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II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.311/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
5A_311/2009

Arrêt du 6 juillet 2009
IIe Cour de droit civil

Composition
Mmes les Juges Hohl, Présidente,
Escher et Jacquemoud-Rossari.
Greffière: Mme Aguet.

Parties
A.________,
recourante,

contre

B.________,
représentée par Me Mauro Poggia, avocat,
intimée.

Objet
partage successoral,

recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour
de justice du canton de Genève du 20 mars 2009.

Faits:

A.
A.a A.________ et B.________ sont les filles de X.________ et de dame
X.________. X.________ est décédé en 1991; par testament, il a laissé à son
épouse l'usufruit de la totalité de ses biens.

Par pacte successoral du 8 mai 1998, dame X.________ et A.________ ont cédé à
B.________, à titre d'avancement d'hoirie et de partage, la totalité de leurs
droits sur les 55 actions de la société X.________ SA, ainsi que tous leurs
droits et créances éventuels envers cette société. En contrepartie, B.________
s'est engagée à ce que l'immeuble constituant la parcelle n° 2'151 de la
commune de Y.________ soit attribué en pleine propriété à A.________, au moment
de la liquidation de la succession de dame X.________; il est précisé que cette
attribution sera faite à la valeur vénale. Enfin, dame X.________ a légué à
A.________ la quotité disponible de sa succession, afin de l'aider, le moment
venu, à assumer les charges de la villa familiale.
A.b Le 18 mars 2003, B.________ a emprunté à A.________ la somme de 200'000
fr., signant une reconnaissance de dette. Il y est prévu que cette somme
portera intérêts à un taux toujours inférieur de 1% au taux hypothécaire de la
Banque Cantonale de Genève, ce du 18 mars 2003 jusqu'au jour de la signature du
partage de la succession de leur mère.
A.c Dame X.________ est décédée le 28 novembre 2003; la succession de son époux
n'avait pas été liquidée avant son décès.

B.
B.a Le 22 novembre 2005, B.________ a ouvert action en partage successoral.
B.b Une expertise portant sur la valeur vénale de la propriété de Y.________,
tant actuelle qu'au mois de novembre 2003, a été ordonnée. Selon le rapport
déposé le 16 janvier 2007, l'expert désigné a fixé la valeur vénale de ce bien
immobilier à 2'570'000 fr. en novembre 2003, et à 3'680'000 fr. en janvier
2007; pour ce faire, il s'est fondé sur la seule valeur intrinsèque de la
villa.
B.c Par jugement du 13 mars 2008, le Tribunal de première instance du canton de
Genève a ordonné le partage des successions de feux les époux X.________, dit
que les biens extants se composent de la villa de Y.________ pour 3'680'000
fr., des 55 actions de la société X.________ SA pour 186'402 fr., du mobilier
pour 55'570 fr. et des créances ou autres titres pour leur valeur résultant des
relevés bancaires au jour du partage effectif, et attribué à A.________ la
pleine propriété sur la villa de Y.________, sous réserve du versement par
l'intéressée d'une soulte à B.________, dont le montant devra être calculé en
tenant compte de la valeur des créances et autres titres.
B.d Statuant sur appel de A.________, la Chambre civile de la Cour de justice
du canton de Genève a modifié ce jugement par arrêt du 20 mars 2009. Entre
autres points, elle a dit que les actifs successoraux de la succession de
X.________ se composent de la villa de Y.________ pour une valeur de partage de
3'680'000 fr., ainsi que des créances et autres titres pour la valeur résultant
des relevés bancaires au jour du décès de X.________, dit que les actifs
successoraux de dame X.________ se composent des créances et autres titres pour
leur valeur résultant des relevés bancaires au jour du partage effectif de la
succession de dame X.________ et des 55 actions de la société X.________ SA
pour une valeur de 186'402 fr., dit que l'avance sur soulte, octroyée par
A.________ à B.________ d'un montant de 200'000 fr. portant intérêts à un taux
inférieur de 1% au taux hypothécaire de la Banque Cantonale de Genève du 18
mars 2003 jusqu'au jour du présent jugement, sera imputée sur la soulte due, et
désigné un notaire avec mission de procéder à toutes les opérations utiles à
l'exécution du partage.

