Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.478/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
4A_478/2009

Arrêt du 16 décembre 2009
Ire Cour de droit civil

Composition
Mmes et M. les juges Klett, présidente, Corboz et Rottenberg Liatowitsch.
Greffier: M. Thélin.

Parties
A.________,
demanderesse et recourante,
représentée par Me Christian Petermann,

contre

X.________ SA,
défenderesse et intimée,
représentée par Me Paul Marville.

Objet
prétentions fondées sur le contrat de travail

recours contre l'arrêt rendu le 18 juin 2009 par la Chambre des recours du
Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Faits:

A.
Pour le compte de ses entreprises clientes, X.________ SA pratique l'emballage
et le conditionnement de marchandises. Dès janvier 2005, A.________ est entrée
à son service en qualité d'opératrice de conditionnement. Son activité a porté
sur divers produits ou articles et elle était rétribuée aux pièces. Un décompte
mentionnait, pour chaque jour de travail, le nombre des unités de chaque
article traité, le gain unitaire et le gain total. Un bulletin de salaire était
établi chaque mois; il mentionnait le salaire brut et une indemnité de vacances
correspondant à 8,33% de ce salaire; la somme du salaire et de l'indemnité
coïncidait avec le total des décomptes journaliers. Les cotisations sociales et
l'impôt à la source étaient retenus sur ce total. Pour l'année 2005, le gain
mensuel brut moyen, vacances comprises, s'est élevé à plus de 5'750 francs.
L'opératrice a d'abord perçu 36 ct. par unité de l'article n° 3026. Dès le 11
avril 2005, après une automatisation partielle du travail concernant cet
article, elle n'a plus perçu que 30 ct. par unité; le taux initial est
cependant resté en usage dans les cas où un tamponnage manuel demeurait
nécessaire.
L'opératrice s'est trouvée en incapacité de travail pour cause de maladie dès
le 15 mars 2006. Le 23 juin, X.________ SA a résilié le contrat avec effet au
31 août 2006.

B.
Le 23 août 2007, A.________ a ouvert action contre X.________ SA devant le
Tribunal civil de l'arrondissement de Lausanne. La défenderesse devait être
condamnée à payer diverses sommes au total de 95'244 fr., avec intérêts au taux
de 5% par an sur 80'000 fr, dès le 8 février 2007; le tribunal devait donner
mainlevée définitive de son opposition au commandement de payer que la
demanderesse lui avait fait notifier.
La défenderesse a conclu au rejet de l'action.
Le tribunal s'est prononcé le 1er octobre 2008; il a rejeté l'action.
La demanderesse ayant saisi la Chambre des recours du Tribunal cantonal, cette
autorité a statué le 18 juin 2009; elle a rejeté le recours et confirmé le
jugement.

C.
Agissant simultanément par la voie du recours en matière civile et du recours
constitutionnel, la demanderesse requiert le Tribunal fédéral de réformer
l'arrêt de la Chambre des recours en ce sens que la défenderesse soit condamnée
à payer 95'244 fr. avec intérêts au taux de 5% par an dès le 2 juillet 2006.
Des conclusions subsidiaires tendent à l'annulation de l'arrêt et au renvoi de
la cause à la Chambre des recours pour nouvelle décision.
La défenderesse conclut au rejet des recours.
Par ordonnance du 27 octobre 2009, le Tribunal fédéral a accueilli une demande
d'assistance judiciaire présentée par la demanderesse et il a désigné Me
Christian Petermann en qualité d'avocat d'office.

