Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.22/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
4A_22/2009

Arrêt du 17 mars 2009
Ire Cour de droit civil

Composition
Mme et MM. les Juges Klett, Présidente, Corboz et Kolly.
Greffière: Mme Crittin.

Parties
X.________ Immobilien GmbH, recourante,

contre

Y.________ SA,
intimée, représentée par Me Pierre-Bernard Petitat, avocat.

Objet
bail à loyer,

recours contre l'arrêt de la Chambre d'appel en matière de baux et loyers du
canton de Genève du 27 novembre 2008.

Faits:

A.
Y.________ SA, précédemment Z.________ SA, est liée à X.________ Immobilien
GmbH (ci-après: X.________ GmbH), par sept contrats de baux. Ces contrats,
initialement conclus à des dates différentes entre Z.________ SA (locataire) et
A.________ (bailleresse), dont les actifs et passifs ont été repris par
X.________ GmbH, portent sur des locaux sis dans l'immeuble 000, à Genève.
Par avis comminatoire du 26 janvier 2004, X.________ GmbH sollicitait de
Z.________ SA le versement du loyer des mois de janvier à mars 2004,
représentant la somme de 21'816 fr. (3 x 7'272 fr.); elle indiquait qu'à défaut
de paiement dans un délai de 30 jours, le bail serait résilié. Le 23 février
2004, la somme de 7'272 fr., correspondant à un mois de loyer, a été acquittée.
Par avis de résiliation de bail du 23 mars 2004, X.________ GmbH a résilié
l'ensemble des baux la liant à Z.________ SA pour le 30 avril 2004.
Le 2 juin 2004, le conseil de Z.________ SA informait X.________ GmbH que la
locataire libérerait les locaux dès le 1er juin 2004. Une clé des locaux était
remise à la bailleresse par ce même courrier.
Par une annonce de presse, X.________ GmbH a offert les locaux libérés en
location dès le 29 juin 2004.

B.
En janvier et mars 2006, X.________ GmbH a saisi la Commission de conciliation
en matière de baux et loyers de plusieurs demandes en paiement, toutes
déclarées non conciliées. Saisi, le Tribunal des baux et loyers a ordonné la
jonction de l'ensemble des causes. X.________ GmbH a conclu, en dernier lieu, à
ce qu'Y.________ SA soit condamnée à lui verser la somme de 74'808 fr.35, avec
intérêts moyens à 5% dès le 15 décembre 2004, représentant la totalité des
loyers mis en poursuite, et à ce que le solde du cautionnement auprès de la
BCGE reste bloqué. Quant à Y.________ SA, elle a pris des conclusions
reconventionnelles et requis le paiement des dommages engendrés par la
résiliation, qu'elle a chiffré à 51'378 fr.80.
Par jugement du 20 décembre 2007, le Tribunal des baux et loyers a condamné
Y.________ SA au paiement de 19'065 fr. avec intérêts à 5% dès le 16 juillet
2004, de 13'185 fr. avec intérêts à 5% dès le 16 septembre 2004, de 23'062 fr.
avec intérêts à 5% dès le 16 novembre 2004 et de 1'540 fr. avec intérêts à 5%
dès le 16 août 2204 (recte: 2004), et prononcé la mainlevée de l'opposition aux
commandements de payer no ..., notifié le 8 février 2006 et no ... notifié le
20 septembre 2005.
Les premiers juges ont considéré, en substance, qu'à la suite de la résiliation
anticipée des baux en raison de la demeure de la locataire, celle-ci était
redevable d'une indemnité correspondant aux loyers qui auraient dû être perçus
par la bailleresse jusqu'à la relocation des locaux ou, pour les cas où il n'y
a pas eu de relocation, jusqu'à la prochaine échéance contractuelle. Pour ce
faire, ils ont tenu compte des dates de relocation indiquées par la
demanderesse à l'appui de ses écritures.
La locataire a appelé de ce jugement. A l'appui de son recours, elle contestait
le montant de l'indemnité allouée pour occupation illicite des locaux en mai
2004; ce montant ne pouvait pas correspondre au montant du loyer, dès lors
qu'elle n'avait, durant ce mois, quasiment pas joui des locaux. Elle contestait
par ailleurs devoir une quelconque indemnité à partir du 1er juin 2004, motif
pris de la nullité ou de l'inefficacité de la résiliation. Elle requérait,
enfin, le remboursement du préjudice subi à la suite de la violation par la
bailleresse de ses obligations contractuelles. La bailleresse a, pour sa part,
déposé un appel incident, en concluant à la condamnation de la locataire au
paiement du montant de 4'980 fr. avec intérêts, correspondant au dommage subi
du fait que certaines surfaces ont été relouées avant l'échéance à des loyers
inférieurs.
Statuant par arrêt du 27 novembre 2008, la Chambre d'appel en matière de baux
et loyers a annulé le jugement du 20 décembre 2007 et condamné Y.________ SA à
payer à X.________ GmbH la somme de 8'000 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 15
mai 2005, prononcé la mainlevée de l'opposition au commandement de payer no ...
à concurrence de ce montant, dit que le solde de l'acte de cautionnement
restait bloqué en faveur de X.________ GmbH jusqu'au paiement intégral du
montant dû et, enfin, condamné Y.________ SA et son conseil à une amende de 500
fr. chacun; les parties ont été déboutées de toutes autres conclusions.
Les juges cantonaux ont estimé qu'il n'y avait pas lieu d'allouer à la
bailleresse une somme excédant l'utilisation effective des locaux par la
locataire. Comme cette utilisation a duré trente-trois jours au-delà de
l'échéance du bail, la cour a considéré, ex aequo et bono, qu'il se justifiait
d'allouer à la bailleresse une indemnité de 8'000 francs.

