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Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 5A.122/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
5A_122/2009

Arrêt du 2 février 2010
IIe Cour de droit civil

Composition
Mmes et MM. les Juges Hohl, Présidente, Escher, Marazzi, von Werdt et Hermann.
Greffier: M. Fellay.

Parties
A.________,
représentée par Me Aba Neeman,
avocat,
recourante,

contre

Banque B.________,
représentée par Me Alain Dubuis, avocat,
intimée.

Objet
action en contestation de l'état des charges,

recours contre le jugement de la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de
Vaud du 12 juin 2008.

Faits:

A.
A.a Le 16 janvier 1996, la Banque B.________ a accordé à A.________ une avance
de 940'000 fr., reportant de 460'000 fr. à 1'400'000 fr. la limite d'un crédit
octroyé précédemment, cela sous la forme d'un prêt hypothécaire à taux fixe n°
xxxx. Le taux d'intérêt semestriel a évolué de 4 ¼ % au départ, à 5 % dès le 12
avril 2000, puis à 4 ¾ % dès le 1er juillet 2001.

L'avance était soumise à diverses conditions, dont la cession de la propriété à
fin de garantie de deux cédules hypothécaires au porteur grevant la parcelle n°
205 de la commune de C.________. C'est ainsi que, par actes du 17 janvier 1996,
A.________ a cédé à la Banque B.________,« en propriété et à fin de garantie »,
la cédule hypothécaire RF n° xxxx d'un montant de 1'040'000 fr., intérêt
maximum 8 %, et la cédule hypothécaire RF n° xxxx d'un montant de 370'000 fr.,
intérêt maximum 10 %, grevant la parcelle précitée respectivement en premier et
deuxième rangs. Les deux cessions étaient effectuées « en garantie des
prétentions actuelles et futures de la Banque B.________ à l'encontre du cédant
et/ou d'elle-même résultant des contrats conclus ou à conclure en raison des
relations d'affaires avec la Banque B.________ ». Elles prévoyaient en outre,
dans leurs conditions spéciales, que « la créance incorporée dans le titre cédé
porte intérêt au taux maximum mentionné dans le titre hypothécaire » [...] et
que « la Banque B.________ ne peut toutefois faire valoir la créance incorporée
dans le titre hypothécaire que jusqu'à concurrence du montant total déterminé
et déterminable de ses prétentions garanties par la cession » [...].

Le 26 mars 1997, A.________ a en outre signé un « acte de gage et de cession
général » dans lequel elle déclarait remettre et céder à titre de gage à la
Banque B.________ tous titres, papiers-valeurs, etc. « en garantie de toutes
les créances actuelles et futures résultant des contrats conclus ou encore à
conclure en raison des relations d'affaires avec la banque, créances que cette
dernière a ou pourrait avoir envers [elle et son mari] ».

Le 7 mai 1997, la Banque B.________ a octroyé à A.________ et à son époux une
avance sous forme de compte courant et/ou d'avance à terme fixe d'un montant de
1'300'000 fr.
A.b Après avoir, le 23 novembre 2000, dénoncé au remboursement le crédit
garanti par les cédules hypothécaires précitées et mis en demeure A.________ de
lui payer les sommes de 370'000 fr. et 1'040'000 fr., la Banque B.________ a
obtenu de l'Office des poursuites de Nyon la notification à la prénommée,
respectivement les 28 mars et 14 juin 2001, de deux poursuites en réalisation
de gage immobilier, l'une - n° xxxx - portant sur la somme de 370'000 fr. plus
intérêt à 10 % dès le 3 avril 1998, la seconde - n° xxxx - portant sur la somme
de 1'040'000 fr. plus intérêt à 8 % dès le 8 mars 1998.

