,
L. Meyer, Hermann et P.-A. Berthoud, Juge suppléant.
Greffier: M. Fellay.

Parties
X.________,
représenté par Me Marc Bellon, avocat,
recourant,

contre

Y.________,
représentée par Me Doris Leuenberger, avocate,
intimée.

Objet
transcription d'un mariage étranger,

recours contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Genève du 28
avril 2009.

Faits:

A.
Y.________, ressortissante suisse et iranienne, et X.________, de nationalité
suisse, se sont rencontrés dans le courant de l'année 1994, alors qu'ils
étaient tous deux mariés, et ont fait ménage commun dès 1995. Y.________ a
divorcé le 9 novembre 1995, X.________ le 11 avril 2002.

A l'occasion d'un voyage en Iran, les intéressés ont contracté à Téhéran, le 6
mars 2005, un « mariage provisoire légitime sigheh » (ci-après: mariage «
sigheh ») d'une durée de cinquante ans. L'acte émis à cette occasion (ci-après:
l'acte de mariage n° 1), rédigé en langue persane et comportant la photographie
et la signature des comparants, a été enregistré le même jour dans un office
notarial.

De retour à Genève, Y.________ et X.________ se sont séparés le 24 mai 2005. Au
début du mois de juin 2005, Y.________ a sollicité de la Direction de l'état
civil du canton de Genève (ci-après: la Direction de l'état civil)
l'enregistrement du mariage célébré le 6 mars 2005. Elle a produit un avis de
l'Institut suisse de droit comparé du 23 mai 2005 selon lequel un tel mariage
pouvait être reconnu en Suisse, à l'exception de sa limite temporelle. Le 28
juin 2005, l'Office fédéral de l'état civil s'est rallié à l'avis exprimé par
l'Institut suisse de droit comparé. Il a invité l'Ambassade de Suisse en Iran à
légaliser l'acte de mariage et la Direction de l'état civil à reconnaître le
mariage « sigheh », sans limite dans le temps.

Le 9 mars 2006, Y.________ a transmis à la Direction de l'état civil un nouvel
acte de mariage (ci-après: l'acte de mariage n° 2), établi sur la base de
l'acte de mariage n° 1 mais dépourvu de signatures, dûment légalisé par la
représentation diplomatique suisse à Téhéran. Se fondant sur les deux actes de
mariage produits, la Direction de l'état civil a ordonné la transcription dans
les registres suisses de l'état civil du mariage contracté le 6 mars 2005. En
avril et mai 2006, X.________ est intervenu à plusieurs reprises auprès de la
Direction de l'état civil aux fins de faire radier cet enregistrement du
mariage.

Par décision du 9 mai 2006, le Département des Institutions du canton de
Genève, en sa qualité d'autorité de surveillance de l'état civil, a rejeté la
requête de radiation de la transcription du mariage de X.________. Il a
confirmé que le mariage contracté le 6 mars 2005 à Téhéran était valable en
droit suisse, qu'il n'était pas contraire à l'ordre public suisse à condition
d'être transcrit sans limitation temporelle et qu'il ne pouvait être annulé que
par un jugement.

B.
Saisi d'un recours de X.________ contre la décision précitée, le Tribunal
administratif du canton de Genève l'a rejeté par arrêt du 28 avril 2009,
communiqué aux parties le 11 mai suivant. Il a retenu en substance que le
mariage « sigheh » était suffisant en Iran pour créer un statut marital, que
cette forme de mariage était reconnue en droit musulman chiite, qu'elle était
expressément prévue par le code civil iranien, que seule la clause limitant
dans le temps les effets de cette institution était contraire à l'ordre public
suisse et que, sous cette réserve, la transcription d'un tel mariage dans les
registres suisses de l'état civil était possible. Pour le surplus, les
conditions fixées pour la transcription avaient été respectées. Aucune des
parties n'avait invoqué l'existence d'une cause absolue d'annulation du
mariage. L'allégation de X.________ selon laquelle il n'avait pas eu
l'intention d'épouser Y.________ le 6 mars 2005 ne constituait qu'une cause
relative d'annulation du mariage, qui relevait de la compétence du juge civil.
En outre, la plainte déposée par X.________ pour escroquerie et faux dans les
titres avait été classée, décision qui avait été confirmée par la Chambre
d'accusation du canton de Genève. Enfin, X.________ n'avait pas intenté
d'action en Iran aux fins de faire constater que, comme il le prétendait,
l'acte litigieux du 6 mars 2005 n'était pas valable selon le droit iranien.

