Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.321/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
4A_321/2009
4A_323/2009

Arrêt du 15 janvier 2010
Ire Cour de droit civil

Composition
Mme et MM. les Juges Klett, présidente, Corboz et Kolly.
Greffière: Mme Cornaz.

Parties
F.X.________,
représentée par Me Imed Abdelli,
recourante,

contre

4A_321/2009
Y.________,
représentée par Me Jean-Pierre Garbade,
intimée,

et

4A_323/2009
Z.________,
représenté par Me Jean-Pierre Garbade,
intimé.

Objet
contrat de travail,

recours contre les arrêts de la Cour d'appel de la juridiction des prud'hommes
du canton de Genève
du 18 mai 2009.

Faits:

A.
Fin 2003, H.X.________, né A.________ (ci-après: H.X.________) a cherché du
personnel de maison pour la villa qu'il était en train d'acquérir, par le biais
de la société dont il était propriétaire économique; il souhaitait ainsi faire
une surprise à sa future femme - qu'il a finalement épousée le 12 mars 2004 et
dont il est actuellement divorcé - parce que, bien qu'elle n'ait pas souhaité
d'aide, il était d'avis qu'à elle seule elle n'aurait pas pu faire tout le
travail domestique nécessaire. Cela étant, le 4 janvier 2004, H.X.________ a
engagé, verbalement, Y.________ et son compagnon Z.________, avec entrée en
service immédiate - à savoir au 1er janvier 2004.

B.
Le 27 février 2007, Y.________ a assigné les époux H.X.________ et F.X.________
en paiement, par cette dernière, de la somme de 128'224 fr. 10 avec intérêt à 5
% l'an. A la même date, Z.________ a également déposé contre les précités une
demande tendant au paiement, par l'épouse, de la somme de 144'813 fr. 90 avec
intérêt à 5 % l'an, ainsi qu'à la remise d'un certificat de travail. En bref,
tous deux prétendaient au versement de montants à titre de salaire,
d'indemnités pour le logement et la nourriture et de rémunération d'heures
supplémentaires, Y.________ réclamant en outre le paiement d'indemnités pour
vacances non prises en nature et Z.________ celui d'une indemnité pour
licenciement immédiat injustifié.

Les procédures ont été suspendues en ce qui concerne H.X.________ en raison de
la faillite de ce dernier, prononcée le 6 mars 2007; elles n'ont pas été
reprises à l'encontre de l'intéressé.

Par jugement du 2 juin 2008, le Tribunal des prud'hommes du canton de Genève a
condamné F.X.________ à payer à Y.________ la somme brute de 85'492 fr. 10 avec
intérêt à 5 % l'an dès le 23 octobre 2006, ainsi qu'à lui délivrer un
certificat de travail. Par décision du même jour, ladite autorité a condamné
F.X.________ à payer à Z.________ la somme brute de 84'127 fr. 20 avec intérêt
à 5 % l'an dès le 27 février 2007, ainsi qu'à lui délivrer un certificat de
travail.

Saisie par F.X.________ et statuant par arrêts du 18 mai 2009, la Cour d'appel
de la juridiction des prud'hommes du canton de Genève a annulé les jugements du
2 juin 2008 et condamné F.X.________ à verser d'une part à Y.________ la somme
de 63'392 fr. 55, d'autre part à Z.________ celle de 61'899 fr. 65, dans les
deux cas avec intérêt à 5 % l'an dès la date moyenne du 1er juin 2005, ainsi
qu'à leur remettre à tous deux un certificat de travail. En bref, elle a en
particulier jugé que F.X.________ contestait vainement sa légitimation passive,
car il fallait raisonnablement admettre qu'avant le mariage, les futurs époux
avaient formé une société simple ayant notamment pour objet leur installation
dans leur villa et l'organisation de la tenue du ménage; dans cette optique,
ils étaient tous deux solidairement tenus des engagements pris par le futur
mari envers les employés de maison; en outre, depuis la conclusion du mariage,
ces engagements étaient entrés dans les obligations que les conjoints assument
mutuellement en vue de la prospérité commune; par ailleurs, l'engagement de
personnel de maison entrait en l'espèce, de manière reconnaissable pour les
tiers, dans les pouvoirs de représentation du conjoint; de surcroît, en tout
état, en profitant quotidiennement des services des employés durant environ
deux ans et en leur donnant, même occasionnellement, des instructions,
F.X.________ avait entériné a posteriori l'engagement pris par son mari et elle
était liée au même titre que lui envers les employés.

