Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.313/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
4A_313/2009

Arrêt du 9 décembre 2009
Ire Cour de droit civil

Composition
Mme et MM. les Juges Klett, présidente, Corboz et Kolly.
Greffière: Mme Cornaz.

Parties
X.________ SA,
recourante,

contre

Y.________, représentée par Me Thomas Collomb,
intimée.

Objet
contrat de bail à loyer; expulsion,

recours contre l'arrêt de la IIe Cour d'appel civil
du Tribunal cantonal fribourgeois du 12 mai 2009.

Faits:

A.
Depuis le 1er janvier 2008, X.________ SA loue à Fribourg des locaux
commerciaux appartenant à Y.________.

Le 15 avril 2008, la bailleresse a envoyé à la locataire une mise en demeure la
sommant de payer, dans les trente jours, la somme de 10'900 fr. représentant
les loyers de janvier à avril 2008, avec menace de résilier le bail. Le 15 mai
2008, la bailleresse a envoyé à la locataire une nouvelle mise en demeure pour
le loyer de mai 2008, avec délai de paiement de trente jours. Il y figure
expressément la précision que "les éventuelles mises en demeure avec menace de
résiliation notifiées précédemment conservent toute leur validité, notamment en
ce qui concerne les échéances et délais".

Le 21 mai 2008, la bailleresse a adressé à la locataire le formulaire de
résiliation du contrat de bail pour le 30 juin 2008.

B.
Le 1er juillet, la bailleresse a requis le Président du Tribunal des baux de
l'arrondissement de la Sarine (le Président) de prononcer l'expulsion de la
locataire. Celle-ci n'a pas déposé de réponse et ne s'est pas présentée à
l'audience du 6 août 2008. Par jugement du même jour rendu par défaut, le
Président a ordonné l'expulsion. La locataire a demandé le relief.

La locataire ne s'est pas présentée à la deuxième audience du 15 octobre 2008.
Le jour même, le Président a rendu un nouveau jugement par défaut par lequel il
constatait que l'instance de relief était périmée et confirmait le premier
jugement rendu le 6 août 2008. La locataire à de nouveau demandé le relief en
arguant d'une assignation irrégulière.

Une troisième audience a été fixée au 10 décembre 2008. La locataire, une fois
encore, ne s'est pas présentée. Par jugement par défaut du 18 décembre 2008, le
Président a rejeté la requête de second relief et confirmé son premier jugement
du 6 août 2008. Le jugement, qui ne comporte pas moins de quatre pages
d'attendus, mentionne au pied du dispositif qu'il "ne sera rédigé que si une
partie le requiert dans les trente jours à compter de la notification du
présent dispositif". La locataire a requis la rédaction. Pour y donner suite,
le Président a rédigé le jugement du 6 août 2008 qu'il a notifié à la
locataire.

La locataire a interjeté un recours en appel. Par arrêt du 12 mai 2009, la IIe
Cour d'appel civil du Tribunal cantonal fribourgeois a rejeté le recours et
confirmé l'expulsion.

C.
La locataire (la recourante) a formé un recours en matière civile au Tribunal
fédéral, concluant au rejet de la requête d'expulsion; invitée à verser une
avance de frais, elle a requis des prolongations du délai et payé le 16 octobre
2009 seulement, à l'ultime échéance. La bailleresse (l'intimée) a proposé le
rejet du recours.

Considérant en droit:

1.
Sur le fond, la recourante soutient qu'une nouvelle mise en demeure lui a été
adressée le 15 mai 2008 avec un nouveau délai de paiement arrivant à échéance
le 18 juin 2008 et que le congé donné le 21 mai 2008 et reçu le 29 mai 2008
serait ainsi antérieur à l'expiration du délai comminatoire. S'il en était
ainsi, le congé serait inefficace (cf. ATF 121 III 156 consid. 1c/aa; arrêt
4C.96/2006 du 4 juillet 2006 consid. 2.2, in MietRecht Aktuell [MRA] 2007 p.
24; Tercier/Favre, Les contrats spéciaux, 4e éd. 2009, n° 2395; Lachat, Le bail
à loyer, nouvelle éd. 2008, p. 670 s. n° 2.3.5). Un nouveau congé serait alors
exclu durant trois ans, pour autant que la recourante ne soit pas en demeure
(art. 271a al. 1 let. e et al. 3 let. b CO). La valeur litigieuse correspond en
conséquence à trois ans de loyer (cf. 119 II 147 consid. 1 p. 149; 111 II 385
consid. 1 p. 386; plus récemment, cf. également arrêt 4C.155/2000 du 30 août
2000 consid. 1a, in SJ 2001 I p. 17; 4C.310/1996 du 16 avril 1997 consid. 2a,
in SJ 1997 p. 493); elle est manifestement supérieure à 15'000 fr. La voie du
recours en matière civile est ainsi ouverte (art. 74 al. 1 let. a LTF).