C.
Par acte du 11 juin 2009 intitulé « recours en matière de droit public »,
X.________ s'est adressé au Tribunal fédéral, le requérant préalablement de
définir les termes « mariage valablement célébré à l'étranger » au sens de
l'art. 45 al. 1 de la loi fédérale sur le droit international privé du 18
décembre 1987 (LDIP; RS 291) et, principalement, d'annuler l'arrêt du Tribunal
administratif cantonal, de renvoyer la cause à cette autorité pour nouvelle
décision, d'ordonner l'ouverture d'une enquête sur la validité du mariage du 6
mars 2005 du point de vue iranien et de réserver la décision des autorités
judiciaires iraniennes à cet égard. Le recourant se plaint d'une application
erronée de l'art. 45 al. 1 LDIP, d'une constatation arbitraire des faits et de
la violation de son droit d'être entendu.
Le Tribunal administratif cantonal a renoncé à déposer une réponse.

Y.________ conclut au rejet du recours et sollicite l'assistance judiciaire
pour la procédure fédérale.

Considérant en droit:

1.
1.1 L'intitulé erroné ("recours en matière de droit public") du mémoire
n'entraîne aucun préjudice pour le recourant, pour autant que les conditions de
recevabilité du recours qui serait ouvert soient réunies (ATF 134 III 379
consid. 1.2 p. 382 et les arrêts cités).

1.2 Le recours vise une décision concernant la radiation d'une inscription au
registre de l'état civil au sens de l'art. 42 al. 1 CC. Portant sur la tenue du
registre de l'état civil, une telle décision est sujette au recours en matière
civile en vertu de l'art. 72 al. 2 let. b ch. 2 LTF (ATF 135 III 389 consid.
1.1; arrêt 5P.338/2004 du 31 mai 2005 consid. 1.1).

Interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes requises (art.
42 LTF) contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu par une autorité cantonale de
dernière instance (art. 75 LTF), le recours est recevable en principe comme
recours en matière civile. Le recourant a par ailleurs qualité pour recourir
(art. 76 al. 1 LTF).

1.3 Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit
fédéral (art. 95 let. a LTF), lequel englobe les droits constitutionnels (ATF
133 II 446 consid. 3.1 p. 447, 462 consid. 2.3 p. 466). Le Tribunal fédéral
applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être lié ni par les
motifs de l'autorité précédente, ni par les moyens des parties; il peut ainsi
admettre le recours pour d'autres motifs que ceux invoqués par le recourant,
comme il peut le rejeter en opérant une substitution de motifs (ATF 133 III 545
consid. 2.2 p. 550). Compte tenu des exigences de motivation posées à l'art. 42
al. 2 LTF, le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs soulevés;
il n'est pas tenu de traiter, à l'instar d'une juridiction de première
instance, toutes les questions juridiques pouvant se poser lorsqu'elles ne sont
plus discutées devant lui (ATF 133 IV 150 consid. 1.2 p. 152).

