Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Subsidiäre Verfassungsbeschwerde 2D.8/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

2D_8/2009
{T 0/2}

Arrêt du 26 février 2009
IIe Cour de droit public

Composition
MM. et Mme les Juges Müller, Président,
Aubry Girardin et Donzallaz.
Greffière: Mme Charif Feller.

Parties
X.________ SA,
recourante, représentée par Me Pierre Gabus, avocat,

contre

Y.________ SA, intimée,
représentée par Me Pierre Louis Manfrini, avocat,
Ville de Genève, Hôtel Municipal, Palais Eynard, rue de la Croix-Rouge 4, case
postale 3983, 1211 Genève 3.

Objet
Adjudication; effet suspensif,

recours constitutionnel subsidiaire contre la décision de la Présidente du
Tribunal administratif du canton de Genève, du 22 décembre 2008.

Considérant en fait et en droit:

1.
1.1 La Ville de Genève a publié dans la Feuille d'avis officielle du 14 juillet
2008 un appel d'offres pour une procédure ouverte concernant le transfert de
"l'activité Cardinal", soit le traitement, la valorisation et le recyclage des
déchets encombrants. Le prix des prestations était estimé à 3'160'000 fr.

Par décision du 17 octobre 2008, le marché a été adjugé à Y.________ SA pour
une offre de 3'981'200 fr., X.________ SA étant placé en troisième position
avec une offre de 5'470'115 fr. Le 6 novembre 2008, celle-ci a déposé un
recours contre la décision d'adjudication en soutenant que les deux autres
candidats auraient été favorisés à son détriment et en concluant à la
restitution de l'effet suspensif. X.________ SA a allégué que les deux sociétés
ne remplissaient pas, contrairement à elle, une condition éliminatoire, à
savoir celle de disposer des autorisations nécessaires au traitement du volume
des déchets encombrants de 4'000 tonnes, prévu dans le cahier des charges,
tandis qu'une importance exagérée avait été donnée au fait qu'elle ne disposait
pas encore du site de traitement requis. Pour X.________ SA, aucun intérêt
public ou privé prépondérant n'empêche la restitution de l'effet suspensif,
dans la mesure où elle assure déjà depuis des années le traitement et
l'évacuation des déchets encombrants.

La Ville de Genève s'est opposée à la restitution de l'effet suspensif en
faisant valoir que le maintien du contrat avec X.________ SA occasionnait un
coût supplémentaire de 50'000 fr. par mois de retard et qu'une saine gestion
des deniers publics était d'un intérêt public évident. La Ville de Genève a
contesté toute favorisation de Y.________ SA, dont l'offre aurait été retenue
conformément aux règles, et a réfuté l'argument selon lequel la société
adjudicatrice ne bénéficierait pas de l'autorisation d'exploitation requise, en
produisant une attestation du 5 août 2008 établie par le Service de géologie,
sols et déchets du Département du territoire du canton de Genève. S'agissant de
la situation du site de traitement, cette question constituerait un critère
fondamental d'évaluation de l'offre sous l'angle de l'appréciation des qualités
environnementales.

Par décision du 22 décembre 2008, la Présidente du Tribunal administratif du
canton de Genève a rejeté la demande de restitution de l'effet suspensif au
recours.

1.2 Agissant par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, X.________ SA
demande en substance au Tribunal fédéral, principalement, d'annuler la décision
précitée du 22 décembre 2008 et de restituer l'effet suspensif à son recours du
6 novembre 2008 contre la décision d'adjudication, subsidiairement, de renvoyer
la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des
considérants.

La Présidente du Tribunal administratif s'en rapporte à justice quant à la
recevabilité du recours et persiste dans les considérants et le dispositif de
son arrêt. La Ville de Genève conclut au rejet du recours dans la mesure de sa
recevabilité. Y.________ SA conclut à l'irrecevabilité du recours, dans la
mesure où la recourante allègue des faits nouveaux et que le recours contient
une motivation insuffisante et, pour le surplus, à son rejet.

2.
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF).
Le recours en matière de droit public n'est recevable contre les décisions en
matière de marchés publics que si la valeur estimée du mandat à attribuer est
supérieure aux seuils déterminants de la loi fédérale du 16 décembre 1994 sur
les marchés publics ou de l'accord du 21 juin 1999 entre la Confédération
suisse et la Communauté européenne sur certains aspects relatifs aux marchés
publics et qu'elles soulèvent une question juridique de principe (art. 83 let.
f LTF a contrario). Comme exposé par la recourante, la deuxième condition n'est
pas réalisée en l'espèce, de sorte que seule la voie du recours constitutionnel
subsidiaire est ouverte pour violation des droits constitutionnels (voir par
ailleurs l'art. 98 LTF).

Le recours a pour objet une décision incidente notifiée séparément. Il n'est
recevable qu'aux conditions prévues à l'art. 93 al. 1 LTF, notamment si la
décision incidente peut causer un préjudice irréparable (let. a; ATF 134 II 192
consid. 1.4 p. 196). Cette condition est manifestement réalisée dans le cas
présent, de sorte qu'il convient d'entrer en matière.