Par décisions des 22 mai et 22 août 2001, le Président du Tribunal
d'arrondissement de La Côte a prononcé la mainlevée provisoire de l'opposition
faite par la poursuivie aux commandements de payer à concurrence,
respectivement, de 370'000 fr. avec intérêt à 10 % dès le 1er janvier 2001 et
de 1'040'000 fr. avec intérêt à 5 % dès le 6 juin 2001.
A.c La Banque B.________ a requis la réalisation des gages objet des poursuites
en question, respectivement, le 10 janvier et le 30 juin 2003. Le 12 décembre
2003, l'office des poursuites a informé les parties que la parcelle n° 205 de
la commune de C.________ serait vendue aux enchères le 14 mai 2004.

Dans l'état des charges de cet immeuble, communiqué le 17 février 2004, la
poursuivante a été inscrite, conformément à sa production, comme créancière en
premier rang, pour la cédule hypothécaire n° xxxx, de 1'402'867 fr. 75, dont
361'457 fr. 75 d'intérêts à 8 % du 10 janvier 2000 au 14 mai 2004, et comme
créancière en deuxième rang, pour la cédule hypothécaire n° xxxx, de 513'872
fr. 25, dont 143'272 fr. 25 d'intérêts à 10 % du 30 juin 2000 au 14 mai 2004.
Il y était mentionné que les titres en question garantissaient, outre
l'engagement résultant du prêt hypothécaire n° xxxx qui s'élevait à 1'261'073
fr. 25, les engagements résultant de deux autres comptes sur lesquels la
poursuivante avait fait valoir l'extension de son droit de gage et dont le
montant s'élevait à 2'091'814 fr. 20, soit en tout 3'352'887 fr. 45. Ces
engagements étant supérieurs à la valeur totale des cédules hypothécaires,
c'est la valeur de ces dernières, soit 1'916'740 fr. (1'402'867.75 +
513'872.25) qui a été portée à l'état des charges conformément à l'art. 35 al.
1 [recte: al. 2] ORFI.

B.
Le 17 mars 2004, la poursuivie a introduit devant la Cour civile du Tribunal
cantonal vaudois une action en contestation de l'état des charges (art. 140 al.
2 LP et 39 ORFI), concluant à ce que les créances incorporées dans les cédules
hypothécaires en question soient réduites à 1'697'510 fr. 20 et à ce qu'il soit
constaté que ces titres ne garantissaient qu'une créance de 634'894 fr. 10 sous
déduction du produit de la gérance légale restant encore à déterminer, à
l'exception de toute autre créance. La demanderesse faisait notamment valoir
que les intérêts portés à l'état des charges étaient erronés et qu'ils auraient
dû être calculés selon les taux et périodes retenus dans les décisions de
mainlevée.

Par jugement du 18 juin 2008, notifié dans son expédition complète le 20
janvier 2009, la Cour civile cantonale a rejeté l'action. Elle a considéré en
substance que les actes de cession précisaient que la créance incorporée dans
le titre cédé portait intérêt au taux maximum mentionné dans les titres
hypothécaires, que la demanderesse n'avait pas allégué quel était le taux
d'intérêt maximum des cédules et les échéances convenues et qu'elle n'avait pas
démontré que les taux inscrits à l'état des charges, soit 8 % sur la cédule n°
xxxx et 10 % sur la cédule n° xxxx, étaient erronés; il n'y avait pas non plus
d'éléments donnant à penser que le point de départ des intérêts, respectivement
10 janvier et 30 juin 2000, excédait ce qui était prévu à l'art. 818 al. 1 ch.
3 CC. L'expert mandaté dans le litige en cause avait d'ailleurs confirmé
l'exactitude des montants d'intérêt portés à l'état des charges pour autant que
l'on retînt les taux et dies a quo indiqués dans cet acte, ce qui, selon la
cour, devait être fait.