2.
La recourante se plaint d'une violation du droit d'être entendu, au motif que
l'arrêt du 18 décembre 2008 n'aurait pas été rédigé.

2.1 Le 6 août 2008, le Président du Tribunal des baux, statuant par défaut, a
ordonné l'expulsion de la recourante. Le dispositif de l'arrêt, ne contenant
aucun motif, a été notifié aux parties avec l'indication que le jugement ne
serait rédigé que si une partie le demandait dans les trente jours. Il n'y a
pas eu de telle requête.

Le 15 octobre 2008, le Président, statuant une seconde fois par défaut, a
constaté que l'instance de relief était périmée, et il a confirmé le jugement
d'expulsion du 6 août 2008. Le dispositif, ne contentant aucun motif, a été
notifié aux parties avec l'indication que le jugement ne serait rédigé que si
une partie le demandait dans les trente jours. La rédaction n'a pas été
requise.

Par jugement du 18 décembre 2008 finalement, le Président a rejeté la requête
de second relief, puis confirmé une nouvelle fois le jugement rendu le 6 août
2008. L'expédition envoyée aux parties, à la différence des deux précédentes,
contient des considérants "en fait et en droit": sur quatre pages, le Président
motive dans le détail le rejet de requête de second relief. Par contre, il ne
s'y trouve aucune motivation de la décision d'expulsion rendue le 6 août 2008;
mais à la suite du dispositif, figure la mention que le jugement sera rédigé si
une partie le requiert dans les trente jours.

La recourante a requis la rédaction. Elle a alors reçu une expédition de
l'arrêt du 6 août 2008.

2.2 Le 18 décembre 2008, le Président du Tribunal des baux a rendu une double
décision. Il a d'abord rejeté la requête de second relief, décision qu'il a
motivée exhaustivement. Il a ensuite confirmé l'expulsion ordonnée le 6 août
2008, mais sans en donner les motifs. Il est manifeste que l'indication selon
laquelle le jugement serait rédigé à la demande des parties se rapportait
uniquement au jugement d'expulsion du 6 août 2008 qui n'avait pas été rédigé
précédemment, et non pas au rejet du second relief déjà motivé.

Quoi qu'il en soit, la recourante a reçu les motifs du jugement du 18 décembre
2008, tant sur la question du second relief que sur celle de l'expulsion. Son
droit d'être entendu n'a pas été violé.

3.
Pour ce qui est du fond, la Cour d'appel, à titre subsidiaire, a constaté, de
façon à lier le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), que l'avis comminatoire
du 15 mai 2008 concernait le loyer de mai 2008 et qu'il y figurait la précision
que des avis comminatoires notifiés précédemment gardaient toute leur validité.
Elle en a déduit que la recourante ne pouvait pas de bonne foi interpréter cet
avis comme une prorogation du délai fixé pour le paiement des loyers des mois
de janvier à avril 2008. Il n'y a rien à ajouter à cette interprétation
parfaitement pertinente, sinon que contrairement à ce que la recourante prétend
dans ses remarques quelque peu obscures sur le système des formes "en quelque
sorte absolutisé" en matière de délais, la Cour d'appel ne s'est pas fondée sur
l'interdiction de l'abus de droit (art. 2 al. 2 CC).

Le délai de trente jours pour payer les loyers des mois de janvier à avril 2008
a été fixé le 15 avril 2008 et le congé donné le 21 mai 2008. La recourante ne
soutient ni n'a jamais soutenu que le congé lui avait été notifié avant
l'échéance du délai fixé le 15 avril 2008 ou qu'elle avait payé les loyers des
mois de janvier à avril 2008, loyers dont elle ne conteste pas être la
débitrice. Il en découle que le congé a été valablement donné le 21 mai pour le
30 juin 2008. C'est donc à bon droit que l'expulsion de la recourante a été
ordonnée.

4.
Compte tenu de l'issue du litige, les frais judiciaires et dépens sont mis à la
charge de la recourante, qui succombe (art. 66 al. 1 ainsi qu'art. 68 al. 1 et
2 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.
Une indemnité de 2'500 fr., à payer à l'intimée à titre de dépens, est mise à
la charge de la recourante.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la IIe Cour d'appel civil du
Tribunal cantonal fribourgeois.

Lausanne, le 9 décembre 2009

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: La Greffière:

Klett Cornaz