2.
2.1 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont
été constatés de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens
de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est
susceptible d'influencer le sort de la cause (art. 97 al. 1 in fine LTF). Le
recourant qui soutient que les faits ont été établis d'une manière
manifestement inexacte (art. 97 al. 1 LTF), à savoir arbitraire au sens de
l'art. 9 Cst. (ATF 133 II 249 consid. 1.2.2 p. 252), doit démontrer, par une
argumentation précise, en quoi consiste la violation; le Tribunal fédéral
n'examine, en effet, la violation de l'interdiction de l'arbitraire que si un
tel grief a été invoqué et motivé par le recourant (art. 106 al. 2 LTF),
c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de façon claire et
détaillée (ATF 134 II 244 consid. 2.2 p. 246; 133 II 396 consid. 3.1 p. 399),
les exigences de motivation de l'acte de recours correspondant à celles de
l'ancien art. 90 al. 1 let. b OJ (ATF 134 I 83 consid. 3.2 p. 88; 133 II 249
consid. 1.4.2 p. 254); les critiques de nature appellatoire sont irrecevables
(ATF 133 III 585 consid. 4.1 p. 589; 589 consid. 2 p. 591/592 et les arrêts
cités). Le recourant ne saurait en outre se contenter de renvoyer aux actes
cantonaux ou de reproduire la motivation déjà présentée dans la procédure
cantonale: l'art. 42 al. 2 LTF exige qu'il discute au moins de manière
succincte les considérants de la décision attaquée (ATF 134 II 244 consid.
2.1-2.3 p. 245/247; 133 II 396 consid. 3.1 p. 399/400 et la jurisprudence
citée).

Quant à l'appréciation des preuves et à la constatation des faits, le Tribunal
fédéral se montre réservé, vu le large pouvoir qu'il reconnaît en la matière
aux autorités cantonales (ATF 120 Ia 31 consid. 4b p. 40; 104 Ia 381 consid. 9
p. 399 et les arrêts cités). Il n'intervient, du chef de l'art. 9 Cst., en
relation avec les art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, que si le juge n'a
manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, a omis
sans raisons objectives de tenir compte de preuves pertinentes ou a opéré, sur
la base des éléments recueillis, des déductions insoutenables (ATF 129 I 8
consid. 2.1 p. 9; 134 V 53 consid. 4.3 p. 62).

2.2 Le recourant a annexé à son mémoire de recours un jugement par défaut du 6
juin 2009 de la 5ème Chambre du Tribunal général de Téhéran ordonnant
l'annulation de la mention du mariage dans une pièce d'identité de l'intimée.
Cette pièce nouvelle est postérieure à la date de l'arrêt attaqué et ne peut
par conséquent pas être prise en considération (art. 99 al. 1 LTF). Il s'ensuit
que les conclusions du recourant tendant à ordonner l'ouverture d'une enquête
portant sur la validité du mariage du 6 mars 2005 du point de vue du droit
iranien et à réserver la décision des autorités judiciaires iraniennes à cet
égard sont irrecevables dans la mesure où elles se fondent sur ladite pièce
nouvelle.

3.
Se référant à l'art. 45 al. 1 LDIP, selon lequel un mariage valablement célébré
à l'étranger est reconnu en Suisse, le recourant fait valoir que le Tribunal
administratif a arbitrairement privilégié l'examen de la question de savoir si,
abstraitement, un mariage « sigheh » pouvait être reconnu en Suisse, après
correction à l'aune de l'ordre public suisse, plutôt que de déterminer en
priorité si, concrètement, l'acte de mariage du 6 mars 2005 faisait réellement
des intéressés des époux du point de vue du droit iranien. En rejetant sa thèse
selon laquelle cet acte était sans valeur du point de vue du droit étranger, le
Tribunal administratif aurait constaté arbitrairement les faits au sens de
l'art. 9 Cst., méconnu son obligation d'établir d'office la teneur du droit
étranger selon l'art. 16 al. 1 LDIP et violé le droit d'être entendu du
recourant concernant des éléments de fait déterminants à teneur de l'art. 29
al. 2 Cst.

3.1 Le recourant reproche à cet égard au Tribunal administratif d'avoir
arbitrairement tenu pour établi que le mariage célébré le 6 mars 2005 avait
fait l'objet d'une inscription dans le registre des mariages du bureau notarial
n° 78, alors qu'il avait établi par pièce que le numéro d'inscription 3413
figurant dans l'acte de mariage n° 2 indiquait, sous cette référence, le
mariage d'un autre couple.

