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II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.328/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
5A_328/2009

Arrêt du 23 juin 2009
IIe Cour de droit civil

Composition
Mme et MM. les Juges Escher, Juge présidant,
Marazzi et von Werdt.
Greffière: Mme Rey-Mermet.

Parties
X.________,
recourant,

contre

Y.________,
intimé, représenté par Me Marie-Claude
de Rham-Casthélaz, avocate,

Objet
action en revendication,

recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de
Genève du 20 mars 2009.

Faits:

A.
Lors d'une vente aux enchères organisée par l'office des poursuites du canton
de Genève le 16 décembre 1999, A.________ a acquis la parcelle n° 171 sise en
zone agricole de la commune de Z.________ (GE).

Peu après cette acquisition, le 30 décembre 1999, elle a conclu avec son frère
X.________ un contrat de bail à ferme agricole affermant ce fonds dès le 1er
janvier 2000 et pour une durée de 24 ans.

B.
A la suite d'une cession de créances du 2 avril 2001, la société D.________ SA
(ci-après : la Société) est devenue créancière de A.________ à concurrence de
116'087 fr. 65 et de ses frères X.________ et B.________ pour des montants
respectifs de 678'966 fr. 70 et 410'479 fr. 05. Toutes ces créances, cédées
pour un prix global de 1'100'000 fr., étaient garanties par des gages
immobiliers, dont une cédule hypothécaire en premier rang de 85'000 fr. grevant
la parcelle n° 171.

La Société a entamé une poursuite en réalisation de gage portant sur la
parcelle n° 171. Le 23 octobre 2003, l'office des poursuites a procédé à la
vente aux enchères de cette parcelle. La Société l'a acquise au prix de 145'000
fr.

Par décision du 20 janvier 2004, la commission foncière agricole du canton de
Genève a débouté la Société de sa requête en autorisation d'acquérir la
parcelle n° 171. Le 8 mars 2005, le Tribunal administratif a rejeté le recours
formé contre cette décision. Le 3 février 2006, le Tribunal fédéral a rejeté le
recours formé contre l'arrêt cantonal (arrêt 5A.14/2005).

A la suite de ce refus d'autorisation, des divergences sont apparues entre les
parties au sujet d'un accord conclu en novembre 2003. A.________ et ses frères
soutenaient que, moyennant le paiement du montant prévu dans cet accord, ils
auraient réglé leurs dettes à l'égard de la Société. De son côté, celle-ci
estimait qu'elle demeurait créancière « à propos de la parcelle n° 171 ».

C.
Le 3 octobre 2006, l'office des poursuites a procédé à une nouvelle vente aux
enchères de la parcelle n° 171 qui a été adjugée à Y.________, agriculteur,
pour un prix de 175'000 fr.

Le 5 octobre 2006, l'adjudicataire a résilié le bail à ferme agricole de
X.________ pour le 31 octobre 2007.

Par décision du 17 octobre 2006, définitive et exécutoire, la commission
foncière agricole a autorisé l'acquisition de la parcelle n° 171 par
Y.________.

D.
Le 8 janvier 2007, X.________ a saisi le Tribunal de première instance du
canton de Genève d'une demande en constatation de la nullité de cette
résiliation et, subsidiairement, en prolongation du bail. Par jugement du 30
novembre 2007, l'autorité saisie a déclaré irrecevable pour cause de tardiveté
la demande de prolongation et a rejeté l'action en constatation de la nullité
de la résiliation.

Parallèlement, X.________ a déposé une plainte auprès de la Commission de
surveillance des offices des poursuites afin de faire constater la nullité de
la vente aux enchères forcées de la parcelle n° 171. Par décision du 22 mars
2007, définitive et exécutoire, l'autorité saisie a déclaré la plainte
irrecevable.

E.
Le 15 avril 2008, Y.________ a ouvert devant le Tribunal de première instance
une action en revendication au sens de l'art. 641 al. 2 CC concluant à ce que
X.________ soit condamné à libérer la parcelle n° 171 et à la lui remettre dans
l'état où elle se trouvait à la fin du bail à ferme agricole, échu au 31
octobre 2007.

X.________ s'est opposé à la demande. Il a fait valoir diverses erreurs
commises par l'office des poursuites lors des ventes aux enchères successives
de la parcelle. Il prétextait aussi que la société poursuivante n'avait plus de
créance à l'égard de la famille depuis le paiement de novembre 2003, de sorte
qu'elle n'était plus fondée à requérir, en 2006, la vente aux enchères de la
parcelle n° 171.