C.
Par acte du 20 février 2009, la demanderesse a interjeté un recours en matière
civile au Tribunal fédéral, concluant à la réforme du jugement précité dans le
sens des conclusions prises dans sa demande. Elle reproche à la cour cantonale
d'avoir violé l'art. 104 al. 2 CO et le fardeau de la preuve en retenant le
taux d'intérêt maximum prévu dans les cédules hypothécaires, de s'être mise en
contradiction avec la jurisprudence du Tribunal fédéral en admettant une
extension du gage et de s'être trompée quant au point de départ des intérêts.

La procédure de recours a été suspendue, par ordonnance présidentielle du 13
mars 2009, jusqu'à droit connu sur un recours en nullité déposé parallèlement
par la recourante auprès de la Chambre des recours du Tribunal cantonal
vaudois. Par arrêt du 3 avril 2009, cette autorité a rejeté le recours en
nullité dans la mesure de sa recevabilité. S'agissant du grief de violation du
fardeau de la preuve, également soulevé en instance cantonale, elle l'a jugé
irrecevable parce que, étant invoqué en relation avec les art. 73 et 104 CO, il
relevait non pas de l'art. 29 al. 2 Cst., mais de l'art. 8 CC dont
l'application ne pouvait être revue dans le cadre du recours cantonal.

Le dépôt d'une réponse n'a pas été requis.

Considérant en droit:

1.
1.1 Le recours a été interjeté par la partie qui a succombé dans ses
conclusions devant l'autorité précédente (art. 76 al. 1 LTF) et il est dirigé
contre la décision finale (art. 90 LTF) prise par une autorité cantonale de
dernière instance (art. 75 LTF; art. 74 al. 2 LOJ/VD et 451a al. 1 CPC/VD) dans
une contestation portant sur l'étendue d'une prétention civile portée à l'état
des charges (art. 140 LP; art. 37 al. 2 et 39 ORFI), soit contre une décision
rendue en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) et dont la valeur litigieuse,
supérieure à 100'000 fr. (jugement attaqué, consid. IIc p. 19), excède le seuil
fixé à l'art. 74 al. 1 let. b LTF. Déposé dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et
la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi, le recours est donc recevable en
principe.

1.2 Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans
être lié ni par la motivation de l'autorité précédente, ni par les moyens des
parties; il peut donc admettre le recours pour d'autres motifs que ceux qui ont
été articulés ou, à l'inverse, rejeter un recours en substituant une nouvelle
argumentation à celle de l'autorité précédente (ATF 133 II 249 consid. 1.4.1 p.
254; 132 II 257 consid. 2.5 p. 262). Compte tenu des exigences de motivation
posées, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), à l'art. 42
al. 2 LTF, le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs soulevés;
il n'est pas tenu de traiter, à l'instar d'une juridiction de première
instance, toutes les questions juridiques pouvant se poser lorsqu'elles ne sont
plus discutées devant lui (ATF 133 IV 150 consid. 1.2 p. 152).

2.
La recourante invoque la violation du fardeau de la preuve en relation avec
l'art. 104 al. 2 CO, soit en relation avec un droit subjectif privé découlant
d'une norme de droit matériel fédéral. Son grief doit donc être examiné sous
l'angle de l'art. 8 CC, étant toutefois rappelé que cette disposition ne permet
pas de remettre en question l'appréciation des preuves (arrêts 5A_198/2008 du
26 septembre 2008 consid. 6.1; 5A_403/2007 du 25 octobre 2007 consid. 3.1 et
les arrêts cités).
Selon l'art. 8 CC, chaque partie doit, si la loi ne prescrit le contraire,
prouver les faits qu'elle allègue pour en déduire son droit. Comme dans la
procédure de revendication (art. 106 ss LP) à laquelle renvoient expressément
les art. 140 al. 2 LP et 39 ORFI, il appartient à celui qui conteste l'état des
charges, dressé par l'office sur la base des productions des ayants droit et
des extraits du registre foncier (art. 140 al. 1 LP et 36 al. 2 ORFI), de
prouver les faits propres à fonder sa contestation (cf. JEAN-LUC TSCHUMY,
Commentaire romand de la LP, n. 25 ad art. 109 LP).