C.
Ayant reçu cet arrêt le 3 décembre 2008, X.________ GmbH a déposé dans un
bureau de poste suisse, le 13 janvier 2009, un recours en matière civile au
Tribunal fédéral. Invoquant une violation de l'art. 257d CO, elle conclut, sous
suite de dépens, à l'annulation de l'arrêt attaqué et à la condamnation de la
partie adverse à lui payer 56'852 fr. avec intérêts, soit 19'065 fr., avec
intérêts à 5% dès le 16 juillet 2004, 13'185 fr., avec intérêts à 5% dès le 16
septembre 2004, 23'062 fr., avec intérêts à 5% dès le 16 novembre 2004 et 1'540
fr., avec intérêts à 5% dès le 16 août 2004. Elle requiert également la
mainlevée de l'opposition aux commandements de payer no ..., notifié le 8
février 2006, et no ..., notifié le 20 septembre 2005.
L'intimée a conclu, sous suite de dépens, au rejet du recours.
Considérant en droit:

1.
1.1 Interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions (art. 76 al. 1
LTF) et dirigé contre un jugement final (art. 90 LTF) rendu en matière civile
(art. 72 al. 1 LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 75
LTF) dans une affaire pécuniaire dont la valeur litigieuse atteint le seuil de
15'000 fr. requis en matière de bail (art. 74 al. 1 let. a LTF), le recours en
matière civile est en principe recevable, puisqu'il a été déposé dans le délai
(art. 46 al. 1 let. c et 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la
loi.

1.2 Le recours peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est
délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit
d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc limité ni par les arguments
soulevés dans le recours, ni par la motivation retenue par l'autorité
précédente; il peut admettre un recours pour un autre motif que ceux qui ont
été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant une argumentation
différente de celle de l'autorité précédente (ATF 134 III 102 consid. 1.1 p.
104). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2
LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), le Tribunal
fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués; il n'est pas tenu de
traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les
questions juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées
devant lui (ATF 134 III 102 consid. 1.1 p. 105). Il ne peut entrer en matière
sur la violation d'un droit constitutionnel ou sur une question relevant du
droit cantonal ou intercantonal que si le grief a été invoqué et motivé de
manière précise par le recourant (art. 106 al. 2 LTF).

1.3 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des
faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en
écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce
qui correspond à la notion d'arbitraire: ATF 134 V 53 consid. 4.3 p. 62 - ou en
violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). La partie
recourante qui entend s'écarter des constatations de l'autorité précédente doit
expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception
prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de quoi il n'est pas
possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui contenu dans la
décision attaquée (cf. ATF 130 III 138 consid. 1.4 p. 140). Aucun fait nouveau
ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de
l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF).

1.4 Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art.
107 al. 1 LTF). Toute conclusion nouvelle est irrecevable (art. 99 al. 2 LTF).