Considérant en droit:

1.
L'exposé soumis au Tribunal fédéral, à l'appui de chacun des recours, porte sur
des prétentions au total de 31'193 fr.; en tant qu'elles excèdent ce montant,
les conclusions présentées sont dépourvues de toute motivation et elles sont
donc irrecevables (art. 42 al. 1 et 2 LTF). Les conclusions sont également
irrecevables dans la mesure où elles tendent à des intérêts à calculer sur un
laps plus étendu que ceux demandés devant la Chambre des recours (art. 99 al. 2
LTF).
Pour le surplus, les recours sont dirigés contre un jugement final (art. 90
LTF), rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) et en dernière instance
cantonale (art. 75 al. 1 LTF). Leur auteur a pris part à l'instance précédente
et succombé dans ses conclusions (art. 76 al. 1 LTF). La valeur litigieuse
excède le minimum légal de 15'000 fr. prévu en matière de droit du travail
(art. 51 al. 1 let. a et 74 al. 1 let. a LTF). Introduit en temps utile (art.
100 al. 1 LTF) et dans les formes requises (art. 42 LTF), le recours ordinaire
en matière civile est en principe recevable, de sorte que le recours
constitutionnel, subsidiaire (art. 113 LTF), est exclu.
Le recours ordinaire est ouvert pour violation du droit fédéral, y compris les
règles de la Constitution fédérale (art. 95 let. a LTF). Le Tribunal fédéral
applique ce droit d'office, hormis les droits fondamentaux (art. 106 LTF). Il
n'est pas lié par l'argumentation des parties et il apprécie librement la
portée juridique des faits; il s'en tient cependant, d'ordinaire, aux questions
juridiques que la partie recourante soulève dans la motivation du recours (art.
42 al. 2 LTF; ATF 135 III 397 consid. 1.4 p. 400; 133 II 249 consid. 1.4.1 p.
254), et il ne se prononce sur la violation de droits fondamentaux que s'il se
trouve saisi d'un grief invoqué et motivé de façon détaillée (art. 106 al. 2
LTF; ATF 134 I 83 consid. 3.2 p. 88; 134 II 244 consid. 2.2 p. 246; 133 II 249
consid. 1.4.2).
Le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement juridique sur la base des
faits constatés dans la décision attaquée (art. 105 al. 1 LTF); en règle
générale, les allégations de fait et les moyens de preuve nouveaux sont
irrecevables (art. 99 al. 1 LTF). Le tribunal peut compléter ou rectifier même
d'office les constatations de fait qui se révèlent manifestement inexactes,
c'est-à-dire arbitraires aux termes de l'art. 9 Cst. (ATF 133 II 249 consid.
1.1.2 p. 252), ou établies en violation du droit (art. 105 al. 2 LTF). La
partie recourante est autorisée à attaquer des constatations de fait ainsi
irrégulières si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de
la cause (art. 97 al. 1 LTF).

2.
Invoquant l'art. 9 Cst., la demanderesse reproche à la Chambre des recours
d'avoir constaté arbitrairement qu'une dette de 18 fr., reconnue par la
défenderesse, a été acquittée. Son argumentation est difficilement intelligible
et, de toute manière, impropre à mettre en évidence une erreur grave et
indiscutable dans la décision attaquée. Elle est donc irrecevable au regard de
la jurisprudence relative aux recours formés pour violation de droits
constitutionnels (cf. ATF 133 II 249 consid. 1.4.3 p. 254; 133 II 396 consid.
3.2 p. 400).