C.
A.________ interjette le 7 mai 2009 un recours en matière civile au Tribunal
fédéral contre cet arrêt, concluant à sa modification en ce sens que, d'une
part, la valeur de partage de la villa de Y.________ devra être actualisée par
l'expert désigné par le tribunal à la date la plus proche possible de celle du
partage effectif de la succession de ses parents et, d'autre part, l'avance sur
soulte de 200'000 fr. octroyée à B.________ portera intérêt à un taux inférieur
de 1% au taux hypothécaire de la Banque Cantonale de Genève du 18 mars 2003
jusqu'au jour de la signature du partage de la succession de dame X.________.
L'intimée n'a pas été invitée à déposer des déterminations.
Considérant en droit:

1.
1.1 Interjeté en temps utile (art. 46 al. 1 let. a et 100 al. 1 LTF) contre une
décision finale (art. 90 LTF) rendue par une autorité cantonale de dernière
instance (art. 75 LTF), en matière civile (art. 72 al. 1 LTF), dont la valeur
litigieuse atteint 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF), le présent recours
est en principe recevable.

1.2 Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel
qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le
droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être lié ni par les motifs de
l'autorité précédente, ni par les moyens des parties; il peut donc admettre le
recours pour d'autres arguments que ceux invoqués par le recourant, comme il
peut le rejeter en opérant une substitution de motifs (ATF 133 III 545 consid.
2.2 p. 550). Compte tenu des exigences de motivation posées, sous peine
d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), à l'art. 42 al. 2 LTF, le
Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs soulevés; il n'est pas
tenu de traiter, à l'instar d'une juridiction de première instance, toutes les
questions juridiques pouvant se poser lorsqu'elles ne sont plus discutées
devant lui (ATF 134 III 102 consid. 1.1 p. 104). Il ne connaît de la violation
de droits fondamentaux que si ce grief a été soulevé et motivé par le recourant
(art. 106 al. 2 LTF), les exigences de motivation correspondant à celles de
l'ancien art. 90 al. 1 let. b OJ (ATF 133 II 249 consid. 1.4.2 p. 254; 133 III
393 consid. 6 p. 397).

1.3 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité
précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont
été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de
l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible
d'influencer le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).

2.
Demeurent seules litigieuses la valeur de la villa de Y.________ et la question
relative aux intérêts de l'avance sur soulte de 200'000 fr. versée par la
recourante à l'intimée. Il convient d'examiner successivement ces deux points.

3.
S'agissant de la valeur de la villa familiale, la cour cantonale a considéré
qu'on ne pouvait déduire du pacte successoral conclu le 8 mai 1998 par les
parties que celles-ci aient eu l'intention de fixer la valeur du bien
immobilier au jour du décès de la mère, comme le soutenait la recourante devant
les instances précédentes. Par conséquent, c'est le principe de l'art. 617 CC
qui s'applique, l'immeuble devant être imputé sur les parts héréditaires à la
valeur vénale qu'il a au moment du partage. Les juges précédents ont écarté la
méthode d'évaluation consistant en la prise en compte d'une moyenne pondérée
entre la valeur intrinsèque et la valeur de rendement du bien, dont la
recourante invoquait l'application, pour s'en tenir à la valeur intrinsèque.
Dans la mesure où celle-ci, telle qu'elle résulte du rapport d'expertise du 16
janvier 2007, n'était plus remise en cause en deuxième instance, à tout le
moins jusqu'en mars 2009 s'agissant de l'intimée (cf. infra, consid. 3.3), la
cour cantonale a considéré que cette expertise restait récente et digne de foi,
de sorte que la question d'une nouvelle expertise ne se posait pas.

