Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.394/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
4A_394/2009

Arrêt du 4 décembre 2009
Ire Cour de droit civil

Composition
Mmes et MM. les Juges Klett, Présidente, Corboz, Rottenberg Liatowitsch, Kolly
et Kiss.
Greffier: M. Piaget.

Parties
1. F.X.________,
2. Y.________,
toutes les 2 représentées par Me Bernard Lachenal,
recourantes,

contre

Z.________, représenté par Me Guy Stanislas,
intimé.

Objet
donation,

recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de
Genève du 19 juin 2009.

Faits:

A.
Depuis le début des années 1970, l'avocat Z.________, domicilié à Genève, a été
le conseil et l'ami de H.X.________, qui était domicilié à N.________. Ce
dernier était à la tête d'une fortune estimée à 500'000'000 US$.

Au cours de l'année 2000, H.X.________ a épousé, en sixièmes noces,
F.X.________.

Le 7 septembre 2001, H.X.________ et Z.________ ont ouvert auprès de A.________
Bank à Genève un compte en dollars n° xxx dénommé "U.________". Selon les
documents d'ouverture du compte, chacun d'eux en était titulaire et disposait
de la signature individuelle. Selon deux témoins, H.X.________ destinait ce
compte à sa fille. Le compte a été approvisionné, sur l'ordre de H.X.________,
par diverses sociétés, trusts ou établissements dont il était l'ayant droit. Le
compte a été utilisé pour payer différentes factures et a donné lieu à de
nombreuses opérations.

Le 19 juillet 2002, H.X.________ a donné l'ordre à la société B.________
Corporation de verser 1'000'000 US$ sur le compte "U.________" qui a été
crédité de ce montant le 23 juillet 2002. Selon Z.________, H.X.________ lui a
dit qu'il s'agissait d'un don qu'il lui faisait pour marquer tant d'années
d'amitié.

Par courrier du 4 juin 2003, Z.________ a donné l'ordre à A.________ Bank de
transférer 1'500'000 US$ sur un de ses comptes personnels auprès de la banque
C.________, transfert qui a été effectué. Ce transfert n'est litigieux qu'à
concurrence d'un million de dollars, correspondant à la donation alléguée. Le
gestionnaire du compte et son assistante, entendus comme témoins, ont affirmé
que H.X.________ s'intéressait à la gestion de ses comptes, en suivait
régulièrement l'évolution et demandait des rapports périodiques; à aucun moment
il n'a remis en cause le transfert opéré sur le compte personnel de Z.________.
L'assistante, lors de sa deuxième audition comme témoin, a affirmé que
H.X.________ lui avait dit, au sujet du transfert sur le compte personnel de
Z.________, qu'il s'agissait d'un petit cadeau ("little present") et qu'elle
avait compris que le bénéficiaire en était Z.________. Une autre assistante a
apposé une mention concernant le but du transfert qui ne fait pas apparaître
l'idée d'une donation; entendue comme témoin, elle a affirmé qu'elle avait eu à
ce sujet un entretien téléphonique avec Z.________, mais qu'elle n'avait pas de
souvenir précis de la conversation.

Les rapports entre H.X.________ et Z.________ se sont dégradés en mai 2004, le
premier reprochant au second de l'avoir mal conseillé dans le cadre de la
constitution d'un nouveau trust appelé "... Trust". Par courrier du 8 juin
2004, H.X.________ a résilié tous les mandats confiés à Z.________. Par la
suite, il lui a demandé, par voie judiciaire, de rendre compte.

H.X.________ est décédé le 23 janvier 2005.

B.
Le 11 mai 2006, F.X.________ et la société Y.________, en qualité d'exécuteurs
testamentaires de la succession H.X.________, ont déposé devant le Tribunal de
première instance de Genève une demande en restitution de 1'000'000 US$ à
l'encontre de Z.________, contestant l'existence d'une donation valable.

Par jugement du 6 novembre 2008, le Tribunal de première instance a rejeté la
demande avec suite de dépens, admettant l'existence d'une donation.

Par arrêt du 19 juin 2009, la Cour de justice du canton de Genève a confirmé le
jugement attaqué avec suite de dépens.