Cette critique ne saurait être retenue. Il ressort en effet d'une attestation
du notaire en charge de l'office public n° 78 que le document produit par le
recourant fait état d'un mariage du type « aghd » (mariage sans limitation dans
le temps), au demeurant célébré le 29 janvier 2006, alors que le numéro
d'inscription 3413 attribué aux parties correspond à un numéro des registres
des mariages « sigheh ». C'est donc sans arbitraire que le Tribunal
administratif a retenu que le mariage célébré le 6 mars 2005 avait été dûment
inscrit dans le registre des mariages « sigheh ». Cette inscription est
d'ailleurs confirmée dans un document d'état civil produit au dossier, soit un
« shenasnameh », correspondant à la fois à une carte d'identité et à
l'équivalent d'un certificat de naissance.

3.2 Au dire du recourant, le Tribunal administratif aurait également fait
preuve de partialité dans l'établissement des faits en omettant de mentionner
le contenu d'un passage recouvert au correcteur liquide d'un document produit
par l'intimée le 28 mars 2007, soit l'attestation de l'existence du mariage
célébré le 6 mars 2005, établie à la suite de la perte de l'original de l'acte
de mariage n°1. Selon lui, le passage en question mentionnait que le document
n'avait pas été enregistré au registre des mariages et l'utilisation du
correcteur ne pouvait qu'être le fait de l'intimée.
Il peut paraître surprenant qu'à l'occasion de la brève consultation de
l'original du document en cause, le 19 juillet 2007, dans les locaux du
Tribunal administratif, le traducteur-juré mandaté par le recourant soit
parvenu à déchiffrer le contenu du passage occulté, tant le correcteur utilisé
masque efficacement le texte. A supposer que celui-ci fasse vraiment état d'une
absence d'enregistrement, le Tribunal administratif pouvait s'abstenir de faire
procéder à des investigations complémentaires pour tenter d'en préciser la
teneur et de déterminer l'auteur de l'utilisation du correcteur liquide: en
effet, il est vraisemblable, d'une part, que ce n'est pas le document incriminé
qui a été enregistré mais bien l'original de l'acte de mariage n° 1; d'autre
part, il est établi par pièce que le mariage célébré le 6 mars 2005 a bien été
inscrit dans le registre des mariages « sigheh ».

Les faits, tels que retenus sur ce point dans l'arrêt attaqué, ne révèlent ni
arbitraire ni partialité de la part du Tribunal administratif.

4.
Le recourant invoque également l'établissement arbitraire des faits de la cause
résultant de la violation formelle de son droit d'être entendu. Il se plaint à
cet égard du refus que lui a opposé le Tribunal administratif de verser au
dossier l'écriture spontanée qu'il a produite le 26 juin 2008 et d'ordonner un
second échange d'écritures au sens de l'art. 74 de la loi genevoise du 12
septembre 1985 sur la procédure administrative (LPA/GE).

4.1 Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst.,
comprend notamment pour le justiciable le droit de s'exprimer sur les éléments
pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique,
d'obtenir l'administration des preuves pertinentes et valablement offertes, de
participer à l'administration des preuves essentielles et de se déterminer sur
son résultat lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF
133 I 270 consid. 3.1; 126 I 15 consid. 2a/aa; 124 I 49 consid. 3a).
Le juge peut cependant renoncer à l'administration de certaines preuves,
notamment lorsque les faits dont les parties veulent rapporter l'authenticité
ne sont pas importants pour la solution du litige. Ce refus d'instruire ne
viole leur droit d'être entendues que si l'appréciation anticipée de la
pertinence du moyen de preuve offert, à laquelle le juge a ainsi procédé, est
entachée d'arbitraire (ATF 131 I 153 consid. 3 et les arrêts cités).
L'arbitraire prohibé par l'art. 9 Cst. ne résulte pas du seul fait qu'une autre
solution pourrait entrer en considération ou même qu'elle serait préférable; le
Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue en dernière instance
cantonale que si elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une
norme ou un principe juridique clair et indiscuté ou si elle heurte de manière
choquante le sentiment de la justice ou de l'équité. Il ne suffit pas que la
motivation de la décision soit insoutenable; encore faut-il qu'elle soit
arbitraire dans son résultat (ATF 132 I 13 consid. 5.1; 131 I 217 consid. 2.1,
57 consid. 2; 129 I 173 consid. 3.1).