3.1 La recourante soutient qu'il serait infondé et arbitraire de retenir la
valeur arrêtée par l'expert au mois de janvier 2007, à savoir il y a plus de
deux ans; celle-ci ne correspondrait plus aux valeurs actuelles du marché
immobilier genevois, dont il serait notoire que les prix gonflés par la
spéculation durant ces dernières années retrouvent actuellement des niveaux
plus normaux. Selon elle, le "moment du partage" devrait correspondre soit au
décès de sa mère soit à la signature de l'acte de mutation, mais en tous cas
pas à une date "totalement arbitraire, située au milieu du processus". Dans la
mesure où la cour cantonale a dit que les comptes bancaires devront être pris
en considération à leur valeur résultant des relevés bancaires au jour du
partage effectif de la succession, il n'y aurait aucune raison que la valeur de
l'immeuble soit arrêtée à celle du mois de janvier 2007. L'autorité cantonale
ne donnerait aucune explication, se limitant à affirmer que, selon les parties,
l'expertise restait récente et digne de foi encore en mars 2009, ce que la
recourante conteste avoir admis. Elle fait valoir que depuis son recours daté
du mois d'avril 2008, les prix de l'immobilier ont notoirement baissé, alors
que tel n'a pas été le cas entre le mois de janvier 2007 (date de l'expertise)
et celui de mars 2008 (date du jugement de première instance), et estime ne pas
être responsable du long délai qui s'est écoulé entre son recours et l'arrêt
rendu. Elle est d'avis que la cour cantonale aurait dû s'abstenir de fixer une
valeur et charger le notaire de faire actualiser l'expertise à une date proche
du partage effectif, comme elle l'a fait pour les actifs bancaires.

3.2 Aux termes de l'art. 617 CC, les immeubles doivent être imputés sur les
parts héréditaires à la valeur vénale qu'ils ont au moment du partage. Lorsque
les héritiers ne peuvent se mettre d'accord sur le prix d'attribution, il est
fixé définitivement par des experts officiels (art. 618 CC). Le droit fédéral
établit selon quels principes juridiques (méthode, critères) l'estimation doit
être effectuée, tandis que l'estimation de la valeur selon ces critères
constitue une question de fait, tranchée définitivement par la juridiction
cantonale (ATF 133 III 416 consid. 6.3.3 p. 418). Les immeubles sont sujets à
des fluctuations de valeur; c'est pourquoi, les parties peuvent requérir, sur
la base de l'art. 618 CC, une réévaluation quand une procédure dure très
longtemps, car alors il est possible que la valeur de l'immeuble ait augmenté
ou diminué de façon importante par exemple à cause d'une modification du
marché, du plan de zones ou des circonstances de fait (arrêt 5A_141/2007 du 21
décembre 2007 consid. 4.1.3).
L'action en partage est soumise à la maxime de disposition (ATF 130 III 550
consid. 2.1.3 p. 553). En outre, selon la jurisprudence et la doctrine, l'art.
617 CC étant de nature dispositive, le tribunal ne peut ordonner, même en cas
de longue procédure, une réévaluation des immeubles sans une requête en ce sens
déposée par une partie. Le fait que le jour du partage soit déterminant pour
fixer la valeur vénale des immeubles n'oblige pas le juge à ordonner d'office
l'administration de preuves ou d'admettre en tout temps les offres de preuve
d'une partie, sans égard aux règles de procédure civile applicables. La
question de savoir jusqu'à quand il peut être invoqué que la valeur s'est
modifiée durant la procédure - et partant jusqu'à quand de nouvelles offres de
preuve peuvent être offertes - est déterminée par le droit cantonal (arrêt
5C.40/2001 du 23 mai 2001 consid. 3d; SPAHR, Valeur et valorisme en matière de
liquidations successorales, Fribourg 1994, n° 2.3.2 p. 120; PETER
SCHAUFELBERGER/KATRIN KELLER, in Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch II, 3e éd.
2007, n° 2a ad art. 617 CC).