C.
F.X.________ et la société Y.________ exercent un recours en matière civile au
Tribunal fédéral contre l'arrêt du 19 juin 2009. Invoquant l'arbitraire dans
l'appréciation des preuves et l'établissement des faits, ainsi qu'une violation
des art. 1, 18, 19, 20, 239 et 242 CO, les recourantes concluent à l'annulation
de l'arrêt attaqué et à ce que l'intimé soit condamné à leur verser la somme de
1'000'000 US$ avec intérêts à 5% dès le 30 mars 2006 sous suite de dépens.

L'intimé a conclu au rejet du recours avec suite de frais et dépens.

Considérant en droit:

1.
1.1 Interjeté par les parties qui ont succombé dans leurs conclusions en
paiement (art. 76 al. 1 LTF) et dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF)
rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par une autorité cantonale de
dernière instance (art. 75 LTF) dans une affaire pécuniaire dont la valeur
litigieuse atteint le seuil de 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF), le
recours est en principe recevable, puisqu'il a été déposé dans le délai (art.
100 al. 1, 46 al. 1 let. b, 48 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par
la loi.

1.2 Le recours peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est
délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit
d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc limité ni par les arguments
soulevés dans le recours, ni par la motivation retenue par l'autorité
précédente; il peut admettre un recours pour un autre motif que ceux qui ont
été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant une argumentation
différente de celle de l'autorité précédente (ATF 135 III 397 consid. 1.4 p.
400; 134 III 102 consid. 1.1 p. 104). Compte tenu de l'exigence de motivation
contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al.
1 let. b LTF), le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs
invoqués; il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de
première instance, toutes les questions juridiques qui se posent, lorsque
celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 135 III 397 consid. 1.4 p.
400; 134 III 102 consid. 1.1 p. 105). Par exception au principe selon lequel il
applique le droit d'office, il ne peut entrer en matière sur la violation d'un
droit constitutionnel ou sur une question relevant du droit cantonal ou
intercantonal que si le grief a été invoqué et motivé de manière précise par la
partie recourante (art. 106 al. 2 LTF).

1.3 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des
faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en
écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce
qui correspond à la notion d'arbitraire (ATF 135 III 127 consid. 1.5 p. 130,
397 consid. 1.5 p. 401; 135 II 145 consid. 8.1 p. 153) - ou en violation du
droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF).

La partie recourante qui entend s'écarter des constatations de l'autorité
précédente doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions
d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de
quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de
celui contenu dans la décision attaquée (ATF 133 IV 286 consid. 1.4 p. 287 et
consid. 6.2 p. 288). Pour qu'une partie puisse demander une rectification de
l'état de fait cantonal, il faut encore que celle-ci soit susceptible d'influer
sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Aucun fait nouveau ni preuve
nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité
précédente (art. 99 al. 1 LTF).

1.4 Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art.
107 al. 1 LTF). Toute conclusion nouvelle est irrecevable (art. 99 al. 2 LTF).

2.
2.1 Les recourantes se plaignent d'arbitraire dans l'appréciation des preuves
et l'établissement des faits.

Selon la jurisprudence, l'arbitraire, prohibé par l'art. 9 Cst., ne résulte pas
du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer en considération ou même
qu'elle serait préférable; le Tribunal fédéral n'annule la décision attaquée
que lorsque celle-ci est manifestement insoutenable, qu'elle se trouve en
contradiction claire avec la situation de fait, qu'elle viole gravement une
norme ou un principe juridique indiscuté, ou encore lorsqu'elle heurte de
manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité; pour qu'une
décision soit annulée pour cause d'arbitraire, il ne suffit pas que la
motivation formulée soit insoutenable, il faut encore que la décision
apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 135 V 2 consid. 1.3 p. 4 s.; 134 I
263 consid. 3.1 p. 265 s.).

En ce qui concerne plus précisément l'appréciation des preuves et des
constatations de fait, il y a arbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en
compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la
décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou
encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des
constatations insoutenables (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9).