3.
La demanderesse réclame le paiement de 9'792 fr. à titre de salaire, à raison
de 6 ct. sur 163'200 unités de l'article n° 3026. Elle prétend n'avoir jamais
accepté la réduction du salaire par unité de 36 à 30 ct., de sorte que ce
premier taux aurait dû être appliqué à toute sa production relative à cet
article.
Il est constant que les parties se sont liées par un contrat de travail, alors
même qu'elles n'ont passé aucune convention écrite, et que la demanderesse
devait être rémunérée aux pièces ou à la tâche.
En pareil cas, selon l'art. 326a al. 1 CO, l'employeur doit communiquer au
travailleur le taux du salaire avant le début de chaque travail. Le cas
échéant, conformément à l'art. 322 al. 1 CO, le travailleur peut prétendre au
salaire convenu.
Pendant plus de trois mois, la demanderesse a d'abord traité l'article n° 3026
au taux de 36 ct. l'unité. Il s'impose d'admettre que, tacitement, les parties
ont ainsi convenu de ce taux, et que la défenderesse n'était pas en droit de le
réduire sans l'accord de l'autre partie.
Si la demanderesse ne voulait pas consentir à une réduction de 36 à 30 ct.
l'unité, dès le 11 avril 2005, elle devait protester et refuser de continuer le
travail de cet article autrement qu'aux conditions convenues. Elle a au
contraire continué à ce nouveau taux, sans élever aucune réclamation et pendant
de nombreux mois, de sorte que la réduction a aussi été convenue tacitement. La
prétention au montant de 9'792 fr., destinée à compenser cette réduction, est
donc dépourvue de fondement contractuel. Selon des constatations qui n'ont pas
été mises en doute devant la Chambre des recours, la demanderesse a pu se
procurer un gain tout aussi important au nouveau taux, parce que
l'automatisation partielle du travail avait réduit le temps nécessaire par
unité; cette circonstance explique que la demanderesse ait accepté la
réduction.
Au moins d'août 2006, la défenderesse a réduit le taux de salaire d'un autre
article, le n° 3025. Elle en a averti son personnel par écrit; chaque
collaborateur était invité à accepter formellement la réduction dans un délai
de dix jours, sans quoi le contrat serait résilié. La défenderesse a adopté
cette procédure longtemps après la réduction qu'elle avait déjà introduite, dès
avril 2005, pour l'article n° 3026. Déjà en raison de ce décalage dans le
temps, le principe de l'égalité des travailleurs (cf. Ullin Streiff et Adrian
von Kaenel, Arbeitsvertrag, 6e éd., Zurich 2006, n° 12 ad art. 328 CO), sur
lequel la demanderesse fonde toute son argumentation, se trouve hors de cause.
A cela s'ajoute que la nouvelle procédure, quoique plus franche, n'aboutit pas
à un résultat plus favorable aux travailleurs.