Le droit d'être entendu comprend en principe aussi le droit de répliquer (ATF
133 I 98, 100; 132 I 42). Lorsque le droit de procédure applicable ne prévoit
pas de communication de la prise de position, l'autorité doit informer la
partie du dépôt de celle-ci et de la possibilité de se déterminer à son sujet.
S'il ne prévoit en principe qu'un seul échange d'écritures, l'autorité peut se
limiter dans un premier temps à communiquer la prise de position à titre
d'information, sans avis formel de la possibilité de répliquer; la partie est
ainsi mise en situation de faire ou non usage de cette possibilité; si elle
s'en abstient, elle est censée y avoir renoncé (ATF 132 I 42 consid. 3.3.3).
Selon l'art. 74 LPA/GE, « la juridiction peut autoriser une réplique et une
duplique si ces écritures sont estimées nécessaires ». En droit cantonal,
l'opportunité d'un second échange d'écritures est ainsi laissée à
l'appréciation de l'autorité de jugement, qui peut décider que les éléments de
fait et de droit résultant d'un premier échange d'écritures sont suffisants
pour lui permettre de se prononcer. Selon la jurisprudence, lorsque l'autorité
n'a pas - ou pas suffisamment - motivé sa décision et n'a indiqué en détail les
motifs de cette décision que dans sa réponse, l'autorité de recours viole le
droit d'être entendu en refusant de transmettre au recourant cette réponse pour
qu'il puisse répliquer (ATF 111 Ia 2 consid. 3). Plus généralement, l'autorité
a l'obligation de communiquer au recourant les écritures de l'intimé quand
celles-ci contiennent des éléments nouveaux et importants au sujet desquels le
recourant n'a pas pu prendre position (ATF 114 Ia 84 consid. 3 p. 87, 307
consid. 4b p. 314; 101 Ia 298 consid. 4a p. 304).
4.2
4.2.1 Par courrier du 26 juin 2008, le recourant a informé le Tribunal
administratif de ce qu'il avait saisi les autorités judiciaires iraniennes
d'une requête devant lui permettre d'accéder au registre d'état civil de
Téhéran et que les documents qu'il avait ainsi obtenus démontraient que
l'intimée n'était pas mariée. Le Tribunal administratif lui a retourné ce
courrier et ses annexes, en précisant que les écritures spontanées n'étaient
pas admises.

Le Tribunal administratif était fondé à agir de la sorte dès lors qu'il avait
averti les parties, le 13 février 2008, qu'aucune correspondance ou production
de pièces ne serait admise jusqu'à droit jugé après la production de l'écriture
du recourant agendée au 28 février 2008. Pour le surplus, les pièces produites
par le recourant le 26 juin 2008 étaient constituées d'un acte de naissance de
l'intimée, sans indication concernant son état civil, et de l'attestation de
l'absence d'enregistrement du mariage dans le registre des mariages du type «
aghd » (cf. consid. 3.1 ci-dessus), soit d'un fait dont le tribunal avait déjà
connaissance. Ces pièces n'étaient donc pas de nature à prouver l'allégation du
recourant selon laquelle l'intimée était considérée comme célibataire au sens
du droit iranien.