Par jugement du 13 novembre 2008, le Tribunal de première instance a fait droit
aux conclusions de la demande.
Saisie d'un appel de X.________, la Cour de justice du canton de Genève a
confirmé le jugement attaqué. Elle a relevé d'une part que Y.________ était
devenu valablement propriétaire à la suite de la vente aux enchères du 3
octobre 2006, dont la validité ne pouvait être plus être examinée et que,
d'autre part, X.________ avait échoué à démontrer qu'il avait le droit de
posséder la parcelle.

F.
Le 7 mai 2009, X.________ a déposé un recours en matière civile contre cet
arrêt, en concluant au rejet de l'action en revendication.

Par ordonnance du 2 juin 2009, la présidente de la cour de céans a admis la
requête d'effet suspensif.

Considérant en droit:

1.
Interjeté par la partie qui a entièrement succombé dans ses conclusions
libératoires et qui a ainsi la qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF),
dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière civile (art. 72 al.
1 LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 75 LTF) dans une
affaire pécuniaire dont la valeur litigieuse dépasse le seuil de 30'000 fr. de
l'art. 74 al. 1 let. b LTF, le recours est en principe recevable, puisqu'il a
été déposé dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus
par la loi.

2.
Le recours peut être interjeté notamment pour violation du droit fédéral (art.
95 let. a LTF), y compris les droits constitutionnels. Il doit être motivé
(art. 42 al. 1 LTF) et sa motivation doit expliquer succinctement en quoi
l'acte attaqué viole le droit (art. 42 al. 2 LTF). Les griefs mentionnés à
l'art. 106 al. 2 LTF, en particulier celui pris d'une violation des droits
fondamentaux, sont toutefois soumis à des exigences de motivation accrues, qui
correspondent à celles qui résultaient de l'art. 90 al. 1 let. b OJ pour le
recours de droit public (ATF 133 IV 286 consid. 1), auxquelles ils doivent
satisfaire sous peine d'irrecevabilité (ATF 134 I 65 consid. 1.3; 134 V 138
consid. 2.1).

3.
3.1 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF). Le recourant ne peut critiquer ceux-ci que
s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à
celle d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 134 V 53 consid. 4.3) - ou en
violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 97 al. 1 LTF). La correction
du vice doit en outre être susceptible d'influer sur le sort de la cause (art.
97 al. 1 LTF). Le recourant qui prétend que les constatations de fait sont
arbitraires doit démontrer, par une argumentation précise et circonstanciée, en
quoi consiste la violation (art. 106 al. 2 LTF; ATF 134 II 244 consid. 2.2; 133
II 545 consid. 2.2).

Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter
de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF). Le recourant doit
exposer dans quelle mesure les conditions nécessaires à une présentation
ultérieure des moyens de preuve sont remplies (ATF 133 III 393 consid. 3).

3.2 Les faits présentés par le recourant devant la cour de céans sont
irrecevables dans la mesure où il s'écarte des constatations du jugement
cantonal sans démontrer conformément aux exigences de motivation précitées que
la cour cantonale aurait établi les faits de manière arbitraire ou en violation
du droit au sens de l'art. 95 LTF. S'agissant des 21 pièces que le recourant
dépose devant le Tribunal fédéral, autant qu'elles ne figurent pas déjà au
dossier cantonal, il s'agit de pièces nouvelles au sens de l'art. 99 al. 1 LTF.
Le recourant ne présentant aucune justification à l'administration de
celles-ci, il n'en sera pas tenu compte.

4.
Dans un premier grief, le recourant se plaint d'une violation de son droit
d'être entendu au motif que la cour cantonale ne l'a pas autorisé à produire
les pièces complémentaires qu'il a proposées lors de l'audience du 20 mars 2009
.

4.1 Selon la jurisprudence, si le droit d'offrir des moyens de preuve
pertinents est invoqué en relation avec un droit subjectif privé découlant
d'une norme de droit matériel fédéral, ce qui est le cas en l'espèce, la
question relève de l'art. 8 CC (arrêt 5A_403/2007 du 25 octobre 2007 consid.
3.1).
Le droit à la preuve, tel qu'il est déduit de cette disposition, confère à la
partie chargée du fardeau de la preuve la faculté de prouver ses allégations
dans les contestations relevant du droit fédéral, pour autant qu'elle ait
formulé un allégué selon le droit de procédure, que les faits invoqués soient
juridiquement pertinents au regard du droit matériel et que l'offre de preuve
correspondante satisfasse, quant à sa forme et à son contenu, aux exigences du
droit cantonal (ATF 129 III 18 consid. 2.6 et les arrêts cités).