2.
La recourante se plaint d'une violation de l'art. 257d CO.
Le litige porte sur la question de savoir si, à la suite de la résiliation des
baux litigieux conformément à l'art. 257d CO, la bailleresse peut prétendre au
paiement d'une indemnité en ce qui concerne la période postérieure à
l'occupation effective des locaux par la locataire. La bailleresse - recourante
-, qui cite la jurisprudence du Tribunal fédéral et plusieurs auteurs de
doctrine, estime que tel doit être le cas, contrairement à ce qui a été jugé
par l'autorité cantonale de dernière instance, qui a considéré qu'il n'était
pas justifié d'allouer à la bailleresse des montants excédant l'utilisation
effective de la chose.
Il est de jurisprudence que le locataire qui a donné lieu, par sa faute, à la
rupture prématurée du bail a l'obligation d'indemniser le bailleur pour le
dommage qu'il lui a causé; l'indemnité à laquelle le bailleur peut prétendre, à
la suite d'une résiliation anticipée du contrat pour défaut de paiement - avec
effet ex nunc -, équivaut aux loyers fixés contractuellement qu'il n'a pas
perçus du fait de la rupture anticipée du bail, cela pendant la période qui
s'est écoulée entre, d'une part, la fin prématurée du bail, et, d'autre part,
le terme pour lequel la chose pouvait être objectivement relouée, la date de
l'échéance contractuelle ordinaire du bail primitivement conclu en constituant
la limite maximale (ATF 127 III 548 consid. 5 p. 552; cf. ég. DAVID Lachat, Le
bail à loyer, 2008, p. 674 no 2.3.11; SVIT-Kommentar Mietrecht, 3e éd. 2008, n°
45 ad art. 257d CO; ROGER Weber, in Basler Kommentar, Obligationenrecht I, 4e
éd. 2007, n° 13 art. 257d CO; Peter Heinrich, in Handkommentar zum Schweizer
Privatrecht, 2007, no 16 ad art. 257d CO).
Il résulte de l'état de fait (art. 105 al. 1 LTF) que la locataire ne s'est pas
acquittée des loyers échus dans le délai de paiement imparti par la bailleresse
et que les baux ont de ce fait été résiliés le 23 mars 2004 pour le 30 avril
2004; les locaux étant libérés le 1er juin 2004, la bailleresse a cherché, dès
la fin de ce mois, par voie d'annonce, un(ou des) locataire(s) de remplacement.
A cet égard, il ressort des constatations de fait du jugement de première
instance, non remises en cause devant l'autorité cantonale, que la surface de
119 m2, le parking n°..., le box no ... et le dépôt no ... n'ont pas été
reloués avant leur échéance contractuelle fixée au 30 septembre 2004 et que les
surfaces de 66 et de 67 m2 et le box no ... ont été reloués les 1er février
2005, 1er juin 2005 et 1er décembre 2004, soit avant leurs échéances
contractuelles fixées respectivement aux 31 juillet 2005, 28 février 2007 et 31
mai 2005.
Il n'apparaît pas, à la lecture du jugement entrepris, que la locataire ait
soutenu, devant l'autorité d'appel, que la bailleresse aurait été en mesure de
relouer les locaux susmentionnés aussitôt après la résiliation des baux. On ne
voit du reste pas ce qui permettrait d'admettre que la bailleresse n'a pas pris
les dispositions qui s'imposaient pour réduire au maximum le dommage subi, ce
d'autant qu'il ressort de l'état de fait qu'elle a, dans le mois suivant la
libération des locaux, recherché un(ou des) locataire(s) de remplacement par
voie d'annonce dans la presse.
Il en découle que la locataire est redevable des loyers correspondant à la
période s'écoulant du 30 avril 2004 (date de la fin prématurée des baux) au 30
septembre 2004, pour les locaux non reloués avant l'échéance, et du 30 avril
2004 aux différentes dates de relocation, pour les autres locaux. L'arrêt
attaqué sera dès lors réformé en ce sens que l'intimée est condamnée à verser à
la recourante les sommes de 19'065 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 16
juillet 2004, de 13'185 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 16 septembre 2004,
de 23'062 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 16 novembre 2004 et de 1'540 fr.
avec intérêts à 5% l'an dès le 16 août 2004, le calcul de ces montants et le
dies a quo des intérêts n'ayant fait l'objet d'aucune discussion devant la Cour
d'appel cantonale. Les oppositions formées dans les poursuites nos ... et ...
sont définitivement levées à due concurrence.
La condamnation de l'intimée et de son mandataire à verser une amende de 500
fr. est maintenue, à défaut de toute contestation soulevée sur ce point. Il en
va de même du blocage du solde de l'action de cautionnement jusqu'au paiement
intégral du montant dû.

3.
L'issue du litige commande de mettre les frais judiciaires à la charge de
l'intimée (art. 66 al. 1 LTF). L'affaire ne justifie toutefois pas l'octroi de
dépens, car la recourante n'est pas représentée par un avocat et n'a pas
justifié avoir supporté des dépenses particulières (cf. ATF 125 II 518 consid.
5b p. 519 s.; 113 Ib 353 consid. 6b p. 357).
Quant aux frais de la procédure antérieure, ils consistent en deux émoluments
de 300 fr. mis à la charge de chacune des parties, dans la mesure où celles-ci
« succombent toutes deux en grande partie ». Conséquemment à la réforme de
l'arrêt attaqué dans le sens d'une confirmation des montants alloués par les
premiers juges, comme demandé par la recourante, l'intimée succombe entièrement
à concurrence des prétentions requises à l'appui de son appel. La recourante,
pour sa part, n'obtient pas gain de cause s'agissant de son appel incident.
Cela étant, il ne se justifie pas de modifier la répartition des frais de la
procédure cantonale (art. 67 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis et l'arrêt attaqué est réformé en ce sens que l'intimée
est condamnée à verser à la recourante les sommes de 19'065 fr. avec intérêts à
5% l'an dès le 16 juillet 2004, de 13'185 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 16
septembre 2004, de 23'062 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 16 novembre 2004
et de 1'540 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 16 août 2004, les oppositions
formées dans les poursuites nos ... et ... étant définitivement levées à due
concurrence.
Pour le surplus, le dispositif de l'arrêt attaqué est maintenu.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'500 fr., sont mis à la charge de l'intimée.

3.
Il n'est pas alloué de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre d'appel en matière
de baux et loyers du canton de Genève.

Lausanne, le 17 mars 2009

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: La Greffière:

Klett Crittin