En l'espèce, il incombait donc à la recourante, en sa qualité de demanderesse à
l'action en contestation de l'état des charges, de démontrer que les taux
d'intérêt de 8 % et de 10 % qui y étaient inscrits, sur la base notamment des
pièces produites par l'intimée, étaient erronés. Pour en avoir ainsi décidé, la
cour cantonale n'a pas violé l'art. 8 CC.

3.
3.1 La cédule hypothécaire est une créance personnelle garantie par un gage
immobilier (art. 842 CC). Il s'agit d'un papier-valeur qui incorpore à la fois
la créance et le droit de gage immobilier, qui en est l'accessoire. Lorsque le
créancier l'a reçue comme propriétaire fiduciaire aux fins de garantie
(garantie fiduciaire; Sicherungsübereignung), il n'y a pas novation de la
créance garantie (ou causale ou de base; ATF 134 III 71 consid. 3 et les
références). On distingue alors la créance abstraite garantie par le gage
immobilier, incorporée dans la cédule hypothécaire, et la créance causale
résultant de la relation de base, en général un contrat de prêt, pour laquelle
la cédule a été remise en garantie, ces deux créances étant indépendantes l'une
de l'autre. La créance abstraite constatée dans la cédule est destinée à
doubler la créance causale aux fins d'en faciliter et d'en garantir le
recouvrement. Seule la créance abstraite incorporée dans la cédule hypothécaire
et garantie par gage immobilier doit faire l'objet d'une poursuite en
réalisation de gage immobilier, tandis que la créance causale peut faire
l'objet d'une poursuite ordinaire (ATF 119 III 105 consid. 2a; arrêts 5A_226/
2007 du 20 novembre 2007 consid. 5.1 et les références citées, 7B.175/2001 du
11 octobre 2001 consid. 1a).

3.2 Dans le cas particulier, les deux cédules ont fait l'objet d'un acte de
cession en propriété et à fin de garantie. La cour cantonale en déduit, sans
que la recourante la critique sur ce point, que les parties ont renoncé à la
novation et que les deux créances cédulaires (abstraites) se sont juxtaposées
aux créances garanties (créances causales). Les contrats de fiducie du 17
janvier 1996 indiquaient d'ailleurs que la banque ne pourrait faire valoir les
créances incorporées dans les titres que jusqu'à concurrence du montant total
déterminé et déterminable de ses prétentions garanties par la cession.

L'art. 35 al. 2 ORFI, applicable par analogie à la réalisation dans la
poursuite en réalisation de gage en vertu de l'art. 102 ORFI, prévoit que les
titres de gage créés au nom du propriétaire et donnés en nantissement doivent
figurer à leur rang dans l'état des charges pour le montant du titre ou, si la
somme pour laquelle le titre a été donné en nantissement est inférieure, pour
cette somme. Cela signifie a fortiori, en l'espèce, que si la créance résultant
du rapport contractuel de base était inférieure au montant de la créance
incorporée dans les cédules, la banque ne pouvait agir dans la poursuite en
réalisation de gage immobilier que pour la somme équivalant à ce qui était
effectivement dû en capital et intérêts en vertu de la créance causale (arrêt
5A_226/2007 déjà cité consid. 5.1). Si, au contraire, la créance résultant du
rapport de base était supérieure au montant nominal des créances cédulaires
majoré de leurs intérêts couverts par le droit de gage au sens de l'art. 818
al. 1 ch. 3 CC (intérêts de trois années échus et intérêts ayant couru depuis
la dernière échéance aux taux des conventions de fiducie), la banque pouvait
faire valoir dans la poursuite spéciale l'intégralité des créances cédulaires
augmentées de leurs intérêts, le solde de sa créance devant faire l'objet d'une
poursuite ordinaire (DIETER ZOBL, Zur Sicherungsübereignung von Schuldbriefen,
RNRF 68/1987 p. 292 let. b et d/bb; NICOLAS DE GOTTRAU, Transfert de propriété
et cession à fin de garantie in Sûretés et garanties bancaires, publication
CEDIDAC n° 33, Lausanne 1997, p. 213 s.; DANIEL STAEHELIN, Betreibung und
Rechtsöffnung beim Schuldbrief, PJA 1994 p. 1255 ss, en particulier p. 1267).