C.
F.X.________ (la recourante) a interjeté deux recours en matière civile au
Tribunal fédéral; dans celui dirigé contre Y.________, elle a conclu
principalement au renvoi du dossier devant la Cour d'appel pour nouvelle
décision dans le sens des considérants, subsidiairement au renvoi du dossier
devant la Cour d'appel pour nouvelle instruction et décision dans le sens des
considérants ainsi qu'au déboutement de son adverse partie de toutes autres
plus amples ou contraires conclusions, le tout sous suite de frais et dépens;
dans celui formé contre Z.________, elle a conclu principalement à ce qu'il
soit dit qu'elle n'a pas la qualité de partie à la procédure découlant des
rapports de travail liant Y.________ (sic) à H.X.________ ainsi qu'au renvoi du
dossier devant la Cour d'appel pour nouvelle décision dans le sens des
considérants, subsidiairement au renvoi du dossier devant la Cour d'appel pour
nouvelle instruction et décision dans le sens des considérants ainsi qu'au
déboutement de Y.________ (sic) de toutes autres plus amples ou contraires
conclusions, le tout sous suite de frais et dépens.
Dans les deux dossiers, la recourante a en bref reproché à la cour cantonale -
dans une motivation confuse présentant un mélange de différents griefs - d'une
part d'avoir rendu des décisions arbitraires au sens de l'art. 9 Cst., d'autre
part d'avoir violé le droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir
d'appréciation, principalement les art. 29 al. 2 Cst., 2 et 4 CC, 61 de la loi
genevoise du 25 février 1999 sur la juridiction des prud'hommes (juridiction du
travail; LJP/GE; RSG E 3 10), ainsi que 320 ss CO, notamment 320 al. 2 CO, 530
ss CO et 166 CC, en rapport avec la question de sa légitimation passive et la
problématique des heures supplémentaires ainsi que des vacances et autres
prestations.

La recourante a également déposé des demandes d'effet suspensif, qui ont été
rejetées par ordonnances présidentielles du 24 juillet 2009; elle a en outre
présenté des demandes d'assistance judiciaire, qui ont derechef été rejetées
par décisions du 29 septembre 2009.

Y.________ (l'intimée) et Z.________ (l'intimé) se sont déterminés sur la
demande d'effet suspensif, mais n'ont en revanche pas été appelés à déposer des
observations sur le fond.

La recourante a été invitée à verser - et a payé - des avances de frais pour
chacun des deux recours.

Considérant en droit:

1.
Les deux recours sont dirigés contre des arrêts similaires, concernent le même
complexe de faits et comportent des liens étroits, de sorte qu'il se justifie
de les joindre pour des motifs d'économie de procédure et de statuer à leur
sujet par un seul arrêt (cf. art. 71 LTF et art. 24 PCF [RS 273]; ATF 131 V 59
consid. 1 p. 60 s.).

2.
Tout mémoire doit indiquer les conclusions (art. 42 al. 1 LTF). Si le Tribunal
fédéral admet le recours, il peut en principe statuer lui-même sur le fond
(art. 107 al. 2 LTF). La partie recourante ne peut dès lors pas se borner à
demander l'annulation de la décision attaquée et le renvoi de la cause à
l'autorité précédente, mais doit également, en principe, prendre des
conclusions sur le fond du litige; il n'est fait exception à cette règle que
lorsque le Tribunal fédéral, en cas d'admission du recours, ne serait de toute
manière pas en situation de statuer lui-même à ce sujet et ne pourrait que
renvoyer la cause à l'autorité cantonale (ATF 134 III 379 consid. 1.3 p. 383;
133 III 489 consid. 3.1 p. 489 s.).

Les conclusions doivent être interprétées à la lumière de la motivation.
L'interdiction du formalisme excessif impose ainsi de ne pas se montrer trop
strict dans la formulation des conclusions si, à la lecture du mémoire, on
comprend clairement ce que veut le recourant (Aubry Girardin, in Commentaire de
la LTF, 2009, n° 18 ad art. 42 LTF). Cela étant, il n'appartient toutefois pas
au Tribunal fédéral, ni à la partie intimée, de supputer ce que la partie
recourante pourrait bien vouloir.

En l'occurrence, la recourante conclut, dans son recours dirigé contre
l'intimée, à ce qu'il plaise au Tribunal fédéral "principalement renvoyer le
dossier devant la Cour d'appel de la juridiction des prud'hommes pour nouvelle
décision au sens des considérants", plus subsidiairement "renvoyer le dossier
devant la Cour d'appel de la juridiction des prud'hommes pour nouvelle
instruction et décision au sens des considérants" et "débouter Madame
Y.________ de toutes autres plus amples ou contraires conclusions". Par
ailleurs, dans son recours formé contre l'intimé, elle conclut à ce qu'il
plaise au Tribunal fédéral principalement "dire que Madame F.X.________ n'a pas
la qualité de partie à la procédure découlant des rapports de travail liant
Madame Y.________ (sic) à Monsieur A.________" et "renvoyer le dossier devant
la Cour d'appel de la juridiction des prud'hommes pour nouvelle décision au
sens des considérants", plus subsidiairement "renvoyer le dossier devant la
Cour d'appel de la juridiction des prud'hommes pour nouvelle instruction et
décision au sens des considérants" et "débouter Madame Y.________ (sic) de
toutes autres plus amples ou contraires conclusions".