3.
3.1 L'art. 17 al. 1 de l'accord intercantonal sur les marchés publics du 25
novembre 1994/15 mars 2001 (AIMP) prévoit que le recours n'a pas d'effet
suspensif. Toutefois, l'autorité de recours a la possibilité d'accorder un tel
effet à un recours si celui-ci paraît suffisamment fondé et qu'aucun intérêt
public ou privé prépondérant ne s'y oppose (art. 17 al. 2 AIMP). Se référant
aux art. 17 AIMP et 66 al. 2 de la loi sur la procédure administrative (LPA/GE)
ainsi qu'à la jurisprudence cantonale rendue en 2008, la Présidente du Tribunal
administratif relève dans sa décision que la restitution de l'effet suspensif
au recours constitue une exception qui doit être interprétée restrictivement.

3.2 La recourante reproche à la Présidente du Tribunal administratif une
appréciation manifestement arbitraire des faits. L'autorité de recours aurait
considéré à tort que la société adjudicatrice bénéficiait de l'autorisation
d'exploiter nécessaire parce qu'elle pouvait justifier d'une autorisation de
traiter les déchets ménagers encombrants à raison de 2'000 tonnes par an, alors
que l'appel d'offres porterait sur le traitement de 1'200 tonnes par an.
L'autorité de recours aurait ainsi omis de tenir compte du fait que la société
adjudicatrice traitait déjà des déchets encombrants pour le compte d'une autre
commune, ce qui l'empêcherait de satisfaire aux exigences de l'appel d'offres à
moins de limiter la quantité de déchets traités actuellement. De plus, cette
société ne disposerait d'aucune autorisation concernant le traitement des
appareils électroménagers, électroniques et informatiques ainsi que des frigos,
qui représenteraient 460 tonnes par année sur le total des déchets volumineux
de la Ville. Par conséquent, la candidature de la société adjudicatrice aurait
d'emblée dû être écartée.

3.3 Les éléments précités, présentés par la recourante pour la première fois
devant le Tribunal fédéral et ne résultant pas de la décision de l'autorité
précédente, constituent des faits nouveaux et sont irrecevables (art. 99 al. 1
LTF). Les affirmations de la recourante sont du reste en contradiction avec les
pièces du dossier, notamment avec l'attestation du 5 août 2008 produite par la
Ville de Genève, à laquelle la décision attaquée se réfère expressément et de
laquelle il ressort que la société adjudicatrice dispose bien de l'autorisation
requise pour l'exploitation de l'installation nécessaire. Par ailleurs, selon
la décision attaquée, l'appel d'offres ne porte pas sur une quantité de 4'000
tonnes de déchets encombrants, mais bien sur celle de 1'360 tonnes de déchets
encombrants (sur un total de 4'000 tonnes de déchets) à traiter.

3.4 La Présidente du Tribunal administratif a retenu que ce n'était pas de
manière arbitraire que la recourante avait été moins bien évaluée que
l'adjudicataire en ce qui concerne les qualités environnementales de son offre,
la décision d'adjudication ayant tenu compte de ce qu'elle ne disposait pas
encore d'un terrain situé dans le périmètre requis pour entreposer les déchets
à traiter et de ce que la procédure tendant à obtenir l'autorisation
d'exploiter un tel terrain était encore en cours. La recourante ne saurait
reprocher à la juridiction cantonale d'avoir fait preuve d'arbitraire (ATF 134
II 192 consid. 2.4 p. 200) s'agissant de cette appréciation (prima facie; cf.
ATF 117 V 185 consid. 2b p. 191) dans le cadre d'une décision sur l'effet
suspensif, qui se fonde sur la situation existant au moment de l'adjudication,
ce d'autant plus que cette question relève bien d'un critère d'évaluation et
non d'une condition de participation au marché comme le soutient la recourante.

3.5 La présidente du Tribunal administratif a estimé que, dans le cadre de la
pesée des intérêts à effectuer pour statuer sur la restitution de l'effet
suspensif, l'intérêt de la commune à se doter d'un centre traitant les déchets
encombrants aux meilleurs coûts et aux moindres nuisances écologiques
l'emportait sur l'intérêt de la recourante à obtenir le marché. Dès lors que
les arguments de la recourante consistant à démontrer que la société
adjudicatrice ne remplit pas tous les critères de l'appel d'offres sont
irrecevables (consid. 3.3 ci-dessus) et que la décision attaquée ne peut être
qualifiée d'arbitraire quant à l'appréciation du critère du site de traitement
des déchets (consid. 3.4 ci-dessus), la recourante ne saurait s'appuyer sur ces
mêmes éléments pour en déduire que la pesée des intérêts entreprise par la
Présidente du Tribunal administratif est arbitraire.

4.
Au vu de ce qui précède, le recours, manifestement infondé (art. 109 al. 2 let.
a LTF), doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Avec ce prononcé,
la requête d'effet suspensif pour le présent recours devient sans objet.
Succombant, la recourante supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 1ère
phrase LTF et art. 65 LTF) et versera une indemnité à Y.________ SA qui a
obtenu gain de cause avec l'assistance d'un mandataire (cf. art. 68 al. 2 LTF).
Il ne sera pas alloué de dépens à la Ville de Genève (cf. art. 68 al. 3 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.
La recourante versera à Y.________ SA une indemnité de 3'000 fr. à titre de
dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties, à la Ville de
Genève et à la Présidente du Tribunal administratif du canton de Genève.

Lausanne, le 26 février 2009
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Müller Charif Feller