Selon les constatations du jugement attaqué et l'expertise sur laquelle elles
s'appuient, la créance totale produite par l'intimée sur la base du rapport
contractuel de base s'élevait à 3'352'887 fr. 45, y compris ses intérêts,
soumis à évolution, convenus pour cette créance, alors que le montant total des
créances cédulaires s'élevait à 1'916'740 fr., y compris leurs intérêts
calculés aux taux fixés dans les conventions de fiducie de 8 % et 10 % (cf. les
faits ci-dessus, consid. A.c). L'office des poursuites s'est donc conformé aux
principes qui viennent d'être exposés en portant à l'état des charges le
montant total des créances cédulaires, par 1'916'740 fr.

3.3 La recourante ne reproche pas à la cour cantonale de s'être trompée en
entérinant le procédé de l'office des poursuites; elle lui fait simplement
grief d'avoir confirmé, à tort au regard de l'art. 104 al. 2 CO, l'application
des taux d'intérêts de 8 % et 10 % aux deux créances cédulaires. A son avis,
seul le taux légal de 5 %, à titre d'intérêt moratoire, était applicable après
la dénonciation des cédules.

En l'espèce, les parties sont convenues, aux termes des actes de cession en
propriété et à fin de garantie des titres hypothécaires du 17 janvier 1996, que
les créances cédulaires porteraient intérêt aux taux maximum mentionnés dans
les titres, soit respectivement 8 % et 10 %. Au stade de la réalisation, la
créancière pouvait donc, en vertu de l'art. 818 al. 1 ch. 1 et 3 CC, requérir
la prise en compte à l'état des charges de l'intégralité des créances
cédulaires avec leurs intérêts aux taux convenus de 8 % et 10 % (cf. ZOBL, op.
cit., exemple cité sous let. d/bb). La cour cantonale a donc confirmé à bon
droit ces taux.

Les réquisitions de vente ayant été présentées, respectivement, le 10 janvier
2003 et le 30 juin 2003, et la réalisation ayant eu lieu le 14 mai 2004, jour
auquel prenait fin la garantie hypothécaire (Paul-Henri Steinauer, Les droits
réels, tome III, 3e éd., n. 2795), la production d'intérêts, soit 8% sur
1'040'000 fr. du 10 janvier 2000 au 14 mai 2004, et 10 % sur 370'000 fr. du 30
juin 2000 au 14 mai 2004, pouvait ainsi être inscrite à l'état des charges,
d'éventuels intérêts supplémentaires au titre des intérêts courus (art. 818 al.
1 ch. 3 CC) ne pouvant être pris en considération dès lors que la production de
la créancière, portée à l'état des charges, ne les réclamait pas.

3.4 La recourante fait valoir que les intérêts des créances cédulaires à
prendre en compte dans l'état des charges auraient plutôt dû être ceux alloués
par les décisions de mainlevée d'opposition.

Ce point de vue ne peut pas être partagé. Selon la jurisprudence, en effet, le
créancier gagiste poursuivant peut produire d'autres ou de plus amples droits
que ceux réclamés dans la réquisition de poursuite, par exemple des intérêts
supplémentaires. Comme tout tiers créancier, il peut exiger que ses droits,
pour lesquels il n'a pas requis la poursuite, soient pris en considération dans
l'état des charges; pour le même motif, il peut aussi produire la partie de la
créance pour laquelle la mainlevée de l'opposition lui a été refusée (arrêt
5C.266/2005 du 2 février 2006 consid. 3.2 et les références citées). En outre,
au stade de la mainlevée, le juge qui la prononce ne connaît pas encore le jour
de la réquisition de vente et n'est donc pas en mesure d'allouer les intérêts
courants (art. 818 al. 1 ch. 3 in fine CC).