S'agissant d'un grief d'ordre constitutionnel, le tribunal ne peut entrer en
matière que si l'arbitraire est invoqué et motivé de manière circonstanciée
(art. 106 al. 2 LTF). Celui qui se plaint d'arbitraire dans l'appréciation des
preuves et l'établissement des faits doit montrer de manière circonstanciée en
quoi consiste l'arbitraire (ATF 133 IV 286 consid. 6.2 p. 288); encore faut-il
que le point de fait contesté soit susceptible d'influer sur le sort de la
cause (art. 97 al. 1 LTF).

2.2 Les recourantes soutiennent que la cour cantonale s'est trompée sur la date
d'introduction de la demande, ce qui pourrait avoir des conséquences sur la
question de la prescription.

Comme l'exception de prescription n'a pas été soulevée, le Tribunal fédéral ne
peut pas examiner cette question en vertu de l'art. 142 CO, quand bien même il
applique en principe d'office le droit fédéral (art. 106 al. 1 LTF). Il en
résulte que le point de fait discuté ne peut pas influer sur le sort de la
cause, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'entrer en matière sur ce grief (art. 97
al. 1 LTF).

2.3 Les recourantes soutiennent que la cour cantonale a retenu arbitrairement
que le défunt se trouvait à la tête d'une fortune estimée à 500'000'000 US$.

Il faut tout d'abord observer que la cour cantonale a employé une formule
particulièrement prudente en disant que le recourant était "à la tête" de cette
fortune, ce qui ne préjuge en rien des formes juridiques qui lui en donnaient
la maîtrise économique. Il est aussi précisé que la fortune est "estimée", ce
qui montre bien qu'il ne s'agit pas d'un chiffre exact.

Les recourantes, qui n'ont de leur côté apporté aucune preuve sur les forces de
la succession, ne semblent même pas contester le chiffre, mais font plutôt
valoir que cette fortune est détenue sous la forme de trusts discrétionnaires
et irrévocables. Il ressort effectivement de l'état de fait cantonal qu'il y
avait de nombreuses entités juridiques, créées manifestement à des fins
d'optimisation fiscale, qui procuraient des fonds au défunt; il n'est pas
allégué que ces entités étaient exclusivement sous la maîtrise de tiers et que
le défunt ne pouvait pas en obtenir des ressources selon ses besoins.
L'argumentation des recourantes, particulièrement inconsistante, est impropre à
démontrer l'arbitraire de la constatation cantonale.

2.4 Les recourantes reprochent à la cour cantonale d'avoir apprécié
arbitrairement les preuves et d'être ainsi parvenue à la conclusion que le
défunt avait l'animus donandi.
Déterminer ce qu'une personne savait ou voulait à un moment donné est une
question de fait, et non de droit (ATF 129 III 118 consid. 2.5 p. 122, 618
consid. 3 p. 620; 123 III 165 consid. 3a p. 168, 118 II 58 consid. 3a p. 62).
Le Tribunal fédéral est donc lié par les constatations cantonales (art . 105
al. 1 LTF), sous réserve de l'art. 105 al. 2 LTF, c'est-à-dire sous réserve
d'un établissement arbitraire des faits.

Le résultat de l'administration des preuves n'est certes en l'espèce pas
univoque, puisque l'une des assistantes de la banque a fait à l'époque une
annotation qui ne mentionne pas l'intention de donner et qu'elle a confirmé,
comme témoin, avoir inscrit cette mention à la suite d'un entretien
téléphonique avec l'intimé. Qu'un moyen de preuve conduise à un résultat
divergent n'exclut cependant pas que le juge puisse parvenir à une conviction.
Il lui appartient d'apprécier dans leur ensemble tous les moyens de preuve
apportés, en évaluant la crédibilité de chacun d'eux.

L'une des assistantes de la banque a affirmé, sous la foi du serment, que le
défunt lui a déclaré, au sujet du transfert litigieux, qu'il s'agissait d'un
"petit cadeau" et qu'elle a compris, puisque les fonds étaient versés sur le
compte personnel de l'intimé, qu'il s'agissait d'une donation en faveur de ce
dernier. Que cette déclaration ait été faite lors d'une seconde audition ne
permet pas d'affirmer que le témoin a menti. Il s'agit d'une déclaration à la
fois claire et crédible sur la volonté du défunt, telle que celui-ci l'a
lui-même exprimée.