4.2 En l'espèce, le recourant n'indique pas les différentes offres de preuve
qu'il aurait présentées conformément aux dispositions de la procédure civile
genevoise. Comme il se borne à affirmer, sans autre explication, que la Cour de
justice n'a pas tenu compte des pièces complémentaires offertes, il n'y a pas
lieu d'entrer en matière faute de motivation suffisante (art. 42 al. 1 et 2
LTF).

5.
Le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu au motif que
la cour cantonale n'a pas examiné ses arguments au fond.

5.1 Selon la jurisprudence, le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2
Cst comporte, notamment, l'obligation pour le juge de motiver sa décision, afin
que, s'il y a lieu, ses destinataires et toutes les personnes intéressées
puissent la comprendre et l'attaquer utilement en connaissance de cause, et
qu'une instance de recours soit en mesure, si elle est saisie, d'exercer
pleinement son contrôle (ATF 133 II 429 consid. 5.1.1 et les arrêts cités; 133
III 439 consid. 3.3). Pour répondre à ces exigences, il suffit que le juge
mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il
s'est fondé pour prendre sa décision; il n'a toutefois pas l'obligation
d'exposer et de discuter tous les arguments invoqués par les parties. Il n'y a
violation du droit d'être entendu que si l'autorité ne satisfait pas à son
devoir minimum d'examiner et de traiter les problèmes pertinents (ATF 130 II
530 consid. 4.3). Savoir si la motivation est convaincante est une question
distincte de celle du droit à une décision motivée; dès lors que l'on peut
discerner les motifs qui ont guidé le juge, le droit à une décision motivée est
respecté, même si la motivation est erronée (arrêt 4A_117/2007 du 13 septembre
2007, consid. 4.1.1; cf. ATF 126 I 97 consid. 2c).

5.2 En l'occurrence, examinant si l'intimé était propriétaire de la parcelle
revendiquée, l'autorité cantonale a relevé que c'était à bon droit que
l'autorité de première instance avait refusé d'examiner les griefs relatifs à
la validité de la vente aux enchères du 3 octobre 2006. Ceux-ci devaient être
soumis par la voie de la plainte à l'Autorité de surveillance des offices de
poursuites qui avait d'ailleurs été saisie. L'intimé était donc valablement
devenu propriétaire à la suite de cette vente. Par ailleurs, la cour cantonale
a considéré que le recourant avait échoué à démontrer qu'il avait le droit de
posséder la parcelle. S'agissant des arguments relatifs à la nullité de la
résiliation du bail à ferme qu'il invoquait à ce sujet, la Cour de justice
s'est référée au jugement du 30 novembre 2007 par lequel le Tribunal de
première instance avait reconnu la validité de cette résiliation. Comme le
recourant ne prétendait pas qu'il avait conclu un nouveau contrat de bail et
qu'il n'invoquait aucun autre droit, réel ou personnel, qui lui aurait permis
de garder la possession de la parcelle, la cour cantonale a admis l'action en
revendication.

Le refus d'examiner les griefs du recourant relatifs à la validité de la vente
aux enchères est par conséquent motivé. Il en va de même du rejet des arguments
du recourant concernant la validité de la résiliation du bail à ferme. Que les
motifs retenus résistent ou non aux objections que le recourant avait élevés
contre le premier jugement est une autre question, de fond, sans rapport avec
le droit à une décision motivée. Le moyen pris d'une violation de celui-ci est
donc mal fondé.

6.
Selon le recourant, l'arrêt entrepris consacre une violation des art. 58, 70,
70 et 76 LDFR en ce sens qu'il conduit au démantèlement de son exploitation
agricole.

Par cette critique, il remet à nouveau en question la régularité de la vente
aux enchères effectuée par l'office des poursuites et en conclut que la Cour de
justice aurait dû annuler dite vente, constater que ledit office avait violé
les dispositions précitées de la LDFR et annuler l'inscription au Registre
foncier faite à la suite de cette vente. Son argumentation, fondée sur des
faits nouveaux (« manque d'UMOS »), n'est ainsi pas topique (sur cette exigence
: Laurent Merz in : Commentaire bâlois, n. 52 et 74 ss ad art. 42 LTF) en ce
sens qu'elle ne se rapporte pas à la question tranchée par la décision
attaquée. Elle porte en effet sur des questions de fond concernant la validité
de la vente aux enchères, alors que la cour cantonale a considéré qu'elle ne
pouvait examiner les griefs relatifs à ce sujet et qu'ils auraient dû faire
l'objet d'une plainte à l'autorité de surveillance. Partant, les reproches
soulevés sont irrecevables.

7.
En conséquence, le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité.
Le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1
LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens à l'intimé, qui n'a pas été invité
à se déterminer (art. 68 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour
de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 23 juin 2009
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Juge présidant: La Greffière:

Escher Rey-Mermet