Le refus du Tribunal administratif de verser ces documents au dossier ne
constituait donc pas une violation du droit d'être entendu du recourant.
4.2.2 Le recourant se plaint également du refus opposé par le Tribunal
administratif à ses différentes requêtes tendant au dépôt d'une réplique. Le 26
juillet 2006, il a requis de pouvoir répliquer aux observations du département
cantonal; le 15 août 2006, il a sollicité la faculté de se déterminer sur
certaines pièces versées au dossier par l'intimée; enfin, le 31 octobre 2006,
il a réitéré sa requête, l'assortissant d'une demande d'expertise relative au
décollement des timbres officiels et à la contre-façon de sa signature sur un
document produit par l'intimée. Plutôt que d'ordonner un second échange
d'écritures, la juge déléguée du Tribunal administratif a appointé la tenue
d'une audience de comparution personnelle des parties, qu'elle a fixée au 1er
décembre 2006. Simultanément, elle a ordonné la production, par le département
cantonal et par l'intimée, d'un certain nombre de pièces originales destinées à
vérifier la validité de la transcription du mariage litigieux en Iran et dans
les registres de l'état civil cantonal.
Le 10 novembre 2008, le Tribunal administratif a adressé une copie des pièces
produites par le département cantonal au recourant. Ce dernier a bénéficié de
la possibilité de se déterminer sur ces documents et, d'une manière plus
générale, sur les écritures des autres parties lors de l'audience du 1er
décembre 2006. Au cours de celle-ci, il a eu l'occasion de verser au dossier de
nouvelles traductions de certaines pièces produites par l'intimée. La pièce
originale de l'acte de mariage n° 1, dont la production par l'intimée a été
ordonnée à l'issue de l'audience de comparution personnelle des parties, a été
versée au dossier, en copie, le 28 mars 2007 et, dans sa version originale, le
16 juillet 2007. Le recourant a pu se déterminer, respectivement les 2 mai et
19 juillet 2007, sur chacune de ces productions. Enfin, suite à la production
par l'intimée du « shenasnameh » sous forme de photocopie le 10 décembre 2007,
de traduction certifiée conforme le 7 février 2008 et d'original le 28 mars
2008, le recourant a pu présenter ses observations, ce qu'il a fait à teneur
d'un courrier du 28 février 2008, accompagné de pièces. Ce courrier a été
enregistré par le Tribunal administratif comme une écriture, même si elle n'a
pas été formellement désignée par le terme de réplique.

Le Tribunal administratif a donc donné suite à toutes les réquisitions
présentées par le recourant les 26 juillet, 15 août et 31 octobre 2006, à
l'exception de la requête tendant à la mise en oeuvre d'une expertise
concernant l'authenticité de l'acte de mariage n° 2 produit par l'intimée. Bien
que le recourant ne s'en plaigne pas devant le Tribunal fédéral, il faut
constater que ce refus était justifié au regard de l'issue réservée à la
plainte pénale déposée par le recourant le 7 juin 2006 à l'encontre de
l'intimée pour escroquerie et faux dans les titres. Cette plainte, qui
reprenait l'ensemble des faits contenus dans le recours déposé auprès du
Tribunal administratif, a fait l'objet d'une ordonnance de classement de la
part du Procureur général du canton de Genève le 24 juillet 2006, confirmée sur
recours par la Chambre d'accusation le 17 octobre 2006. Selon l'autorité
pénale, la prévention de faux dans les titres, qui concernait notamment l'acte
de mariage n° 2, n'était pas établie. Le Tribunal administratif était dès lors
fondé à renoncer à la mesure d'instruction sous forme d'expertise requise par
le recourant.

Le Tribunal administratif n'a par conséquent pas abusé de son pouvoir
d'appréciation en refusant d'ordonner un second échange d'écritures formel au
sens de l'art. 74 LPA/GE. En effet, les éléments de fait et de droit résultant
du premier échange d'écritures, de l'audience de comparution personnelle des
parties, des pièces versées au dossier postérieurement à cette audience et de
l'écriture du recourant du 28 février 2008 étaient suffisants pour qu'il puisse
se prononcer sur tous les aspects de la cause.
4.2.3 C'est en vain que le recourant critique l'appréciation du Tribunal
administratif selon laquelle il n'avait pas contesté l'existence de deux types
de registres matrimoniaux, l'un pour les mariages ordinaires, l'autre pour les
mariages « sigheh », au motif qu'il a été privé de la possibilité de répliquer.
Il pouvait parfaitement le faire dans son écriture du 28 février 2008, qu'il a
essentiellement consacrée à la critique de l'authenticité et de la traduction
du « shenasnameh » produit par l'intimée.