La véracité de cette déclaration est étayée par un indice corroboratif. Deux
témoins (le gestionnaire du compte et la même assistante) ont affirmé que le
défunt suivait de près ses comptes et qu'il n'a jamais réagi au sujet du
transfert des fonds sur le compte personnel de l'intimé. Reposant sur deux
témoignages concordants (sans éléments contraires), cette absence de réaction
peut être tenue pour avérée. Or, une personne qui suit attentivement les
opérations sur ses comptes ne manquerait pas de réagir si un million de dollars
était transféré contre sa volonté sur le compte personnel d'autrui; l'absence
de réaction permet raisonnablement d'admettre que le défunt était d'accord avec
cette attribution dépourvue de contre-prestation (celle-ci n'a d'ailleurs
jamais été alléguée).

Il reste évidemment le problème du moyen de preuve divergent, c'est-à-dire de
la déclaration de l'autre assistante. La cour cantonale a imaginé qu'elle avait
pu confondre ce transfert avec un autre. On peut aussi concevoir, puisque cette
assistante s'est adressée à l'intimé, que ce dernier, par souci de discrétion,
n'a pas voulu dire à cette employée de banque qu'il recevait une donation d'un
tel montant. En tout état de cause, la mention un peu obscure apposée par cette
assistante n'est pas de nature à contrebalancer la conviction qui se dégage des
autres moyens de preuve exposés ci-dessus. En concluant qu'elle était
convaincue que le défunt avait l'intention de faire une libéralité, la cour
cantonale n'est pas tombée dans l'arbitraire.

3.
3.1 Les recourantes invoquent la violation de diverses dispositions du droit
fédéral, à savoir les art. 1, 18, 19, 20, 239 et 242 CO.

Ces griefs se chevauchent partiellement et il paraît plus expédient - le
Tribunal fédéral appliquant le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF) - de
reprendre l'analyse juridique du cas ab ovo.

3.2 La question litigieuse est de savoir si une donation est valablement
intervenue.

En raison du domicile à N.________ du donateur (cf. ATF 110 II 156 consid. 2b
p. 158), la cause revêt un caractère international et la question du droit
applicable doit être examinée d'office par le Tribunal fédéral (ATF 132 III 609
consid. 4 p. 614, 626 consid. 2 p. 629).

La question doit être tranchée selon le droit international privé du for (ATF
132 III 661 consid. 2 p. 663). La qualification du rapport juridique litigieux
doit être effectuée selon le droit interne du for (ATF 132 III 609 consid. 4 p.
615).

En l'absence de convention internationale, il faut donc appliquer, pour le
fond, les art. 116 et 117 LDIP et, pour la forme, l'art. 124 LDIP.

En l'espèce, la cour cantonale a retenu que les parties, représentées par des
avocats, avaient, par actes concluants, choisi d'appliquer le droit interne
suisse. Comme la question du droit applicable a été expressément soulevée par
la cour cantonale et que les avocats des parties continuent de se référer
exclusivement au droit suisse, il n'est pas douteux que les parties ont choisi
d'appliquer ce droit comme le leur permet l'art. 116 LDIP. En ce qui concerne
la forme, ce n'est que si le contrat apparaissait comme nul selon le droit
suisse qu'il faudrait se demander s'il n'est pas valable selon le droit
N.________ (art. 124 al. 2 LDIP). Quant à la question de la capacité du
donateur, elle ne se poserait que s'il était établi - ce qui n'est pas le cas -
que le donateur n'avait pas la capacité selon le droit N.________ (cf. art. 35
et 36 al. 1 LDIP).

3.3 Selon l'art. 239 al. 1 CO, la donation est la disposition entre vifs par
laquelle une personne cède tout ou partie de ses biens à une autre sans
contre-prestation correspondante.