Cela étant, au bas de chacune de ses deux écritures, à l'issue de l'entier de
son argumentation, elle expose qu'"au vu de ce qui précède, la recourante
demande principalement à ce que la décision dont est recours soit annulée et
réformée dans le sens des conclusions exposées au préambule du présent mémoire,
et si par impossible le Tribunal fédéral ne devait pas prononcer l'annulation
de ladite décision, ordonner que le dossier soit remis à la Cour d'Appel des
Prud'hommes de Genève pour nouvelle décision au vu des considérants".
D'emblée, deux remarques s'imposent concernant les conclusions prises dans le
recours dirigé contre l'intimé. Premièrement, il y a lieu de relever que la
recourante a manifestement procédé à un "copier/coller" du recours déposé
contre l'intimée, ce qui a singulièrement pour conséquence qu'elle a
formellement pris ses conclusions contre cette dernière; il n'est pas
nécessaire d'examiner si cette situation, qui dénote d'une certaine
désinvolture, est en soi de nature à entraîner l'irrecevabilité des conclusions
concernées, pour les raisons qui seront exposées ci-dessous. S'agissant
deuxièmement de la conclusion de la recourante tendant à ce qu'il soit dit
qu'elle n'a pas la qualité de partie à la procédure, il convient de rappeler
que des conclusions en constatation de l'inexistence d'un rapport de droit sont
recevables en cas d'intérêt juridique à une constatation immédiate (cf. art. 71
LTF et 25 PCF); or, semblable intérêt fait défaut en l'espèce, dans la mesure
où il incombait à la recourante, plutôt que de faire constater son absence de
légitimation passive, de prendre une conclusion au fond tendant au rejet des
prétentions de son adverse partie, puisque la qualité pour défendre est une
question de droit matériel qui se détermine selon le droit au fond et dont le
défaut conduit au rejet de l'action (ATF 126 III 59 consid. 1a p. 63; 125 III
82 consid. 1a p. 83).

Pour ce qui est des conclusions communes aux deux recours, il apparaît, à la
lumière de la motivation des recours et du paragraphe récapitulatif exposé par
la recourante au pied de ses écritures, que celle-ci ne conclut clairement
qu'au renvoi de la cause à la cour cantonale, les conclusions en déboutement de
ses adverses parties de toutes autres plus amples ou contraires conclusions, au
demeurant subsidiaires, revêtant dans le cas particulier le caractère de pures
formules de style et ne pouvant être considérées comme des conclusions au fond.

Dans ces circonstances, les conclusions des recours sont en principe
irrecevables, sauf à admettre l'existence d'une exception. Or, l'on ne voit pas
en quoi la Cour de céans, si elle accueillait les recours, ne serait de toute
manière pas en situation de statuer elle-même; cela ne découle pas des arrêts
entrepris, ni ne fait l'objet d'une véritable justification dans les recours.
Certes, la recourante soutient, dans le cadre de son grief de prétendue
violation de son droit d'être entendue, que le caractère formel de ce moyen
emporte en principe l'annulation de la décision concernée; cela ne change
toutefois rien au fait que le Tribunal fédéral pourrait être en mesure de
rendre une décision s'il admettait d'autres critiques relatives à l'application
du droit matériel.

Pour le surplus, l'on ne voit pas que l'on se trouve en l'espèce dans une
situation qui appellerait typiquement un renvoi plutôt qu'une réforme, comme
lorsqu'il s'agit de compléter l'état de fait ou d'exercer un pouvoir
d'appréciation (cf. Corboz, in Commentaire de la LTF, 2009, n° 16 ad art 107
LTF): concernant la première hypothèse, l'état de fait déterminant apparaît
complet, et la recourante mentionne d'ailleurs expressément, en rapport avec
son argumentation relative à la question des heures supplémentaires, qu'elle
"ne cherche pas, en invoquant ce grief, à compléter l'état de fait"; s'agissant
enfin du deuxième cas de figure, la recourante reproche certes formellement à
la cour cantonale d'avoir commis un abus ou un excès de son pouvoir
d'appréciation, mais elle méconnaît cependant que l'on ne se trouve pas en
l'espèce dans un domaine où la loi réserve au juge un tel pouvoir.

En définitive, les recours sont donc irrecevables.

3.
Comme la valeur litigieuse, calculée selon les prétentions à l'ouverture de
chacune des deux actions (ATF 115 II 30 consid. 5b p. 41), dépasse le seuil de
30'000 fr., le montant de l'émolument judiciaire - perçu une seule fois compte
tenu de la jonction des deux recours - est fixé selon le tarif ordinaire (art.
65 al. 3 let. b LTF) et non réduit (art. 65 al. 4 let. c LTF). Compte tenu de
l'issue du litige, les frais judiciaires et dépens des intimés - réduits dès
lors que ceux-ci se sont uniquement déterminés sur la demande d'effet suspensif
-, créanciers solidaires, sont mis à la charge de la recourante, qui succombe
(art. 66 al. 1 ainsi que art. 68 al. 1 et 2 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Les recours sont irrecevables.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.
Une indemnité de 1'500 fr., à payer aux intimés, créanciers solidaires, à titre
de dépens réduits, est mise à la charge de la recourante.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Cour
d'appel de la juridiction des prud'hommes du canton de Genève.

Lausanne, le 15 janvier 2010

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: La Greffière:

Klett Cornaz