C'est en vain également qu'il reproche au Tribunal administratif d'avoir retenu
qu'il n'avait pas intenté action en Iran pour obtenir des autorités compétentes
la constatation de l'invalidité de l'acte de mariage litigieux selon le droit
iranien. En effet, le courrier du 26 juin 2008, dont il se plaint qu'il lui a
été retourné au titre d'écriture non requise, faisait uniquement état d'une
requête d'accession au registre d'état civil de Téhéran (cf. consid. 4.2.1
ci-dessus); en outre, les documents qu'il s'était ainsi procurés démontraient
uniquement l'inexistence d'un mariage de type « aghd » et non d'un mariage «
sigheh » (ibidem).
4.2.4 Le recourant fait encore grief au Tribunal administratif d'avoir
mentionné dans l'arrêt attaqué qu'il n'avait pas formulé d'observations après
la production du « shenasnameh » original, en particulier qu'il n'avait pas
soutenu qu'il pût s'agir d'un faux. S'il est exact que le recourant ne s'est
pas manifesté après la consultation du document original - alors qu'il s'est
empressé de réagir lors de toute autre production de pièces de la part de
l'intimée -, il avait cependant formulé un certain nombre de remarques
critiques dans son écriture du 28 février 2008 au sujet de la photocopie et du
duplicata de la traduction de cette pièce, qui avaient été versés au dossier
antérieurement. Il avait notamment invoqué certaines divergences formelles
entre la traduction produite et celle effectuée par le traducteur-juré qu'il
avait consulté. Il n'est en outre pas certain que le dépôt d'observations non
sollicitées aurait été agréé par le Tribunal administratif, comme l'a démontré
le renvoi à son expéditeur du courrier du recourant du 26 juin 2008. Si la
mention de l'absence de réaction du recourant peut paraître discutable, il faut
constater qu'elle n'est pas déterminante pour l'issue du litige. En effet, le «
shenasnameh » original faisait clairement état du mariage de l'intimée et du
recourant le 6 mars 2005 devant l'office notarial n° 78 de Téhéran.
4.2.5 Le recourant soutient enfin que le Tribunal administratif a fait preuve
de légèreté en écartant la prévention d'usage de faux dans les titres à
l'encontre de l'intimée au motif qu'il n'avait fourni aucun élément inconnu du
juge pénal et qu'il n'avait pas contesté l'appréciation de celui-ci.

S'il est vrai que l'ordonnance de la Chambre d'accusation ne pouvait pas faire
l'objet d'un recours au Tribunal fédéral, le Tribunal administratif pouvait se
fonder sur l'appréciation du juge pénal quant à la réalité du délit de faux
dans les titres dénoncé par le recourant, dès lors que les faits invoqués à
l'appui de la plainte pénale étaient identiques à ceux allégués devant le
Tribunal administratif. Quant aux explications fournies lors de l'audience du
1er décembre 2006 par l'intimée au sujet des circonstances de l'établissement
de l'acte de mariage n° 2, que le recourant assimile au consentement à
l'élaboration d'un faux dans les titres, elles démontrent que l'intéressée
s'est contentée de fournir certaines indications à l'auteur du document,
précisément pour éviter l'accusation de faux dans les titres.

Les critiques du recourant sur ce point sont donc infondées.

5.
Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure de sa
recevabilité.

Dès lors qu'il succombe, le recourant doit supporter les frais judiciaires
(art. 66 al. 1 LTF) et verser une indemnité à titre de dépens à l'intimée (art.
68 al. 1 LTF). Dans ces conditions, la requête d'assistance judiciaire
présentée par celle-ci devient sans objet.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Une indemnité de 2'000 fr., à payer à l'intimée à titre de dépens, est mise à
la charge du recourant.

4.
La requête d'assistance judiciaire présentée par l'intimée est sans objet.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal administratif et au
Département des Institutions du canton de Genève.

Lausanne, le 5 novembre 2009
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: Le Greffier:

Hohl Fellay