La donation est un contrat (Pierre Tercier/Pascal G. Favre, Les contrats
spéciaux, 4e éd. 2009, n. 1760 p. 260; Pierre Engel, Contrats de droit suisse,
2e éd. 2000, p. 110; Margareta Baddeley, Commentaire romand, CO I, 2003, n° 4
ad art. 239 CO). Il suppose donc un accord des parties sur un transfert
patrimonial à titre gratuit (art. 1 al. 1 CO). En conséquence, la donation doit
être acceptée (ATF 110 II 156 consid. 2d p. 161). L'acceptation peut intervenir
par actes concluants (art. 1 al. 2 CO) et, comme la donation ne présente que
des avantages pour le donataire, elle peut être tacite (art. 6 CO).

Ce contrat peut revêtir deux formes: la donation manuelle (art. 242 CO) ou la
promesse de donner (art. 243 CO) (arrêt 5C.273/2005 du 14 mars 2006 consid.
5.1).

Lorsque le donateur s'engage envers le donataire à lui remettre gratuitement un
bien et que le donataire accepte, le contrat est parfait. Il donne naissance à
une obligation dont le donataire peut exiger l'exécution. Pour protéger le
donateur contre des promesses faites à la légère, le législateur exige qu'il
s'engage par écrit ou, s'il s'agit de donner un immeuble ou un droit réel
immobilier, par acte authentique (art. 243 al. 1 et 2 CO). Seul le donateur
doit signer l'acte écrit (ATF 110 II 156 consid. 2d p. 161; 105 II 104 consid.
3b p. 107 s.). On parle alors, selon le titre marginal de l'art. 243 CO, d'une
"promesse de donner", expression qui n'est pas entièrement satisfaisante, parce
qu'elle fait croire à tort qu'il ne s'agit pas d'un contrat, mais d'un acte
unilatéral.

Il arrive que le donateur exprime sa volonté de faire une libéralité en
remettant directement le bien au donataire qui l'accepte. Dans ce cas, la
conclusion de la donation a lieu en même temps que son exécution, de sorte que
la naissance du contrat coïncide avec son extinction par l'exécution (ATF 105
II 104 consid. 3a p. 107). On parle alors d'une "donation manuelle" selon
l'expression figurant à l'art. 242 al. 1 CO. Cette dénomination non plus n'est
pas entièrement satisfaisante, parce qu'elle suggère l'idée d'une chose
mobilière que le donateur remet au donataire de la main à la main. Or, la
"donation manuelle" peut revêtir, s'il s'agit d'une chose mobilière, toutes les
formes de transfert de la propriété mobilière (ATF 105 II 104 consid. 3a p.
107). La donation peut aussi porter sur un immeuble ou un droit réel
immobilier, auquel cas le transfert s'opère par l'inscription au registre
foncier (art. 242 al. 2 CO). Elle peut également porter sur une créance ou un
autre droit transmissible ayant une valeur patrimoniale; une "donation
manuelle" peut donc également intervenir par une cession de créance (art. 164
et 165 CO; Nedim Peter Vogt, Basler Kommentar, OR I, 4e éd. 2007, n° 8 ad art.
239 CO; Engel, op. cit., p. 112) ou par une assignation (ATF 105 II 104 consid.
3c p. 108). Une "donation manuelle" peut donc intervenir par un virement d'un
compte bancaire à un autre (Vogt, op. cit., art. 239 n° 20). Ce qui est décisif
est que le bien sorte du patrimoine du donateur et entre dans celui du
donataire (Tercier/Favre, op. cit., n. 1769 p. 261).

Une promesse de donner qui ne revêt pas la forme écrite est sans effet
juridique (ATF 117 II 382 consid. 2a p. 385). Un ordre bancaire (qui n'exprime
pas l'intention de donner) ne peut constituer une promesse valable (ATF 117 II
382 consid. 2b p. 385). Cependant, si une promesse nulle pour vice de forme est
ensuite exécutée sous la forme d'un transfert du bien d'un patrimoine à
l'autre, il faut, en vertu de la règle spéciale de l'art. 243 al. 3 CO,
considérer qu'il s'agit d'une donation manuelle valable (Tercier/Favre, op.
cit., n. 1829 p. 269; Vogt, op. cit., n° 6 ad art. 243 CO; Baddeley, op. cit.,
n° 50 ad art. 239 CO et n° 21 ad art. 243 CO; Engel, op. cit., p. 118).