4.
La demanderesse réclame 15'593 fr. pour rémunération de ses vacances. Elle
soutient que la défenderesse aurait dû la rémunérer dans les périodes où les
vacances étaient effectivement prises, et qu'elle ne pouvait pas s'exonérer de
cette obligation en portant simplement en compte une indemnité - par ailleurs
incluse dans le salaire aux pièces - de 8,33% sur les bulletins de salaire
mensuels.
A teneur de l'art. 329d al. 1 CO, l'employeur verse au travailleur le salaire
total afférent aux vacances, et une indemnité équitable en compensation du
salaire en nature. D'après l'art. 362 al. 1 CO, il s'agit d'une disposition à
laquelle un accord des parties ne peut pas déroger au détriment du travailleur.
Le salaire afférent aux vacances doit donc être versé au moment où celles-ci
sont prises; les parties ne peuvent pas valablement convenir qu'il sera inclus
dans le salaire des périodes de travail effectivement accompli et que
l'employeur ne devra rien pour les périodes de vacances. Un accord de ce genre
n'est reconnu que dans les cas exceptionnels où des motifs objectifs justifient
cette solution, en particulier lors de l'occupation très irrégulière de
travailleurs à temps partiel; il faut encore que la part du salaire global
destinée à la rémunération des vacances soit clairement indiquée dans le
contrat de travail, lorsque celui-ci est conclu par écrit, et dans chaque
décompte de salaire (ATF 129 III 493 consid. 3 p. 495; 129 III 664 consid. 7.2
p. 672). Dans le contrat écrit, l'indication porte sur le prorata ou sur le
montant à affecter aux vacances; dans les décomptes, elle porte sur le montant
(ATF 129 III 429 consid. 3.3 p. 496). Si ces conditions n'ont pas été
observées, l'employeur doit payer le salaire des vacances en sus de la
rémunération globale dont les parties ont convenu (ATF 118 II 136 consid. 3b p.
137; voir aussi ATF 129 III 493 consid. 3.4 p. 497).
La Chambre des recours constate que les parties n'ont pas conclu de contrat
écrit et que les bulletins de salaire indiquaient précisément le montant à
affecter aux vacances. Les exigences formelles de la jurisprudence précitée
sont donc satisfaites. Toutefois, de l'arrêt du 26 juillet 1990 (ATF 116 II
515) auquel la Chambre se réfère, il ne ressort pas que cela suffise; il faut
encore, comme on l'a vu, que les parties aient été amenées par des difficultés
ou motifs objectifs à conclure un accord dérogeant au régime ordinaire de
l'art. 329d al. 1 CO. A première vue, mais cela n'est pas clairement constaté,
la demanderesse travaillait régulièrement et à temps plein. Le salaire était
variable mais à elle seule, cette circonstance qui se rencontre couramment en
cas de travail payé à l'heure, aux pièces ou à la tâche, ne parvient pas à
justifier un accord dérogatoire. Dans ces conditions, la demanderesse se plaint
à bon droit d'une application incorrecte de l'art. 329d al. 1 CO.
Il n'appartient pas au Tribunal fédéral de rechercher lui-même s'il existait
des circonstances de fait propres à autoriser, exceptionnellement, une
dérogation au régime imposé par cette disposition. Il ne lui appartient pas non
plus, dans la négative, d'élucider quelles ont été les périodes de vacances
prises ou à prendre par la demanderesse, ni la rémunération que l'autre partie
aurait dû lui verser alors. La décision attaquée doit être annulée et il
incombera à la Chambre des recours de statuer à nouveau sur la rémunération des
vacances. S'il y a lieu, selon le droit cantonal, elle renverra la cause au
Tribunal civil.

5.
La demanderesse réclame enfin 5'790 fr. pour rémunération de treize jours
fériés, pendant lesquels elle n'a pas travaillé.
Les parties n'ont pas convenu d'une rémunération pour les jours de congé et la
loi ne prévoit, non plus, aucune prestation de ce genre en faveur du
travailleur rémunéré à l'heure, aux pièces ou à la tâche. Seul le 1er août, de
par l'art. 110 al. 3 Cst., est un jour férié et rémunéré. De ce point de vue,
le régime des jours de congé diffère de celui des vacances ou des périodes
d'incapacité de travail (Streiff/von Kaenel, op. cit., n° 22 ad art. 324a/b CO;
voir aussi Rémy Wyler, Droit du travail, 2008, p. 338).
Il incombera également à la Chambre des recours de statuer sur la rémunération
en principe due pour les 1er août 2005 et 2006, tandis que la demanderesse ne
peut élever aucune prétention en rapport avec les autres jours fériés.

6.
Vu le sort des prétentions valablement portées devant le Tribunal fédéral, il
se justifie de répartir l'émolument judiciaire à parts égales entre les parties
et de compenser les dépens. La demanderesse bénéficie de l'assistance
judiciaire, de sorte que sa part de l'émolument ne sera pas perçue et qu'une
indemnité sera allouée à son conseil.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours constitutionnel est irrecevable.

2.
Le recours en matière civile est partiellement admis, dans la mesure où il est
recevable; l'arrêt de la Chambre des recours est annulé et la cause est
renvoyée à cette autorité pour nouvelle décision.

3.
La défenderesse acquittera un émolument judiciaire de 1'500 francs.

4.
Il n'est pas alloué de dépens.

5.
La caisse du Tribunal fédéral versera une indemnité de 2'000 fr. à Me
Petermann, à titre d'honoraires.

6.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton
de Vaud.

Lausanne, le 16 décembre 2009

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La présidente: Le greffier:

Klett Thélin