3.3 En l'espèce, il résulte de l'arrêt attaqué que, dans ses conclusions après
enquêtes, déposées le 23 novembre 2007, l'intimée avait requis que l'expert
procède à une actualisation des estimations figurant dans son rapport. Cette
requête a été rejetée par le Tribunal de première instance du canton de Genève,
pour le motif que les enquêtes avaient été closes lors de l'audience du 9
octobre 2007. Dans sa réponse sur appel du 27 juin 2008, l'intimée a requis
derechef qu'une réévaluation de la villa soit effectuée par l'expert, dans
l'hypothèse où la liquidation de la succession n'aurait pas eu lieu au 31 mars
2009. La cour cantonale a considéré cette demande comme sans objet, dans la
mesure où son arrêt était rendu avant cette date. Pour sa part, la recourante
n'a jamais requis la réévaluation de l'immeuble litigieux, ni n'a remis en
question les valeurs arrêtées par l'expert dans son rapport du mois de janvier
2007. Dans son appel du 25 avril 2008 contre le jugement de première instance
du 13 mars 2008, elle s'est bornée en effet à soutenir que la date du décès de
sa mère (novembre 2003), devait être retenue pour l'évaluation de la villa et
que la valeur vénale devait être déterminée par la combinaison des valeurs
intrinsèque et de rendement de l'immeuble, sans critiquer par ailleurs les
valeurs fixées par l'expert. Dans ces circonstances, c'est à juste titre que la
cour cantonale a retenu que les valeurs résultant du rapport d'expertise
n'étaient pas remises en cause par les parties au moment où elle a statué. Au
surplus, elle n'avait pas à ordonner d'office, comme on l'a vu, une révision de
l'expertise pour déterminer la valeur de l'immeuble au jour de son jugement.
Partant, c'est à tort que la recourante reproche aux juges précédents d'avoir
retenu la valeur vénale arrêtée par l'expert au mois de janvier 2007.

4.
4.1 Dans un second grief, la recourante reproche à la cour cantonale d'avoir
admis que les intérêts relatifs à l'avance sur soulte de 200'000 fr. qu'elle a
octroyée à l'intimée le 18 mars 2003 courraient jusqu'au jour de son arrêt.
Elle considère que cette limitation au 20 mars 2009 est infondée et arbitraire.
En effet, comme le mentionne l'arrêt attaqué, la reconnaissance de dette signée
le 18 mars 2003 par les parties prévoit que la somme portera intérêts à un taux
toujours inférieur à 1% au taux hypothécaire de la Banque Cantonale de Genève,
ce du 18 mars 2003 "jusqu'au jour de la signature du partage de la succession
de leur mère". Selon elle, les intérêts devraient ainsi courir jusqu'au jour de
l'exécution du partage, laquelle a été confiée à un notaire.

4.2 Vu sa formulation, la reconnaissance de dette litigieuse a manifestement
été rédigée dans l'idée que les parties concluraient une convention de partage
au décès de leur mère. Or, le jugement (formateur) en partage remplace le
contrat de partage que les héritiers concluent normalement (ATF 130 III 550
consid. 2.1.1 p. 552 et les références). Ainsi, la cour cantonale a arrêté la
valeur de l'immeuble de Y.________ au jour de son jugement, la valeur retenue
par l'expert au mois de janvier 2007 étant considérée par les juges précédents
comme toujours d'actualité au moment de rendre leur décision. Dans ces
circonstances, on ne voit pas en quoi la cour cantonale aurait violé le droit
fédéral en arrêtant au jour de son arrêt également le cours des intérêts de
l'avance sur soulte, laquelle doit logiquement être fixée à cette même date. Le
fait que l'exécution du partage ait été confiée à un notaire n'y change rien,
les calculs devant être effectués - sous réserve du partage des comptes
bancaires - au jour du jugement en partage.

5.
Compte tenu de ce qui précède, le recours doit être rejeté. La recourante, qui
succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas
lieu d'allouer des dépens à l'intimée, qui n'a pas été invitée à se déterminer.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 10'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour
de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 6 juillet 2009
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: La Greffière:

Hohl Aguet