3.4 En l'espèce, il ressort des constatations cantonales - qui lient le
Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF) - que le défunt avait l'intention de
transférer un million de dollars à l'intimé sans contre-prestation, pour lui
exprimer sa reconnaissance après une trentaine d'années de conseils et
d'amitié. Dans ce but, il a fait transférer la somme par une assignation sur le
compte dénommé "U.________". Dès ce moment, les fonds étaient à disposition de
l'intimé, puisque celui-ci disposait d'une signature individuelle sur ce
compte; le défunt n'en avait cependant pas totalement perdu la maîtrise,
puisqu'il pouvait aussi disposer de ce compte avec une signature individuelle
(sur cette question: cf. ATF 52 II 284 consid. 2 p. 289 s.); on peut donc se
demander si la donation manuelle était déjà parfaite au moment où les fonds
sont arrivés sur ce compte; il n'est cependant pas nécessaire d'approfondir
cette question. En effet, par une seconde assignation, l'intimé a fait
transférer les fonds sur un compte personnel auprès d'une autre banque. Dès ce
moment, les fonds sont clairement sortis du patrimoine du défunt et sont entrés
dans celui de l'intimé. En donnant cet ordre, l'intimé a manifesté sa volonté
d'accepter la donation. Le transfert de valeur ayant été opéré, il faut
raisonner avec la notion de donation manuelle et l'absence de promesse en la
forme écrite est sans importance (art. 242 al. 1 et 243 al. 3 CO). Le transfert
ayant été opéré avant la mort du donateur, la question examinée à l'ATF 105 II
104 (consid. 3c p. 108 s.) ne se pose pas.

Il n'apparaît donc pas que la cour cantonale ait violé les art. 1, 18, 239 ou
242 CO.

3.5 Les recourantes tentent enfin de soutenir que la libéralité serait
contraire aux bonnes moeurs en raison de la qualité d'avocat de l'intimé.

Il est vrai que la jurisprudence a admis qu'une libéralité en faveur d'une
personne de confiance, telle qu'un avocat, pouvait, dans des circonstances
particulières, être contraire aux bonnes moeurs, lorsque la personne de
confiance a exercé une influence déloyale sur la volonté du donateur ou
lorsqu'elle a violé des règles professionnelles élémentaires (ATF 132 III 455
consid. 4 p. 458 ss).

Il faut tout d'abord observer qu'aucune règle juridique n'interdit de façon
absolue à un avocat de recevoir un cadeau de l'un de ses clients. Ensuite, il
faut rappeler que le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés par la
cour cantonale (art. 105 al. 1 LTF). Or, il ne ressort nullement de l'état de
fait cantonal que l'intimé aurait sollicité ce don, qu'il aurait exercé une
quelconque pression sur le donateur, qu'il aurait, d'une quelconque façon,
trahi la confiance placée en lui ou abusé d'une situation de dépendance. Il
ressort au contraire des constatations cantonales que le donateur, personne
très fortunée, a décidé librement, de sa propre initiative, de faire une
libéralité en faveur de son ami et avocat, pour le gratifier après une
trentaine d'années de conseils et d'amitié. Même si le montant paraît élevé,
une telle libéralité ne peut pas être qualifiée de contraire aux bonnes moeurs.
Il n'y a donc pas eu davantage de violation des art. 19 et 20 CO.

On ne se trouve dans aucun des cas qui permettrait de revenir sur la donation
valablement exécutée (cf. art. 247 et 249 CO).

Le recours doit donc être rejeté.

4.
Les frais judiciaires et les dépens sont mis solidairement à la charge des
parties qui succombent (art. 66 al. 1 et 5 et art. 68 al. 1, 2 et 4 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 15'000 fr., sont mis solidairement à la charge
des recourantes.

3.
Les recourantes verseront solidairement à l'intimé une indemnité de 17'000 fr.
à titre de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour
de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 4 décembre 2009

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: Le Greffier:

Klett Piaget