4.
La recourante soutient qu'il était contraire à l'ATF 108 II 47 d'admettre
l'extension du gage au crédit octroyé le 7 mai 1997.

4.1 L'arrêt invoqué prévoit, en résumé, que la constitution d'un droit de gage
pour un nombre indéterminé de créances futures porte une atteinte illicite aux
droits de la personnalité et n'est, partant, pas valable (consid. 2). Cette
jurisprudence, rendue dans un litige portant sur l'extension d'un droit de gage
immobilier à une créance résultant d'un acte illicite, rappelle néanmoins que,
selon la loi, une hypothèque peut garantir une créance quelconque, actuelle ou
future ou simplement éventuelle (art. 824 al. 1 CC), même une créance d'un
montant indéterminé ou variable (art. 825 al. 1 CC). Elle n'exclut l'extension
du gage que dans l'hypothèse d'un engagement démesuré (übermässige Bindung),
soit d'une clause du contrat de gage dépassant largement la garantie d'un
rapport de crédit d'un montant variable et englobant tout bonnement toutes les
prétentions actuelles et futures imaginables de la banque contre son client.

Il est admis que les conditions générales des banques prévoient une garantie
très étendue en leur faveur visant de façon générale toutes leurs créances
vis-à vis d'un certain débiteur, créances qui, de façon prévisible, découlent
ou découleront des relations d'affaires des parties. Sont visées les créances
dont le constituant du gage pouvait raisonnablement envisager l'existence au
moment où il exprimait son accord (WOLFGANG WIEGAND, Akzessorietät und
Spezialität, in Probleme der Kreditsicherung, Berner Tage für juristische
Praxis 1981, Berne 1982, p. 45 ss; Carlo Lombardini, Droit bancaire suisse, 2e
éd., p. 881 s. n. 20 s.; STEINAUER, op. cit., n. 3083a; DANIEL GUGGENHEIM, Les
contrats de la pratique bancaire suisse, 4e éd., p. 304-305; BÉNÉDICT FOËX, Les
actes de disposition sur les cédules hypothécaires, in Les gages immobiliers,
Constitution volontaire et réalisation forcée, p. 113 ss, spéc. p. 125.).

4.2 Tel est manifestement le cas de la créance résultant du crédit qui a été
octroyé à la recourante le 7 mai 1997, soit un mois et demi environ après
qu'elle a signé l'acte de gage et de cession général du 26 mars 1997 établi aux
fins de garantir « toutes les créances actuelles et futures » de la banque
envers elle, « résultant des contrats conclus ou encore à conclure en raison
[de leurs] relations d'affaires, créances que [la banque] a ou pourrait avoir
envers [elle et son mari] ».

Le grief de la recourante est donc mal fondé.

5.
Quant au point de départ des intérêts, il peut être renvoyé à ce qui a été
exposé au considérant 3.3 ci-dessus. Au demeurant, pas plus devant le Tribunal
fédéral que devant la cour cantonale, la recourante n'apporte d'éléments
donnant à penser que le point de départ des intérêts aurait été fixé en
violation de l'art. 818 al. 1 ch. 3 CC.

Dans la mesure où il est recevable, le grief soulevé sur ce point est donc mal
fondé.

6.
En conclusion, le recours droit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité,
aux frais de la recourante (art. 66 al. 1 LTF).

Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens à l'intimée, qui n'a pas été invitée à
répondre au recours.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 8'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour civile du Tribunal
cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 2 février 2010
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: Le Greffier:

Hohl Fellay